Chapitre 23 : Informations journalistiques
Attendant la venue de ses collègues avec impatience, c'est Raphaël qui accueillit les détectives dans le hall de réception de la rédaction du journal local pour laquelle il travaillait. Il ne leur dit pourtant rien tant qu'ils n'étaient pas à l'abri d'oreilles indiscrètes.
« —Bougez pas, fit-il une fois que la porte de son bureau fut refermée. Je vais chercher Nico. »
Aussitôt dit, aussitôt fait. En un claquement de doigts, Raphaël était de retour avec son collègue.
« —Bonjour vous deux ! lança Nicolas à l'adresse des détectives. Très honnêtement, j'aurais préféré ne jamais vous revoir...
—C'est un sentiment partagé, lui répondit Ewen tout aussi attristé de la situation.
—J'imagine que vous voulez que je vous partage ce que je sais ?
—Exactement.
—Un cadavre a été retrouvé au petit matin dans un regroupement d'ordures du bois des Milles Pas. Il a rapidement été identifié puisque sa mère venait justement signaler sa disparition au commissariat. Elle devait rentrer chez elle dans la nuit après lui avoir dit qu'elle était sortie en boîte, mais quand sa mère est venue la réveiller pour qu'elle la dépanne au travail, elle n'a trouvé personne dans la chambre et pas de réponse au téléphone. Les amies avec qui elle a prétendu passer la soirée ont également dit qu'il n'y avait pas de sortie en boîte de prévue.
« Sinon, pour ce qui est du cadavre en lui-même, on retrouve toutes les caractéristiques de notre tueur : en sous-vêtements, un bout d'intestin prélevé, et la carte de visite accrochée au soutien-gorge. Les policiers n'ont aucun doute quant à un quatrième meurtre de la même main.
—Qui l'a retrouvée ? demanda Maggie.
—Un homme qui passait par-là, je cite, « par hasard pendant une petite promenade matinale en plein air ». C'est ce qu'il m'a dit quand je l'ai interviewé. Je pense qu'il s'agit plutôt d'un client, mais bon, on va lui laisser le bénéfice du doute. J'aimerais pas être à sa place quand sa femme lui demandera ce qu'il faisait pour se promener dans ce bois. Il a déjà fait le tour des journaux télévisés qui ont rappliqué en moins de deux. Votre affaire prend une tournure incroyable.
—Qu'est-ce que ça en dit d'ailleurs chez les autres journaux ? demanda Maggie passablement agacée par la dernière remarque de Nicolas. Ils ont une piste ?
—Tu sais, on ne se parle pas trop entre collègues quand il y a une affaire comme ça. On ne voudrait pas que LE scoop du jour soit publié en premier par un autre.
—J'aurais dû m'en douter...
—Mais il suffit de regarder BFM pour comprendre qu'ils accusent ouvertement un violeur multirécidiviste sorti de prison en fin d'année dernière.
—Comment ça ? s'intéressa grandement la jeune détective qui ne regardait pas cette chaîne d'informations bancales.
—Vous n'êtes pas au courant ? Êtes-vous vraiment détectives ? »
La blague ne fit rire ni Maggie ni Ewen.
« —Bon bon, je suis désolé, se reprit Nicolas embarrassé par son bide. Je parlais de Kevin Nobeau. Il a été condamné une première fois il y a 15 ans pour le viol de deux lycéennes de sa classe. Comme il n'avait que 17 ans à l'époque, il n'a écopé que d'une peine de 2 ans ferme. 1 an chacune.
« À peine sorti, il recommence. Deux mois plus tard, il viole la voisine de palier de ses parents. Il prend 3 ans ferme. Il purge sa peine, ressort, se tient tranquille pendant une bonne année, et rebelote. Cette fois, c'est sa nièce. Condamnation de 10 ans, libéré le 26 décembre dernier en économisant 1 an pour bonne conduite.
—Un violeur multirécidiviste, on ne le surveille pas tout particulièrement ? demanda Ewen concentré.
—Il est suivi par un Service Pénitentiaire d'Insertion et de Probation. À ma connaissance, il n'a pas de bracelet. Il a purgé sa peine, et correctement en plus, donc il est libre.
—Soit. Mais je trouve les soupçons des journalistes un peu exagérés. C'est peut-être un violeur mais pas un tueur. Ce sont deux crimes différents.
—Selon leurs « experts » (Nicolas marqua ce mot en imitant grossièrement des guillemets avec ses doigts), les viols ne sont plus suffisants pour calmer ses pulsions. Il est donc passé à autre chose. »
Même si les détectives étaient perplexes, la piste se devait d'être creusée.
« —Merci pour toutes ces informations Nicolas, fit Ewen reconnaissant. Autre chose à nous communiquer ?
—Non, rien de plus. Et vous ? Rappelez-vous, c'est donnant-donnant.
—On n'oublie pas. On a soupçonné Cameron Lacheray, un bénévole pour l'association Sortez couverts. Il n'a pas fallu deux jours à Patron pour l'innocenter. Ses alibis sont indiscutables.
—À moins que... songea Maggie à voix haute. »
Nicolas tendit le cou en direction de la jeune détective, très intéressé par ce qu'elle avait à dire.
« —À moins que ? la pressa-t-il, sentant le scoop arriver.
—Ewen, interpella la jeune femme en ignorant complètement la relance du journaliste. Patron l'a innocenté en partant du principe qu'il n'y a qu'un seul Black Bird. Mais peut-être qu'ils sont plusieurs à œuvrer derrière ce pseudo. Peut-être que Cameron dirige tout de loin, et qu'il se forge justement de solides alibis quand il sait qu'il va y avoir meurtre. Il choisit ses victimes quand il vient sur le terrain, gagne leur confiance, et le jour fatidique, il envoie son homme de main au rendez-vous, et c'est lui qui se charge du sale travail.
—Juste pour le plaisir de tuer ?
—Il a peut-être d'autres avantages en contrepartie. Ou juste pour le plaisir de tuer, oui.
—C'est bougrement intelligent, siffla Raphaël qu'ils avaient presque tous oubliés tellement il se faisait discret. »
Maggie rosit de plaisir.
« —Qu'est-ce qu'on fait du coup ? questionna Ewen.
—On va quand même voir la mère de Beverly, lui répondit Maggie. Et ça ne nous coûte rien d'aller interroger ce Kevin Nobeau et son Conseiller Pénitentiaire d'Insertion et de Probation. »
Ewen acquiesça. Avant de quitter les journalistes, Maggie les mit en garde :
« —Ne partagez aucune information sur Cameron Lacheray s'il vous plaît. Il ne faut pas qu'il se sente traqué, il pourrait faire disparaitre des preuves ou pire, disparaitre tout court. Je vous assure que, dès que nous en saurons davantage, vous en serez les premiers informés. Nous avons juste besoin d'être sûrs de nous avant.
—D'accord, bouda Nicolas qui ne cacha pas sa frustration de ne pas pouvoir sortir son article à sensation dans le prochain journal.
—Merci. »
Les détectives saluèrent les journalistes et se mirent en route. Ils avaient décidé d'aller interroger Annabelle Copain, la mère de leur dernière victime.
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