Chapitre 19 : Maggie rejoint Mariam

15 avril

   Si pour Béthanie, Djamila et Ewen, la journée était presque terminée, elle était loin de l'être pour Maggie qui allait passer une grande partie de la nuit dans un camion à sillonner la rue aux Ours accompagnée de bénévoles.

   Mais pour le moment, l'heure n'était pas au travail. Ils n'avaient pas plus avancé depuis leur rencontre avec Mariam, et passaient donc un temps considérable dans les préparatifs du mariage de Béthanie et Coline. Le sujet du jour était la tenue des témoins, donc celles que porteraient Maggie, Djamila, Ewen, les deux frères de Béthanie, et le frère de Coline.

« —Pour les hommes, dit Béthanie avec son ton le plus sérieux et indiscutable, c'est costume beige, chemise blanche, et vous vous achèterez la même cravate vert pastel. Nous vous offrons la boutonnière.

—Je n'ai pas le choix, c'est ça ? osa quand même Ewen.

—Non.

—Et pour les femmes ? demanda Djamila anticipant avec crainte la réponse de son amie.

—Pour Maggie et toi, nous voulons une robe vert pastel. Vous choisissez la coupe mais il faut que ce soit strictement la même. Ça veut dire journées shopping jusqu'à ce que vous trouviez la perle rare qui vous convient à toutes les deux. Nous vous offrons la pince à cheveux fleurie. »

   Djamila soupira, ne cachant pas son irritation à l'idée de devoir faire du shopping seule avec sa collègue.

« —Tu es disponible samedi pour que nous y allions ? demanda Maggie faisant fi de l'agacement de son amie.

—Oui. On n'a qu'à dire 14h à l'entrée Est du centre commercial. Maintenant file, tu vas être en retard au rendez-vous que t'a fixé ma sœur. »

   Maggie consulta l'heure sur son portable et quitta précipitamment le bureau car elle allait effectivement être en retard si elle ne partait pas immédiatement. 

   La jeune détective se rendit avec plaisir dans la petite ville sur laquelle elle avait jeté son dévolu pour y faire construire sa maison. Un constructeur leur avait confirmé la faisabilité de leur plan. Il ne manquait plus que l'accord de la banque pour le prêt. Le couple espérait que la réponse n'allait pas tarder à tomber. Ils craignaient que le terrain ne leur file entre les mains à cause de lenteurs administratives. Ça serait trop dur à accepter.

  Une fois devant la maison de Mariam, Maggie se gara et alla directement frapper à la porte. 16h59. Parfait.

   Mariam ouvrit et fit entrer la jeune détective avec sa bonne humeur qui semblait parfaitement la caractériser. Elle lui proposa des boissons chaudes que Maggie déclina avec politesse, mais lui imposa l'assiette de pâtisseries faites maison. Cette fois, l'invitée ne se fit pas prier et en prit une qu'elle dégusta avec délectation pendant que son hôte la briefait sur le déroulé de la soirée.

« —On vient me chercher à 18h pour être installés et opérationnels à 18h30 dans la rue aux Ours. Nous sommes une équipe de quatre : Cameron, l'homme de la situation, Jade, une étudiante en médecine et future gynécologue, Gaëlle et moi. Nous nous installons dans un parking à l'orée du bois des Milles Pas. C'est le bois adjacent à la rue, et là où de nombreuses passes se font.

   « Généralement, Jade reste dans le camion et attend que nous lui amenions les femmes qui souhaitent la rencontrer pour un examen. Gaëlle et moi restons à proximité avec une caisse à roulettes de sandwiches, bouteilles d'eau et préservatifs. Nous avons aussi quelques couvertures en cas de besoin et de quoi faire des boissons chaudes dans le camion. Et bien sûr, nos flyers de prévention. Cameron reste généralement près du truck pour monter la garde.

  « Ça fonctionne mieux quand elles viennent à nous plutôt que quand nous les abordons. Elles sont trop méfiantes, surtout celles qui n'ont jamais entendu parler de nous. On a toujours du monde, notre réputation ici n'est plus à faire. Nous repartons dans la nuit, quand plus personne n'a besoin de nous. 

   « Je te conseille de rester près de moi. Je dirai que je te forme, comme je l'ai fait avec de nombreuses autres. Tu risques de trop éveiller les soupçons si tu crapahutes seule dans les alentours, surtout si tu commences à interroger les moins farouches. As-tu des questions ?

—Y a-t-il un endroit dans le camion où je peux parler aux filles à l'abri des regards indiscrets ?

—Seul l'espace aménagé en cabinet gynécologique est isolé. Pour le reste, je ne peux te garantir aucune confidentialité, désolée.

—Je ferai avec. Quelle est l'affluence habituelle ?

—C'est variable. Comme il fait encore assez froid, il n'y aura pas beaucoup de monde. Souvent, la soirée a du mal à démarrer, puis nous avons un pic d'affluence environ 2 ou 3 heures après notre arrivée, avant que ça s'estompe petit à petit. Il ne faut pas être pressée.

—J'ai toute la nuit devant moi. »

  Mariam jeta un œil à son portable avant de lancer :

« —Ils ne vont pas tarder à arriver. Je te conseille d'aller aux toilettes avant de partir. Nous n'en avons pas encore dans le truck. Un restaurateur du coin nous prête gracieusement les siens, mais il n'est pas très regardant sur l'hygiène. Tu risques moins à aller uriner dans la forêt plutôt que dans son commerce si tu vois ce que je veux dire. »

   Maggie suivit cette dernière recommandation à la lettre et alla se forcer à faire pipi chez la sœur de Djamila qui, contrairement à celles qui venaient de lui être décrites, avait des toilettes impeccables. Lorsqu'elle ressortit, les mains encore légèrement humides malgré un séchage en règle, elle entendit un gros moteur s'arrêter dans la rue. Sûrement le camion qui venait d'arriver.

   Son manteau sur le dos, Mariam lui confirma cette déduction. Maggie s'empressa d'enfiler à son tour son gros manteau et son écharpe, et les deux femmes sortirent de la maison pour aller monter dans le camion qui stationnait en double-file, warnings allumés, en attendant leurs deux dernières voyageuses.

   Sur les sièges avant du camion se trouvaient Cameron au volant, Gaëlle au centre, et Jade côté portière. Mariam et Maggie avaient pris place sur la seconde rangée de sièges, à côté d'un tas de bazar appartenant sûrement aux bénévoles. Tous se présentèrent rapidement.

   Il y avait donc d'abord Cameron. Un homme d'une trentaine d'années, plutôt bel homme, avec visiblement beaucoup d'humour. Il était manager dans une grande enseigne internationale de fast-food. Toute sa vie il avait été bénévole pour nombre d'associations. Tout petit déjà, sa mère l'emmenait à la SPA pour s'occuper et promener les chiens abandonnés et en quête d'amour. Deux ans en arrière, il avait entendu parler de cette association et avait décidé de la rejoindre, adorant le concept.

   Gaëlle était une très jolie femme aux cheveux coupés courts, et avec un sacré bagout. Maggie apprit qu'elle n'était pas bénévole mais avait un vrai métier au sein de cette association dont elle avait participé à la création. Elle était la trésorière et chargée de communication. Un rôle important puisqu'elle surveillait les dépenses, mais était surtout chargée de leur trouver les fonds nécessaires à leur bon fonctionnement. Maggie l'imaginait sans problème négocier des contrats avec une grande aisance.

   Enfin, Jade, très grande brune assez inhibée, était étudiante en médecine spécialisée dans la gynécologie. Il ne lui restait plus que deux ans avant d'être diplômée. Elle avait rejoint l'équipe l'année dernière, en remplacement de la précédente étudiante qui ne pouvait plus leur accorder de son temps. Et elle espérait y rester le plus longtemps possible.

   Absorbée dans leurs présentations, Maggie fut étonnée lorsqu'ils s'arrêtèrent à l'entrée de la petite forêt des Milles Pas. Les bénévoles sortirent du camion, accompagnés de la jeune détective, et s'activèrent à s'installer.

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