Chapitre 11 : Le magasin miteux
Le magasin de vêtements en question était une boutique low-cost située dans un autre quartier mal fréquenté de Jouville. Deux femmes étaient en train de faire la fermeture.
« —Bonsoir, commença chaleureusement Ewen.
—Vous voyez pas qu'on est en train de fermer ? s'énerva la plus vieille des deux femmes, une fausse-blonde sur-maquillée.
—Nous sommes désolés de vous déranger mais nous aimerions vous voir un instant à propos de votre ancienne employée, Janice Brun.
—Vous êtes qui ? Des journalistes ? J'en ai plein le cul de vous, allez voir ailleurs si j'y suis.
—Nous sommes plutôt détectives privés en charge de l'enquête. »
À ces mots, la femme se radoucit et, avec un grand sourire à moitié édenté, elle leur proposa mielleusement d'entrer dans la boutique afin de discuter de tout ça au chaud. La jeune femme qui l'accompagnait les suivit docilement à l'intérieur. Le petit groupe s'installa autour de la caisse, dans un magasin miteux et trop encombré pour être agréable.
« —J'me suis pas présentée, lança la plus vieille des deux femmes sans se départir de son pauvre sourire. J'suis Annabelle Copain, la gérante de cette caverne aux merveilles. Et voici ma fille, Beverly, elle bosse avec moi ma Bébé.
—Enchantés, firent les détectives en chœur, se forçant d'être agréables.
—Alors, vous voulez savoir quoi ?
—Apprenez-nous en plus à propos de Janice Brun s'il vous plaît, lui répondit Ewen.
—Elle bossait pour nous depuis qu'j'ai repris l'affaire y'a 6 ans. Évidemment, j'savais pas qu'c'était une pute, sinon j'l'aurais jamais engagée. Imaginez un peu l'image que ça m'aurait fait. Nan, j'étais sur l'cul quand j'l'ai appris. Dégoûtée.
—Mise à part cette information, quelle employée c'était ?
—Une aguicheuse. Elle hésitait pas à allumer les mecs pour en arriver à ses fins, pour qu'ils achètent. Maintenant, je pense qu'elle racolait ici cette catin.
—Comment vous l'avez recrutée ?
—J'ai mis une annonce sur Facebook et elle est venue se présenter. Elle faisait l'taff alors j'l'ai gardée. J'venais d'ouvrir. On avait acheté ça avec mon ex-mari pour le fun. Mais il est parti avec une salope, alors j'ai divorcé et j'ai réussi à garder la boutique vu qu'il m'avait faite cocue. Un mal pour un bien.
—D'ac...
—J'ai souffert dans la vie vous savez, le coupa Annabelle. C'était mon troisième mari, j'avais même pas 40 balais. Et j'vous parle pas des mecs de passage. Ma Bébé, je l'ai eue à 16 ans. Le connard il a pas assumé, il l'a pas reconnue. C'est mon premier mari qui l'a fait 4 ans plus tard. Juste avant d'me larguer. On n'a plus de contact avec lui, mais c'était qu'un gros con.
—Merci mais...
—Après y'a eu Steven. Il m'a fait 3 chiards et y m'tapait dessus. Alors l'ASE m'a pris mes gosses parce qu'ils ont dit que j'étais la fautive. Là y sont revenus à la maison depuis un moment, mais ça a pas été facile. Et puis y'a eu Benoit, qu'a ouvert le magasin avec moi. Un beau mec, mais endetté jusqu'au cou. Il a bien fait de se barrer avec sa minette. Il est interdit bancaire hein, quand même ! Après j'ai fait une pause, j'ai trop souffert. Et là c'est le grand amour avec Gaëtan. Il est sympa lui. Le truc c'est qu'il veut d'autres gosses, mais moi j'ai passé l'âge. Vous feriez quoi vous, à ma place ?
—Madame Copain, tenta une fois de plus Ewen avec davantage d'aplomb, nous sommes ravis d'avoir fait votre connaissance, mais nous sommes surtout venus vous parler de Janice Brun.
—Bah j'ai rien d'autre à dire sur cette pute. T'as des trucs à rajouter ma Bébé ?
—Non, fit doucement Beverly. Moi je l'aimais bien Janice, peu importe ce qu'elle faisait dans sa vie privée.
—Alors toi t'es vraiment trop idiote, s'emporta Annabelle. La pro pour te ramener des relations pourries. Tu te rends compte que t'as été copine avec une pute ? Nan mais franchement toi aussi tu me dégoûtes, même pas tu te remets en question.
—Bon ! s'imposa Ewen. Mesdames, désolés d'avoir installé un sujet de discorde entre vous, mais nous allons devoir vous laisser. Excusez-nous encore une fois de vous avoir fait retarder le moment de votre fermeture, et merci de votre précieuse participation. À bientôt ! »
Les deux détectives s'éclipsèrent rapidement avant qu'Annabelle ne reparte dans un monologue inintéressant. Une fois qu'ils furent suffisamment loin de la boutique, ils s'arrêtèrent quelques minutes afin de débriefer avant de rentrer chez eux.
« —Je ne veux plus jamais croiser cette femme, lâcha Ewen en un soupir chargé de dégoût.
—Et moi dont ! renchérit sa collègue.
—En plus, on n'a rien appris de particulier, c'est désespérant.
—Je pense qu'il faudrait qu'on arrive à mettre la main sur cette Beverly. Si elle était vraiment amie avec Janice, elle pourrait peut-être nous en dire davantage. Mais avec sa despote de mère dans les parages, elle ne dira rien.
—T'as vu comment elle lui parlait ? Il ne faut surtout pas qu'elle continue à se reproduire cette femme, c'est un danger pour le développement de ses enfants.
—Et elle s'étonne qu'ils aient été placés... »
Les détectives soupirèrent en chœur avant de se quitter sans oublier de se souhaiter une bonne soirée malgré tout.
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