Alors cette fois ce n'est pas moi qui l'ai écrite, c'est une fanfiction que j'ai traduite il y a quelques temps maintenant avec l'autorisation de l'auteur !

je vous laisse la découvrir ;)

Enjoy ! ~

La ville était enveloppée par les ténèbres, la demi-lune illuminant le monde de sa pâle lumière. Tout autour de Kyungsoo, la ville dormait ; seul le doux ronronnement des trains commençant leur long voyage pour relier les différentes parties du pays, avec leurs longues remorques était le seul bruit qui dérangeait cet apaisant silence du matin.

L'air était vif, aussi froid que de la glace, et Kyungsoo regardait à chaque fois avec un léger amusement son souffle qui se cristallisait avant de disparaître dans la fraîcheur du matin. La lumière des lampadaires vacillait, éclairant devant ses yeux les minuscules gouttelettes de rosée qui s'accrochaient aux brins d'herbes alentours, la lumière les réfractant en un million de petits spectres de couleur. Enveloppant une écharpe pourpre autour de son cou pour lutter contre le froid, Kyungsoo glissa ses mains dans les poches de son manteau. L'hiver était en train de revenir, mais Kyungsoo s'estimait heureux que la neige ne se soit pas encore montrée. La neige aurait rendu son trajet plus lent, plus pénible.

Avec en moyenne cinq heures de sommeil chaque nuit, il était certain que, une fois que la neige commencerait à tomber, il aurait moins de temps, et devrait se lever encore plus tôt pour arriver à temps.

Pas assez de sommeil, combiné avec de longues et intenses heures dans les cuisines du Hyde, l'hôtel casino le plus luxueux de toute la Corée du Sud Kyungsoo n'avait pas une minute à lui. De grands cercles sombres cernaient ses yeux, ses iris avaient depuis longtemps perdu leur éclat. Mais pas une seule fois Kyungsoo n'avait souhaité que son épuisant, répétitif style de vie ne change.

Il était un apprenti. Un apprenti au Hyde. Kyungsoo savait qu'il était plus que chanceux d'avoir décroché cet apprentissage dans cet hôtel luxueux et de renommée mondiale, sa grandeur lui coupait le souffle à chaque fois qu'il parcourait ses labyrinthes de couloirs pour atteindre les cuisines.

Avec ses luxueux tapis et ses hauts plafonds, ses incroyables tableaux entourés d'élégants cadres dorés, ses trente étages, incluant un théâtre, un pôle de commerce et un casino, le Hyde était la représentation même de la sophistication. Et Kyungsoo ne s'imaginait pas ailleurs.

C'était son rêve, tout ce pourquoi il avait travaillé. C'était sa vie. Et Kyungsoo n'aurait voulu que cela change pour rien au monde.

Le bus gravit la colline au bout de la rue. Ses phares éclatant brillèrent contre la toile noire en arrière-plan. Kyungsoo se leva, rajustant son lourd sac de travail sur son épaule. Sortant de l'abribus, il attendit que le bus soit complètement visible avant de se signaler. Ralentissant jusqu'à s'arrêter, le chauffeur offrit à Kyungsoo un sourire amical ; c'était toujours le même chauffeur qui montait la colline à cinq heures du matin, le même chauffeur qui souriait à Kyungsoo, ne prenant pas en compte leur fatigue mutuelle, et Kyungsoo lui retournait à chaque fois son sourire. Les deux étaient assez proches et échangeaient souvent quelques paroles avant de tomber dans un silence complice.

Kyungsoo se plaça au premier rang du bus. Même si le bus était vide il se sentait plus en sécurité à côté du conducteur. Cette fois, il demanda simplement au conducteur 'Comment s'est passée votre journée ?' Kyungsoo vit son expression changer, le même petit sourire auquel il était habitué, la même réponse.

C'était les petites choses qui rendaient moins insupportables ses heures de sommeil perdues.

Avec sa tête baissée et ses sourcils froncés avec détermination Kyungsoo s'affairait à trancher finement ses légumes pour ensuite les ajouter à la préparation du repas pour le directeur de l'hôtel. Il était au travail depuis seulement trois heures, les petits déjeuners avaient été servis seulement dix minutes auparavant.

C'était dans les habitudes du Hyde de préparer les repas au moins six heure à l'avance, et de ce fait, Kyungsoo était persuadé qu'il en était de même pour toutes les cuisines des grands hôtels. Si quelque chose n'était pas préparé à temps tout tombait à l'eau, et le Chef Cuisinier ne voulait surtout pas prendre ce risque.

« Kyungsoo ! » aboya-t-il à travers la cuisine où il supervisait la cuisson du bouillon quelques minutes auparavant. « Qu'est-ce que tu fais ? Il me semble t'avoir dit de tailler les carottes en julienne, pas d'en faire une jardinière ! »

Son fort accent français combiné à un débit de parole élevé, rendait la tâche difficile pour Kyungsoo qui peinait à comprendre ce qu'il disait. Comme Kyungsoo ne répondait pas, il traversa la cuisine dans un accès de colère, ses yeux plissés dans leurs petites fentes.

« Est-ce que d'après-toi ça ressemble à une julienne ? » cracha-t-il et Kyungsoo secoua la tête.

« Non, je suis désolé » s'excusa-t-il platement, évitant le regard furieux du Chef cuisinier. « Je ferais mieux la prochaine fois. »

« La prochaine fois, » grogne le Chef cuisinier avec étonnement. « Tu peux vraiment te considérer chanceux de ne pas encore avoir été viré de ma cuisine ! Ce n'est pas la première fois que tu as la tête dans les nuages Kyungsoo ! Monsieur Kim ne tolère pas de relâchement dans son personnel. Dis-moi Kyungsoo, sais-tu qui est Monsieur Kim ? »

« O-oui, »bégaya Kyungsoo quittant du regard son couteau, ce qu'il regretta immédiatement. Les yeux du Chef cuisinier lançaient des flammes, ses joues et son nez retroussé brûlaient d'un mélange de colère et à cause de la demi-douzaine de plaques de cuisson, ainsi que les fours. « Il est le propriétaire du Hyde. »

« Et, » gronda le Chef cuisinier « c'est lui qui décide qui travaille ici. Tu ne voudrais pas le fâcher, est-ce que je suis bien clair ? »

« Oui, monsieur. »

A ce moment précis, Kyungsoo n'aurait rien voulu d'autre que de disparaître. C'était uniquement de sa faute s'il avait relâché son attention ; il n'était apprenti que depuis moins d'un mois et il ne voulait en aucun cas compromettre son avenir. Mais le manque de sommeil le rattrapait petit à petit.

Le Chef cuisinier laissa échapper un soupir bruyant, jetant le couteau sur le plan de travail.

« Il y a un petit-déjeuner qui est toujours sur le chariot » dit-il enfin. « Apporte-le à la chambre qui l'a commandé ; tu trouveras la chambre et l'étage écrits sur la note. Quand ce sera fait, va dans la réserve, il y des cartons de vaisselle. La salle de restaurant a besoin d'être réapprovisionnée. »

Accordant au Chef cuisinier un simple hochement de la tête pour lui montrer qu'il avait compris, Kyungsoo s'inclina pour s'excuser.

« Oui, » dit-il brièvement. « Je m'en occupe tout de suite ! »

Il essaya de se frayer un chemin parmi le personnel des cuisines et atteignit enfin l'endroit où le petit déjeuner l'attendait, prêt à être livré sur son chariot lorsque le Chef cuisinier l'attrapa fermement par les épaules. Kyungsoo frissonna, dardant un regard hésitant par-dessus ses épaules.

« Oh, et Kyungsoo » commença le Chef cuisinier. « Ne reviens pas dans ma cuisine avant d'avoir sorti ta tête des nuages et d'être prêt à travailler. »

Kyungsoo sentit ses joues rougir d'embarras, ses oreilles prenant une légère teinte rosée. Offrant au Chef cuisinier un bref hochement de la tête, il se dépêcha de traverser le reste de la cuisine pour rejoindre le chariot.

« Oui » soupira Kyungsoo, permettant à ses épaules de se relâcher. Avec une grande poussée, le lourd chariot, chargé de nourriture lui accorda un grincement bruyant avant d'avancer. Il ne voudrait changer sa vie pour rien au monde.

Kyungsoo laissa échapper un lourd et silencieux soupir de soulagement lorsque l'ascenseur s'arrêta dans un frémissement au vingt-quatrième étage. Après le premier mouvement de l'appareil, il était certain d'avoir laissé son estomac au cinquième étage, où se trouvaient les cuisines, de même que sa fierté ainsi qu'un Chef cuisinier plus qu'agacé.

L'ascenseur des employés était un peu plus brutal que ceux pour les clients ; beaucoup moins extravagant cela va de soi. Constitué d'un aluminium terne, la seule lumière oscillait, éclairant par à coup la cabine dépouillée. L'ascenseur réservé à la clientèle était lui décoré de moquette luxueuse –pas du linoleum comme celui des employé- avec un miroir et un groom irréprochable dans la tenue comme dans l'attitude.

Redonnant un léger élan au chariot chargé du petit déjeuner, Kyungsoo ferma les yeux et vacilla quand le chariot passa sur le minuscule écart entre la cabine et le couloir de l'étage. Après avoir vérifié d'un coup d'œil que rien ne s'était renversé ou n'était tombé du chariot, il continua son avancée à travers le hall richement décoré, l'épaisse moquette ayant le même effet que de la mousse sous ses pieds.

Les nombres dorés inscrits sur les portes brillaient sous la lumière du couloir ; Kyungsoo jetait un regard à chaque fois qu'il passait devant une nouvelle porte, consultant systématiquement le numéro de la chambre qui était griffonné à la va-vite sur un morceau de papier. Chambre 748.

736 .... 739 ... Ah, enfin !

Kyungsoo frappa doucement à la porte, attendant qu'elle s'ouvre. Gonflant ses joues, Kyungsoo regarda la porte une seconde fois, mais avant qu'il n'ait eu la chance de frapper une deuxième fois, la porte s'ouvrit d'un coup et Kyungsoo rencontra les yeux bruns et ardents de Jessica Jung, l'une des têtes montantes de Corée du Sud.

La bouche de Kyungsoo resta ouverte sous le choc. Il savait que le Hyde attirait de riches et célèbres clients, mais il avait rarement l'occasion de quitter les cuisines. C'était, d'ailleurs, sa première expédition au-dessus du cinquième étage.

« Bonjour, » balbutia-t-il incertain. « Votre... »il s'arrêta intimidé, improvisant une série de geste pour désigner le chariot.

Un sourire ravi se dessina sur le visage de Jessica au moment où ses yeux se posèrent sur le contenu du chariot.

« Parfait, » dit-elle avec un air rayonnant tout en ajustant la ceinture de sa robe de chambre en satin. « Merci. Mettez-le dans la salle à manger s'il-vous-plaît. »

Se décalant sur le côté, Jessica laissa Kyungsoo faire rouler le chariot dans sa suite prestigieuse, se remettant vite à côté de lui pour lui indiquer la salle à manger. Kyungsoo n'avait jamais pensé qu'une suite pouvait être aussi grande ; la seule chambre était de la taille de son appartement entier (ce qui n'était pas difficile pour Kyungsoo qui visait dans un petit studio qu'il pouvait traverser en quelques pas)

La baie vitrée offrait une vue panoramique spectaculaire de Séoul qui semblait s'étendre au-delà de l'horizon. Les murs étaient élégamment décorés d'un ensemble de peintures à l'huile et de miroirs ornementés. Est-ce que toutes les suites de l'hôtel étaient comme celle-là ou bien la taille augmentait à mesure qu'on se rapprochait du dernier étage ?

Kyungsoo regardait autour de lui, essayant de garder en mémoire le plus de choses possible, mais finit par s'interrompre, de peur de paraître trop intrusif. Baissant son regard sur le sol, il se traîna péniblement jusqu'à Jessica et, après s'être incliné poliment, il sorti à la hâte de la suite, fermant rapidement la porte derrière lui.

Il s'était souvenu de quelque chose dont avaient parlé le personnel de cuisine à propos d'un évènement qui durait environs trois semaines et qui avait lieu chaque année ; à chaque fois c'était le Hyde qui accueillait l'évènement. Des célébrités et des personnes très influentes inondaient le Hyde et un aperçu –aussi court soit-il- de sa star favorite était la chose que le personnel du Hyde attendait le plus.

Kyungsoo était perdu dans ses pensées, s'imaginant travaillant au Hyde pendant l'évènement pour la toute première fois. Si Jessica Jung était ici, il peinait à imaginer qui d'autre pourrait également choisir le Hyde comme lieu de résidence pendant la manifestation.

Mais Kyungsoo était un apprenti cuisinier – un commis. Il savait que c'était par hasard (et pour de mauvaises raisons) qu'il avait été écarté de la cuisine aujourd'hui. Il ne voulait pas que cela se reproduise. Kyungsoo savait qu'il n'aurait pas la chance de voir le Hyde animé par les célébrités et les personnes de haute importance. Il ne devait pas se faire trop d'espoir.

Croisant ses mains dans son dos, Kyungsoo continuait sa route à travers l'enchevêtrement de couloirs du vingt-quatrième étage, jusqu'à rejoindre l'ascenseur. Le Chef cuisinier lui avait ordonné de se rendre à la réserve après la livraison. Mais il n'y avait pas de mal à admirer un peu en route le riche mobilier dont la cuisine manquait cruellement.

Le son étouffé de quelques voix parvint aux oreilles de Kyungsoo et il fronça les sourcils, enfonçant ses mains dans ses poches. L'étage était sans aucun doute animé à cette heure de la journée.

Un verre se brisa à l'intérieur de la chambre, suivi de près par un sanglot étouffé. Qu'est-ce que c'était ? Est-ce que quelqu'un avait glissé ? Kyungsoo senti une vague de panique l'envahir alors qu'il se rapprochait discrètement de la suite d'où provenait le bruit. La porte était entrouverte, une poignée défectueuse creusant un minuscule écart, deux centimètres tout au plus, par le biais duquel Kyungsoo pouvait observer la scène.

Sa première réaction fut d'inspecter la zone ; peut-être que le client avait fait frappé dans quelque chose – ou glissé. Il voulait être sûr que personne n'était blessé avant de faire irruption dans la pièce.

Mais les yeux de Kyungsoo tombèrent sur quelque chose de tout à fait inattendu. Les canapés avaient été repoussés au fond de la pièce contre le mur ; à leur place au centre de la pièce une unique table basse, entourée d'une douzaine d'hommes vêtus de costumes.

Est-ce que l'un d'entre eux s'est blessé ? se demanda Kyungsoo.

Un autre cri étouffé résonna dans la chambre et Kyungsoo aurait juré qu'il sonnait comme désespéré.

Les hommes en costume s'écartèrent, révélant un homme couvert de sang, bâillonné et ses bras attachés, agenouillé à côté de la table basse. Kyungsoo retint un cri et ses yeux passèrent de l'homme ensanglanté à la table ; un assortiment de revolvers et un large choix de fusils y étaient déposés

Kyungsoo senti son cœur s'accélérer. Cet homme était en danger, mais Kyungsoo savait que s'il se précipitait dans la chambre pour le secourir, il finirait lui aussi par être tué. Il devait appeler à l'aide ! La sécurité, le CEO, le Chef cuisinier ! – n'importe qui ! Détournant ses yeux de la minuscule fente de la porte, Kyungsoo sentit l'adrénaline envahir son corps. Il devait sauver cet homme.

Une main recouvrit la bouche de Kyungsoo, quelque chose de métallique – un pistolet – se pressa dans le bas de son dos et immédiatement, le sang de Kyungsoo se glaça, son visage perdit de ses couleurs.

La main se déplaça de la bouche de Kyungsoo jusqu'à sa gorge, de longs doigts s'enroulèrent autour de sa nuque. Aspirant l'air brièvement, Kyungsoo ouvrit la bouche pour crier. Son corps fut brutalement retourné et plaqué contre le mur du couloir.

Terrifié, Kyungsoo leva son regard pour rencontrer celui de son agresseur, et il le regretta aussitôt. Avec une grande et imposante stature, l'homme avait des cheveux couleur chocolat foncé qui tombaient parfaitement sur son visage anguleux ; ses lèvres rondes et pleines étaient étirées vers le haut dans un grognement. Mais ce que Kyungsoo trouvait le plus terrifiant chez cet homme était cet indubitable éclat de cruauté que l'on pouvait distinguer dans son regard ténébreux.

L'homme leva un sourcil avant de secouer la tête. Remettant le pistolet dans son holster, il détacha Kyungsoo du mur et le poussa jusqu'à la porte.

« Avance » commanda-t-il de sa voix rauque.

Kyungsoo avait l'impression que ses jambes allaient le lâcher d'un instant à l'autre. Son corps tremblait de peur mais lentement, il prit sur lui pour mettre un pied devant l'autre, obéissant à l'homme qui entra à sa suite, la tête baissée à cause de la peur.

Avec une main toujours fermement agrippée à la nuque de Kyungsoo, l'homme traîna Kyungsoo à travers la pièce, le jetant –violemment- contre la table basse. Plaçant rapidement ses mais en avant pour amortir sa chute, Kyungsoo pria intérieurement pour que ses mains ne tombent pas en contact avec du sang.

Kyungsoo sentait ses genoux trembler violemment, ses yeux rivés sur le sol. Il n'osait pas regarder l'homme, encore moins jeter un coup d'œil au captif ensanglanté à côté de lui. Est-ce qu'ils allaient le torturer lui aussi ? Est-ce qu'on lui réservait le même sort que cet homme, attaché, bâillonné et blessé qui était agenouillé à côté de lui.

Un des hommes en costume grogna, jetant un regard froid sur Kyungsoo.

« Jongin » dit-il, déplaçant son regard entre Kyungsoo et l'homme qui l'avait traîné dans la chambre. « Qui est-ce ? »

Jongin haussa légèrement les épaules, enfonçant ses mains dans les poches de son jean.

« Aucune idée » dit Jongin avec cette même voix rauque qui provoqua des frissons dans le dos de Kyungsoo. « Parle, gamin. »

Il donna un brusque coup avec le bout de sa botte dans le bas de son dos et Kyungsoo ferma les yeux. Ce n'était pas bon pour lui de désobéir maintenant. Sa vie était en jeu et Kyungsoo aurait fait n'importe quoi pour survivre encore un peu.

« Kyungsoo, » murmura-t-il, les mains secouées de tremblements.

Un rire bref s'échappa des lèvres de Jongin alors qu'il contournait la table, un rire ne contenant aucune trace d'humour. Avec ses yeux rivés sur Kyungsoo, les lèvres de Jongin s'étirèrent en un rictus froid ; il n'était pas encore satisfait par l'intensité de la peur de Kyungsoo.

« Bien, Kyungsoo, » dit-il simplement. « Tu ne vas raconter à personne ce que tu as vu aujourd'hui. »

« Comment tu peux en être sûr ? » demanda un des hommes, pointant son doigt en direction de Kyungsoo. « Il a l'air du genre à moucharder. »

« Pourquoi tu ne le délivres pas plutôt de cette situation ? » suggéra un autre, esquissant un geste en direction de la table basse recouvertes de couteaux, d'armes à feu et – loucha Kyungsoo- autres objets qui ne le rassuraient en rien. Etaient-ils utilisés pour broyer les os ?

Sans s'arrêter, l'homme laissa planer sa main au-dessus de chaque arme à feu perdu dans sa contemplation. « Nous devrions le faire taire maintenant. »

Kyungsoo ne pouvait pas regarder. Fermant les yeux avec force, il prit une profonde inspiration – et attendit.

Le rire venimeux de Jongin résonna à travers la pièce. Faisant claquer sa langue contre son palais, il s'arrêta devant Kyungsoo, sortant le pistolet de son holster contre sa hanche.

« Voulez-vous savoir pourquoi je suis sûr que Kyungsoo n'en parlera à personne ? »

Sans attendre que les autres lui répondent, il leva son arme, braquant le canon contre le dos de l'otage ensanglanté. Les yeux de l'otage se remplirent de peur et il laissa s'échapper un sanglot terrorisé, étouffé par le chiffon qui le bâillonnait.

Quelque chose de chaud gicla sur la joue de Kyungsoo et il senti la bile remonter le long de son œsophage. C'était comme si, à ce moment précis, le monde s'écroulait sous ses pieds. Il avait l'impression que ses tympans étaient sur le point d'exploser ; son estomac était retourné.

Kyungsoo n'entendit pas le bruit sourd de l'otage s'échouant sur le sol, ou encore le cri d'agonie s'échappant des lèvres de l'otage qui lui glaça le sang. Il ne senti pas non plus le sang chaud se répandre autour de ses genoux. Il ne senti rien, si ce n'est que son corps était engourdi.

Jongin laissa glisser un sourire satisfait. C'était l'attitude qu'il attendait. Contournant le corps de l'otage, il s'arrêta juste à côté de Kyungsoo. Sa main glacée agrippa la mâchoire de Kyungsoo tournant sa tête dans sa direction.

« Ouvre les yeux » dit calmement Jongin.

Kyungsoo serra la mâchoire, gardant ses yeux clos. La poigne de Jongin se resserra sur son menton.

« Ouvre-les » répéta-t-il. Doucement, à contrecœur, Kyungsoo s'exécuta. Avec ses yeux écarquillés par la peur, il osa rencontrer eux de Jongin ; ils étaient vides, froids. Est-ce que cet homme se préoccupait véritablement de la vie de ses semblables ?

« Maintenant dis-moi » dit Jongin sur un ton mielleux, son pouce frottant la joue de Kyungsoo pour essuyer le sang qui avait giclé. « Qu'est-ce que tu vois ? »

Kyungsoo dû faire un effort considérable pour secouer la tête, sa mâchoire fermement maintenue dans la poigne de Jongin.

« R-Rien » gémit-il terrorisé.

Les lèvres de Jongin s'étirèrent en un rictus sinistre. « Bien. Raconte à quelqu'un ce que tu viens de voir et ta fin ne sera pas différente de la sienne. Maintenant disparaît de ma vue. »

**************

Kyungsoo trébucha et se remit sur ses pieds, trottinant dans le couloir, il devait s'éloigner au plus vite et ne voulait pas prendre le risque de rejoindre l'ascenseur au cas où Jongin changerai d'avis. Atteignant la cage d'escalier, il descendit les marches quatre à quatre jusqu'à ce qu'il soit certain d'avoir établie une certaine distance de sécurité.

Ce fut à cet endroit-là, dans l'obscurité de la cage d'escalier, que Kyungsoo ramena ses jambes contre sa poitrine et se mit à sangloter. Son corps était secoué de tremblements à chaque fois qu'il repensait à ce qu'il c'était passé. Mais il ne pouvait pas demander de l'aide. Pas maintenant.

Kyungsoo ne savait pas combien de temps il était resté assis à pleurer, mais au moment où il commençait progressivement à se calmer, il entendit les échos de pas, de mouvements venant d'au-dessus. Est-ce que c'était Jongin qui venait le tuer ?

Le souffle de Kyungsoo se bloqua dans sa gorge, et il parvint malgré les tremblements à se mettre sur ses pieds. Il était au dix-septième étage –le casino. Il pourrait se fondre dans la foule et emprunter l'ascenseur situé sur le côté ouest de l'hôtel.

Empruntant rapidement la porte de la sortie de secours, s'assurant que la grande porte coupe-feu ne fasse aucun bruit en se refermant, Kyungsoo entra dans le casino.

Presque immédiatement sa bouche s'ouvrit sous la surprise. Ce n'était pas la musique assourdissante ou encore les rais colorés et lumineux utilisés pour attirer les clients qui attirèrent l'attention de Kyungsoo. C'était l'énorme masse de personne se déhanchant, discutant avec une autre, chacune dans un habit extravagant et coloré, quelque chose de doré noué derrière la nuque. Un masque.

Il devait y avoir un bal masqué de prévu cet après-midi, Kyungsoo comprit rapidement alors qu'il se frayait un chemin dans cet océan humain. Quelque chose de grand, de spectaculaire, d'inoubliable pour la cérémonie d'ouverture de l'évènement prévu pour durer trois semaines, dans le style habituel du Hyde. Kyungsoo était certain que monsieur Kim, le propriétaire du Hyde, n'avait négligée aucune dépense pour s'assurer que ses invités passent le meilleur moment de leur vie.

Les yeux de Kyungsoo passaient de client en client alors qu'il tentait tant bien que mal de traverser le casino -tout autour de lui, des visages de célébrités qu'il admirait, des gens de grande importance, millionnaires.

Kyungsoo grogna quand il se heurta à un homme bedonnant, Ses cheveux grisonnant étaient lissés vers l'arrière de son crâne, les trois premiers boutons de sa chemise ouverts sur son torse. S'inclinant rapidement, Kyungsoo s'excusa.

L'homme haussa les sourcils, un rictus pervers étirant ses lèvres.

« Je suis sûr qu'on peut trouver un tas de choses à faire ensemble »

Kyungsoo secoua vivement la tête, mettant ses mains devant lui pour mettre le plus de distance possible entre lui et cet homme.

« N-non » murmura-t-il brièvement, Se détournant de l'homme, il tenta de se frayer un chemin à travers les clients, déterminé à laisser Jongin et le millionnaire dans la foule.

La réserve. Jongin ne le trouverai pas là-bas, n'est-ce pas ? Au moins, il pourrait être seul. Il pourrait faire le vide dans son esprit. Le Chef cuisinier lui a ordonné de ranger la vaisselle dans la réserve -il ne devait pas retourner à la cuisine tant qu'il n'était pas prêt à travailler. Kyungsoo savait pertinemment qu'il n'y retournerait pas tout de suite.

Il ne voulait pas prendre le risque de sortir maintenant, Et si jamais Jongin ou un autre de ses hommes le surveillait par la fenêtre ? Ils voudraient le faire taire. Kyungsoo serait une proie facile.

Atteignant l'ascenseur, Kyungsoo laissa échapper un long soupir, Il n'avait pas remarqué qu'il retenait sa respiration. Au moment où les portes de verre s'ouvrirent, il disparut à l'intérieur. L'employé de l'ascenseur lui lança un regard perplexe. Les employés n'étaient pas supposés utiliser cet ascenseur.

« La réserve s'il-vous plaît » demanda rapidement Kyungsoo. L'employé hocha la tête, appuyant sur le tout dernier bouton.

« Est-ce que vous avez un problème en cuisine ? » demanda-t-il après un court silence. Kyungsoo le regarda fixement.

« Pardon ? »

« Un problème en cuisine » répéta l'employé, esquissant un geste d'abord vers le pantalon de Kyungsoo puis en direction de son visage. Un léger gloussement s'échappa de ses lèvres. « Vous avez glissé dans de la sauce tomate ? »

Kyungsoo ne répondit pas. A la place les couleurs quittèrent peu à peu son visage en se remémorant les évènements précédents et Kyungsoo sentit sur lui le regard observateur de l'employé de l'ascenseur, même après avoir quitté la cabine et s'être aventuré dans l'obscurité de la réserve.

L'un après l'autre, Kyungsoo transporta les cartons de vaisselle, son dos se courbant sous le dur labeur. Un par un les cartons pleins à craquer de faïence furent déplacés de la réserve jusqu'au couloir, Il était lui était difficile de voir où il allait tandis qu'il transportait les cartons jusqu'à l'énorme chariot de transport qui attendait dans le couloir. Kyungsoo peinait à y voir quelque chose par-dessus son chargement.

Kyungsoo laissa son esprit divaguer. Il ne voulait penser à rien. Il ne devait pas...

Soulevant un autre gros carton, il chancela dangereusement en sortant de la réserve. Un énorme bruit sourd, suivi par un cri de surprise -et de colère attira son attention. Après avoir empilé le carton de vaisselle sur les autres déjà présents au sommet du carton, Kyungsoo se retourna.

Deux hommes furieux en costume se tenaient devant lui. Kyungsoo sentit son cœur s'emballer. Ce n'était pas les mêmes hommes que ceux dans la suite, mais Kyungsoo se doutait que Jongin en avait d'autres. Il fit un pas en arrière.

« Tu l'as cassé ! » l'agressa un des hommes, cognant ses poings l'un contre l'autre dans un geste de colère. Cassé ? Cassé quoi ?

Kyungsoo baissa les yeux; plusieurs morceaux d'argile vieillie tombèrent à ses pieds.

« Le buste de Néfertiti ! » cracha l'autre avec rage. « C'était l'attraction phare des enchères de ce soir ! »

La reine... Néfertiti ? Est-ce que Kyungsoo avait bien entendu ? La même inestimable antiquité qui avait disparu du musée de Berlin quelques mois auparavant ? Qu'est-ce qu'il faisait au Hyde ?

Kyungsoo regarda fixement les deux hommes.

« Je suis désolé » balbutia-t-il, s'inclinant tout en s'excusant. « Je ne voulais pas-

« Est-ce que tu as une idée de la somme qu'il aurait pu rapporter ? » dit le premier, en secouant la tête avec incrédulité. « Ce devait être le bouquet final pour la Bird Cage ! »

Bird... Quoi ?

« Bird Cage ? » demanda Kyungsoo, hésitant. Ça ne pouvait pas être le buste de Néfertiti. C'était une pièce inestimable ! Assurément c'était une réplique.

« La Bird Cage -une vente aux enchères exceptionnelle » expliqua le premier homme de sa voix lourde, presque un grognement. « Et quand on dit exceptionnelle, cela veut bien dire ce que ça veut dire. Des secrets nationaux, des pièces de musée inestimables -des personnes »

« P-Personnes ? » demanda Kyungsoo les yeux écarquillés. « Vous vendez des gens aux enchères ? »

Le deuxième homme opina. « C'est la vérité. Et étant donné que tu viens de briser notre pièce maîtresse, tu vas devoir payer. »

« Mais comment ? » balbutia Kyungsoo. « C'est hors de prix ! »

« Exact. Tu vas le rembourser avec ton corps. »

Kyungsoo fut réveillé par le murmure étouffé de plusieurs centaines de personnes. La douleur battait contre ses tempes ; les lumières l'aveuglaient. Tentant de se mettre en position assise, Kyungsoo toucha son front avec précaution, ses yeux s'habituant peu à peu à la lumière.

Devant lui se tenait un public, des masques dorés couvrant leur visage. Le regard trouble, Kyungsoo pu apercevoir le vieux milliardaire du casino assis au premier rang, un rictus moqueur sur son visage.

Des barreaux dorés encadraient Kyungsoo. Il était en prison ? Levant la tête, Kyungsoo identifia rapidement la situation dans laquelle il se trouvait ; il était piégé, enfermé dans une cage à oiseau géante et dorée.

« Et maintenant » dit une voix venant de la droite de Kyungsoo « Le grand final –Nous avons eu un léger problème avec le buste de Néfertiti. Mais pas d'inquiétude, à la place, nous avons un jeune mâle de vingt-et-un ans. »

Le murmure de la salle se fit plus intense, tel un bourdonnement pour les oreilles de Kyungsoo. Il était en vente ? Mais comment c'était possible ? C'était illégal ! Et ça se passait dans le Hyde !

« Commençons la mise à cinquante millions. »

Kyungsoo regardait la foule complètement perdu au moment où le millionnaire leva la main, son sourire s'étira sur son visage.

« Soixante dix millions ? » exhorta le commissaire-priseur, lui aussi affublé d'un masque doré.

Au fond de la salle, une autre silhouette leva la main.

« Quatre-vingt-quatre ! » cria-t-elle.

« Quelqu'un pour quatre-vingt-cinq ? » demanda le commissaire-priseur, attendant une surenchère.

Jamais Kyungsoo ne s'était senti si désespéré. Il recula jusqu'au fond de la cage, essayant de son mieux d'échapper au regard des centaines de spectateurs masqués.

« Cent-vingt millions ! » cria le millionnaire, levant sa main une nouvelle fois. Kyungsoo senti son estomac se retourner. Il regarda la salle avec incompréhension alors que le commissaire-priseur continuait de demander des enchères ; les spectateurs s'étaient tus.

« Deux-cent millions ! »

La mâchoire de Kyungsoo tomba. Il connaissait cette voix. C'était lui. Jongin. Il était là. Le cœur de Kyungsoo cessa de battre, son corps commença à trembler.

Pitié, non.

« Adjugé ! »