E Chapitre 30.
Plusieurs jours s'étaient écoulés depuis la menace de Bill consistant à échanger la place de Dipper avec celle de Mabel s'ils venaient à rompre leur contrat. Même s'il refusait catégoriquement de laisser Mabel entre les mains de ce malade, Dipper avait grandement du mal à garder la tête sur les épaules. Plus le temps passait, plus il avait l'impression de se faire déposséder de son corps. Il n'était plus qu'un jouet sexuel, servant à canaliser les pulsions de ce pervers. Cette unique fois où il avait ressenti cette connexion entre eux n'était plus jamais réapparue. Ses envies de meurtre ne l'avaient toujours pas quitté. Il désirait du plus profond de son âme le dépecer pour ensuite l'empailler et jouer aux fléchettes avec son visage - son œil valant le plus de points. Cependant, il savait qu'une fois mort, il ne pourrait plus vivre non plus. Ils étaient retenus par des liens invisibles, les enchaînant à la vie, à la mort. Ils n'étaient plus rien l'un sans l'autre. Néanmoins, cela ne dérangeait pas Dipper de quitter le monde des vivants. Seulement, la question était : "Comment mettre un terme à leur vie ?". Bill avait refusé qu'on apportât des objets coupants dans la chambre et avait fait retirer le miroir de la salle de bains qui n'avait jamais été remplacé depuis qu'il l'avait brisé. Il n'y avait plus aucun moyen pour lui de tenter quoi que ce fût pouvant entraîner la mort.
- Pinetree ? Tu es réveillé ?
Un corps chaud se superposa au sien et des lèvres quémandeuses se posèrent sur son omoplate. Dipper était toujours allongé sur le ventre, la tête reposée dans ses bras. Il ne bougeait pratiquement plus depuis ces derniers jours. Habituellement, il marchait un peu dans la chambre, voire dans les couloirs quand il avait besoin de prendre l'air. Cependant, il ne sortait plus du lit depuis un peu plus de trois jours. Il ne faisait que dormir, lire un peu, manger, et coucher avec Bill. Il n'avait même plus la force de protester. Plus vite il se laisserait faire, plus vite cela finirait. Il n'était plus qu'une loque, attendant son heure.
- Qu'est-ce qu'il y a ? demanda-t-il d'une voix fatiguée, à moitié camouflée par ses bras.
- Je voulais te faire une surprise mais tu n'as pas l'air de bonne humeur.
Sa voix moqueuse l'intrigua. Quelle surprise ? Il se tourna pour l'observer du coin de l'œil. Voyant qu'il était enfin intéressé, Bill poursuivit.
- Je m'ennuie quand on fait l'amour.
Dipper haussa un sourcil, ne comprenant pas cette déclaration. En quoi cela le regardait-il ? Il lui offrait son corps et s'il n'était pas content, ce n'était pas son problème.
- Et ?
- Je préférais avant, quand tu te débattais et que tu me suppliais d'arrêter. C'était plus marrant. J'ai l'impression de baiser un mort en ce moment, et ça ne m'excite plus vraiment.
Cela sonnait comme une bonne nouvelle pour Dipper. Ainsi, ses fesses pourraient enfin se reposer et ne plus être constamment envahies par un sexe demandeur.
- Alors je me suis dit que te redonner la joie de vivre pourrait peut-être me ramener l'ancien Pinetree ! argumenta le démon, plaisantin.
Il se redressa pour sortir du lit et ajouta :
- C'est pourquoi j'ai décidé de t'amener dans le monde des humains aujourd'hui.
Le teint du garçon commença à reprendre des couleurs et il éloigna son visage de l'oreiller pour se tourner vers le démon.
- C'est vrai ?
Bill se retourna vers lui, tout sourire.
- J'aurais préféré que ce soit une blague parce que je ne t'aurai pas de la journée mais si c'est pour te retrouver en meilleure forme, alors ça me va de te laisser à Gravity Falls !
Par "meilleure forme", il entendait sûrement de le revoir désespéré car la journée se serait déroulée bien trop vite et qu'ainsi, il redevînt réticent à ses caresses et à leurs parties de jambes en l'air. Dipper savait que c'était son côté affolé et suppliant qui lui faisait atteindre l'orgasme. Mais ce n'était plus son problème. Depuis qu'il faisait l'étoile de mer, leurs ébats semblaient plus courts, à son plus grand bonheur.
Bill claqua des doigts. Dipper se retrouva alors face à lui, bien apprêté.
- Allez, il est temps de se dire au revoir. Tu me fais un bisou ?
- Pitié..., pensa le jeune humain, agacé.
Il se plaça sur la pointe des pieds et l'embrassa avec force. Il fut retenu plus longtemps que prévu par un bras dans la courbe de ses reins. Les mains à plat contre son torse servaient de limite de sécurité pour l'adolescent. Quand ils s'éloignèrent, un filet de bave relia leur bouche. Dipper passa sa main contre ses lèvres pour se débarrasser de ce liquide visqueux. Il fut très surpris de sentir la main de Bill glisser jusqu'à son entrejambe. Son instinct lui dit de s'éloigner mais il n'avait plus le courage. Se débattre n'aurait servi à rien. Et puis, il se dit qu'en témoignant sa réticence, Bill reviendrait sur sa décision de le conduire sur Terre, puisqu'il serait de nouveau en rébellion contre ses assauts. La main ne se détacha pas de son pantalon. Au contraire, elle entama de lentes caresses. Les doigts de Dipper se resserrèrent sur la chemise de Bill, tandis qu'il se mordit les lèvres pour s'empêcher d'émettre le moindre son suspect. Néanmoins, il ne parvint pas à contenir les infimes mouvements de bassin accompagnant le rythme de ses aller-retours sur son sexe à travers la couche de vêtements. Il s'attendait à une remarque, une pique, une moquerie de la part de Bill mais il ne fit rien. Et cette absence de réaction lui tordit le ventre d'appréhension. Doucement, l'adolescent déposa son front contre son épaule pour cacher ses rougeurs ainsi que sa bouche entrouverte faisant circuler son souffle difficilement contenu. Il sentit une bosse durcir sous la main experte de son maître. Ses poings autour de sa chemise se crispèrent davantage, ils tremblaient de nervosité. Soudain, sa jambe tressauta.
- Ah !
Il n'avait pas su contenir ce gémissement. Et étonnamment, Bill décida que c'était le moment pour lui d'arrêter ce petit jeu. Il remonta sa main jusqu'au visage de Dipper, caressa sa joue du revers et esquissa un sourire de connivence.
- Allons-y, alors !
Il claqua des doigts et ils se firent téléporter au même endroit que la dernière fois. Dipper tourna le dos à Bill pour faire face au Mystery Shack mais le démon ne le laissa pas filer tout de suite. Il l'enlaça pour le coller contre lui et lui susurra à l'oreille :
- À ton retour, tu as intérêt à changer d'attitude. Sinon, je pourrais bien vouloir échanger ta place avec quelqu'un d'autre.
Dipper se retourna brusquement, horrifié, mais Bill avait déjà disparu. Il resta un instant interdit, confus. Devait-il comprendre que s'il ne redevenait pas la petite biche fragile qu'il était auparavant, Bill romprait lui-même le contrat ? Dipper commença finalement à comprendre l'ampleur de la signification de "perdre son humanité".
Ces sombres pensées furent dissipées par la frustration qu'il avait dans le pantalon. Il baissa les yeux sur la protubérance, les joues rouges. Il ne pouvait décemment pas rejoindre sa famille dans cet état.
Il se sentit particulièrement honteux à l'idée de faire une chose pareille dans la forêt. Il s'éloigna discrètement à travers les arbres afin de ne pas attirer l'attention depuis les fenêtres du Mystery Shack. Une fois assez reclus, il guetta les alentours pour s'assurer qu'il était bel et bien seul et commença à œuvrer pour se débarrasser de cette tension dans le bas-ventre. Il souleva son t-shirt qu'il prit en bouche pour ne pas être gêné, déboutonna son pantalon, sortit l'attirail. Une main contre un tronc, l'autre sur son sexe, il s'activa pour finir rapidement. Son visage se déforma à mesure que son plaisir primaire s'intensifia. Les sourcils froncés, ses lèvres se retroussant autour de son t-shirt qu'il mordait avec force, il finit par fermer les yeux pour se concentrer sur sa tâche.
"Ah... Pinetree..."
Dipper stoppa brusquement ses aller-retours en se rendant compte qu'une boule s'était formée dans son ventre en se remémorant la voix excitée de Bill.
"Pinetree..."
Le susurrement au creux de son oreille. Coupable, Dipper poursuivit ses va-et-vient sur son sexe encore plus dressé.
Ses mains sur son corps qui lui agrippait les hanches, les poignets, les cuisses, qui lui caressait le visage, le dos, les bras, les fesses.
Dipper accéléra, sa salive se répandant sur son t-shirt.
Ses lèvres sur les siennes, sur ses joues, son menton, son cou, ses omoplates. Ses dents sur son oreille, sa nuque, ses lèvres. Sa langue valsant avec la sienne, parcourant sa gorge, son torse et son ventre.
- Ahhh...
Il manqua de lâcher le tissu maintenu dans sa bouche. Ses doigts se resserrèrent sur l'écorce de l'arbre, sa tête se reposa sur son bras. Il se souvint de la présence chaude entre ses fesses, les frottements contre ses muqueuses, le liquide visqueux se répandant le long de ses cuisses.
Ses fesses se resserrèrent, frustrées de ne pas être conquises par cette présence brutale mais si agréable. Dipper ne parviendrait jamais à jouir sans cette présence. Il avait beau accélérer, il avait beau modifier la pression, l'emplacement de ses doigts, l'amplitude du mouvement, il n'était pas satisfait. Il manquait quelque chose.
Profondément gêné par ce qu'il s'apprêtait à faire, il s'éloigna de l'arbre, abaissa son pantalon et son boxer. Il passa son autre main sur sa verge pour récupérer un peu de son liquide pré-séminal et la dirigea vers ses fesses. Il eut un peu de mal à insérer le premier doigt, ainsi que le deuxième et le troisième mais très vite, le passage fut plus accessible, moins étroit.
- Mmh... Niarghhh... !
Il perdait le contrôle de sa voix, de ses gestes, de son corps, de tout. Il se laissa tomber à genou dans l'herbe, se pencha en avant et enfonça ses doigts le plus profondément qu'il le pût.
"Pinetree..."
Cette voix dans sa tête lui faisait perdre la raison. Il ouvrit la bouche, laissa retomber son t-shirt sur son ventre et laissa sa voix s'exprimer clairement.
- Ahhh... Ahhh... Bill... Mmh... Han... ! Bill... ! Ahhh... !
"Pinetree..."
- Ah putain, Biiill !!!
Il accéléra ses va-et-vient sur sa verge douloureuse et dans son orifice comme un dératé, l'esprit embrumé par un plaisir indomptable. Puis, il éjacula enfin, le corps parcouru de spasmes. Il haleta encore de nombreuses minutes, épuisé, son torse bougeant en rythme de sa respiration effrénée.
Vint alors le retour à la réalité, où Dipper se rendit compte de ce qu'il venait de faire.
- Non... C'est pas vrai...
Il ne venait quand même pas de se masturber en pensant à Bill ? Bill Cipher, son séquestreur, son bourreau, son violeur. Le démon qui avait décimé toute sa famille, qui le retenait en captivité pour son bon plaisir, qui ne respectait pas ses "non", qui l'avait détruit moralement et physiquement.
- Comment j'ai pu faire une chose pareille... ?
Il éprouva un profond dégoût pour sa propre personne. Son comportement le révoltait et remit en doute tout ce qu'il pensait jusqu'à présent. S'il s'excitait en pensant à cet être maléfique, cela signifiait-il qu'il aimait quand il le touchait ? S'était-il persuadé qu'il détestait cette situation parce que cela n'aurait pas été normal s'il en était autrement ? S'était-il menti à lui-même tout ce temps ?
- Est-ce que j'aime...tout ce qu'a pu me faire ce salopard ?
Ce n'était pas concevable. Bill l'avait réellement ensorcelé. Il lui avait implanté des images dans le crâne pour l'ébranler. Il ne pouvait pas aimer ce comportement déviant. Il ne pouvait pas éprouver du désir pour cet être infâme. Rien de tout cela n'était possible.
- Dipper ! s'écria Oncle Stan en ouvrant la porte. Je suis tellement heureux de te revoir !
Il le serra dans ses bras.
- Tiens, tu es trempé. Qu'est-ce qui t'est arrivé ?
Avant de frapper à la porte du Mystery Shack, Dipper s'était rapidement lavé dans le cours d'eau qui longeait tout Gravity Falls. L'eau froide lui avait remis les idées en place.
- En fait...Bill m'a déposé près du Lake Gravity Falls. J'ai pas fait attention et j'ai glissé.
Ils furent bientôt rejoints par tout le reste de la maisonnée, attiré par le cri de joie de Stanley. Dipper les remercia intérieurement d'arriver pile au bon moment. Cela lui fit du bien de les revoir. Les jours passaient bien trop lentement quand il restait cloîtré dans sa chambre, mais les retrouver lui redonnait une raison de vivre.
- Comment vas-tu, mon garçon ? Dis-moi que Bill ne te fait pas trop morfler.
Dipper afficha un visage souriant, astreignant son esprit de ne pas faire émerger les images qui le déboussolaient.
- Ça pourrait aller mieux mais je me porte plutôt bien.
Il zieuta sa sœur qui était restée un peu plus à l'écart des autres, le dévisageant avec tristesse. Il lui sourit à son tour pour la rassurer. Mais elle n'était pas dupe. Elle était au courant de toute l'affaire et elle savait bien que cela ne s'était pas arrangé.
- Tiens ? Tu t'es coupé ? fit remarquer Soos en désignant la cicatrice sur la joue du garçon.
Il se souvint de cet épisode. Bill ne voulait pas effacer ces plaies superficielles pour qu'il se rappelât de son erreur d'avoir attenté à sa vie - et par conséquent, à la sienne aussi. Et puis, cela le satisfaisait de le voir marqué de la sorte sur plusieurs parcelles de son corps. Bill n'était qu'un pervers, jouissant de la douleur de sa marionnette. Même avec le temps, les blessures n'avaient toujours pas disparu bien qu'elles fussent quasiment estompées. Il se demanda même comment Soos l'eût remarquée aussi vite.
- Oui. C'est une longue histoire...
Remarquant que l'attention de ses oncles s'accroissait, il ne pouvait plus rester dans le silence. Toutefois, il se refusait de dire la vérité. Ils étaient déjà assez inquiets, alors inutile d'en rajouter.
- J'ai...été dans la forêt devant le manoir et je suis tombé dans les ronces. Mais ça va ! Je ne me suis rien pris dans l'œil !
Il s'efforça de paraître naturel pour ne pas attirer les soupçons.
- Tu aurais pu faire attention, Dipper, sermonna gentiment Stanford, rassuré qu'il se portât plutôt bien.
Ils rentrèrent dans le magasin, discutant gaiement de sujets en tout genre pour dépayser le nouvel arrivant. Ils voulaient lui faire oublier sa misère en lui apportant du réconfort.
Toute la journée, Dipper avait cessé de penser que sa vie n'avait plus aucun intérêt. Il se sentait à sa place à leurs côtés. Il se sentait aimé et en vie. Pour rien au monde, il ne souhaiterait quitter cet endroit. Jusqu'à ce que la nuit arrivât, tout du moins. Quand l'amusement général s'estompa pour laisser place à la fatigue, Dipper commença à ruminer sa condition misérable. Il redevint froid, distant, livide. Sa sœur remarqua aussitôt ce changement d'humeur quand elle le rejoignit dans la chambre. Elle avait bien senti que son état avait empiré depuis la dernière fois qu'elle l'avait vu. Il s'installa sur son lit, le visage caché dans ses mains. Elle eut le cœur brisé de le voir aussi mal en point. Elle s'approcha pour s'asseoir à ses côtés et lui caressa les cheveux sous sa casquette fétiche.
- Ça continue ? demanda-t-elle, s'attendant à une réponse tournée à l'affirmative.
Il acquiesça.
- Cette cicatrice est vraiment due à des ronces ?
Il désapprouva d'un signe de tête.
- C'est lui qui t'a fait ça ?
Il hocha la tête, les yeux larmoyants.
- Il me détruit à petit feu. Il me dépossède. Je ne sais plus ce qui est de moi ou de lui. Mes pensées se mélangent. Je ne sais plus qui je suis.
Il poussa un long soupir avant de poursuivre :
- Je ne suis pas sûr de pouvoir tenir plus longtemps...
Elle posa ses mains sur son genou et se pencha pour être dans son champ de vision.
- On va trouver une solution. Je te le promets. Tiens le coup encore quelque temps et on te sortira de là.
Il la regarda longuement avant de lui demander d'un ton plat :
- Tu le penses vraiment ?
- Bien sûr !
Elle s'exprimait avec conviction mais son regard inquiet trahissait ses réelles pensées. Bill était comme un dieu tout puissant, inatteignable. C'était lui qui menait la danse, et ses pions sur l'échiquier se déplaçaient selon sa volonté. Personne ne pouvait aller contre lui. Il avait trop de coups d'avance pour que quelqu'un parvînt à le faire chuter de son trône. Quiconque se lançait dans une partie contre lui se retrouverait obligatoirement échec et mat.
Il n'y avait pas de moyen de lui échapper. Mabel en avait finalement pris conscience mais elle se refusait de se l'avouer. Son frère avait besoin d'elle. Si elle abandonnait, plus personne ne pourrait lui venir en aide. Mais Dipper n'avait plus envie d'en parler. Il se dégagea de la présence chaleureuse de sa jumelle et s'allongea sous les couvertures froides.
- Bonne nuit, Mabel. Je suis très fatigué en ce moment...
Elle lui sourit gentiment et lui embrassa le front.
- Je comprends. Repose-toi bien, Dipdip.
Elle rejoignit son lit et s'endormit rapidement. Mais Dipper demeurait toujours dans le monde réel, réfléchissant avec discernement.
C'était décidé. Il allait tout mettre en œuvre pour faire tomber le roi. Un coup d'état a toujours fait ses preuves. Et il allait en élaborer un, au péril de sa propre vie.
Si Bill meurt, alors le monde sera enfin en paix.
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