Chapitre 1

Toom

C'est la fin d'après-midi, et les distributeurs du réseau ne sont pas encore arrivés. C'est pas rare qu'ils prennent un peu de retard, à cause des risques, mais là ils devraient déjà être passés. Au bout d'un moment, quand je suis entrain de régler l'intensité électrique, la borne nous informe en clignotant que nous avons des invités. Le temps que je descende de mon perchoir, mon oncle est allé ouvrir. Il revient livide, suivit de deux grands examinateurs en uniforme.

Ils prétendent qu'ils nous ont prévenus, mais c'est faux. Il y a un message marqué lu sur la borne, ce sont leurs hackers qui nous l'ont envoyé à l'instant. Du coup nous n'avons aucune preuve. Quand on leur dit ça, la plupart des gens pensent qu'ils ont dû oublier. Moi, je sais qu'il ne faut pas croire ceux qui viennent du système.

Les examinateurs font petit à petit le tour des pièces, ils ouvrent tout, ils débranchent, ils fouillent. Et comme nous n'avons rien pu cacher, ils trouvent. Au bout de quelques temps, la borne se remet à clignoter.

"Vous attendiez de la visite ?"

Mon oncle nie, il fait tout ce qu'il peut. Moi, je vais ouvrir, en espérant que je pourrais expliquer aux distributeurs qu'ils doivent partir.


Zavy

Toom, le petit de la ferme, nous ouvre la porte avec l'air complètement effrayé. Il nous chuchote :

"Les examinateurs sont venus à l'improviste, vous devez pas rester chez nous. Vite, partez !"

Derrière lui, nous pouvons entendre le bruit de deux armes enclenchées, et des pas rapides qui se dirigent vers la sortie. Danech prend la main de l'enfant, et le tire dehors. Au bout du couloir appariassent les manteaux bleus des examinateurs, illuminés chacun par le canon déployé au bras de son propriétaire.

Je laisse tomber les conserves par terre, et ouvre depuis l'interface tout ce que je peux cacher avec mes mains dans le dos. Aucun de nous ne porte le symbole du réseau, nous ne risquons rien tant que nous ne sortons pas d'arme. Sauf s'ils demandent nos identités.

Cette fois, ils n'en ont même pas besoin, ils devaient soupçonner le fermier depuis longtemps. Maintenant, il y a deux armes de type 4 pointées vers mon visage, et impossible de lever un bouclier puisqu'ils peuvent voir mon interface depuis leur position. Ça, c'est Rid qui s'en occupe d'habitude. Ensuite, on tire à vue et on s'enfuit.

Je m'en veux toujours un peu d'attaquer des examinateurs, ce ne sont après tout que des civils qui croient au fonctionnement du système.


Eagler

Je viens d'aller chercher le repas pour ce soir, et quand je rentre je découvre mes parents qui m'attendent, tous les deux debout autour de la table.

Il me faut quelques secondes à peine pour poser nos victuailles dans l'espace réservé à cet effet, pourtant tout au fond de mon esprit quelque chose me crie de gagner du temps, d'aller trop lentement. Je n'en suis pas capable, et juste après je me retrouve entre eux deux, et je pose mes yeux horrifiés sur ce qu'ils veulent me montrer.

Ce plan-là, je l'ai fait le mois dernier. C'est un fonctionnement basé sur des informations, que j'ai trouvées grâce à quelques modifications de mon interface, qui servirait à remplacer nos trains trop encombrants par un réseau plus léger et rapide, donc que l'on pourrait suspendre au-dessus de toutes les tours. Je suis particulièrement fière de celui-là, il y a tous les détails et toutes les solutions.

Mon père évoque ce qui est arrivé à un de ses amis, peintre clandestin. Je sais très bien quelle sera la sentence, comme pour tout ce qu'on essaye de cacher au système. Mais je sais aussi quelle est la seule solution pour ne pas perdre ma faille dans le cocon.

Je ne peux pas travailler pour eux, ce serait tourner le dos à ce en quoi je crois. Est-ce que ma sécurité compte plus que les générations à venir ?


Ynver

Il y a un peu moins de monde dans les rues et sous les dômes, pourtant nous savons tous que, sous l'égide du gouvernement, nous ne risquons rien.

Dans notre zone, il faut récupérer les repas sous le dôme 645-F, à l'heure qui nous convient dans l'après-midi. Certains préfèrent le préparer eux-même, ceux là ne passent pas commande et se servent au 645-G, mais ma mère n'en fait pas partie. C'est vrai, pourquoi faire soi-même ce que le gouvernement peut faire à notre place ?

Normalement, j'y serais dans trois minutes. C'est un peu loin, j'aurais le temps de mettre de la musique si je voulais. D'un coup, je vois un silhouette sombre en limite de ma vision. J'aurais pu avoir rêvé, mais je suis presque sûr qu'elle se cache dans le ruelle qui donne vers le vieux dôme. Personne n'a le droit d'aller ici.

Je la suis, sans dépasser la délimitation de la ruelle. C'est une fille, elle est toute seule au centre du vieux dôme. Lorsqu'elle se retourne, j'arrive à voir son visage pendant quelques secondes, juste avant de me rendre compte que la base de données de mon interface est incapable de la reconnaître.

"Comment tu t'appelles ?"

C'est une question que je n'aurais jamais dû poser. Mais je voudrais vraiment savoir. Heureusement que personne ne le saura.


Nack

Un individu non identifiable a été découvert en ville, par le biais d'une interface. Ce qui signifie qu'un clandestin se balade dans Viznu, et qu'au moins un civil est au courant. Je ne sais pas qui c'est, mais si il ne va pas voir une autorité du gouvernement d'ici quelques heures, je peux parier qu'il aura de lourds ennuis.

Je ne pense pas qu'il faille divulguer cette information. Trois satellites suivent la fille, dont deux qui l'ont en visuel, il n'y a aucun risque, elle sera appréhendée dans quelques minutes. Il faut attendre que celui ou celle qui possédait l'interface en question aille la dénoncer.

Le général Krain vient de nous donner la liste des officiers de police en action, mais après vérification certains d'entre eux ont des accrochages dans leur dossier. Nous avons l'autorisation de les effacer.

La clandestine a été arrêtée juste sous la tour 37, mais le comité antiterroriste préfère qu'on ne dise rien tant que son complice n'a pas été appréhendé. Un citoyen de pleins droits de mèche avec les rebelles, ça va faire un scandale, mais il faut bien ça pour occuper la population.

J'ai l'identité du civil, je dois trouver dans son dossier n'importe quoi pour l'incriminer. Il est très jeune, mais sa mère a signalé plusieurs fois des comportements étranges, il écoute souvent de la musique, ce qui n'est pas illégal en soi mais qui témoigne d'un isolement social confirmé par ses relevés psychiatriques. Et surtout, on y retrouve plusieurs occurrences de dialogue où il remet en cause la véracité de nos informations ; j'ai vu des dossiers bien plus difficiles à monter.

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