Chapitre III : Le mariage du démon
Alester Astré
Auva - les bas-fonds
Auva, capitale du Royaume de Norsque. La chaleur du soleil inondait la grande ville faisant couler la sueur des plus valeureux travailleurs. La pluie ne tombait presque plus, et les journées se faisaient de plus en plus longues.
Les quartiers les plus sombres et étroits de la ville étaient réservé aux habitants les plus pauvres et les plus douteux d'Auva. Alester Astré, ingénieur et cartographe du Royaume, terminait péniblement sa tâche en renforçant et solidifiant une fois de plus les murs de ces quartiers.
Il avait le teint bronzé par le soleil et les cheveux bruns et courts. La plupart des ingénieurs de la ville gardaient leur cheveux courts pour des raisons de sécurité et praticités. Les cheveux longs avaient plus de chances de rester emmêlés dans les rouages ou autres mécanismes complexes. Alester ne montrait point de faiblesse dans son travail, il était doué et en moins d'une journée il était capable à lui seul de renforcer les murs des quartiers sombres d'Auva. Ces murs étaient souvent endommagés par les créatures qui y rodaient de l'autre côté, celles qui vivaient dans la pénombre de la forêt de l'Ouest.
Une fois sa tâche accomplie, Le jeune ingénieur passa sa main sur son front perlant de sueur et contempla le soleil. Sa journée de travail était achevée, et le soleil ne tarderait à disparaître. Il s'apprêtait à rentrer chez lui lorsqu'une voix familière l'interpella :
— Où t'en vas-tu donc comme ça, l'ami ?
Alester se retourna et aperçu au loin son ami Preath, un grand gaillard au cheveux blond tenant des deux mains un seau remplis de pièces servant à l'ingénierie. La façon dont il peinait à marcher révélait la lourdeur du seau qu'il transportait.
— Que fais-tu ici Preath ? questionna Alester d'un air détaché. Tu m'as déjà laissé arranger le mur tout seul et tu oses venir après le travail fini.
— Pardonne-moi, rétorqua le grand blond en déposant le seau rempli de ferrailles aux pieds de son ami. Tu sais que mon père est un vieux meunier, et que je me dois de l'aider. Mais passons, le maître m'a chargé de te remettre ces pièces et ces outils pour l'amélioration des murs.
Le seau débordait de rouages, de vis, et de boulons en tout genre. Alester se mit à rire en voyant toutes ces pièces.
— Les murs, je les ai déjà améliorés. Tu diras au maître que j'ai terminé ma journée, mais si tu y tient tu peux tout vérifier toi-même.
Il tapota l'épaule de son ami avant de mettre sa besace sur la sienne et de partir, ne laissant pas le temps à Preath de répliquer. Alester marcha alors dans les quartiers sombres jusqu'à son habitation, longeant les ruelles étroites.
Il croisa sur son chemin de nombreux paysans, commerçants et même filles de joies. Tous avaient la même réaction en le voyant, ils murmurèrent entre eux le nom de "fils indigne de la Reine" ou de "démon". Le jeune homme se contenta de les ignorer, il était habitué à attirer ce genre de réaction, et ce, depuis sa plus tendre enfance.
Il voulu continuer sa route, mais un des chevaux blancs de la garde royale surgit et se mit en travers de son chemin. D'abord surpris, Il reconnut ensuite le visage du cavalier à l'armure brillante, et un sourire apparut immédiatement sur ses lèvres.
— Capitaine Vallas, prononça-t-il. Que me vaut l'honneur de cette rencontre dans les bas-fonds de la ville ?
— Votre mère la Reine Noire, souhaite s'entretenir avec vous. Annonça Vallas sérieusement. Elle m'a chargé de vous escorter jusqu'au château.
Alester perdit peu à peu son sourire à l'entente de cette nouvelle, sa mère n'avait jamais souhaiter le voir, pourquoi le voudrait-elle maintenant ? Il était le fils renié, le fils qui ne pouvait devenir sorcier, celui qui portait le nom d'un démon.
Tout jeune déjà, il avait été conduit dans les obscurs quartiers afin d'être le plus loin possible du château. Aurait-elle changé d'avis ? Après vingt-et-une années d'écoulées, elle souhaiterait le revoir et le considérer comme son enfant légitime. Ou bien, elle préparait un plan, et pour cela la présence de son fils à ses côtés lui serait nécessaire.
— Pourquoi la Reine voudrait-elle me voir ? Demanda Alester avec suspicion. Que vous a-t-elle dit ?
Le capitaine Vallas poussa un soupir, avant de se résoudre à lui répondre.
— Elle ne m'a pas donné de précisions, mais il s'agirait de l'arrangement d'un mariage.
— Un mariage !? S'exclama soudainement le jeune homme. Je dois me marier ?
— Je l'ignore. Mais s'il vous plaît de le savoir, prenez place sur mon cheval et allons jusqu'au château d'Auva.
Il hésita longuement, il avait confiance en Vallas mais certainement pas en la Reine, sa mère. Il était de plus éreinté à cause d'une longue journée sous le lourd soleil de la capitale, il ne se sentait pas capable d'apprendre de mauvaises nouvelles.
Il ne semblait, cependant, pas avoir le moindre choix.
Alester chevaucha donc à contre cœur le cheval du capitaine Vallas, et tout deux s'élancèrent en direction du château d'Auva. Et plus ils s'en approchèrent, plus les quartiers s'illuminaient et devenaient somptueux, voire luxueux. Le parfum même qui flottait dans l'air s'adoucissait, Alester ne sentait plus l'habituel odeur infecte de pourriture qui régnait dans les sombres quartiers, mais un parfum doux et agréable, presque indescriptible.
Plus ils s'approchaient du château, plus le cœur du jeune homme battait fort. Il se demandait sans cesse ce que la Reine voulait faire de lui, et quel genre de tourment allait-elle lui causer.
Un mariage.
Il n'était pas prêt pour cela, et il ne comptait pas l'être un jour. Sa simple vie d'ingénieur et cartographe lui plaisait, sa liberté lui convenait. Les filles des bas-fonds lui suffisait amplement, et puis, quelle fille voudrait d'un époux renié par sa mère ?
— Nous sommes arrivés, déclara Vallas.
Sans un mot, il descendit du cheval et suivit Vallas jusqu'au château. Plusieurs gardes se tenaient devant l'entrée et protégeaient les portes. Lorsque le capitaine s'avança, ils lui dégagèrent le passage afin qu'il puisse entrer.
Ainsi, Alester et Tarlyn Vallas se rendirent dans une immense salle du château, appelée salle du Conseil. Deux chevaliers se tenaient devant la porte.
— Alester Astré, fils de la Reine. Dit simplement Vallas pour que les deux hommes ouvrirent les deux grandes portes de la salle du conseil.
Alester pu apercevoir une grande pièce dotée d'une seule et longue table en bois rectangulaire. Cinq personnes y faisaient déjà places. Le jeune homme vit sa mère, siégeant en bout de table dans un grand fauteuil de velours épais. La Reine portait son habituelle robe noire, et sa couronne d'or blanc. Il vit aussi ses deux sœurs, Artianne et Thaïla. Les deux femmes étaient toutes deux de grandes beautés, et des exemples pour le Royaume.
Alester repéra aussi Ewen Larelle, duc d'Auva et grand argentier du Royaume. Il était assis près de sa sœur aînée Artianne, qui était sa femme. Un autre homme était assis à la table mais Alester ne le reconnu pas, il était aux côté de sa sœur jumelle Thaïla. Cependant cet homme avait les traits du visage assimilables à ceux du duc d'Auva.
Lorsque la Reine aperçut son fils, elle leva son verre en sa direction.
— Enfin, tu es arrivé ! S'exclama-t-elle de vive voix, si bien que tout le monde tourna la tête vers lui. Nous t'attendions Alester, hâtes-toi de prendre place.
Alester s'introduisit dans la salle du conseil. Il marcha sans conviction jusqu'à la grande table, et pris place sur l'un des sièges libres. Il affichait un air douteux, n'aimant en rien l'atmosphère qui régnait en ce moment même. Ils le dévisageaient tous, en particulier sa sœur Artianne et son mari, qui lui jetaient des regards de mépris. Mais il se contenta de rester silencieux, et arbora l'esquisse d'un faux sourire.
— Tarlyn, ordonna la Reine, vous aussi rejoignez-nous.
— Bien, Ma Reine.
Le capitaine pris place aux côtés d'Alester, tous deux partagèrent un bref regard d'incompréhension.
— Très bien ! Nous allons pouvoir commencer. Mais avant cela, Vallas dites-moi si les Traqueurs sont informés de la future invasion des Rescapés à Ormesel.
— Oui, répondit le capitaine. J'ai fait parvenir un message aux Traqueurs, ils se préparent actuellement à leurs faire barrage.
— Parfait ! Le problème sera donc bientôt résolu, affirma-t-elle, commençons sans plus attendre. Si je vous ai demandé de venir, c'est pour vous annoncer le mariage de ma belle Colombe cendrée avec notre chers Comte d'Ormesel, Lidan Larelle.
Elle désigna Thaïla, surnommée la Colombe cendrée de part sa grande bonté et la couleur cendrée de sa robe. Alester devina donc que l'homme à ses côtés était le Comte d'Ormesel. Son sourire excessif et arrogant, ne cessait de l'agacer. Les deux frères Larelle étaient connus pour être des dirigeant odieux et violent. En l'épousant, Thaïla deviendra donc la Dame d'Ormesel. Elle quittera la capital d'Auva afin de suivre son époux, et vivra dans les ténèbres de la ville du bois, ville entourée par les forêts de l'Ouest et de l'Est.
Alester tenta de faire ressentir son inquiétude à sa sœur en lui lançant des regards appuyés, mais Thaïla ne répondit que par de simples sourires, puis détourna le regard vers son futur époux. Le jeune homme poussa un soupir, désespéré.
— Elle est aveuglée par l'amour, fit discrètement remarquer Vallas. Vous ne pourrez rien lui faire entendre.
— C'est ce que je commence à comprendre, souffla Alester. Au moins l'annonce du mariage ne me concerne point.
— Je n'ai pas terminé ! Déclara la Reine de sa voix coupante en ayant entendu Alester.
Ce dernier sursauta de surprise et observa aux coins des lèvres de sa mère un faible rictus apparaître. Soudain, il senti un frisson parcourir son échine et un souffle froid mordre sa nuque. Il remarqua de plus sa sœur aînée imiter le même sourire que sa mère.
— Une autre union aura lieu prochainement, repris-t-elle. Bien évidemment, il s'agit du mariage du démon avec la jeune sorcière Amalica Loren, unique fille du Seigneur de Batyse.
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