Chapitre I
Je le toise, un air mauvais plaqué sur le visage. Et voilà, je me trouve en heure de colle à cause de ce connard de première classe !Je lutte intérieurement pour ne pas lui sauter à la gorge et finir ce que j'ai commencé tout à l'heure. Je soupire discrètement et regarde le prof, sans rien dire.
-Je vous laisse, vous avez deux heures donc vous nettoyez la salle de fond en comble, je veux pas voir une tache quand je reviens. Il appuie ses propos en désignant toute la salle du doigt.S'il y a un problème je suis en salle des profs. Pas de bêtises,compris ? Et aucun de vous ne sort avant les deux heures. Entendu ?
Le froid pèse lourdement. Ni lui ni moi ne répondons. Nous ne nous échangeons même pas un regard. Nos regards sont verrouillés sur nos pieds.
-J'ai pas bien entendu.S'impatiente notre professeur.
-Oui monsieur !
On a répondu en même temps, de ce fait on se regarde froidement et méchamment. Le prof sort et referme la porte derrière lui. Deux heures ? Je dois réellement passer deux heures entières avec Josh vu notre relation actuelle ? On va s'entre-tuer vous allez voir...
Notre professeur sort sans aucune réflexion supplémentaire.
Je me dépêche d'attraper un torchon et me mets face au tableau sans lui adresser la parole. Je n'ai même pas envie de voir son visage plus longtemps. Quand je pense qu'avant on s'entendait comme jamais.Je serre le chiffon et frotte vigoureusement le tableau. Je suis énervé ! Tellement frustré ! Pour une fois que je ne me laissais pas faire ! Je serre la mâchoire et marmonne dans ma barbe -Que je n'ai pas- Il vaut même pas la peine que je daigne lever le petit doigt pour lui alors pourquoi je me suis battu ? Je soupire à nouveau, comme si je tentais d'extraire toute cette frustration de mon corps. Faut dire que j'avais une bonne raison pour lui coller mon poing dans la tronche. : ce type me persécute !Je sais pas même pourquoi en plus. Est-ce que c'est pas risible ?On est dans la même classe on est même d'ancien pote -De très très bons potes qui partageaient une relation relativement fusionnelle- et du jour au lendemain il s'est mis à me persécuter. Je m'en prends plein la gueule quotidiennement et hier j'ai juste voulu me défendre pour une fois. D'habitude je me laisse marcher dessus mais là c'était la fois de trop ; La goutte d'eau qui fait déborder le vase. Je me retourne pour le toiser et lui lance un regard insensible. Je rêve ou il reste sans rien faire ? Ma rage monte encore plus en moi :
-T'as cru que j'étais la bonne ou quoi ?! Bouge toi et nettoie !
-Il soupire Et toi t'as cru que tu allais me donner des ordres ? Fous moi la paix et occupe toi de toi.
-C'est de ta faute si on est là ! T'avais qu'à pas me faire un coup foireux comme d'hab...
-Je fais ce que je veux.
-Je grogne : C'est ça ouais. Nettoie, allez ! On a deux heures et on sortira pas si la salle est pas propre donc sors toi les mains des poches.
-Fiche moi la paix. »
Il me gonfle... Je soupire et lève les yeux au ciel. Je m'affaire à ma tache et nettoie la salle. Pourquoi on nous laisse tous les deux alors qu'il y a huit chances sur dix qu'on se saute à la gorge ?
En réalité, je suis réellement dépité qu'on se prenne la tête comme ça. On était de vrais amis... était ouais, maintenant c'est l'enfer entre nous. Et le pire c'est que je n'ai aucune idée de pourquoi c'est devenu comme ça entre nous. Je l'entends finalement s'activer pour nettoyer, au moins il me laisse pas tout faire... Je me grandis et nettoie le haut du tableau. Je m'ose à parler malgré ma rancœur et ma colère :
« -Joshua...
-Fous moi la paix. Je suis pas là pour taper la causette avec toi.
-Pourquoi t'as changé à ce point ? Tu m'as jamais dit pourquoi tu me faisais ça.
-J'ai besoin d'une excuse ? Tu me faisais chier. Point barre. »
Toujours froid avec moi, pas moyen d'avoir une fichue conversation, pourtant ça nous ferait pas de mal parce que j'y crois moyen à son excuse bidon là. Quoique je ne sais pas trop. Il a beau être un pur connard j'aimerais que tout redevienne comme avant et qu'on oublie tout ce qu'il a fait. Mon ami me manque énormément. Je ressens comme un vide que rien ne parvient à combler. Lui et ses potes se font une joie à m'emmerder, me renverser des boissons dessus, me pousser dans les couloirs, me faire tomber avec mon plateau à la cantine. Ce genre de chose... Parfois l'un de ses potes, Miller je crois bien, est encore plus violent... J'ai toujours peur quand je le vois. Mais malgré tout ça, quelque chose en moi m'empêche de haïr Joshua. Lui il est peut-être capable d'oublier notre amitié d'un claquement de doigt mais pas moi. C'était un peu mon coup de cœur amical, j'adorais passer du temps avec lui. J'aimerais tout arranger,ou au moins comprendre pourquoi il me fait ça.
« -Tu peux pas arrêter ? On était bien en tant qu'ami... »
Le bruit du silence règne, me stressant. J'ai peut-être trop parlé.J'aurais peut-être du me taire... Mais malgré cela, mon envie de savoir le pourquoi du comment tout a tourné au vinaigre continue de croître en moi. Je me pince les lèvres, tentant de me retenir de parler mais finalement je n'y tiens plus et continue :
« -Je t'ai jamais rien fait. Je ne t'ai pas menti, fait aucun coup bas,je ne t'ai pas laissé tomber ni... rien en fait. Donc je ne comprends pas.
-Tu me gonfles. Crache-t-il
-Je sais, mais toi aussi tu me tapes sur le système. On peut jamais discuter !
-Et ?
-Je sais même pas pourquoi j'essaie encore de te parler... Je lève les yeux au ciel et tente de garder ma rage pour moi.
-Dans ce cas tais toi.
Je fais ce qu'il me dit, le temps de trouver de quoi le parer. Une idée me traverse l'esprit. Un sourire malsain déforme mon faciès et je dis posément :
-Je pourrais porter plainte pour harcèlement et même pour coups et blessures tu sais...
Je me retourne et m'adosse contre le tableau en croisant les bras. Un air de défi est plaqué sur mon visage. Je n'ai jamais osé le faire et je pense pas que j'en aurais les couilles pour être franc mais j'ai tout de même envie de le menacer, juste pour voir si ça peut lui permettre de craquer. Il s'avance vers moi, je tente de ne pas perdre la face. Il appuie son bassin contre la table face à moi.Quand mes orbes rencontrent les siennes, son regard semble perdu,différent...
-Tu pourrais. Tu devrais même, peut-être.
-Tu ne m'en dissuades pas ? Je trouve cela étrange. Il pourrait avoir de gros problèmes, passer en justice et tout le tralala et il semble carrément s'en foutre.
Il hausse les épaules et a un rictus triste en baissant la tête,murmurant :
-Pourquoi je ferais ça ?
-Pour continuer à me pourrir la vie. Et aussi pour sauver ta peau et t'éviter de gros problèmes.
C'est une raison plus que légitime et justifiée. Je tente de soutenir son regard mais je me sens intimidé, je détourne donc les yeux et laisse ces derniers parcourir notre salle de cours. Sa voix me sort de ma contemplation et à la place je laisse mon regard se balader sur lui : sur ses cheveux châtains clair, ses yeux marrons,tirant légèrement sur le vert.
« -Je veux pas te la pourrir.
-Tu te fiches de moi ? N'importe quoi... T'aurais pas une réponse un peu plus crédible ?
-Crois ce que tu veux. Il soupire. Après tout, déteste moi, c'est plus simple.
-Plus simple ? Mon amitié avec un gars que j'adorais est complètement ruinée et ce foutu gars me manque. Je veux mon ami à nouveau, je veux retrouver nos bons délires. Donc non c'est pas "plus simple", c'est juste... triste de ne plus te parler...
Il regarde ailleurs, ne semblant pas savoir quoi répondre. Sa petite moue où ses lèvres se pincent me rappellent nos bons moments. Il s'éclaircit la voix et reprend :
-Continue à nettoyer, je veux me casser de là.
Il s'éloigne. Ce qu'il dit ne colle absolument pas avec ce qu'il fait.Son but est de me faire perdre la tête ou quoi ? Il me met un petit coup dans le torse et me crache à la figure un :
-Pauv' mec.
Moi,un pauvre mec ? J'allais te le dire... Je suis triste de ce qu'il me fait mais je n'arrive pas à me défendre. Quelque chose en moi m'en empêche. Je subis simplement les mesquineries qu'il me fait et me dit.
J'arrête de nettoyer le tableau et m'affaire aux bureaux. Joshua, lui, passe la serpillière. Je ne prête pas grande attention à lui et continue à passer le chiffon humide sur les tables, une par une. Je regarde dans le vide et avance à la rangée de derrière en fermant les yeux. Je rentre dans quelque chose. Je geins et relève la tête.C'est lui. Il a l'air étonné et ne bouge pas. Je n'ose faire ni un pas ni parler... J'ai peur de me prendre une trempe dans la face. Je sais qu'il est capable de faire certaines choses. Nos regards se confrontent, se livrant une bataille acharnée. Il a un visage transcendant et sa voix est lacérante :
-Tu te pousses ?
-Ouais... Comme si j'avais le choix j'ai envie de dire. Lorsque je suis sur le point de me reculer il m'arrête.
-Attends...
Il laisse sa phrase en suspend. Je le toise et attends avec appréhension la suite de sa phrase. Qu'est-ce qu'il me veut encore ? Je reste sur mes gardes, prêt à répondre en cas d'agression.
-Tu me détestes ?
-J'ai un rictus Ta question est idiote... Si je le déteste ? Ce qu'il faut pas entendre ma parole.
-Ouais. Il est visiblement agacé et sa voix froide me transperce Bon, Shay pousse toi maintenant.
J'en ai marre qu'on tourne autour du pot sans savoir ce qui ne va pas entre nous. C'est horrible ! Ça me fruste et me rend encore plus triste... Je tente dans un dernier élan d'espoir de le convaincre qu'on discute tous les deux :
-Tu voudrais pas qu'on mette tout au clair ?
-Y'a strictement rien à dire ! Ta tête me revient plus, point.
Il me pousse sur le côté assez brusquement et passe la serpillière à nouveau. Pourquoi il passe d'un extrême à l'autre comme ça ?Mais il est lunatique un truc de fou ! Ses paroles m'ont blessé mais je ne compte pas lui montrer. Je ne compte pas non plus pleurer parce que je suis épuisé de cette situation. Du moins, pas devant lui. Je garde donc la tête haute et fais abstraction de ses propos.Depuis un mois environ je dois faire comme si tout ça ne m'atteignait pas alors que je souffre de la perte de mon ami.
Je marche en arrière pour arranger une tache et lui rentre dedans, de dos. Je me fige, effrayé.
-T'es sur mon chemin. Crache-t-il entre ses dents serrées.
Il se fiche de moi ou quoi ? Je marmonne à mon tour :
-T'es aussi sur le mien.
Il reste muet, certainement étonné que j'ose répondre. Je suis tiraillé entre haine et quelque chose d'autre que je n'arrive pas à expliquer. Il est sur le point de me rendre dingue.
-On devrait délimiter la salle en deux.
-Ouais ou je vais finir fou.
-Moi aussi, tu crois quoi ? Que ça me fait plaisir d'être coincé dans cette pièce avec toi ? Un pur plaisir oui !Waaa j'adore !
-Et moi alors ? Je suis bloqué avec la personne que je veux le moins voir, c'en est jouissif.
Dans le fond ses paroles me font mal. Savoir qu'il me hait me brûle le cœur. Malgré ça je lui rends ses paroles, désirant lui faire mal comme il me fait mal :
-Pareil pour moi !
Je marche sur son talon avec le mien tout en grognant ma frustration. Il m'agace à un point inimaginable. Jamais je n'aurais cru que quelqu'un me ferait perdre la tête comme cela.
Je m'avance à nouveau pour nettoyer le devant de la salle avec le chiffon, je le rince un peu et remets du produit. Il râle, je l'entends. Je tente d'en faire abstraction. Il est une vrai teigne !J'arrive pas à croire qu'il aie changé à ce point, ça paraît irréaliste. A cet instant, un flot de tristesse et de regret monte en moi. Je me sens lavé de toute énergie, de toute force et même mes sentiments semblent s'évaporer au loin. Je murmure :
-Tu me fais du mal c'est horrible... Merci, vraiment... Je croyais qu'on était proche, qu'on était ami... Et...
Je garde ma phrase en suspens, n'arrivant pas à trouver de fin. Je renifle discrètement, sentent les larmes me brûler les yeux. Un nœud se forme dans ma gorge tandis qu'un creux ronge mon ventre. Je sais même pas pourquoi je lui dis ça. Je baisse la tête et me mets face à la table. Je pose mes deux mains à plat dessus et ferme les yeux pour me calmer. Mon cœur me brûle. Mon pote est devenu le mec qui me persécute tous les jours, comment c'est possible ?J'entends quelque chose tomber mais je m'en fous. Je me fais violence pour refouler mes larmes.
Je sens son corps dans mon dos. Un intense frisson me fait tressaillir.Qu'est-ce que... ? Il me fait me retourner d'un coup sec. Mon regard rencontre le sien comme un automatisme. Je papillonne des yeux et fronce les sourcils, ne comprenant pas ce qu'il fait. Je monte mes bras et positionne ces derniers pour me défendre en cas de coup. Il roule des yeux et les fait s'abaisser.
-Je suis sûr que j'ai raison.
-Sur quoi ?
Je ne comprends pas. Il me pousse en arrière, je bute donc dans le bureau derrière moi. Je me sens prisonnier et pris au piège. Je mets un coup dans son torse. Je veux lui faire comprendre que je suis pas une petite chose fragile.
-Tu fiches quoi là ?
-T'en as pas marre de geindre ?
-Non pour l'instant ça va. J'ironise.
Il est proche de moi, c'est perturbant. Je m'assieds donc sur la table et relève la tête pour que nos regards se croisent. Il est plus grand que moi maintenant. Il m'attrape par mon sweat-shirt et me tire vers lui.
-Tu comptes me frapper ?
-Non.
Je serre les poings et reste assis. Si jamais il me fait mal je me débats et je le frappe, je peux le faire ; Hier j'ai réussi à me défendre mais il a fallut que ce fichu pion arrive et m'empêche de lui foutre sa raclée ! Il l'aurait mérité ! Même si j'avoue qu'il n'est jamais celui qui me fait horriblement souffrir.Celui qui me décroche des bleus et des blessures c'est Miller. Le problème c'est que je voue une colère profonde pour Joshua car c'est lui mon ami. Je le regarde froidement et lui mets un léger coup dans le ventre histoire de lui faire comprendre que je suis capable de lui faire mal et de me battre à nouveau contre lui si jamais il me le fait à l'envers. Je suis pas Hulk mais si je veux je peux quand même me battre.
Je prends le temps de le détailler complètement. Ça faisait longtemps qu'on avait pas été si proche. Le silence règne et me dérange de plus en plus. Son manque de réactivité me fait perdre patience et je perds mes moyens :
-Bon quoi ? Je crois les bras contre mon torse. Tu me veux quoi cette fois encore,hein ? M'emmerder ? Me frapper ? Me ridiculiser ?T'as prévu un petit plan pour qu'encore une fois je sois plus basque terre et que tout le monde puisse se foutre de ma gueule ?
-J'allais te le dire oui. Il lève les yeux au ciel. J'aime pas quand il fait ça !
-Je vais pas te laisser me détruire, pigé ? J'en ai marre de me faire marcher dessus par toi. Tu me saoules. Lâche moi et retournons à ce foutu ménage !
-Tu veux savoir quel est le problème ?"
*******
Merci beaucoup pour vos retours sur le prologue ! J'espère que ce premier chapitre ne vous aura pas déçu ><
On se retrouve bientôt !
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top