7~ C'est parti !
J'arrive enfin à la salle à manger ! Oui, enfin. Parce que le rez-de-chaussée est vraiment grand !
Et je souris en entrant dans la grande pièce aux fenêtres d'or tandis que des plans se déversent dans ma tête. Ah, je suis rassurée de retrouver ma hargne !
Dans ma douce tenue choisie par les soins de Nora, je me sens mieux. Mes cheveux sont bien coiffés, mon visage est bien maquillé, et mes poignets sont bien ornés. Je me sens prête à affronter la journée.
Le repos a été profitable. Mais surtout, c'est l'attention de Nora qui a finit de me remettre d'aplomb. Elle qui a eut la prévenance de venir me réveiller, sans aucun commentaire sur la position dans laquelle elle m'a surprise ou sur mon visage trop pâle. Elle m'a levée et apprêtée dans un silence léger, sans jamais rien demander. Non, elle s'est juste occupée de moi.
Je n'ai jamais connu de réveille aussi doux.
Mais maintenant, la compétition commence ! Et Gabrielle a repris du poil de la bête, alors c'est parti !
Dès que je passe les portes de la salle à manger, je suis projetée dans la compétition.
Je trouve au premier plan Adama et le prince, entourés de participants tous mieux habillés les uns que les autres. Garçons comme filles, ils sont nombreux à se rassembler autour des deux Aurores. Je ne pourrai donc pas me faire remarquer si je les imite.
Ce sera pour une autre fois.
Certains candidats restent tout de même à l'écart. Alors, une fois mon plateau fournit de multiples viennoiseries, c'est vers eux que je me dirige.
Je retrouve Corentin dans le lot, un sourire toujours aussi franc que la veille sur son joli minois bien réveillé. Son regard croise le mien, et un sourire vient naturellement à mes lèvres. Oui, il est solaire ce Nuit.
Vraiment bizarre.
- Bonjour Gabrielle ! lance-t-il gaiement en me voyant me ramener près du petit groupe.
Et je réponds tout aussi joyeusement :
- Bonjour Corentin ! Et puis bonjour...
... merde, trou de mémoire.
Un sourire peiné sur le visage, je me tourne vers les trois autres dont je n'ai pas retenu le prénom. J'ai vraiment un problème avec ça. Parce que si je ne sais pas comment ils s'appellent, je sais parfaitement leur caste et j'ai déjà dressée une liste d'avantages et d'inconvénients sur eux.
Bizarre mon cerveau.
- Louise, m'éclaire gentiment une jolie fille brune aux grosses lunettes noires, prenant rapidement la parole.
Le visage bienveillant d'hier, c'est elle. Une alliée du meilleur goût.
- Capucine, poursuit la seconde un peu rondouillette de l'autre coté de la table.
Son sourire à elle aussi est communicatif, encadré de jolies boucles châtains et de tâches de rousseurs. Elle est mignonne.
- Hector, finit l'autre garçon.
Et je leur souris distraitement. Oh, j'espère que je n'oublierai pas leurs prénoms cette fois-ci ! La meilleur se doit de connaître ceux à qui elle parle, d'avoir un minimum de mémoire.
Alors s'il te plaît, cerveau capricieux, enregistre cette fois !
ღ ღ ღ
- Corentin,
- Louise,
- Capucine,
- Hector,
- Gabrielle.
Et je finis le tour avec un grand sourire pour tous les yeux rivés sur moi.
Deux premiers jours : présentation. Et première activité : tour de table.
Pourquoi pas, ça peut être rigolo. Mais pendant quatre heures, ça risque surtout d'être long.
- Bien, approuve l'organisatrice d'un sourire mesuré. Maintenant je vais appeler un prénom, et son porteur va devoir dévoiler une information sur lui. Famille, travail, ce que vous aimez faire, ce que vous n'aimez pas,... vous avez le choix ! Mais je ne veux pas de castes, vous êtes à égalité ici.
Et un Jour ricane. Oh la notion d'égalité semble mal passer pour lui. Mais je ne cherche pas à retenir sa tête ou son nom, je suis déjà concentrée à trouver quoi dire. De toute façon, avec des réflexions comme ça, il partira bien avant moi.
L'exercice se révèle par contre plus difficile qu'il n'y paraît. Quand j'y pense, il n'y a pas grand chose que j'ai envie de dévoiler aux autres.
Voleuse ? N'aime pas les foules et la lumière ? A de bons contacts si vous cherchez des armes ou des herbes ? Sait lancer des couteaux dans le noir, a tué sa première victime à douze ans ? Déteste ce système de castes merdique ?... non, pas terrible comme première impression.
- Hyacinthe, envoie alors l'animatrice.
J'avale ma salive pour me tourner vers la jeune fille aux boucles folles qui ébauche un sourire... très crispé.
- Mon père est maire de Tyhm, déclare-t-elle.
Eh bien, une information totalement inutile. Merci Hyacinthe de confirmer à la fois ta caste et ta froideur.
- Merci Hyacinthe, fait poliment la bonne femme. Maintenant, désigne quelqu'un.
Et la jeune métisse ne prend même pas la peine de réfléchir pour lancer gaiement :
- Adama.
Pas trop compliqué n'est ce pas ? Si ce n'est pas au premier tour qu'elle vire, elle, c'est au deuxième.
- J'aime assister à des matchs de tennis, dévoile la belle Aurore.
Un information bien choisie, ce sont ceux qui n'ont rien à prouver qui parlent de leurs centres d'intérêt.
- Anthony, lance-t-elle à son tour.
Un garçon de sa table ce matin, un Jour bien baraqué.
- Je sais tirer à dix mètres au pistolet.
Donc ça part dans une exposition des compétences. Pas trop compliqué pour un soldat au moins.
- Dorian.
- Mon père a combattu aux côtés de Nelson Herdge, affirme fièrement son copain désigné.
Certains visages se dérident, laissant percevoir une certaine admiration. C'est sans doute parce qu'ils connaissent ce fameux Nelson Herdge.
Mais personnellement, il m'est tout à fait inconnu. Alors je cherche vainement à trouver quel est l'intérêt d'une telle annonce.
... sauf qu'elle n'en a pas.
- Juliette.
- Je sais bien peindre à l'aquarelle.
Et les informations fusent ainsi entre Jours et Crépuscules pendant un bon moment. "J'apprend la médecine avec mon père", nous informe Louise quand vient son tour. "J'aime passer du temps à étudier les plantes" déclare monsieur tête en l'air, répondant au nom de Martin. Puis vient le tour de Corentin.
- Tous les ans, pour l'anniversaire de ma petite sœur, je lui fabrique une poupée avec des bouts de tissus trouvés à l'usine, fait-il nostalgiquement.
Oh, c'est original. Et c'est mignon.
Dommage que je n'ai pas de bonne cause pour justifier mes vols, moi aussi.
- Gabrielle, lance-t-il ensuite, les yeux pétillants.
Je suis prise de court. Ah, c'est malin, ça, Corentin !
Alors, sans que je sache comment l'idée me vient j'annonce, d'une voix aussi froide que chaleureuse :
- Je préfère qu'on m'appelle Ielle.
Et mon regarde brun glisse de visages en visages pour prendre la température. Ils sont partagés entre méfiance et amusement... bien joué Gabrielle.
Seuls quelques uns gardent la même expression. Corentin son sourire doux, c'est naturel chez lui, Louise son regard bienveillant, quelques autres filles leur moue intéressée mais surtout... le prince.
Oui, le grand Aurore regarde la petite Nuit avec son air amusé. Eh bien, si il veut jouer...
- Eliam, appelé-je d'une voix mielleuse.
Toutes les têtes se tournent brusquement vers lui, soudainement intéressées, et je prends conscience que personne n'avait osé l'appeler.
- Eh bien... fait-il pensivement. J'aime particulièrement bien mon prénom, moi.
Quelques rires sont étouffés tout autour de la table, mais le prince ne récupère de moi qu'un pauvre sourire.
Parce que j'aimerais lui dire que mon prénom ne me dérange pas non plus, je n'ai pas honte d'une des seules choses que mes parents m'ont léguées. Mais dans les auberges, les longs noms sont vite écorchés. Et je préfère être surnommé Ielle que Gaby, c'est tout.
Alors il s'attire l'amusement des autres, le beau prince. Mais pas le mien.
- Fiona, lance-t-il ensuite.
Et la petite Nuit vire au rouge entre ses bouclettes rousses.
- Je... je ne suis jamais sortie de ma ferme à part pour venir ici... nous informe-t-elle faiblement.
La jeune fille a une toute petite voix, c'est adorable. Et sa déclaration souffle pas mal de personnes dans l'assistance.
Mais je sais que ce n'est pas une bonne chose. Pour qui va-t-elle passer en avouant qu'elle n'a pas reçu d'éducation ?
Non, la meilleure n'est pas analphabète.
Le tour repart. J'en suis sortie, alors je peux totalement en profiter. Même si au final, il n'y a rien de bien intéressent.
Jusqu'à ce que l'animatrice reprenne la main.
- Maintenant, nous allons refaire l'exercice, nous dit-elle. Sauf que cette fois, quand vous serez nommé, vous devrez nous citer une chose que vous appréciez suivie d'une chose dont vous avez peur.
Nous acquiesçons et la bonne femme lance le jeu.
- Louise.
- J'aime diagnostiquer des patients avec mon père, nous apprend-t-elle patiemment. Et j'ai peur de la mort.
Tandis moi, je recommence à m'interroger. Oh, il y a beaucoup de choses que j'aime, et beaucoup de choses dont j'ai peur. Mais elles ne sont pas du genre à être révélées ici.
Alors non, je ne vois toujours pas quoi dire.
Jusqu'à ce qu'Eliam me provoque.
- J'aime la glace au citron, fait-il d'abord d'un flegme fou. Et j'ai peur du vide.
Puis il tourne ses yeux d'un bleu limpide sur moi, et son sourire moqueur s'agrandit.
- Ielle.
J'hausse sensiblement les sourcils devant l'accentuation particulière qu'il porte à mon surnom. Tandis que, sous mes cheveux violets, mon cerveau se met à charbonner.
- J'aime la nuit, décidé-je de dire, et j'ai peur de perdre mon frère.
Pas trop niais j'espère... puis je souris en songeant à Noah qui va peut-être voir ce passage d'un bar ce soir, devant une chope de bière.
Oh oui frérot. Malgré toutes tes conneries, ta petite sœur t'aime.
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