14~ Je te veux dans mon équipe !
— Monsieur Eliam à ma droite, mademoiselle Adama à ma gauche !
Et les deux Aurores vont sagement se ranger des deux cotés de l'entraîneur.
— C'est vous qui ferez vos équipes, annonce-t-il en s'écartant pour rejoindre Henry-Louis resté sur le coté. Je vous laisse alterner entre fille et garçon, faites moi des groupes équitables.
Les deux Aurores hochent la tête à l'unisson avant de nous inspecter minutieusement.
Nous sommes quatorze à leur faire face, deux équipes de sept. Il y en a des plus forts, des plus faible, et il manque Henry-Louis.
Oui, le dernier Aurore du groupe s'est débrouillé pour être nommé arbitre dès la première séance de sport. Une performance qui va sans doute lui coûter cher au classement si il ne se rattrape pas dans les sports individuels de la semaine.
Mais par dessus tout, je vais devoir me résigner à ne pas pouvoir lui lancer de mousse dans la tête pour la balle au prisonnier.
Et ça, ça va se payer !
— Honneur aux dames, Adama commence, déclare l'entraîneur.
La belle Aurore prend une inspiration avant de faire son choix, ses yeux verts slalomant sur les uns et les autres avec méthode.
— Anthony, finit-elle par appeler.
Oh tient, le troisième du classement. Un jeune garde au physique bien développé qui plus est. C'est un choix surprenant !
Et je parie que c'est à Louise d'être appelée par Eliam maintenant...
Quoique je ne devrais rien parier avec stupide prince. Surtout quand il affiche ce sourire malicieux encore plus stupide que lui.
— Ielle, chantonne-t-il joyeusement.
Je souffle un bon coup, les yeux rivés dans les siens.
Ses questions ciblées, le petit hérisson et maintenant ça ?
Qu'est-ce qu'il me veut ? Ça l'amuse de me provoquer ?
Eh bien prince ou pas, si il continue à me chercher il va me trouver !
Sauf que pour le moment je suis obligée de lui obéir. Mes pas sont lourds de réticence, je dois bien être la seule du pays à ne pas vouloir être à ma place.
Mais quand je me range derrière Eliam, je n'ai plus tant besoin de me forcer pour sourire.
Le prince m'a tout de même remarquée. Il m'a choisie en première, ce n'est pas rien ! Et même malgré ma réserve, je ne peux empêcher mon cœur de battre un peu plus vite...
— Emanuella, reprend Adama.
La forte jeune fille vient se placer derrière elle. Eh bien, on peut dire qu'elle ne joue pas dans la difficulté ! Avec une équipe comme ça, l'Aurore est sûre de gagner.
— Martin, appelle alors Eliam.
Sérieusement, ce gringalet ?
Le prince par contre, il veut perdre.
Mais en fait, j'aurai dû m'en douter. Il ne manque pas une occasion de se ridiculiser, la preuve en image !
Ainsi si il m'a choisie la première, ce n'est pas du tout parce qu'il m'estime forte. C'est parce qu'il veut m'entraîner dans sa chute.
Je commence à comprendre des choses...
— Dorian, appelle Adama.
Et le second soldat baraqué vient gentiment se placer derrière l'Aurore.
— Louise, choisit Eliam.
Je souris aimablement à mon alliée qui s'approche, tout en relevant encore intérieurement sa faible corpulence.
— Juliette.
— Hector.
Mais non !
De mon équipe ou pas, c'est finalement entre les deux yeux d'Eliam que je vais envoyer le ballon !
Hector, vraiment ? Cette tige de fer qui a échappé de peu à l'élimination ? C'est n'importe quoi !
Et je regarde mélancoliquement Corentin partir dans l'autre équipe...
— Flora, invite Eliam.
Alors maintenant c'est à la petite Nuit de faire son entrée ?
J'ai nommé l'équipe des bras cassés !
— Elya, engage Adama.
— Gaston.
— Capucine.
— Et puis Hyacinthe !
Et la dernière jeune fille vient compléter l'équipe, plus épaisse en cheveux bouclés qu'en quoique ce soit d'autre.
Je soupire en lançant un regard mélancolique à Corentin puis me force à jauger mes compagnons.
Un amas de tas d'os et de grands cœurs. C'est bien joli, mais aucune chance de gagner quoique ce soit avec ça. Et même si ce n'est qu'une balle au prisonnier, ça me met légèrement sur les nerfs...
Sauf qu'à mon grand étonnement, Eliam décide de prendre les choses en main.
— Flora, Hyacinthe et Martin, vous passez devant, ordonne-t-il d'un sérieux hors du commun.
Sa voix est basse, de sorte à ce que personne d'autre que nous ne l'entende.
Ce soudain revirement m'interpelle. Il veut gagner finalement ?
— Vous courrez pour les perturber, planifie-t-il. Tandis que Louise, Hector et Gaston, vous resterez à l'arrière sans trop bouger tout en vous concentrant sur la balle. Je compte sur vous pour bien viser quand ce sera votre tour de tirer.
Je reste bouche bée. C'est la guerre ou c'est une balle au prisonnier qu'il organise là ? Et puis si il tenait tant à la victoire, pourquoi avoir construit cette équipe ?
Je crois que je n'arriverai jamais à savoir ce qu'il peut penser ce prince...
— Et Ielle, tu reste avec moi en plein milieu, commande-t-il finalement. Faisons en sorte d'être les principales cibles. Je te fais confiance pour éviter les tirs.
Puis, sûr que l'on remplira tous notre rôle, il se relève de toute sa hauteur pour dévisager l'autre équipe presque comme si il cherchait déjà les points faibles de nos adversaires.
Je garde la bouche entre-ouverte et les jambes raides, prise de court. Le pire, c'est que ça me semble être un bon plan. Alors je lui obéirai... Mais j'aimerai savoir pourquoi il prend tout ça à cœur maintenant.
— C'est quoi cette stratégie ? je lui demande quand il disperse les autres.
Son regard se pose sur moi, et ce n'est qu'à ce moment que je me rends compte qu'il me dépasse d'une tête. Je dois dire que le décalage m'impressionne étrangement maintenant, même son éternel sourire n'arrive pas à discréditer l'aura de puissance qu'il manifeste.
Il pourrait faire un bon conseiller finalement...
— Tu sais, même les plus faibles peuvent gagner si on les aide, répond-t-il sagement.
— Oh, monsieur fait de la philosophie... maugréé-je sans partager son avis.
Son visage s'éclate en un grand sourire.
— Chacun son tour, ricane-t-il en me plantant là.
Je reste muette.
Il vient vraiment de faire allusion à cette tirade que j'ai déclamée il y a deux jours ? Ma parole, il a la mémoire bien longue !
Je secoue la tête pour réordonner mes idées puis avance vers le terrain où se rassemblent déjà les autres.
Alors nous gagnons tous les huit nos places définies, attendant patiemment le signal du départ. Comme prévus, je deviens la cible de tirs que j'évite sans difficultés. Et je peux en dire autant du prince, qui se révèle être un très bon joueur.
Aussi étrange que cela puisse paraître, nos tireurs prennent l'avantage. Ils suivent scrupuleusement les conseils avisés d'Eliam, tout se passe à merveille. Et même si ce n'est qu'un stupide jeu de balle au prisonnier, je trouve de quoi en être fière.
Alors quand le prince me regarde après avoir éviter une énième balle, je lui souris volontiers. Parce que je ne sais pas vraiment ce qu'il a voulu faire avec son équipe de bras cassés, mais il a réussit.
ღ ღ ღ
Quand j'arrive devant la salle inscrite dans mon emploi du temps cette près-midi, le sourire n'a toujours pas quitté mes lèvres. Après notre belle victoire à la balle eu prisonnier, ma performance n'a cessé de s'améliorer en handball.
Les équipes ont été à nouveau séparées en deux, je me suis retrouvée avec Louise, Hector et Martin. Et ils se sont révélés particulièrement doués en ce sport !
Rajoutons à ça que Corentin, pas rancunier pour deux sous, n'a cessé de me féliciter durant toute la séance. Et après ce déjeuné à la grande table entre mes trois compagnons, mon équipe de hand victorieuse et un Eliam rieur qui nous a fait le plaisir de se joindre à nous, je me sens particulièrement de bonne humeur.
Alors oui, j'ai oublié mes rancunes. Ma vigilance s'est relâchée bien plus largement que je ne devrais le permettre. Mais c'est plus fort que moi, je me sens bien avec eux.
Oui pour une fois j'ai de vrais alliés !
Corentin m'effleure le bras quand nous rentrons dans la salle, je me sens frissonner.
Je ne devrais pas lui permettre de m'approcher, je devrais le refouler comme Nora hier. Sauf qu'étrangement je le lui permets.
Et je lui souris.
Trois semaines... c'est court au final.
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