Chapitre 43 Andrew. Randonnée
Samedi
Pov Lisa
Cher journal
J'arrive pas à dormir ce matin. Comme tous les samedis matins depuis que je suis rentrée chez maman.
Alors, comme tous les matins, j'ai souhaité une bonne nuit à la lune depuis le rebord de ma fenêtre, et j'ai regardé le soleil se lever. Quand je me penche par-dessus la balustrade, je vois en bas les voitures qui circulent. Comme toute la nuit. Ici, il y a beaucoup de bruit. Beaucoup d'enseignes aussi, qui clignotent tout le temps. Jaune, bleu, vert, Rouge, Jaune, Bleu, vert, Rouge. Maman dit qu'elle aime ce quartier car il est vivant.
Mais il n'y a pas de parc. Parfois un moineau, enfin je pense que s'en est un, vient sur le rebord de ma fenêtre. Il est tout marron et petit et je lui laisse un peu de pain tous les soirs dans une petite boite en plastique. Hier, il n'est pas venu, ni ce matin. Je me sens seule. Maman doit dormir. Hier soir, elle est rentrée très tard. Elle était de mauvaise humeur. Je l'ai même pas vue, juste entendue. Elle a crié après mamie Carmen qui me gardait. Je voulais comprendre mais en même temps, j'avais peur alors, je suis restée dans ma chambre et elle n'est pas passée me souhaiter une bonne nuit. Maman est bizarre en ce moment. Un moment elle chantonne toute seule et l'instant d'après, elle me regarde comme si elle me détestait et me dit d'aller dans ma chambre. J'y suis tout le temps dans ma chambre. Elle m'y fiche la paix.
Papa me manque. Horriblement. Il m'appelle matin et soir, mais c'est pas comme si je pouvais me blottir dans ses bras. Il me lit parfois une histoire au téléphone, mais je ne me réveille jamais en trouvant son parfum sur mon oreiller. Et puis j'aime bien parler à Livie aussi, discuter avec une fille c'est sympa aussi. Je peux lui dire des choses que je ne raconterais pas forcément à Papa. Ça lui ferait mal peut-être, et j'ai l'impression qu'elle me comprend. Elle a été gentille : jamais elle ne m'en a voulu pour ce que je lui ai fait subir au début.
Les filles à l'école disent que mon papa me ment, qu'il ne viendra pas me chercher pour vivre avec lui. Mais je sais qu'elles se trompent et je leur parle plus. Papa m'a expliqué que le grand jour sera pour bientôt.
Parfois je me réveille et mon oreiller est tout mouillé. Je veux retrouver mon Papa.
ooOoo
Il était à peine huit heures quand la voiture avec chauffeur que j'avais louée pour la journée, me dépose au pied de l'immeuble d'Alana . Le chauffeur, un homme très sympathique apparemment, me propose de sonner à l'interphone, ce que j'accepte sans problème.
C'est avec perplexité que je remarque ce changement en moi. Quinze jours plus tôt, cela m'aurait agacé que l'on me propose de m'aider.
Le bip d'ouverture de la porte est la seule réponse à notre appel.
- 10ème étage, me souffle le jeune homme.
Sa voix me parvient « d'en haut ». C'est rare, vu ma propre taille. Il doit être sacrément grand. Il est discret et propose son aide sans être envahissant.
- Merci, vous vous appelez comment ?
- Dimitri, Monsieur Follen.
- Merci Dimitri. Appelez-moi Andrew. À votre voix, je devine que nous avons environ le même âge. Comme vous le voyez, je suis dans une situation un peu particulière, et je pense que vous pourrez m'aider un peu aujourd'hui. Je veux que cette journée soit spéciale pour ma fille.
- Très bien. Ça sera avec plaisir... Andrew. L'ascenseur est à 10 mètres environ devant vous. Vous souhaitez que je vous accompagne ?
- Non merci. Pour l'instant cela ira. Attendez-moi ici s'il vous plaît, je reviens avec Lisa, ma fille, dans peu de temps.
Enfin je l'espérais. Alana ne devrait plus chercher à me mettre des bâtons dans les roues.
Ma canne me guide sans difficulté jusqu'à l'ascenseur qui, je le savais par mon frère, indique vocalement l'étage atteint. Après quelques tâtonnements, la petite boîte me mène au palier où vit ma fille pour quelques heures encore.
La porte au bout du couloir à gauche de l'ascenseur m'a indiqué Drake . À pas prudents, je franchis la distance me séparant de l'appartement, et cherche la sonnette. Il n'y en a pas. Je frappe alors sur le battant. Je suis en avance, mais je suis certain que ma princesse est réveillée. C'est une lève-tôt.
Après quelques secondes de silence, je tape à nouveau sur le battant, mais un peu plus fort.
Et si Alana a décidé de...
Le bruit du verrou coupe court à l'hypothèse effrayante que mon cerveau commence à bâtir.
La porte s'entrouvre.
- Papa !
La chaîne de sécurité est ôtée et une seconde plus tard, Lisa se jette dans mes bras.
Je la serre fort. C'est si bon. Ses petits bras s'enroulent autour de mon cou, et le serrent convulsivement. Je sens ma joue se mouiller alors qu'elle frotte son visage contre le mien. Elle pleure.
Avançant de quelques pas prudents dans l'appartement, avec mon précieux fardeau, je referme la porte derrière moi avant de me mettre à genoux devant ma princesse.
Elle ne me lâche pas, et blottit sa tête dans mon cou. Je m'inquiète immédiatement. S'est-il passé quelque chose ? Alana s'en serait-elle prise à notre fille ?
- Eh ben ma jolie ? Tu pleures ? Tu n'es pas heureuse de voir ton vieux papa ?
Elle hoquette de rire, et j'en profite pour m'écarter un peu et saisir le visage de ma fille entre mes mains, essuyant les larmes de mes pouces.
- Que se passe- t-il ?
- Je ne... Je ne savais pas que tu allais venir... Je pensais à toi et j'ai entendu frapper à la porte... c'est ... magique.
Elle parle de façon hachée, luttant contre des sanglots que je comprends, être, des pleurs de soulagement.
- Tu me rassures ma princesse. Ta mère ne t'a pas prévenue que je passais ce matin.
Elle secoue la tête pour toute réponse, et je me garde d'en dire plus.
- C'est pourtant elle qui a déclenché l'interphone. Elle doit être ici !
- Oui, elle est dans sa chambre. Elle peut déclencher la porte de l'immeuble de sa chambre, m'apprend la petite.
- On va donc la laisser se reposer. Elle sait que je suis là. Tu me guides vers ta chambre ? On pourra discuter.
Je récupère ma canne que j'ai abandonnée sur le sol, tandis qu'elle saisit mon autre main encore posée sur sa joue. Je me relève pour la suivre.
Je suis frustré de ne pas voir la chambre de ma Lisa. Mais je juge inutile de lui demander de me la décrire, elle n'y dormira plus. Je réalise toutefois, que sa mère ne l'a sans doute aucunement préparée à son départ. Il faudra donc que je raccourcisse ma journée de sortie avec elle pour faire moi-même sa valise. Je devrai moi-même lui annoncer notre départ, ce qui n'est pas plus mal.
- Lisa ? Tu serais d'accord pour passer la journée à moi ?
Elle éclate de rire, et ce son, comme à chaque fois, me réchauffe le cœur. C'est si bon d'entendre cela.
- Évidemment ! C'est une question très bête Papa, tu le sais ? Dis-moi, dit-elle redevenant sérieuse, tu seras ici à L.A. longtemps ? Je croyais que l'audience avec le juge était bientôt ?
- On en parlera tout à l'heure. Je répondrai à toutes tes questions dans la journée. C'est promis ma puce. Je dois parler avec ta maman avant de sortir. Tu es habillée un peu chaudement ?
- Je suis en pyjama. Il est très tôt tu sais.
- Je sais... Je devais être un peu pressé de te retrouver. Tu t'habilles pendant que je discute avec Alana ? Un peu chaudement, nous allons passer la journée à l'extérieur, et je ne suis pas certain que le soleil soit au rendez-vous.
- Ça marche. Je serai prête dans 5 minutes.
Elle parle en chantonnant, et je l'entends courir partout dans la chambre.
- Accorde-moi 10 minutes s'il te plaît. Et je te rappelle que le brossage des dents est obligatoire avec moi.
- Je sais, je sais mon papa. La chambre de maman est dans le couloir, 3ème porte à droite.
Elle pense à moi. Sa petite remarque pour m'aider est naturelle. Comme Livie . Ceci nous facilitera la vie
- Merci ma belle.
Je sors, fermant doucement la porte derrière moi. Je grimace soudain : il est hors de question d'aller rejoindre Alana dans sa chambre. Je la bippe sur son téléphone, que j'entends en effet, sonner non loin. Je m'adosse au mur du couloir, attendant patiemment. Je sais qu'elle me fera payer d'une façon ou d'une autre, ma franchise de la veille.
Peu de temps après, une porte s'ouvre non loin. Avant de claquer.
- Salut commence Alana d'une voix enrouée peu agréable.
Je l'ai apparemment réveillée et elle n'apprécie pas vraiment.
- Bonjour Alana . Je suis venu un peu plus tôt que prévu. J'avais besoin de voir Lisa.
- Tu ne peux pas la voir, m'assène-t-elle en passant devant moi. Son corps me frôle, et je reconnais ce parfum écœurant haut de gamme que je ne supporte plus.
Je hausse le sourcil en secouant la tête.
- Laisse tomber. Tu ne lui as rien dit apparemment.
Je suis mon ex-femme avec précautions, vers ce qui semblait être un espace cuisine. Elle ouvre des placards. Un bruit de vaisselle et une odeur de café me confirment mon intuition. Je déteste être dans un lieu que je ne connais pas et que personne ne m'a présenté ou décrit. À tâtons, je trouve une chaise et je m'assois.
- Dire quoi ? reprend mon ex-femme après quelques minutes particulièrement agaçantes.
Mon cœur s'affole. Elle n'a pas changé d'avis ?
Je pose mes longues mains sur mes genoux et les « contemple » sans rien dire dans un premier temps. Je dois rester calme et réfléchir.
- Mon billet d'avion et celui de Lisa sont réservés pour ce soir, énonce-je posément après quelques secondes.
Elle ne répond rien. Je l'entends juste boire à quelques mètres de moi.
- Je voulais savoir quand et comment tu souhaitais lui annoncer que tu avais accepté que j'ai sa garde définitive. Soit je le fais seul ce matin, soit tu veux être présente.
Les secondes s'étirent longuement. Sa cuillère racle le fond de sa tasse lentement. Je refuse de regarder vers elle. Je ne sais pas exactement où elle est.
Le temps s'éternise et sa tasse claque sur le comptoir.
- Tu fais comme tu le souhaites. Je m'en fiche.
L'air qu'elle déplace en passant à nouveau devant moi, met mes nerfs à vif, et je l'attrape par le coude avant qu'elle ne disparaisse dans le couloir.
- Alana! C'est ta fille. Je sors avec elle me promener ce matin. Je reviendrai en fin d'après-midi pour faire ses bagages. Tu seras là ?
- Pour quoi faire ? réplique-t-elle d'un ton agacé.
- Lui dire au revoir ? suggérai-je ironiquement.
- Si tu y tiens. Mais... elle soupire, énervée. J'ai un rendez-vous à 16 heures dans une vente privée de tenues idéales pour l'Europe. Soyez là avant 15 heures.
- Bien.
- Lisa a les clés. Vous fermerez derrière vous en sortant. Je retourne me reposer.
Dégageant son bras de mon emprise, elle s'éloigne. Et mon corps se détendit enfin. Je me frotte les tempes pour faire disparaître le mal de tête lancinant qui a pris place insidieusement, comme à chaque fois que je dois discuter avec Alana. J'ai l'impression d'être face à une personne imprévisible et incontrôlable. Je réalise à quel point j'ai craint qu'elle ne change d'avis et je comprends enfin que nous ne risquons rien. Son tour du monde la captive plus que sa fille, et je ne sais pas si je dois m'en réjouir.
Quelques minutes plus tard, Lisa me saisit la main et m'embrasse la joue.
- Je suis prête Papa ! On fait quoi ?
ooOoo
J'ai réussi à garder notre destination secrète un certain temps mais, après 45 minutes de route pendant lesquelles Lisa a bavardé à bâtons rompus, m'expliquant sa jeune vie de collégienne, elle reconnait ou devine, je ne sais, quel est l'endroit où je souhaite l'emmener, et commence à s'agiter sur son siège.
- Waouh ! C'est pas vrai ? Tu te souviens de ça ? Ça fait si longtemps mon papa adoré !
Elle sautille toute excitée sur son siège.
- Dimitri ? Il me semble que l'on approche.
Le chauffeur doit entendre le raffut de ma fille, le sourire dans sa voix me le confirme.
- Oui Andrew. Le parking n'est pas loin. Mademoiselle semble très impatiente.
- Oui Monsieur ! Ça fait deux ans, je crois que j'en ai parlé à Papa. Maman n'a jamais voulu m'amener ici. M'en fiche d'ailleurs ! Avec Papa c'est mieux. Vous savez, il connaît plein de choses sur les lettres de Hollywood mon Papa. Il m'a raconté que tout a été détruit par le temps et que...
Elle continue à babiller et à tapoter mon genou en cadence et mon sourire ne disparaît plus.
Dès que la voiture s'arrête, j'en sors rapidement et Lisa me suit immédiatement, glissant sa petite main dans la mienne avec confiance. Je respire l'air pur de la colline où nous nous trouvons. Pas de voiture. Pas de bruit. Pas de foule. La colline et Hollywood Sign nous appartiennent pour quelques heures.
- C'est... beau ! souffle Lisa.
Démétri s'adosse à côté de moi contre la voiture.
- Les lettres sont juste devant nous. Un peu plus haut sur la colline. Il y a personne ce matin. C'est calme. Vous voulez que je vous accompagne ? demande-t-il à voix assez basse.
- C'est sécurisé, comme vous l'avez vu sur les photos ? demandai-je.
- Oui. Il n'y a aucun risque pour la petite. Ni pour vous, ajoute-il après une hésitation.
Je grimace un peu mais sa franchise me plait;
- Bon, alors nous y allons seuls. Vous pouvez rester à la voiture ou monter faire un tour de votre côté. Il paraît que la vue vaut le détour, souris-je.
- Je serai là-haut si vous avez besoin, Andrew.
- Merci.
Je me tourne vers l'intérieur de la voiture et récupère un sac à dos que je place sur mes épaules. Puis, armé de ma canne, je afis un clin d'œil à Lisa.
- Prête Princesse ?
- Oh oui P'pa !
J'avais la veille, dans l'avion, choisi et préparé soigneusement le trajet, mais concrètement, faire de la randonnée sur un sentier pédestre inconnu, même avec une petite fille voyante pleine de bonne volonté, ce n'est pas aussi simple, comme je m'en rends rapidement compte. À Central Park, j'ai mes repères, une image mentale des lieux que je connais depuis des années, ici, c'est l'inconnu. Je dois me contenter de la description sommaire de Dimitri le matin même. Mais j'y arriverai. Comme j'arriverai à aider, à guider ma Lisa tout au long de sa vie. Il le faut. Avec son aide si nécessaire.
Le choix de ce lieu est symbolique. Nous en avions parlé pour la dernière fois, le jour de l'accident, sur la plage. Elle aime que les grandes lettres se voient de si loin et permettent de reconnaître la capitale historique du Cinéma partout dans le monde. Et moi, j'aime lui faire plaisir. Une première halte.
- Je compte sur toi Lisa pour me signaler le moindre problème, ou si la rambarde est abîmée. Nous formons une équipe.
- Bien sûr. C'est si beau. Si grand.
Elle n'est pas essoufflée, bien que je mène sûrement un rythme trop rapide pour elle.
Ma princesse prend son rôle très au sérieux, et grâce à elle, nous parvenons assez vite au bout du sentier, au pied des lettres. Je ne les vois pas évidemment mais, passant devant elles, je les ressens. Est-ce l'ombre qu'elles projettent ? Ou une aura surnaturelle due à mon imagination hyper-développée ?
Je m'assois sur un muret et fait défiler mes pauvres connaissances cinématographique, pour me souvenir des scènes tournées à proximité de Hollywood Sign, ou d'une copie sur un plateau. Il avait tout subi le pauvre, séisme, incendie, et je souris au souvenir de la tête de ce pauvre Justin Timberlake en proie au vertige assis tout là-haut avec sa copine. Un bon souvenir, ce film. J'avais ri avec Drake , qui disait que c'était un film de « filles ». Je ne regarderai pas cela avec la mienne en tout cas. Avec Livie ... cela pourrait nous donner des idées.
- Papa ? Tu es avec moi ?
Euh, oui... de retour à la réalité. Un père de famille n'a pas le droit de rêvasser.
Lisa me décrit les lettres que j'imagine sans problème, et la superbe vue sur la ville de L.A. au loin. Puis nous discutons de choses et d'autres. Je repousse l'instant où je dois lui annoncer notre départ. De quoi ai-je peur ? Elle veux venir vivre chez moi. Et je suis capable de m'occuper d'elle. Je viens encore de me le prouver !
- Papa ! J'ai faim.
- Il est quelle heure ?
- Je sais pas, j'ai faim c'est tout.
Elle est logique. Nous avons grignoté dans la voiture quelques beignets et une boisson lactée tout en venant ici, car elle n'a pas voulu déjeuner chez Alana, ce qui me convenait.
- Mince alors, je vais faire comment si tu as faim ? Je te porte pour descendre ou tu pourras marcher seule ? plaisanté-je.
- Je suppose que le sac que tu as sur le dos depuis une heure, contient un truc de bon ? En tout cas tu as intérêt ! Sinon t'es plus mon papa préféré de l'année !
Elle rit aux éclats en se moquant de moi. La coquine, elle me connaît. J'avais appris très vite qu'on ne sortait pas en promenade avec des enfants sans vivres.
J'ouvre le sac et sors triomphalement les sandwichs au poulet sans salade ni cornichons, que j'avais commandés au restaurant de l'hôtel. Ils ne sont sûrement pas aussi bons que ceux de Livie, mais nous ferons avec. L'air printanier et la sensation de liberté nous a ouvert l'appétit.
On s'assoit sur le sol herbeux, et je continue de sortir de mon sac, boissons et fruits.
- Dimitri n'est pas loin, tout seul. Tu veux bien qu'il vienne avec nous ?
Le petit cœur généreux de ma Lisa me plait tant !
- Bien sûr, ma puce. Va le chercher et propose-lui. Je vous attends ici.
J'ai prévu large question quantité, et je suis heureux qu'il nous tienne compagnie. J'ai toute la vie pour profiter de ma Lisa maintenant.
À trois, le déjeuner, plus ou moins improvisé, est sympathique et animé. Dimitri nous apprend qu'il est marié et a un fils d'une dizaine d'années. Il sait y faire avec les gosses. Il apprivoise ma fille rapidement en sortant de la poche de sa veste, une barre de Kinder country comme elle me l'avoue rapidement.
Puis il s'éloigne en nous disant qu'il nous attend à la voiture.
Je suis seul avec Lisa qui se blottit contre moi.
Le silence est à peine troublé par le cri des oiseaux et le passage de quelques avions ronflant dans le lointain.
- Alors Papa ? Tu restes à L.A. longtemps ? Qu'est-ce qui se passe avec ta demande pour me garder ? On va pas voir le juge lundi ?
- Que de questions ma douce.
Je caresse ses cheveux qui repoussent doucement, ils lui arrivent à l'épaule maintenant. J'aime cela.
- Alors non, je ne reste pas longtemps.
Elle se raidit et je poursuis très vite.
- Et nous n'irons pas chez le juge. Ni toi, ni moi. Ce n'est pas la peine. Ta mère et moi avons trouvé un accord. Tu repars à New York avec moi dès ce soir. Pour toujours. Si tu es d'accord.
Elle ne répond pas.
- Si je veux ? dit-elle d'une petite voix étranglée.
- Euh oui... je ne vais pas te forcer à repartir mais j'ai cru comprendre que... enfin tu ne...
Je bégaye comme un gosse à son premier rendez-vous. J'ai eu peur de sa réaction en comprenant que sa mère l'abandonne, mais je n'ai pas pensé avant cet instant, qu'elle pourrait avoir changé d'avis.
- Papa ? Parfois tu es idiot. Je ne veux pas rester avec Maman, et je veux plus que tout partir vivre avec toi ! Et Livie !
Elle est si sûre d'elle que je la serre un peu plus contre moi.
- Tu es certain Papa, c'est pas une blague ? fait-elle, doutant elle aussi en digne fille de son père.
- Je fais des blagues sur les sandwichs, pas sur un sujet pareil. Ta mère a signé les papiers hier soir. Sans même passer devant le juge. Mais c'est officiel et définitif. C'est ton oncle Drake qui a préparé le dossier.
- Elle a signé hier des papiers pour que je vive avec toi ?
Elle répéte mes propres mots, comme si elle cherche à en comprendre le sens. Je sais que je dois en dire un peu plus que ce que j'ai prévu.
- Oui. Elle m'a proposé une sorte... d'accord. J'obtiens ta garde définitive, et elle hum... pourra se consacrer à ses hobbys.
Je ne me vois pas lui présenter que Alana a saisi cette occasion de se « libérer » des contraintes d'être une mère.
- Maman a demandé quoi en échange de ma garde ?
Sa voix me fait froid dans le dos. Elle n'est pas dupe à huit ans des défauts de sa mère.
- Disons, qu'elle a besoin d'une aide financière ponctuelle. Elle a déjà l'assurance que je m'occuperai correctement de toi. Ça aurait pu être suffisant.
- Hummpp grogne Lisa, et je la sens hausser les épaules.
- Bon, donc tu es contente de partir. Tes camarades de classe ne te manqueront pas ?
- Non ! On part quand ?
- Je veux partir ce soir. Nous devons rentrer chez ta mère, afin que tu lui dises au revoir et que nous fassions ta valise.
- Bon, on y va ! Il n'y a pas grand-chose que je veux prendre, à part tous les livres et les DVD, et puis ma collection de galets, et il y a aussi le manteau rouge que Livie ...
Elle papote en me tenant la main sur le trajet du retour, me faisant la liste des « objets » à emmener.
Je l'arrête rapidement.
- Lisa... On va faire une valise et deux ou trois cartons. La valise nous accompagne dans l'avion et les cartons, Dimitri a accepté de s'occuper de nous les faire parvenir rapidement. Dans l'avion, nous sommes limités par le poids.
Nous devons arriver près de la voiture car elle me lâche la main, ce qui provoque un léger arrêt de mon cœur, avant que je ne réalise qu'il n'y avait aucune voiture folle à proximité.
- Dimitri ! Papa m'emmène chez nous ! À New York ! Vous le saviez et vous ne m'avez rien dit ! C'est pas gentil !
Elle plaisante et son entrain me récompense de mes efforts.
Mais on ne m'y reprendra plus à refaire des « randonnées » seul avec elle, en terrain inconnu avant longtemps. C'est épuisant de rester concentré en continu, à l'affût du moindre danger invisible, plutôt discuter avec Justin ... Quoique...
- Votre père m'avait fait jurer le secret jeune fille, et je suis un homme de parole.
La voix grave de Dimitri me fait sourire.
- Allez Dimitri... au lieu de bavarder, on y va. Alana a un rendez-vous, je ne veux pas partir sans qu'on la voit.
Parfois, je dis des phrases bizarres, mais il est hors de question de quitter L.A. sans que ma fille ne dise adieu à sa mère. Dieu seul savait quand elle la reverrait.
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