chapitre 32 Livie. Perdus
Hello mon cher journal...
C'est mon dernier matin ici. Je regarde dehors il fait beau. Je voudrais... tellement de choses. Je repense à mon vœu de cette nuit.
Si je dois partir demain, je sais que de toute façon Papa veut que je revienne. Vite. Il me l'a dit et je sais que lui il ne ment pas. Je sais qu'il trouvera une solution. Ça sert à rien d'être triste. En attendant je dois trouver un prétexte pour sortir aujourd'hui seule avec Livie . Si elle est d'accord pour m'aider.
À ce soir, je te dirai si j'ai réussi ou pas.
En attendant, je vais retrouver Papa et Livie à la cuisine, ça sent bon le gâteau au chocolat.
ooOoo
Samedi
Je me réveille en sursaut avec un mauvais pressentiment. Les murs de ma chambre me paraissent soudain étrangers. Une seule nuit dans celle d'Andrew a perturbé mes repères. M'asseyant sur mon lit, je tente à l'aide de la main de démêler ma chevelure toujours aussi horrible au réveil, je songe à l'humeur triste et pensive d'Andrew la veille au soir. Il a tellement de choses à assimiler en même temps. Il reste tellement secret encore. S'il a abattu toutes mes barrières de protection en si peu de temps, je devine qu'il reste en lui tant de souffrances encore cachées.
Peut-être n'arriverai-je jamais à l'aider ? Soudain découragée, je me dirige vers la salle de bains et me heurte à un solide torse qui en sort. Les mains d'Andrew me rattrapent et je hume discrètement son parfum, mélange de savon, d'après-rasage et de... lui. Malgré moi, je saisis le haut de ses bras, comme pour me rattraper.
- Excuse-moi Livie !
- Désolée !
Nous avons parlé en même temps et cela nous fait rire. Ses mains glissent sur ma taille me faisant frissonner tout en déclenchant en moi une chaleur nouvelle. Sa proximité me trouble chaque jour de plus en plus. Je m'écarte très légèrement ne me faisant pas confiance. Les doigts disparaissent aussitôt de ma taille et je me sens absurdement seule. Il est est attentif, trop peut-être au moindre de mes mouvements et mon recul, même imperceptible ne lui a pas échappé.
- Tu as bien dormi Andrew ?
- Ça peut aller. Je m'excuse pour hier soir, je n'étais pas de très agréable compagnie.
- Ta compagnie m'est toujours agréable. Chacun a des moments difficiles et les amis sont là pour aider non ? Pas uniquement pour partager les bons moments.
- Pas faux. Je vais te laisser la salle de bains. C'est moi qui prépare le petit déjeuner aujourd'hui.
Il ne veut pas parler de son mal-être de la veille et je n'ai pas le droit de le pousser plus loin.Il a besoin de garder son espace personnel même si cela me pince durement le cœur de savoir qu'il a choisi de me garder à distance.
- Comme tu veux, je n'en ai pas pour longtemps je te rejoins en bas.
Il s'écarte bien sûr pour me laisser passer et avec ma maladresse habituelle je me pousse du même côté, rencontrant à nouveau son corps. À croire que je suis aussi aveugle que lui.
Il rit et en me maintenant par l'épaule, il me contourne.
- Cette fois-ci je ne cours pas Livie, me taquine-t-il en m'esquivant adroitement.
Je referme la porte de la salle de bains derrière moi, à nouveau en proie à ce trouble délicieux provoqué par son toucher même léger.
Comment résisterai-je lorsque Lisa ne sera plus là pour restreindre mes gestes ?
D'ailleurs voudra-t-il encore de ma présence ?
Le pessimisme est de rigueur aujourd'hui semblait-il !
Je soupire et procède à une douche rapide. De retour dans ma chambre, j'enfile prestement un jean et un sweat bleu avant de le rejoindre à la cuisine.
- Lisa dort toujours ? je demande en sortant les ingrédients nécessaires pour faire des muffins au chocolat, les gourmandises préférées de Lisa.
- Je crois oui, il n'y a aucun bruit qui provient de sa chambre. Je préfère la laisser profiter de sa grasse matinée. Demain nous devons la conduire tôt à l'aéroport.
- Ça ne sera pas facile pour vous deux.
- Ouep !
Le mot, bref, sec, claque comme un regret sur lequel on ne veut pas s'appesantir. Andrew n'a apparemment pas envie d'approfondir ce sujet-là non plus.
Je retourne à ma préparation, laissant le silence s'installer entre nous. Il est songeur. Je ne sais pas comment aborder le sujet suivant.
- Livie ?
- Oui ?
Tu as quelque chose à me demander ?
Je me retourne vers lui brusquement, surprise.
- Pourquoi dis-tu cela ?
- Je ne sais pas. J'ai l'impression de t'entendre réfléchir. Tu as battu la pâte au rythme de tes pensées.
Je contemple le bol de pâte devant moi et le repose avant de changer d'avis. Elle est plus que mélangée cette pâte. Alors je la verse dans les moules et l'enfourne sans rien ajouter me laissant le temps de réfléchir à la façon de lui annoncer.
- Tu as sûrement raison. Mais je ne sais pas vraiment comment tu vas réagir.
- Dis-le et on verra, dit-il avec un léger sourire en coin.
- J'ai appelé Mike Parton hier après-midi.
- Parton ?
- Mon ancien patron. Il est d'accord pour que je reprenne mon poste malgré ma démission. Je commence le travail lundi, dans la clinique qui est à 200 mètres d'ici.
Je le fixe cherchant à décrypter sa réaction. Ce type , à ce moment précis, est totalement impassible.
- Je comprends.
- Tu comprends quoi ? je demande un peu anxieuse.
- Que tu n'aimes pas rester inactive et qu'avec Lisa à L.A. tu as peur de t'ennuyer.
- Tu dis n'importe quoi. Simplement je devais m'occuper de Lisa et... oui d'accord je ne veux pas rester inutile à ne rien faire.
- Bien, fait-il en me tournant le dos.
Quelque chose ne va pas. Je savais qu'il n'aimerait pas cela. Mais qu'imaginait-il ? Que j'allais rester assise sur son canapé à vivre à ses crochets ?
- Si tu veux que je parte dis-le ? finis-je par dire, le cœur battant très fort, terriblement angoissée par sa réponse.
Il se retourne brusquement vers moi.
- C'est ce que tu envisages aussi ? Travailler d'abord et partir d'ici ? Me laisser ? Et quand Lisa reviendra, elle ne trouvera plus personne ? jette-t-il précipitamment.
Il semble amer, en colère même. Je fais un pas vers lui et pose ma main sur son épaule. Peut-être que la même peur que moi le tourmente.
- Andrew, je ne veux pas partir ! Toi et Lisa avaient pris une grande place dans ma vie mais, je ne peux pas rester à ne rien faire. Je travaillerais à mi-temps. Tu sais, je n'ai pas renoncé à reprendre mes études de kiné... mais qui te ferait tes cookies aux amandes si je partais ?
J'essaie de rendre la conversation un peu plus légère, dissimulant mon aveu par une sorte de plaisanterie. Il soupire et enfin, je découvre qu'il est soulagé de ma réponse.
- C'est vrai que sans tes cookies aux amandes, je ne survivrai pas une journée. Livie ... Comment as-tu fait pour devenir si indispensable en si peu de temps ? souffle-t-il contre mon oreille.
Je découvre aussi que nous nous sommes rapprochés et que son corps frôle le mien. Qui a bougé ? je n'en sais rien. Le contact troublant de son visage effleurant ma joue, le frôlement de son buste contre ma poitrine qui se dresse instantanément sous mon sweat, provoque immédiatement une chaleur insidieuse dans mon ventre et mon visage s'échauffe. Je me sens rougir comme une midinette. Mais cet instant doit rester un moment de franchise.
- Aucune idée. Je ressens le même besoin de rester ici avec toi et je crois qu'il faudra qu'on fasse avec.
- Ça m'effraie tu sais...
- Bonjour Papa !
Comme une tornade, Lisa entre dans la pièce et saute dans les bras de son père, m'écartant par ce geste. Andrew la réceptionne avec son 6ème sens et elle attrape mon cou, me tirant vers elle, tout en se blottissant dans les bras de son père. Un gros câlin à trois. C'est inattendu et mon cœur se gonfle d'émotion. Je l'aime déjà tant cette gamine, et qu'elle partage ce moment intime avec son papa avec moi, me fait comprendre qu'en plus de m'accepter, elle m'apprécie aussi. Demain sera un jour difficile.
- Salut ma belle, un jour tu vas nous faire tomber à te jeter ainsi sans prévenir sur nous, la gronde gentiment Andrew.
- Désolée mon papa, j'adore faire ça ! Tu es le papa le plus doué du monde pour rattraper les filles de presque neuf ans, rigole-t-elle.
- Humm, grogne Andrew en embrassant son front, cherchant à cacher son émotion.
Je ne peux m'empêcher de sourire, ils sont si adorables. Il est si adorable.
- Ouais je suis d'accord avec toi Lisa, il est très doué ton père, tu es une chanceuse, rajouté-je ravie de voir le teint marmoréen d'Andrew rosir légèrement. Enfin. Il n'atteindra jamais mon "rouge tomate" mais je découvre que certains compliments l'embarasse.
- Si tu veux je te le prête mon Papa. Juste un peu. Livie, tu veux un papa comme le mien ?
Je m'étouffe de rire alors qu'à son tour, Andrew se moque ouvertement de moi. La proposition de Lisa ne correspond pas vraiment à notre relation, aussi difficile à définir que celle-ci soit.
- Merci... j'ai déjà un papa.
- Il est où ?
- Loin dans un autre état.
- À L.A. comme Alana ? me demande Lisa, penchant la tête de côté, curieuse.
- Non. Dans une petite ville du côté de Columbus. C'est pas aussi loin.
Mais le résultat est le même.
- Tu le vois souvent ?
- Non, très rarement. Tout le monde n'a pas la chance d'avoir un père comme le tien.
La sonnerie du four me sauve de l'interrogatoire de la chipie. Je n'ai pas envie de parler de mes liens de famille très... distendus depuis que j'avais fait le choix de me marier avec Peter .
Lisa se tortille pour descendre des bras d'Andrew et s'approche du four pour tenter de voir le contenu à travers la vitre fumée.
- Recule-toi ma jolie, dis-je en passant devant elle armée d'une manique.
- C'est bien tes muffins aux deux chocolats ? me demanda-t-elle en fronçant son petit nez. Mêlant envie et crainte, elle obéit, recula loin du four brûlant et dangereux en surveillant mes gestes.
- Bien sûr !
- Et oncle Drake ne va pas venir, n'est-ce pas ? Je pourrais donc en avoir beaucoup ?
Andrew rit. Ce moment familial partagé et ce son que j'entends régulièrement depuis quelques jours, me fait ressentir que je fais partie d'une « famille ». C'est curieux et très prématuré mais je jete un œil à Andrew, vérifiant s'il est aussi détendu que son rire le laisser entendre. Il s'est approché de nous, attiré sûrement par l'odeur des gâteaux lui aussi. Passant derrière moi, il me surprend en posant sa main gauche sur ma hanche. Il se penche par-dessus mon épaule, dangereusement proche, et inspire. Je sens sa joue proche plus que je ne la vois. Si proche de moi.
Je vacille un peu, me reculant insensiblement en arrière, mon dos recherchant le contact de son torse. J'ai besoin de beaucoup plus que ce léger contact qui allume de petits feux partout sous ma peau.
- Beaucoup ? Gourmande ! Je veux ma part aussi, souffle-t-il contre mes cheveux.
Mon souffle se bloque, et mon cerveau arrête de fonctionner quelques microsecondes.
- Mais avec Drake , on n'est jamais certain qu'il ne soit pas prêt à surgir, alerté par son instinct, mangeons tout... et vite.
Il parle des gâteaux. Je secoue la tête, me sentant un peu idiote. À quoi je pensais ? Nous sommes dans la cuisine avec sa fille. Andrew a décidément une influence plus que déroutante sur mes sens et mon intelligence. Reprenant une position plus correcte, je m'éclaircis la gorge afin de pouvoir parler sans me ridiculiser une fois de plus.
- Alors, passons tous à table,
J'ai réussi à articuler clairement et mon ton était neutre, presque pas tremblant.
-- Quelques heures plus tard. --
Je n'aurais pas dû accepter, mais lorsque Lisa m'a entraînée dans sa chambre, refermant la porte derrière elle, j'ai compris qu'elle voulait me demander quelque chose et qu'il me serait difficile de le lui refuser.
Voilà pourquoi je me retrouve maintenant à courir dans les rayons de la galerie commerciale au coin de notre rue derrière Lisa afin qu'elle choisisse le cadeau « idéal » pour son papa adoré.
Oui, j'ai craqué et inventé rapidement une histoire de « shopping entre filles » pour Andrew afin de sortir seule avec la petite. Il a été inquiet de nous voir partir seules toutes les deux, il a même suggéré que Justin Black nous accompagne puisque nous refusions sa présence. Lisa a roulé des yeux à cette suggestion, secouant énergiquement la tête à mon intention, ne voulant mettre personne d'autre dans la confidence. Soupirant, je me suis penchée vers l'oreille d'Andrew lui murmurant que je ne voulais pas de Justin dans mes pattes lorsque je choisirais mes sous-vêtements. Je ne sais pas quel démon m'a inspiré cette idée mais j'ai été récompensée par le trouble visible de celui qui a partagé mes chastes nuits par trois fois déjà.
Un point pour Livie .
Evidemment, après ceci il n'a plus insisté.
Nous sommes en fait très loin du rayon lingerie avec Lisa. Elle courait d'une boutique à l'autre de la galerie commerciale la plus proche de chez Andrew, hésitant entre une peluche, un gadget technologique dernier cri censé lui rendre la vie plus facile et un bracelet de cuir noir que je trouvais particulièrement séduisant. Cela ne sert évidemment à rien que je lui dise que quel que soit son choix, il adorerait, elle est aussi perfectionniste que son père et volète d'un objet à l'autre inventoriant les avantages et les inconvénients de chacun d'eux. Amusée d'abord, lassée bientôt, je m'assois sur un banc en face des deux boutiques qui offrent des objets l'intéressant, heureusement voisines, couvant la petite fille excitée du regard.
Je découvre à quel point cette gamine compte pour moi. Elle s'est glissée dans mon cœur en douce, indépendamment de ce que je ressens pour son père. Dans la galerie animée et bruyante, il me semble qu'il n'y a qu'elle, qu'elle est la plus jolie et enjouée des petites filles. En gros je ressens ce que ressent une maman totalement partiale et fière de sa progéniture. Mais réellement Lisa est belle. C'est la fille de son père et elle a quelque chose qui accroche le regard, une lumière, un petit quelque chose qui fait que beaucoup de personnes sourit en la croisant même si elle ne s'adresse pas à eux. Elle vient de rentrer à nouveau dans le magasin « Tentation » qui propose les fameux bracelets avec un air décidé. À travers la vitrine, je la regarde discuter avec la vendeuse avec animation, exposant ses arguments. Lisa est pleine de vie. Souriante. Rien à voir avec l'enfant méfiante, voire agressive qui a débarqué dans nos vies il y a 15 jours. Une toucher léger sur mon genou interrompt mes réflexions.
Je baisse la tête. Un petit garçon adorable dont les grands yeux bleus ressortent comme des joyaux dans sa frimousse au teint un peu mate, a posé sa menotte sur mon jean et s'y accroche. Il se tient debout ses jambes légèrement écartés pour stabiliser sa position et me regarde avec des larmes pleins les yeux. Il semble avoir à peine trois ans et s'il ne me parle pas, son regard exprime parfaitement sa détresse.
- Eh bien bonhomme ! Que fais tu ici tout seul ? lui dis-je doucement pour ne pas l'effrayer plus qu'il ne semble l'être déjà.
Je saisis sa petite main libre et lance rapidement un regard circulaire cherchant les parents de ce petit bonhomme en salopette de jean. Personne ne semble affolé de la disparition de l'enfant. M'agenouillant devant lui, je continue à lui parler.
- Eh bien je crois que je vais devoir chercher tes parents avec toi !
Il me regarde sans prononcer un mot et se met à sucer son pouce. Il ne semble pas décidé à me répondre mais m'a choisi pour l'aider comme en témoigne sa main maintenant crispée sur mon sweat. Je passe doucement les doigts sur ses magnifiques bouclettes blondes.
- Tu veux bien venir avec moi ?
Il remue la tête sans me lâcher du regard.
-Tu t'appelles comment mon bonhomme ?
-Arthur, chuchote-t-il en inclinant la tête sur le côté.
- Bien. Arthur, On va chercher Papa ou Maman ?
- Ze veux maman, me dit-il timidement .
- D'accord Maman... Je peux te porter ? Tu veux bien.? On va la chercher.
Sans retirer son pouce de sa bouche, il acquiesce une nouvelle fois d'un petit mouvement de la tête. Me relevant, je le soulève dans mes bras, le calant contre ma hanche et jette un œil pour vérifier que Lisa est toujours en train de discuter dans la boutique. Je ne la vois pas. Mon regard fouille l'intérieur de la petite boutique. La vendeuse est seule derrière le comptoir et pianote sur son téléphone.
Pendant une seconde je suis déchirée... Allez vers l'accueil de la galerie où doit se trouver la maman affolée de la petite tête blonde ou faire les dix pas qui me séparent de la boutique où est rentrée Lisa pour m'assurer que tout va bien ? Mon conflit est résolu lorsqu'une superbe jeune femme en larmes se précipite vers moi en appelant son fils. « Arthur !* »
L'air réjoui du garçonnet qui tend déjà les bras vers elle, me convainc de lui abandonner mon petit protégé. Elle semble tellement soulagée que j'ai l'impression d'avoir réussi un miracle en lui "rendant" son fils. Tout en serrant le petit contre son coeur, elle se présente ,Mme Richards, de passage à New York. J'ai rarement rencontré une femme aussi belle, élégante et ...simple à la fois. Je lui souris, un peu distraitement, sans quitter la boutique des yeux. Je suis nerveuse et la sensation désagréable ressentie le matin en me réveillant me crispe de nouveau le ventre.
- Je ne sais pas comment vous remercier. Je discutais dans la boutique avec mes amies Léonie et Rachel, il était assis dans la poussette et une seconde plus tard il n'était plus là. J'aurais dû l'attacher. C'est de ma faute. C'est ...
Elle soupire et sa respiration se coupe au souvenir de cet instant. Je lui serre le bras doucement et coupe court à ses explications en m'excusant : je dois retrouver ma propre fille. Elle me sourit gentiment.
Après une rapide caresse au petit fugueur, je me précipite dans la boutique « Tentation ». Regardant à droite et à gauche je ne vois que la vendeuse.
Mon cœur manqua un battement avant de repartir à toute allure.
- La petite fille qui était avec vous il y a deux minutes, où est-elle ?
La jeune vendeuse me regarde l'air ahuri.
- Euh... elle est par là. Elle attend que l'on grave le bracelet qu'elle a choisi pour son papa.
- Mais elle n'est plus ici ! J'ai regardé partout dans votre magasin.
Je ne reconnais pas ma voix, tremblante et plaintive. La fille reste immobile ne comprenant pas l'angoisse qui monte en moi. Elle hausse les épaules.
- Elle doit être ressortie vous retrouver.
Peut-être. J'aurais jamais dû la laisser. Jamais.
- Si elle repasse ici. Vous lui dites de m'attendre avec vous je reviens...
Je sors en courant regardant vers le banc où il n'y a que la mère et son garçon. A genoux devant lui , calme,elle lui explique quelque chose et il l'écoute attentivement. Je tourne sur moi-même scrutant la couloir de la galerie. Personne. Lisa ne se serait pas éloignée. Elle est grande. Elle SAIT qu'il ne faut pas. Et elle me l'a promis. Je ne la vois nulle part. Maintenant c'est moi qui suis angoissée. Je rentre en courant dans le magasin de gadgets voisin. Il est petit et un coup d'œil rapide m'apprend que Lisa n'est pas là non plus.
Je ne dois pas céder à la panique.
Réfléchis Livie ! Ne panique pas.
Tu n'as pas bougé de ce banc. Elle n'a pas pu sortir du premier magasin, tu l'aurais vue !
Je frotte mes tempes douloureuses. Je dois prendre la bonne décision, et rapidement.
Lisa ne peut pas partir seule de la galerie. Elle ne se serait même pas éloignée sans moi. Elle était trop responsable.
Une idée me frôle... désagréable. Mon sang se glace, mes membres se paralysent une seconde puis je pars comme une flèche. Faisant demi-tour, je me retrouve dans la petite boutique. Ce que je craignais se justifie, il y a une autre issue. Une porte de secours obligatoire, légèrement cachée derrière un rayonnage.
- Il y avait quelqu'un d'autre avec ma fille dans le magasin ? je lui demande hystérique , en saisissant son poignet.
- Madame, calmez-vous ! Je ne sais pas moi !
- Comment ça vous ne savez pas ? Le magasin est minuscule ! Vous devez vous rappeler si ma fille était votre seule cliente à moins que vous ne soyez idiote !
Je la secoue trop engluée dans mon angoisse pour rester polie.
- Un homme. Il y avait un homme je crois. Il regardait les présentoirs vers la vitrine. Il ne s'est pas approché de la petite. Enfin je ne crois pas.
Elle a un air indécis et passif qui me met en fureur.
- Merde !
Je me rue vers la porte de secours en sortant mon portable de ma poche. Je dois appeler quelqu'un pour m'aider à la retrouver. Mais qui ?
Dehors il n'y a personne. Le magasin donne sur une ruelle assez fréquentée surtout un samedi après-midi. Je scrute les visages, voulant désespérément que mon instinct se trompe. La vibration de mon portable dans ma main stoppe ma quête inutile. Le cœur battant je regarde le nom de l'appelant et le téléphone manque de m'échapper. M'évanouir n'est pas la solution pour aider Lisa.
- Où est-elle ?
Je crie d'un ton agressif dans l'appareil. Il n'a pas le droit. Pas le droit de la toucher. Ni même de la regarder.
- Bonjour Olivia .
Calme et narquoise, la voix tant détestée fait couler une sueur froide dans mon dos.
---
Note de l'auteure :
* Arthur et sa maman, la belle Madame Richards ,sont des personnages "empruntés " (avec son autorisation) à l'oeuvre fascinante de @Feaper , Envers et contre tout, tome 2... Si par malheur vous ne connaissez pas : sans hésitation, cédez à la tentation : allez lire le tome 1. Puis le tome 2.
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