Chapitre 31 Livie : Humeurs
Lisa :
C'était une drôle de journée aujourd'hui mon cher journal...
D'abord papa, qui vient me voir tôt ce matin et qui me câline comme si j'étais encore son bébé.
Puis Livie qui frappe à ma porte dix minutes plus tard. C'est la première fois qu'elle vient le matin dans ma chambre. Bon d'accord ça ne fait pas très longtemps que je suis agréable avec elle.
Oncle Drake devait venir déjeuner avec nous alors on a préparé ensemble un super petit déjeuner, des crêpes dégoulinantes de miel et de sirop d'érable, ressorti les boites de cookies, (pas ceux de Justin !), du vrai chocolat chaud et même des mini-palmiers. Elle a bien compris que mon oncle Drake adore tout ce qui est sucré. Remarque la surprise c'est que Papa a super bien mangé lui aussi, il a dévoré nos crêpes ! Je crois qu'il adore la cuisine de Livie. Elle lui ferait même manger des grenouilles je crois, si elle voulait.
Après je suis allée dans ma chambre. Je savais qu'ils voulaient parler tranquillement tous les trois. Des trucs de grands. Mais qui me concernaient, je pense.
J'ai peur de retourner chez Alana. Avec elle tout est... compliqué. jamais on ne ferait de la pâtisserie comme avec Livie. C'est ..salissant et fatiguant. Salissant peut -être mais on a nettoyé après et la cuisine était nickel. Comme Papa l'aime. Ca Livie l'a exigé. Et puis je sais que ca fait grossir les gâteaux mais ca avec Papa je m'en fiche. Alana serait très fâchée si elle savait tout ce que j'ai mangé entre hier et aujourd'hui. Je m'en FICHE. Papa dit que je suis un poid plume qui s'envolerait si le vent souffle trop fort.
L'après-midi, Justin m'a offert un joli truc qu'il a sculpté pour moi. C'est la première fois qu'on fabrique quelque chose rien que pour moi ! Une espèce de loup en bois tout petit, tout minuscule, qu'il a accroché à un bracelet de tissu. Je lui ai sauté au cou pour le remercier. Il m'a dit que c'est comme un bracelet porte-bonheur pour quand je serais loin de lui. Il semblait triste et Livie lui a fait les gros yeux.
Il me manquera lui aussi. Comme Oncle Drake et comme Livie . Mais le pire sera de quitter Papa.
Cher journal, si je devais faire un vœu en regardant les étoiles ce soir... J'aimerais tant que Maman me laisse avec mon Papa. Ça sert à rien de garder des enfants qu'on n'aime pas !
Je croise les doigts pour que mon vœu se réalise. les étoiles sont si belles, elles doivent m'avoir écouté.
Bonne nuit mon cher journal.
Lisa.
ooOoo
Vendredi.
De vrais enfants. Drake est venu déjeuner avec Andrew, Lisa et moi. Heureusement qu'Andrew m'avait prévenu avant de partir, entre deux baisers.
Non Livie ne laisse pas ta tête partir de ce côté.
Ils viennent d'engloutir les crêpes préparées Lisa et moi et maintenant les deux frères se chamaillent. De vrais gosse. C'est de ma faute : j'ai sorti la tarte aux pommes promise à Drake pendant que Lisa sortait du placard la boîte de cookies aux amandes et la tendait à son père.
-C'est pour moi ? dit le grand avocat en jetant un regard soupçonneux à la boîte en plastique transparente conservant la tarte.
-Euh oui, tu te souviens ? Pour que tu acceptes de ralentir quand tu m'as aidé à déménagé, j'ai ..
- Oui je sais, me coupe-t il. Ce que je veux dire c'est : est-ce que c'est MA tarte.
Son insistance sur l'article possessif n'échappe à personne. Lisa glousse. Andrew referme la boite de cookies qu'il respirait en fermant les yeux. Et moi je ne comprends rien. Je secoue la tête et l'interroge des yeux. C'est Lisa qui m'explique.
-Livie si c'est SA tarte...c'est la sienne. Il ne partagera pas.
- Euh...
Je ne pensais pas en la lui donnant pendant le petit déjeuner qu'il partagerais. Il y a suffisamment e crêpes mais sa réaction reste...curieuse. Il a croisé ses avants bras musclés sur la boite comme si c'était un trésor.
-D'accord Drake pas de problème tu sais, je l'ai faite pour toi comme prévu. On n'avait pas prévu que tu partages.
-Parles pour toi, Liv'. Je voulais goûter cette tarte mais comme je connais mon égoïste de frere, je sais que je n'aurais pas le moindre morceau de ton dessert. Donc il ne goûtera pas les cookies.
Je fixe Andrew. Incrédule. Il semble sérieux et a curieusement adopté la même attitude que son frère : il couve de ses bras la boîte métallique. En fixant ce dernier du regard comme pour le défier d'y toucher.
OK.
Très
Mature.
Et c'est cet homme qui était dans mon lit ce matin.
Enfin techniquement j'étais dans son lit. Je secoue un peu plus la tête pour revenir à la réalité comme le rire cristallin de Lisa m'y invite. Les frères Follen sont fous. Mon tête pivote de l'un à l'autre toujours stupéfaite de cette mini-crise que j'ai déclenchée sans le vouloir. Bon de toute façon ils ont mangé. Et plus que nécessaire si j'en juge les assiettes vides qui jonchent la table. Le sport ça affame. Je décide de jeter dehors les deux ados immatures et la gamine qui rigole ouvertement de mon étonnement.
-Vous avez fini de dévorer ? Alors dégagez de ma cuisine. Allez jouer avec Lisa. Je range et réfléchis à la possibilité de m'enfuir avec la boîte de Justin. Ouste...
Je suis un peu agacée et cela se ressent dans ma façon de parler. Lisa rigole de plus belle et les deux hommes, peut-être un peu honteux de leurs gamineries sortent de la cuisine sans un mot. mais Andrew passe derrière moi, me frôle, me faisant frissonner en me chuchotant dans l'oreille.
-Il avait la boite sous ses coudes non ? Il faisait toujours ça quand il refusait de partager son goûter avec moi. Ca rendait maman folle, surtout quand je l'imitais pour le faire rager.
Je reste bouche bée une seconde et pouffe de rire à mon tour en comprenant que mon Andrew a des talents cachées d'acteur.
Quelques minutes plus tard, cuisine rangée, je tourne un peu dans le salon. Lisa a rejoint sa chambre et Drake est avec son frère dans le bureau mezzanine de celui-ci. je pense qu'ils peaufinent la stratégie pour la garde de Lisa. J'hésite à appeler la petite, on doit descendre voir Justin.
Livie tu peux monter s'il te plait. Drake et moi on voudrait te parler.
Ok la visite à Justin sera pour plus tard. Je les rejoins rapidement, étonnée qu'ils aient besoin de moi. En arrivant je note, sans étonnement qu'Andrew a pris place sur son fauteuil devant son bureau et que celui-ci est tourné vers la petite banquette recouverte de velours creme qui occupe l'un des coins de la mezzanine. Drake y est assis, jambes écartées, les coudes appuyés sur le genoux et regarde son frère un air de défi dans le regard. Sont-ils encore en train de se disputer à propos de ..nourriture ? Andrew soupire en me montrant l'autre fauteuil, moins imposant , sur le côté de son bureau. J'ai souvent vu Lisa s'y asseoir pour dessiner tranquillement tandis que son père travaille. Je prend place en silence, une inquiétude sourde naissant au creux de mon ventre.
-Livie, merci d'être montée je ...
-Non . C'est moi qui lui parle Andrew. C'est ce que nous avons convenu.
la voix est ferme et claque, Drake a coupé la paroles à son frère. Hum, en mode avocat, Veulent-ils m'annoncer une mauvaise nouvelle par rapport à Peter ? Je remue sur ma chaise, mal à l'aise. Parler de Peter à Andrew, c'est faisable. A Drake.... je souffle et essuie mes mains moites sur mon jean. Andrew se penche alors un peu vers moi et en saisis une, la serrant légérement dans la sienne, chaude, rassurante.
-Ne t'inquietes pas souffle-t-il doucement.
- Elle a aucune raison de s'inquiéter, Andrew. Olivia, il s'agit de Lisa et de sa mère. Ou plutôt de la garde de Lisa.
Mon inquiétude prend alors un autre direction. Que se passe-t-il ? Qu'ai à voir avec ceci ? Drake veut-il qu'Andrew et moi gardions nos distances afin d'être tranquille pour demander la garde de la petite. J'ai soudain conscience que notre... notre... relation un peu particulière peut être un argument utilisable par la mère de la petite contre la demande de garde d'Andrew. Je me sens egoiste. Et si Lisa était venue dans la chambre de son père ce matin ? Que pourrait-elle raconter à sa mère ?
Une idée me parvient soudain : comment Drake sait-il pour nous deux ? Andrew lui a dit ? Je me crispe à cette idée et veut écarter la main d'Andrew de mon genou.
-Drake, parles lui et vite. Tu la fais stresser. Sinon c'est moi qui lui demandes.
Andrew est en colère et sa phrase claque dans le silence.
-Décidément vous êtes sur les nerfs tous les deux. Liv' je veux juste te demander si tu accepterais de témoigner au procès pour la garde de Lisa si nous devons en arriver là ?
Je réalise que j'étais partie sur une voie erronée et ferme les yeux de soulagement, tout en écoutant attentivement les explications de Drake.
-Ce que tu as appris sur Lisa en discutant avec elle, ce que tu en a déduit sur son comportement et les contraintes que sa mère lui imposent peut être décisif. Peut-être aurons nous besoin de toi. Je sais qu'Andrew ne souhaite pas tu sois mêlée à tout cela mais...
- mais s'il le faut je le ferais. Evidemment.
Ma voix est ferme, je n'ai aucune hésitation ou peur : cette enfant a besoin de son père, il est bon, dans tous les sens du terme, pour elle alors que sa mère est toxique pour Lisa, j'en suis convaincue au plus profond de moi. Je me tourne vers Andrew et c'est moi qui saisit ses mains cette fois.
-Tu dois mettre toutes les chances de ton côté, ne rien négliger pour qu'elle vive ici, où elle sera bien avec toi..
Où tu seras bien avec elle.
Il doit le comprendre. je poursuis alors :
-Lisa est une petite merveilleuse, elle est tres forte mais souvenez vous dans quel état de peur, de rébellion, elle est arrivée il y a quinze jours. Je ferais n'importe quoi pour que cela ne se reproduise pas.
Un petit sourire, celui que j'adore éclaire alors le visage d'Andrew. il porte ma main à ses lèvres.
-Merci.
Je rougis sous la douce caresse de ses lèvres et sous son regard brillant qui ne me quitte pas, j'ai l'impression qu'il me voit, qu'il voit au plus profond de moi. Drake, claquant dans ses mains, coupe notre échange.
-Parfait, ça c'est acquis. Autre point . Que pense tu d'envoyer Lisa en consultation chez ma voisine, la psy. ?
Je penche la tête sur le côté, en contemplant l'avocat. Il est doué. je n'y aurais peut être pas pensé. Une expertise psychologique. Je souris. les deux frères quoique très différents sont aussi intelligents l'un que l'autre. Curieusement à ce moment j'ai envie de faire la connaissance de leurs parents. Andrew n'en parle pas souvent mais l'empreinte de Sue sa mère flotte un peu partout dans l'appartement et je sais, à quelques paroles qu'il a laisser échapper qu'il respecte énormément son père.
-A lors ? Tu es toujours avec nous ?
-Euh... oui, désolée. C'est une très bonne idée. Vous avez encore besoin de moi ?
Je dois m'éloigner Mes idées sont trop...bizarres. Drake consulte du regard Andrew qui, évidemment, ne dit mot.
-Euh, non a priori, bafouille-t-il alors.
-Bon. J'ai prévu de passer à la loge avec Lisa. On doit voir Justin. Je serais en bas.
Andrew fait la grimace et Drake rigole. Je ne comprends pas trop mais hausse les épaules et ne m'attarde pas . Je serre doucement l'épaule d'Andrew en passant.
-Je vous laisse. A plus tard.
- Attends moi je vous accompagne alors, j'ai plus rien a faire ici et je sens qu'Andrew est sur le point de dépasser sa dose journalière de son frère préféré.
Je hausse un sourcil en esquissant une moue amusée. il n'y a que lui...pas d'autres frères à l'horizon, Dieu merci. Quoique je suis certaine qu'un 3eme frère Follen ferait surement le bonheur d'une femme.
- On est OK Andrew, j'appelle Meyer le privé avec qui je bosse à Los Angeles. Tu gères la psy et n'oublie pas petit frère !... footing tous les deux jours dorénavant.
Il me double en trombe dans les escaliers et appelle sa nièce, la pressant de sortir de sa chambre. Je soupire en poursuivant ma descente. Drake me fatigue. heureusement que je vis avec son frère et pas avec lui.
ooOoo
Quelques heures plus tard
La nuit est très fraîche mais je le sens à peine. Assise sur le large fauteuil sur la terrasse, blottie sous une couverture, je respire lentement essayant d'évacuer les les pensées liées à cette journée, somme toute assez calme.
Si on oublie le réveil.
Et on oublie le réveil. Il le faut. Je laisse mes pensées survoler alors les petits instants de bonheur de la journée. Je souris au souvenir du sourire ébloui de Lisa lorsque Justin lui a donné, avec un air un peu gêné, la breloque qu'il a sculpté pour elle. Il est vraiment adorable et je l'ai presque vu rougir sous sa peau halée lorsqu'elle lui a montré le plaisir que ce cadeau très personnel lui faisait. Elle n'a pas l'habitude d'être gatée et ne s'y attendait pas du tout. Il lui a expliqué que le loup était un animal tres précieux, une sorte de porte bonheur protecteur dans la tribu auquel il appartenait et qu'il voulait qu'elle sache qu'il serait toujours là, même de loin pour l'aider. Là, la petite a grimacé évidemment lui rappeler son prochain départ n'était pas l'idée la plus intelligente que Justin avait eu.
Plus tard, à la maison, Andrew a quitté son antre pour nous rejoindre et jouer au Monopoly avec nous. Il nous a accusé de tricher. Evidemment, j'ai dû laisser Lisa regarder un peu mes cartes et n'ai pas été très attentive à ses lancers de dés mais elle était si contente de "gagner".
Je viens de les laisser seuls. Séance de lecture oblige. Et j'apprécie de relâcher un peu la pression. Etre proche d'Andrew, c'est comme être toujours sous influence, alternant entre excitation et sérénité. Cependant dès qu'il n'est pas près de moi, comme maintenant, sa présence me manque. Je souris de ma propre indécision en resserrant la couverture autour de mes épaules. L'obscurité m'entoure. le brouhaha incessant de la nuit new yorkaise est un peu atténué mais me parvient toujours. Cela ne m'empêche pas d'entendre les pas d'Andrew dans le couloir.
-Andrew.
- Livie ?
Il semble surpris. Il n'est pas venu sur la terrasse pour me retrouver mais au contraire il pensait qu'il y serait seul. Un peu gênée, je me lève.
-Euh je vais rentrer et te laisser.
-Non.
Sa main attrape doucement mon coude lorsque je passe à côté de lui.
-Non Livie. reste s'il te plait. Je... je ne savais pas que tu serais là mais j'en suis heureux. Je n'osais pas aller te déranger dans ta chambre.
Mon corps se détend alors, comprenant qu'il est sincère. Il s'avance sur la terrasse, d'un pas tranquille et sur. Comme d'ordinaire. Et comme d'ordinaire, je suis éblouie par sa capacité à dépasser, à faire oublier son handicap. Il s'accoude contre la rambarde. Je remarque qu'il a passé par dessus son tee-shirt un sweat bleu marine, ou noir qui moule parfaitement son buste. Dans la pénombre je tente de déchiffrer son profil. Ce n'est pas son habitude de rester muet. De rester loin de moi. Soudain je frissonne. Que se passe t-il dans sa tête ? Que pense-il de tout cela ? De Lisa ? De son ex-femme ? De nous ? Comment arrive-t-il à gérer tout cela ? Je voudrais tellement l'aider.
Je m'approche de lui et ne résiste pas, me blottissant contre son dos, j'entoure sa taille de mes bras en chuchotant contre son omoplate.
- Comment va Lisa ?
- Hum..
Entendre vibrer son corps lorsqu'il commence à parler me trouble. Beaucoup trop et je dois écarter mes pensées parasites pour me concentrer sur sa réponse et sur le sourire que je sens poindre entre ses côtes où mes mains prennent appui.
-Nous avons bien avancé dans la lecture d'Harry Potter ce soir. Ce petit bonhomme mal-aimé par son oncle et sa tante la passionne. Et les questions fusent à chaque fois que je m'arrête. C'est vraiment pas mal pour une lecture jeunesse. Le jeune Harry ,son courage et sa candeur me plaisent. Mais ce n'était pas le sens de ta question ? N'est-ce pas Livie ?
Il saisit mes mains refroidies par l'air nocturne et les glisse sous son sweat serrées entre les siennes et là j'en suis certaines elles ne vont pas tarder à se réchauffer. Comme d'autres parties de mon coeur.
-Tu as en effet saisi Andrew, mais tu le sais, tu parles si tu en as envie.
Il rit doucement
-Ce n'est pas l'envie qui manque. Lisa va bien mais refuse de parler de son départ. Elle le sait mais elle ne veut pas l'envisager. Demain sera une journée...compliquée pour elle.
Je soupire. Compliquées pour eux deux. Et pour moi aussi. Je sais qu'elle va me manquer. En quelques jours elle a pris une place très importante pour moi. Et pas uniquement parce qu'elle est SA fille.
-Et toi ?
J'ai osé. Va t'il répondre ? Partagé ce qu'hier il ne pouvait pas dire ?
-Moi...
Il se crispe un instant, sa main gauche serrant convulsivement les miennes tandis que l'autre rejoint la rambarde.
Le silence nous entoure. J'ai perdu conscience du monde, de l'activité new yorkaise quelques dizaines de mètres plus bas. J'attends juste. Andrew. J'ai douloureusement envie qu'il se confie. Juste un peu. Qu'il relâche la pression et partage un peu de ces angoisses qui l'ont paralysé la nuit dernière. Le temps s'étire, je patiente en écoutant sa respiration qui se hâche par moment comme s'il livrait un combat contre lui même. Puis je sens les vibrations dans son torse avant même de l'entendre et curieusement cela me suffit. Même s'il ne dit rien, même s'il ne me confie rien, il aura essayé.
-C'est curieux, je me sens entre deux périodes, entre deux humeurs. C'est un de ces moments de la vie où l'on comprend que tout peut basculer suivant nos décisions.
Il marque une pause, cherchant ses mots.
-Je ne sais plus vraiment ce que je veux. Pour la première fois depuis longtemps. Et pour la première fois, je sais ce que je veux et suis prêt à me battre pour. J'ai eu une vie facile, Livie tu sais. Des parents adorables. une enfance tranquille, même avec Drake. Une fillette adorable que j'ai élevé. Un métier que j'adore et qui m'assure la tranquillité financière. Alana n'a été qu'une "petite" erreur de parcours qui m'a donnée ma plus grande joie : ma Lisa. Tout allait bien. Même l'accident...
Il marque une pause et lève la tête comme s'il contemplait le ciel, dans lequel une bande obscure d'une bleu sombre, tel un drap de velours, barre le fond étoilé.
- Il y avait ma vie avant l'accident, très nette et toute tracée, écrire et vivre avec ma fille. Puis après l'accident, survivre dans l'obscurité et meubler le vide. Maintenant... Même l'accident avec ses conséquences n'est pas "grave" à côté de ce qui m'attends si je la perds. Je ne peux pas la perdre. Même si cela implique pfff ... je ne sais pas... je ne sais plus Livie.
Il se retourne alors vers moi et je me retrouve blottie dans ses bras, la joue collé contre sa poitrine et je sens son souffle sur mes cheveux alors que ces mains serrent très fort ma taille. Ces gestes me disent une chose. Ses paroles en disent une autre et je comprend soudain le conflit qui l'habite. Le même que le mien. Je suis plutôt un obstacle à sa vie avec la petite, à son combat pour la garder. Je veux aussitôt reculer. M'éloigner. Il doit comprendre que je ne m'imposerais pas. Jamais. Mais à nouveau d'un geste rapide il me colle à lui et je retrouve sa chaleur réconfortante et n'ai plus le courage de m'éloigner.
- Liv'. Ecoute moi au lieu d'imaginer je ne sais pas quoi. D'un côté, c'est très clair. Physiquement, je n'ai jamais eu autant envie d'une femme que de toi ce matin. Mais il y a plus que cela. Tu es prête à m'accorder beaucoup plus et il est hors de question que je t'emporte dans mes galères. Je veux pouvoir t'aider, te soutenir dans ta lutte contre Peter mais en aucun cas être un poids pour toi. Je ne peux être le compagnon de qui que ce soit. Cela n'est pas possible.Même si ...
Sa voix se casse sur ses derniers mots, à peine chuchotés. La blessure que je sens dans ces paroles résonnent en écho de la mienne. Il ne peut pas être mon compagnon. Il ne peut pas être mon compagnon. Je réalise que c'est pourquoi ce que je veux. Au plus profond de moi. De ton mon être, je veux être sa compagne, celle qui l'aide, le soutient. Celle qui partage et apaise les blessures encore cachées. Il a besoin de moi. Mais pas comme je le voudrais.
Je secoue la tête. Puis mes bras l'entourent. je croise mes mains dans son dos, sous son sweat et laisse ma joue reposer contre lui. Je ne cherche plus à lutter. Je ferais ce que je dois faire. Je regarde le ciel. Le silence a fini par gagner et seules quelques étoiles, éloignées mais puissantes, ont fini par percer le ciel perpétuellement éclairé de la ville.
- Les étoiles sont très belles ce soir. C'est curieux Andrew, on a l'impression face à elles, que le temps peut passer tranquillement. Qu'elles seront toujours là, comme repère. J'aime cette sérénité. Le temps peut réparer plein de choses, si on le permet.
- Philosophe, Livie, ce soir ?
- Toujours.
Toujours philosophe, toujours là pour lui surtout. Il semble le comprendre. Son sourire frôle mon front. J'ai réussi à le faire sortir de sa bulle d'interrogations et de stress.
Je laisse glisser mes mains encore fraîches contre son dos et ses muscles se détendent sous son tee-shirt. Il soupire de bien-être.
Tout est paisible. Nous restons ainsi un long moment sans parler, nous contentant de la présence de l'autre.
- Parle-moi encore des étoiles s'il te plaît, chuchote-il beaucoup plus tard dans la nuit.
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