Chapitre 3
Quelques jours avaient passé depuis mon « accrochage » avec les voisins et je ne m'en portait que mieux. Plus de voitures devant chez nous, plus de vélo d'enfant sur le trottoir et une palissade enfin blanche. Les autres ne m'adressaient plus la parole mais au fond, c'était tous des hypocrites ; je l'avais appris de M.Baunon, qui lui était devenu presque sympathique. Il gueulait toujours autant, mais plus sur nous. Il m'avait même gratifié d'un « Bien joué, petite ! » depuis sa fenêtre en levant un pouce en l'air. Depuis ce jour, il me salue tous les matins, geste qui me rend un peu perplexe ainsi que mon blond de cousin.
« Écoute, c'est pas compliqué, lui avais-je expliqué, les gens m'adorent. »
Il avait répondu par un simple éclat de rire. Je ne sais toujours pas comment le prendre.
Je promenais avec Tête d'Anchois dans le village. À la base, on allait juste chercher des bombes de peinture au supermarché mais on avait négligé un petit détail : aujourd'hui était le premier jour de la Fête du blé. Toutes les routes sont barrées, les magasins fermées et les rues bondées.
La Fête du blé, c'est un peu l'évènement de l'année chez nous. La place centrale est complètement saturée par des petits stands colorés entre lesquels déambulaient des mascottes déguisées en épi de blé ou en baguette de pain. L'évènement réunis plusieurs bourgs du coin et pas mal de touristes y passent lorsqu'ils le peuvent.
Une petite brune s'approche de nous. Je la détaille rapidement alors qu'elle s'adresse à mon cousin, bien évidemment. Pas grande, physique sportif, cheveux mi-longs, habillée d'un tablier recouvrant un petit short et d'un débardeur simple. Visiblement elle tient un stand un peu plus loin avec sa mère, à voir la ressemblance.
« Bonjour ! Je peux vous proposer de venir goûter nos pains ? Demanda-t-elle en papillonnant des cils.
- Eh bien, je ne sais pas, on ne fait que se balader à vrai dire, » hésita Antoine.
Il semblait plutôt absorbé par ses chaussures sur ce coup là. J'allais me racler la gorge, histoire de signaler ma présence et le silence pesant, mais la fille se tourna vers moi avec un sourire faux.
« Eh bien je pense que nous avons le temps, on a rien de précis à faire, répondis-je. »
Voyant que celui qui m'accompagnait ne bougeait pas et ne semblait pas vouloir suivre cette fille, j'intervins.
« Bon, tu comptes bouger ou je te laisse là ? Dans ce cas dis le moi, je préfère demander à quelqu'un de te garder, on sait jamais » ajoutai-je avec le sourire-qui-donne-envie-de-foutre-des-claques.
Il sortit de sa torpeur et me lança un regard mi-noir mi-amusé alors que l'autre le regardait bizarrement.
Arrivés au stand, une bonne femme nous agressa pour nous enfoncer du pain dans la bouche. Bon, c'était presque ça.
« Bonjouuur ! Chantonna la femme. Vous êtes là pour goûter notre pain ? «
J'allais rétorquer « Non en fait on voulait savoir si vous aviez du parquet pour refaire notre entrée ? » mais le blond me devança.
« Il me semble que c'est la seule chose à faire dans ce festival, madame, riait-il.
- C'est vrai. Alors nous avons une baguette simple, une tradition, une céréalière aux graines de pavot et de sésame, un pavé... »
Elle ne se démonta pas et nous présenta tout un tas de pains différents devant lesquels je restais un peu dubitative. Je lançai rapidement un coup d'œil autour de moi et remarquai que beaucoup de gens étaient dans la même situation que nous : perdus devant des baguettes. À un détail près. Eux n'avaient pas de tabourets.
Nous commençâmes à grignoter la mie qui s'offrait à nous dans un silence agréable coupé par les commerçants qui hurlaient que leurs produits étaient meilleurs que ceux des autres.
Heureusement, la jeune boulangère se décida à briser le blanc :
« Alors Antoine, je savais pas que t'étais revenu après tes études !
- Mh, eh bien maintenant tu le sais, » répondit-il.
Pour ma part, j'étais perplexe. Donc la petite brune connaissais mon cher cousin... et visiblement elle en pinçait pour lui. Intéressant...
« Vous vous connaissez ? Lançai-je sous le regard noir du blond qui sentait la connerie arriver.
- Oui, on était ensemble au collège et au lycée. Mais Antoine est allé faire des études supérieures et a quitté la ville.
- Oui, ça je le sais. C'est d'ailleurs là-bas qu'on s'est rencontrés, mentis-je. Mon petit Antoine a débarqué dans ma ville et depuis on ne se quitte plus. Hein chéri ? » Demandai-je en nouant nos doigts.
Tous me regardaient avec des yeux ronds. La boulangère car elle ne captai pas un mot de notre conversation, Tête d'Anchois parce qu'il était tout le temps comme ça et la petite brune car elle venait de se voir enlever son amour de collège.
Se ressaisissant vite, tous les trois prirent la parole :
« Hum, oui, on s'est même installés dans la maison de mes parents, ajouta le blond.
- Ah, je vois... eh bien, je vous souhaite plein de bonheur alors, répondit-elle les dents serrées.
- Alors ce pain ? Questionna la bonne-femme pour sauver la discussion.
- Succulent madame, mais nous avons à faire, » terminai-je.
Nous nous levâmes et fîmes un léger signe de main en guise d'au revoir, sous le regard meurtrier de la petite brune.
Un peu plus loin, je lâchai la main de mon cousin et lui demandai en pouffant :
« C'était qui ? Elle avait l'air fan de toi.
- Une fille de ma classe de lycée, elle te l'a dit, répondit-il, blasé. C'était un peu fort ta mise en scène, d'ailleurs.
- Au moins elle te collera plus, rétorquai-je.
- En plus t'es mauvaise actrice.
- Non.
- Si.
- Gamin.
- Pouffiasse. »
Je lui donnai un coup derrière la tête qu'il allait me rendre si notre attention n'avait pas été attirée par un aboiement. Des petits jappements de chiots. Un homme d'une quarantaine d'années proposait des petits beagle au modeste prix de rien du tout. Un regard échangé et mon cousin et moi courrions vers le petit stand.
Cinq chiots sautaient dans un grand carton mais tout de suite un en particulier attira mon attention. Un œil bleu. Un œil marron. Une entaille à l'oreille.
« Bér', tu m'écoutes ? S'exclama Tête d'Anchois.
- Non. Monsieur, je peux porter celui là ? Demandai-je en pointant le petit chiot.
- Bérengère... me mit-il en garde tandis que l'homme me tendais le chien.
- Regarde, m'extasiai-je, moooh coucou toi ! Comment tu peux résister ? M'indignai-je en lui montrant le petit beagle.
- Je peux pas... Monsieur, ce serait possible de le garder ? Finit-il par demander.
- Oui, c'est une portée que je ne peut pas garder, alors oui. Vous avez de quoi vous en occuper ?
- On peut aller tout acheter en ville, » informai-je.
Après quelques recommandations, nous repartions avec un chien. Un magnifique petit mâle que nous avions fini par appeler Lee Roy, suite à de grands fous rire sur ce nom.
Arrivés à la voiture, Antoine prit le volant et nous partions en direction du magasin animalier, d'où nous sortions avec une gamelle, de la nourriture, un collier en cuir noir et une laisse en corde ainsi que quelques jouets.
Nous étions enfin rentrés à la maison. Le grand blond jouait avec la petite boule de poil dans la salle à manger quand la sonnette retentit, ce qui m'étonna étant donné que nous n'attendions personne. Je déverrouillai la porte et m'effarai en voyant débouler trois blondes dans l'entrée.
« - Mais qu'est-ce-que vous faîtes ici ? »
- Avoir un chien : Check !
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