Elle découvrit son corps de ses vêtements. L'air était si chaud qu'il embrasait son habit charnel. Gaia entra son pied dans l'eau tiède du grand bain jusqu'à y immerger tout son corps. Seul son visage dépassait. L'eau commençait à se tâcher de rouge vermeille et l'épaule de la jeune fille était plus que meurtrie mais elle ne la sentait pas, elle ne sentait plus rien. Elle plongea sa tête sous la surface. Ses cheveux mouillés effectuaient des danses, jouant avec les molécules d'eau.

Une fois que l'air lui manqua, elle respira l'air ambiant en sortant son crâne de l'eau. Elle prit un temps pour contempler l'eau rosâtre. Gaia se souvint que la vision que Markov lui avait permis de revoir sa famille, comme si elle pouvait tous les serrer dans ses bras. Elle passa une main dans ses cheveux trempés et se mit à pleurer une énième fois. La Padawan, de l'eau dans les yeux tenta d'enlever le sang de sa peau, jusqu'à vouloir l'arracher pour entrevoir sa chair. Elle prit ses genoux avec ses bras et mit son visage dans le creux de ses mollets.

La vue trouble, elle savonna chaque parcelle de son corps sans précaution, même sa brûlure qui ne la faisait plus souffrir, car elle n'avait dans son cœur que la douleur des pertes qu'elle avait accumulées.

Elle sortit de l'eau vermeille et sécha son corps humidifié. Gaia constata avec stupeur une fleur violette ainsi qu'une note sur les vêtements que Ben avait préparés. Elle la prit et l'observa longuement ; la tige de celle-ci était verte et munie de piquants et avait des fleurs triangulaires. La jeune fille prit le mot :

"Insouciante et plus forte que tout" -Ben

Elle sourit en prenant son menton dans sa main mais son sourire s'évanouit dans la même seconde.

La Padawan enfila les vêtements dépourvus de sang puis sortit de la pièce, la nuit toujours maître dans le ciel. Une faible lumière transparaissait derrière les rideaux transparents qui se balançaient au rythme du vent. On entendait au loin le lac qui tremblait.

Le calme régnait et, pourtant, un sentiment amer et froid s'était réveillé en cet endroit luxueux qui n'était pas propice à l'effroi et à la tempête. 

La fleur à la main, la jeune fille poussa la porte de sa chambre et y découvrit une mer de fleurs violettes. Sur le dessus de son lit naviguaient des pétales et des tiges par centaines. Elle eut un petit rire, à nouveau. Mais il s'évanouit aussi, comme tout. Ces fleurs, c'est tout ce dont elle avait besoin : l'amour. Sans lui, elle ne serait plus rien, un tas de cendres. La Padawan s'assit au milieu des fleurs et prit l'une d'entre elles dans la main et la porta vers son nez aquilin. 

-Ma mère m'a toujours dit que les fleurs étaient le remède à tout chagrin.

Ben se tenait dans l'embrasure de la porte, accoudé contre l'encadrement de celle-ci, les bras croisés et un petit sourire en coin. 

-Je sais Gaia, commença-t-il en s'approchant d'elle, que cela sera bien inutile. Mais au moins, j'aurais essayé de combler ton cœur brisé.

Elle regarda la fleur plus intensément. Il poursuivit en s'asseyant à côté d'elle.

-Il faut que je t'avoue quelque chose. Il sait. Luke sait.

La jeune fille dévia lentement ses yeux de la fleur pour les poser sur Ben.

-Comment...

-C'était beaucoup plus tôt dans la journée. Il était en communication avec la tour des Jedi. Plus précisément avec Lor San Tekka. Et il a parlé de mesures drastiques pour que rien ne se passe entre nous.

-Mais il nous a défendu, pas vrai ? Maître Luke est quelqu'un de loyal, non ? demanda-t-elle en écarquillant les yeux.

Il mentit.

-Oui.

Ses yeux dirent bien plus que ce que des mots auraient pu expliquer. 

-Est-ce que tu sais qui est Olive Archibald ? demanda Ben avec curiosité.

-Tu ne sais pas qui elle est ? répondit-elle avec surprise. Olive Archibald et Kyper Lennox ? Tu n'as jamais rien entendu de cette légende ?

Le garçon fit non de la tête.

-Visiblement ce n'est pas un mythe puisqu'ils en parlaient comme si cela s'était réellement passé. Qu'est-ce qu'elle raconte, cette histoire ?

-Olive Archibald était l'apprentie d'un grand maître Jedi, autrefois. Elle avait toutes les qualités pour devenir une chevalière affirmée et parfaite : elle était serviable, aimée, d'une beauté inégalable et possédait une intelligence hors du commun. Mais un jour, un homme vêtu de noir, aussi repoussant que maléfique fit son apparition dans la tour des Jedi. 

-Ce gars, c'était Kyper Lennox ?

Elle acquiesça de la tête et poursuivit son récit.

-C'était le fils d'un ancien partisan de l'Empire. Lorsqu'Olive rencontra le regard du garçon, elle voyait une étincelle de pureté dans ses yeux. En dépit de tout, elle croyait toujours que les gens avaient tous un bon cœur. Lennox était réputé comme laid, repoussant et surtout méchant, cependant, Olive voyait en lui quelque chose de si fort qu'elle tomba amoureuse de ce garçon qui était dans l'Académie pour lui accorder une seconde chance vers la lumière. Elle devint alors complètement sienne et, un beau jour, il vit la passion dont la jeune fille était éprise. Il s'aperçut de sa beauté, de sa bonté, de sa gentillesse et de sa générosité. Kyper la croisa un soir au détour d'un couloir et tous deux finirent dans les bras l'un de l'autre, malgré l'interdiction fixée par le code Jedi.

-Comment est-ce que cela s'est fini ?

-Kyper et Olive se donnaient rendez-vous tous les soirs au même endroit pour s'aimer, comme ils le pouvaient. Un jour, à la fin de sa guérison, Kyper quitta la tour des Jedi et ne put plus jamais revoir sa bien-aimée. Olive en devint malade et n'avait plus goût en rien. Son chagrin était tel, qu'elle avait fini par se donner la mort. On raconte même qu'elle avait le sourire, lorsqu'on a retrouvé son corps inerte. 

-Et qu'est-ce qu'il est advenu de Kyper ? demanda Ben.

-On ne sait rien de ce qu'il est devenu. Je crois pas que cette histoire le précise. 

-Ça ne va pas se passer comme ça, n'est-ce pas ? On va s'en sortir mieux qu'eux, pas vrai ?

-Ce n'est qu'un légende, Ben.

Ils se regardèrent de longues minutes en silence, les sourcils froncés, visages à quelques centimètres l'un de l'autre. Ben prit les lèvres de Gaia dans les siennes pendant d'éternels instants.