Prologue
Il se tenait près d'un homme replié sur lui-même en une sorte de tortue apeurée. Sa coquille, d'ordinaire robuste, semblait s'écailler à vue d'œil sous la longue lame qui le maintenait au sol. S'il faisait le moindre geste brusque, ce n'étaient pas ses maigres pattes qui allaient disparaitre, mais sa tête avec laquelle il n'avait pas réfléchi. Les aristocrates, tout autour de la salle, plongée dans un lourd silence, retenaient leur souffle tant l'angoisse et la peur leur nouaient les entrailles.
Le roi, un homme cruel qui avait l'apparence d'un loup assoiffé de sang, se penchait en avant avec une joie perverse. Ses yeux de fer fixaient le malheureux qui tremblait, le visage presque collé contre les dalles d'un blanc éclatant. La même blancheur qui faisait étinceler la dentition canine de l'empereur.
- Avez-vous autre chose à ajouter avant votre décapitation, duc Valrius, lui demandait le souverain en agitant une coupe de vin rouge avant d'y déposer ses lèvres.
- Par pitié, s'exclamait le pauvre homme d'une voix tremblante. Pardonnez mes piètres mots et ma bêtise, votre excellence!
Le monarque se faisait un instant pensif, comme s'il réfléchissait réellement à la demande de son sujet. Or le jeune homme qui maintenait la rapière contre le cou du duc savait pertinemment que sa décision était déjà finale. Il savait mieux que quiconque que son oncle, le roi, ne revenait jamais sur ses décrets. Le fratricide que le monarque avait commis était suffisant pour l'épéiste. Il connaissait parfaitement la nature profonde de cet homme.
- Callidus, l'interpellait l'empereur avec son sourire cruel. Tu sais déjà quoi faire, n'est-ce pas?
L'épéiste soulevait son arme avec une expression froide et détachée. Il donnait un coup de pied contre les côtes du duc qui gémis de douleur en essayant de se faire encore plus petit.
- Levez-vous, ordonnait le jeune homme et, voyant que l'aristocrate de haut rang ne bougeait pas, il le soulevait avec sa main gantée, comme si le duc n'était qu'un sac d'entrainement.
- Pitié, marmonnait le duc Valrius, le visage peint d'une rivière salée, en suppliant son futur bourreau. Mon prince. Sauvez-moi de cette torture.
Dans un geste rapide et indifférent, l'épéiste tranchait le bras que l'homme tendait vers lui.
Sa plainte résonnait.
Un écho sans fin.
Un hululement à fendre l'âme.
La reine, debout près du trône, eut immédiatement le réflexe de mettre sa main devant les yeux de son jeune fils, fermant les siens par la même occasion. Les autres aristocrates n'osaient pas non plus poser trop longtemps leur regard sur cette torture public. Ils avaient eux-mêmes l'impression d'être décapité à chaque coup de rapière du fils de l'ancien souverain.
Le roi souriait en voyant le corps démembré dorénavant méconnaissable.
- Bon chien, disait-il joyeusement à son neveu alors que celui-ci était tachée du sang de la victime.
- Vos désir sont des ordres, répondait Callidus en s'agenouillant face à son oncle, sa fine épée au sol devant lui et une main sur le cœur.
Lorsqu'il relevait les yeux, son regard froid et aussi sombre que le néant se posait sur une ombre qui flottait au-dessus du trône imposant. Il la fixait comme si quelque chose s'y cachait et qu'il cherchait à découvrir son origine.
Une genèse dont lui-même faisait dorénavant partie.
Le début de toute chose.
D'un cercle vicieux qui ne s'arrêterait qu'après la mort... et encore là, il se doutait qu'il ne pourrait jamais y échapper.
C'était encré en lui.
Une emprunte éternelle.
Celle des ténèbres.
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