Chapitre 11 partie 2 Amnis

Lorsque je réouvre les yeux, je suis de retour dans mon corps. Le ciel se lève lentement sur l'aube. On entend la mer claquée à un rythme lent et régulier contre le sable, ainsi que les cris des mouettes, au loin. Les ronflements de grand-oncle Midas vient enterrer, de temps à autre, les bruits de la nature.

Je remarque qu'Ester et Ison ne se trouvent pas dans la petite cabane de pêcheur. Je m'étire avant de me lever et d'aller jeter un coup d'œil à l'extérieur. Ils sont tous les deux devant un feu en train de faire griller du poisson... sans doute pêcher avec les vielles cannes qui trainent tout près d'eux.

– Bon matin, Amnis, me dit Ison alors que je les rejoins d'un pas tranquille.

– As-tu bien dormi, me questionne Ester en me tendant la brochette qu'il faisait cuir alors que je m'installe près de lui.

– Comme avant, ai-je vaguement répondu en jetant un regard incertain vers Ison, avant de prendre le bâton et de plonger mes dents dans le cadavre de l'animal aquatique.

Ester hoche la tête, comprenant sans que j'aie besoin d'évaser sur le sujet. Ison nous interroge du regard, mais nous restons en silence.

Il semblerait que ma capacité de projection ait un lien avec Callidus. Dès que je me retrouve à une certaine distance de lui, mon âme semble vouloir irrémédiablement rester à ses côtés. Je ne vois pas de raison logique à cela... à part, peut-être, que ma destinée est intimement liée à la sienne.

Et si c'était vraiment moi qui réussirai à le sauver?

– Te sens-tu d'attaque pour pratiquer la maitrise du feu, m'interroge Ison, me sortant ainsi de mes pensées.

– Je pense que oui, lui ai-je répondu en finissant ma brochette de poisson., plus motiver que jamais. Même que je suis prête à commencer dès maintenant.

– Très bien, dit Ester en hochant la tête avant de me tendre un autre poisson qui n'a cependant pas été cuit. Commence par faire griller ça.

Je plisse les yeux et le regarde en gonflant les joues, ce qui fait rire Ison. Grand-oncle Midas nous rejoint en baillant aux corneilles alors que je prends avec agacement le bâton des mains de mon frère.

– C'est supposé être ça, la première leçon, ai-je bougonné en observant l'animal mort, puis le feu qui crépite.

– Il est préférable que tu apprennes d'abord les bases de la survie, réplique Ester avec sérieux, ce qui fait d'autant plus rire Ison qui s'essuie le coin des yeux. Toi et moi avons toujours vécu dans le confort. Nous ne pouvons pas nous permettre d'être capricieux.

– C'est pourtant toi, le seul qui l'est, ai-je marmonné, même si je sais qu'il a en partie raison.

Avant la mort de père et mère, je n'avais jamais réellement connu ce qu'était la douleur. Les larmes me montent aux yeux lorsque je revois la scène dans mon esprit. Je voyais Callidus souffrir, mais je ne pouvais pas entièrement le comprendre. Mes " visions" ne m'apportaient que de la peur et une sensation d'inconfort... mais maintenant que j'ai compris que ce n'était pas du tout des rêves, je garde en mémoire ce que j'ai fait et où je suis allée.

La seule question qui reste, c'est pourquoi.

Pourquoi lui?

Est-ce parce qu'il a besoin de moi?

Besoin d'être sauvé?

– Ça ne fera rien du tout même si tu le fixes aussi intensément, dit Ester avec un petit sourire en voyant que je ne fais pas cuir la brochette.

– Je pensais à autre chose, dis-je en tendant le bâton au-dessus du feu. Celui-là sera pour vous, grand-oncle Midas. Du moins, si je le réussis.

– Si tu te concentres sur le feu, cela peut s'avérer être une leçon, non pas de survie, mais de magie, ma petite, dit Midas en caressant sa longue barbe blanche. Contrôler la chaleur pour faire cuire à goût le poisson sur ce bâton.

– Oh, ai-je fait en le regardant avec étonnement avant de reporter mon attention sur Ester. C'est ce que tu insinuais par survie?

– Vois cela comme tu veux, me répond mon frère ainé en haussant les épaules. Toutes expérience est bonne pour des gens incompétents.

– Euh... je ne crois pas que la ridiculiser est une manière d'encourager, dit Ison avec une grimace alors que je fronce les sourcils en entendant le commentaire de mon frère.

– Amnis n'a pas seulement l'air faible, continue Ester en me regardant droit dans les yeux. Elle est faible.

Le feu monte en hauteur en harmonie avec l'agacement qu'il fait naitre en moi. Le poisson prend feu et finit tout noir, en cadavre calciné.

– Voilà la confirmation que le feu est bel et bien ton élément, dit Ester en souriant, fier de m'avoir provoqué pour déclencher mon aptitude au contrôle de l'élément. Mais ce test est à moitié une réussite.

Il fait un geste vers la forme poudreuse au bout du bâton que je tiens toujours.

– Le feu est l'élément du cœur, m'explique mon frère ainé en prenant une flamme pour la modeler comme s'il s'agissait d'argile. Il peut réagir selon les émotions des gens aptes à le contrôler. Il est certes le plus dangereux, mais aussi le plus vivant de tous. Un jour, tu pourras contrôler toutes les formes de chaleur.

J'ouvre grand les yeux alors qu'Ester me fait un sourire énigmatique.

– C'est bel et bien ce qui vient de te traverser l'esprit, Amnis. Les maitres du feu peuvent contrôler autant la foudre et le magma que l'air, l'eau et la terre chaude. C'est pourquoi il est considéré comme l'élément le plus puissant et le plus redoutable... pas uniquement parce que son contrôleur peut aussi se blesser s'il n'arrive pas à bien le maitriser.

Il va pour ajouter autre chose, mais il semble se raviser à la dernière seconde.

– Tout compte fait, il faut toujours savoir se maitriser lorsqu'on utilise la magie, dis-je en me rappelant les conseils de grand-oncle Midas. Si on est quelqu'un d'aussi sentimental que moi, cela peut s'avérer catastrophique, c'est ça?

– La magie des mages par de l'intérieur, acquiesce Midas en prenant le poisson que lui tend Ison. Puis de l'extérieur. Les sorciers, dans leur cas, ne peuvent utiliser que l'énergie extérieur.

– Comment peut-on les différencier, ai-je demandé alors que Midas plante ses dents dans l'animal mort.

– En générale, les sorciers ne peuvent qu'utiliser les runes et les incantations lier à chaque dieu et cela, pendant un temps limité. Nous ne pouvons pas les différencier au premier coup d'œil à moins de pouvoir voire leur essence et leur énergie.

– Est-ce que distinguer les différents types de magie en fait partie?

Midas semble un instant surpris par ma question avant de sourire, comme s'il venait de se souvenir que je suis plus sensible à la magie que la moyenne des gens.

– C'est sans doute la base de cette capacité. Si tu t'entraines, peut-être que tu arriveras un jour au stade final.

– Je vais travailler encore plus dur dès maintenant, dis-je en me levant avec motivation avant d'aller m'installer un peu plus loin.

Je me place en position de méditation, jambes croisées, mains sur les genoux, avant de fermer les yeux. Je fais le vide dans mon esprit, puis par à la recherche de l'énergie lumineuse à l'intérieur de moi. Je ressens les battements de mon cœur qui ralentissent, l'air qui entre et qui sort de mes poumons à chacune de mes inspirations et expirations, ainsi que le vent qui caresse mon visage et fait danser mes cheveux.

Quelque chose de doux et chaud se répand dans chaque centimètre de mon corps, comme si c'était une fondue au chocolat. La lumière m'englobe et le dieu du jour, Luz, ne tarde pas à apparaitre près de moi dans la même robe ondoyante que la première fois que je l'ai vu. Elle est courte et doré sur laquelle brille un soleil brodé de fil d'argent. Ses yeux de la couleur de l'or m'observent avec douceur et sérénité alors que ses longs cheveux blonds voltigent autour de son visage sombre.

– Que veux-tu faire de ta vie, mon enfant, me demande-t-il d'une voix claire et mélodieuse. Cherches-tu à te sentir accompli? Veux-tu une puissance qui pourra soigner le cœur du mal? Ou veux-tu simplement trouver ta voie?

Je secoue la tête et réfléchis un instant à ma réponse.

– Je veux simplement avoir la force de me protéger, lui dis-je alors que je ressens la vigueur, la robustesse et la grandeur de son énergie dans chaque fibre de mon être. Et... hmm... peut-être un jour pouvoir sauver quelqu'un.

– Je vois, dit-il avec un sourire tendre. Ton cœur est donc bel et bien pur. La raison qui a poussé Noche à te choisir se cache autre part.

– Que voulez-vous dire, l'ai-je questionné avec surprise devant ses derniers mots. Vous croyiez qu'il m'avait béni car j'ai une part de mal en moi?

Le dieu de la lumière eut un sourire triste et mystérieux qui attise malgré moi ma curiosité.

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