31 ~ N°1304 Sawyer-Psy
C’est un cauchemar, je vais me réveiller. Je tourne la boite dans tous les sens, grattant le bois avec mes ongles comme une hystérique à la recherche d’un double fond même si je sais pertinemment qu’il n’y en a pas. Tout ce que j’essaie de faire c’est me donner du temps, reculer le plus possible ce moment où je ferai face à la réalité : Je n’ai plus les lettres de Michael.
Dans un acte désespéré je fouille tous les meubles de mon appartement, finissant par balancer les tiroirs tant la panique me gagne et m’empêche d’agir de façon logique. Qu’est-ce que j’en ai fait ? Je ne peux pas les avoir jetées, je m’en souviendrais. Les seules lettres que j’avais jetées étaient celles qu’il m’avait envoyées le lendemain de la soirée d’inté juste avant que je ne me mette à l’ignorer. Mais où sont-elles ? Je colle mes mains moites sur mes tempes et mords violemment ma lèvre, essayant de lutter contre la crise de larmes qui m’oppresse. Qu’avais-je fait pendant ma dépression ? Je ne me souviens pas de m’être approchée des lettres de Michael, non ça m’aurait achevé, mais peut-être étais-je trop aliénée pour me rendre compte de ce que je faisais ?
Au bout d’une trentaine de minutes à retourner mon appartement et à triturer mon esprit, je finis par me résoudre au fait que j’ai perdu ces lettres. A cette pensée je m’écroule sur mon lit, laissant exploser le flot massif de larmes qui me broyaient de l’intérieur. Où sont ces maudites lettres ? Je ne peux pas me faire à l’idée que les paroles de Michael aient disparu comme ça. Je garde dans ma main crispée la petite boite en bois dans laquelle jusqu’à aujourd’hui reposaient les nombreuses et diverses lettres de Michael. Sentir le bois creux me fait mal au cœur alors que je devrais y sentir le frottement du papier. Je m’en veux, j’aurais dû y faire plus attention, ces lettres signifiaient vraiment quelque chose pour moi. Comment ai-je pu les égarer ? C’est juste impossible.
Suis-je réellement en train de devenir folle ? A faire des choses dont je ne me souviens plus quelques semaines plus tard ? Je me met en boule dans mon lit et continue à pleurer. Qu’est-ce qu’il m’arrive ? Depuis que je suis arrivée ici j’ai totalement déraillé, je ne dors plus, je ne mange presque plus, je ne vais plus en cours et je m’éloigne de l’essentiel. Mon avenir. Tout ça à cause d’un appartement qui m’avait conduite à un échange puis à rencontrer Calum et à me rapprocher un peu plus du danger qu’était les Erudits.
Les Erudits, c’était eux le problème.
Jamais je ne les avais imaginés aussi empoisonnants. Car c’est ce qu’ils sont, un poison qui chaque jour infecte un peu plus mes veines desséchées et qui me fait sombrer dans la folie. Il y a bien trop de choses que je ne comprends pas autour de moi, trop de gens à qui je ne peux plus me fier, tout ça parce qu’un petit groupe avait décidé il y a trois ans de faire sa loi et aujourd’hui ils sont une menace, invisible et muette mais pourtant bien présente.
*
Noyée dans mes pensées je cherche toujours désespérément un souvenir des dernières semaines où je n’avais pas ouvert la boite. Il y a bien forcement eût un moment où j’avais ouvert cette boite ! Je frappe mon matelas et pousse un cri étouffé dans mon oreiller, évacuant par la même occasion tout le stress que la mort latente de Rudy m’avait provoqué.
Je suis tellement engluée dans mon mutisme que je n’entends pas ma porte s’ouvrir et bientôt des bras forts me lèvent de mon matelas, me faisant hurler de peur.
« - Heidi c’est Calum ! Heidi calme toi ! –Je tourne la tête, les yeux exhorbités pour voir Calum, la mine effrayée- Mon Dieu Heidi mais qu’est-ce qu'il te prend ?!
-C…Calum.. »
Je suis tétanisée et me détend quelques secondes, le temps qu’il me porte jusqu’à chez lui, m’allongeant sur le lit tandis qu’il demande à Amarande de me préparer un grand verre de thé avec des calmants. Je gigotte, je veux retourner chez moi, je veux chercher les lettres, je suis sûre qu’elles sont quelque part !
« - J…Je n’ai pas vérouillé ma porte ! –Crié-je-
- Heidi ça ne craint rien ici, personne ne va entrer chez toi. »
Je me débats avant de me geler sur place. J’avais l’impression d’avoir déjà vécu cette scène, cette discussion au sujet de ma porte que je n’avais pas fermé à clé.
Oh mon Dieu.
Je suis prise de vertiges et de nausées avant même d’avoir pu avaler quoi que ce soit. A aucun moment je n’ai touché à ma boite de correspondances, si je n’ai aucun souvenirs c’est parce que ce n’est pas moi qui ai enlevé les lettres. Quelqu’un s’est introduit chez moi pour les prendre le jour où j'étais chez Calum et que j'ai laissé ma porte ouverte quelques temps.
Le basané me maintient fermement contre son matelas pour m’empêcher de gesticuler en tous sens, mais maintenant que je connais la vérité je ne vais pas rester ici à comater. Je le regarde qui s’approche de moi. Est-ce que c’est lui ?
« - RENDS LES MOI CALUM ! –Hurlé-je contre son visage effaré-
-Q..Quoi ?!
-MES LETTRES ! »
Il joue parfaitement la comédie, je pourrais presque croire à son visage surpris, mais ça ne prend pas, il savait où j’avais mis mes lettres, jusque-là il pensait que c’était les lettres d’Ashton alors par haine envers son ancien meilleur ami il a très bien pu me voler mes lettres. Mais ce sont celles de Michael. Je veux qu’il me les rende.
J’ai beau me débattre le basané réussi à me faire avaler son comprimé si bien que peu de temps après je me sens terriblement lourde. Ma tête me pèse et je n’ai même plus la force nécessaire pour me mouvoir, sentant tout mon corps m’abandonner alors que mon cerveau reste aussi actif qu’une pile électrique. Mais pas pour longtemps. Ma bouche devient pâteuse et je vois trouble, n’apercevant plus qu’une tache brune à la place du visage de Calum avant de m’effondrer contre son matelas, inconsciente.
*
« Oui ici Mr Hood, j’appelle pour une visite, Mademoiselle Sawyer. D’ici une heure. Merci. »
J’ai l’impression qu’on m’a frappé la tête à coup de battes de baseball tant mon crane est douloureux. Je n’ai plus aucune notion du temps ni du lieu. Je pense être encore sur le matelas de Calum mais ma tête tourne tellement que finalement je ne sais plus si je suis debout ou allongée. La seule certitude c’est que je vais vomir. Je me redresse, ouvrant les yeux ou du moins j’essaye et aperçois enfin la pièce dans laquelle je me trouve. C’est la chambre de Calum. Je n’ai pas bougé.
« - Heidi ?! –Calum accourt vers moi et m’aide à me lever, passant son bras fort autour de mon ventre cotonneux-
-V…Vomir –Arrivé-je à balbutier tandis qu’il m’amène jusqu’à sa salle de bain, me mettant la tête au-dessus de sa baignoire, soulevant mes cheveux alors que je rends honteusement le peu de nourriture que j’ai ingurgité ces derniers jours.
-Il va vraiment falloir que tu consultes un médecin Heidi –Soupire Calum en massant mon crane douloureux-
-M…Me touche pas ! »
Ma voix est entrecoupée par des hoquets qui me brulent la gorge, faisant affluer les larmes aux bords de mes yeux qui vrillent. Je ne veux pas qu’il me touche. C’est lui qui a volé mes lettres ça n’en fait aucun doute. Mais pourquoi au juste ?
*
« - Mange un petit bout –Me dit-il la mine désolée-
-Non, laisse-moi.
-Heidi ne fais pas le bébé c’est ridicule.
-C’est toi qui me dit ça ? –Dis-je sur un ton de reproche-
-Pardon ?
-En attendant qui est assez stupide pour détester une personne et essayer de le faire sortir de ma vie car il en est jaloux ?
-Heidi je ne te suis pas là –Dit-il en fronçant les sourcils-
-Laisse tomber ! Et puis qu’est-ce que tu m’as fait ? –Dis-je alors que ma tête tourne toujours- Tu m’as droguée ?
-Moi, te droguer ? Es-tu folle ?!
-Je crois que ouais –Dis-je d’une voix pâteuse sous le regard inquiet du basané-
-Heidi je ne sais pas ce qu’il t’arrive mais vraiment ton état de santé ne s’arrange pas –Il pose sa main sur mon front- j’ai vu l’état de ton appartement quand je suis venu te chercher. Qu’est-ce qu’il t’a pris ?
-Je cherchais quelque chose –Dis-je les dents serrées-
-Au point de tout retourner ?
-Tu sais parfaitement ce que je cherchais !
-Non Heidi je…
-Mes lettres !
-Attends, mais quelles lettres ?! –Grogne-t-il-
-Celles que j’échangeais avec mon voisin ! Ces lettres que tu as prisent pour celles d’Ashton et que tu m’as volées car tu le jugeais trop dangereux pour moi ! –Il ouvre grand ses yeux-
-Tu es complètement malade Heidi, je ne t’ai rien volé ! Et je m’en fiche des lettres que tu écris à Ashton.
-Menteur ! Tu es jaloux d’Ashton ! Voilà pourquoi quand j’ai laissé mon appartement ouvert tu t’es introduit dedans et….
-Et tu m’expliques comment j’aurais pu faire sans que tu t’en rendes compte ? j’ai passé tout mon temps à tes côtés sauf quand j’étais sous la douche et désolé de te décevoir mais je n’ai pas le pouvoir de me dédoubler.
-Ca ne peut être que toi !
-Tu me fais énormément de peine Heidi, pourquoi n’arrives-tu pas à me faire confiance ? –Dit-il blessé par mes propos-
-Car tu es un Erudit bordel !
-Et alors ? Tu sais que je vaux mieux qu’eux !
-Ca c’est ce que TOI tu dis ! –Je commence à prendre ma tête entre mes mains- JE NE SAIS PLUS QUI CROIRE, MERDE ! »
Je me remets à pleurer mais cette fois-ci Calum reste à l’écart et me fixe avec attention, la mine désemparée avant de lâcher dans un souffle ‘C’est pire que ce que je pensais. Tu vas venir avec moi Heidi.’ Je redresse la tête surprise et le vois qui enfile un blouson, me tendant une main qui me fait me reculer.
« - Il faut que tu vois quelque chose, c’est important.
-Laisse-moi tranquille je t'ai dit !
-Non, il faut que tu saches la vérité. »
Je tourne vivement la tête, ouvrant mes yeux. De quoi parle-t-il ? Quelle vérité ?
Finalement je passe chez moi pour prendre un manteau et une écharpe, ignorant le désordre digne d’une crise d’hystérie et ferme mon appartement, vérifiant plusieurs fois que celui-ci est bien fermé sous le regard désespéré du basané.
Oui je suis en train de devenir complètement parano.
*
Le trajet se fait en silence. Je n’ai suivi Calum que pour cette histoire de vérité. Je n’ai aucune idée de l’endroit où il m’amène. Peut-être dans un endroit reculé où il pourra me violer et ensuite me tuer à la demande des Erudits. Je le regarde du coin de l’œil qui fixe gravement la route et me colle un peu plus contre la portière. Je ne l’imagine pas un instant me faire du mal mais dans ma tête toutes les hypothèses sont envisageables.
Quelques instants plus tard nous arrivons devant un grand bâtiment blanc.
« - On est où ? –Demandé-je avec des soupçons-
- Tu verras.
-Dis ou bien je ne sors pas de cette voiture !
- On est à l’hôpital.
- Quoi ? Pourquoi ? –Dis-je sur la défensive- Si tu me prends pour une tarée qui a besoin d’être soignée je…
- Eh du calme ! Ce n’est pas pour toi qu’on est ici mais si tu agis de la sorte les médecins vont finir par croire que tu es bonne pour te faire interner alors tais-toi et suis-moi. »
Je grogne et fini par sortir, marchant sur les talons de Calum. Au-dessus de nous brille l’enseigne ‘Hôpital Psychiatrique’ ce qui me fait douter encore plus de la franchise du basané. Je suis sûre qu’on est là pour moi. Je m’arrête un instant mais il vient doucement enrouler sa main chaude autour de la mienne.
« - Je veux te montrer quelque chose Heidi.
-J…Je –Je commence à trembler-
-Je t’assure que ce n’est pas pour toi que nous sommes là –Il me regarde droit dans les yeux- par contre je veux que tu me promettes quelque chose.
-Q…Quoi ?
-Ne dit à personne ce que tu vas voir. J’insiste sur le personne. Pas même aux jumeaux. Personne ne doit savoir que tu es venu ici.
-Pourquoi ? »
Il ne répond pas mais me lance un regard lourd de sens. Apparemment cette vérité a un prix et je finis par hocher la tête, entrant dans le bâtiment aux murs aussi immaculés que mes cheveux. Ce qui d’ailleurs me vaut des regards en coin de la part des médecins.
Est-ce que ma folie se lit sur mon visage ? Ou dans ma couleur de cheveux peut-être.
« - Bonjour je suis Mr Hood –Se présente Calum à la femme de la réception, ne lâchant pas ma main-
- Oh très bien, vous êtes attendu au troisième étage, chambre 1304. »
Calum la remercie et nous prenons l’ascenseur dans lequel flotte une désagréable odeur de produits désinfectants. J’ai horreur de ce genre d’endroit, surtout depuis la mort de mon petit frère. Pour moi l’hôpital était synonyme de mort au point qu’à mon humble avis, les murs seraient mieux en noir qu’en blanc. Une fois devant la porte Calum s’arrête et se tourne de nouveau face à moi.
« - Heidi, promet moi que rien de ce que tu vas voir ou entendre ne sortira d’ici.
-Mais Calum je…
-Heidi, pitié. Pour une fois je te demande de m’écouter.
-D’accord –Dis-je en soupirant- Mais elle a intérêt à en valoir la peine ta vérité, car en attendant j’en ai beaucoup d’autre à élucider. »
A commencer par qui est le voleur de lettres qui s’est introduit chez moi. Sûrement quelqu’un qui avait le code du batiment 1, donc le choix était réduit. Je n’ai pas le temps de réfléchir à une hypothèse que Calum m’a déjà entrainé à l’intérieur d’une chambre, toute aussi blanche que les murs à l’extérieur. Au milieu de cette pièce se trouve un grand lit entouré de rampes en métal qui me fait déglutir. Est-ce que je vais finir dans un endroit pareil si je ne me calme pas ?
« - Calum ? –Je sursaute à l’entente d’une voix féminine dans la pièce à côté du lit, sûrement les wc-
-Oui c’est moi –Il sourit et bientôt une jeune femme aux longs cheveux auburn sort de la pièce et se poste devant nous, elle n’a aucunement l’air hystérique si ce n’est ses yeux bleus cernés de poches violacées et sa blouse sur laquelle est agrafé l’étiquette ‘ Sawyer – Psy’ - Et j’ai de la compagnie.
-Oh –Elle pose ses yeux bleus sur moi et je me prends à rougir tant son regard est intense, finalement elle me fait un peu peur- Qui est-ce Calum ?
-Heidi Fauste, tu sais je t’en ai parlé la dernière fois. –Je redresse la tête et lance un regard noir à Calum-
-Tu as qu…
-Heidi –Il me fait me taire avant de montrer la jeune femme d’une signe de la main- je pense que je vais faire les présentations. Sawyer voici Heidi, et Heidi voici Sawyer –Je lui serre la main non sans me demander qui est cette personne et en quoi elle a un quelconque rapport avec la vérité de Calum-
-Alors c’est elle –Murmure la fille-
-Je peux savoir ce q.. –Calum soupire et me coupe dans mon élan-
-Heidi tu me jures de te taire ?
-Tu ne vas pas recommencer ! –Grondé-je-
-Bon très bien –Calum s’écarte de moi et s’approche de la jeune fille avant de venir happer timidement ses lèvres roses, me faisant ouvrir grand les yeux-
-Tu veux que je cache le fait que tu es en couple ? –Dis-je sans trop comprendre-
-Non Heidi –Il lève les yeux au ciel- Je voulais te présenter Daphnée. »
Ma mâchoire descend d’un étage à l’entende de ce prénom sur lequel je pouvais désormais poser un visage. Sauf que je ne m'attendais pas à la rencontrer et encore moins ici. Alors c’était elle la petite amie de Calum, puis d’Ashton, cousine de Luke et meilleure amie de Michael et anciennement de Marge ? Trop de monde autour d’une seule pauvre jeune fille. Daphnée se recroqueville un peu plus sur elle-même à la vue de mon regard choqué, essayant de se réfugier dans le cou de Calum qui, lui, semblait analyser ma réaction.
« - Tu ne dis rien ? –Dit-il-
-Que veux-tu que je te dise –Dis-je sans lâcher Daphnée des yeux- C’est… C’est vraiment elle ?
-Oui, celle qui habitait le 301, bâtiment 1.
-Je… Je ne pensais pas la trouver ici.
-C’est strictement confidentiel, seuls Luke et moi sommes au courant.
-Luke ? –Je demande alors que Daphnée hoche la tête-
-C’est mon cousin ! –Dit-elle d’une voix un peu lente pour ne pas dire attardée-
-Euh oui je…Je sais –Dis-je d’une voix maladroite-
-C’est lui qui m’a amené ici –Elle fini par me faire un large sourire, changeant totalement d’attitude-
-C’est pour ça que je t’ai demandé de ne rien dire, il ne faut pas que les autres apprennent qu’elle est ici –Soupire Calum-
-Pas même Ashton et M…
-A…Ashton –Je regrette rapidement mes dires en voyant le visage blême de Daphnée, ses yeux ouverts au point qu’ils pourraient sortir de leurs orbites- A…Ash..
-Non Daphnée ce n’est rien, il n’est pas là, Ashton n’est pas là. –Dit-il d’une voix douce et posée comme pour rassurer sa jeune amante- Il n’y a que moi et Heidi.
-E…Elle a parlé de Ashton ! –Dit-elle en me pointant du doigt ce qui me rend automatiquement mal à l’aise, il y a moins de deux minutes elle me faisait un sourire-
-C’est parce qu’ils sont voisins, c’est tout. Je t’assure qu’il n’est pas là –Il la prend dans ses bras et la berce-
-Euh je…. Je vais attendre dehors –Dis-je tremblante-
-N…Non ! –Couine Daphnée- Tu dois savoir !
-Savoir quoi ?
-Ashton est un méchant ! –Dit-elle en faisant la moue-
-Avec tout le respect que je te dois… Tu n’as pas toute ta t… -Calum me lance un regard noir qui me coupe dans mon élan-
-Heidi écoute là.
-Non je ne l’écouterai pas Calum ! –Dis-je les joues rouges- Ashton est gentil avec moi, il a pris soin de moi lorsque j’ai fait ma stupide dépression !
-Non il n’est pas gentil ! –Se met à pleurer Daphnée- Ashton est méchant ! Ils le sont tous ! Ils sont tous méchants avec moi ! JE LES DETESTE ! »
Je me recule rapidement, surprise par une telle réaction de la part de Daphnée. Elle est complétement cinglée. Mais réflexion faite, je crois que je réagis comme elle et ça me fait peur. Vais-je finir comme ça si je reste dans l’appartement 301 ? Vais-je me mettre à pleurer pour un oui ou pour un non et parler comme une enfant qui réapprend à utiliser les mots trop longtemps retenus sous les crises d’hystérie ? Vais-je moi aussi devoir enfiler cette blouse d’hôpital frappée du mot psy ? Pour Psychopathe sûrement.
Je déglutis et regarde Calum qui maitrise la jeune femme avant de l’allonger délicatement, lui murmurant des choses à l’oreille qui visiblement l’apaisent. Moi je reste en retrait, le souffle coupé et les mains moites. Voilà ce que les Erudits ont réussi à faire, ils l’ont rendu complétement folle et je suis sûre que c’est ce qu’essaye de me faire comprendre Calum. Que si je n’arrive pas à me reprendre je finirai comme Daphnée.
*
« - Je ne la crois pas, au sujet d’Ashton –dis-je à Calum sur le chemin du retour alors que la nuit commence à tomber-
- Tu devrais.
- Ça t’arrange de dire ça toi, tu as toujours haït Ashton ces dernières années !
- Heidi tu n’as pas compris ce qu’il se passe ? Il y a quelqu’un qui essaye de te rendre aussi tarée que Daphnée. Et ce quelqu’un c’est Ashton ! Il a complètement changé Daphnée lorsqu’elle est arrivée en musique et regarde-la à présent !
- Si vraiment il voulait me rendre tarée il ne serait pas venu s’occuper de moi ! –Dis-je avec colère-
- C’était pour t’amadouer !
- Non Calum ! Moi je lui fais confiance à Ashton.
- Alors d’après toi qui a rendu Daphnée comme ça ?
- Les Erudits ! –Dis-je en croisant les bras-
-Ca va beaucoup plus loin que ça Heidi ! Les Erudits ne sont pas le cerveau de l’histoire.
- Alors qui est-ce ?
- Je ne sais pas, j’étais trop proche de Daphnée ils n’ont pas jugé nécessaire de m’en parler.
- Je suis sûre que ce n’est pas Ashton !
- Heidi tu ne le connais pas –Soupire-t-il-
- Et visiblement toi non plus. –Je tourne la tête et regarde au dehors, les dents serrées-
- Tout ce que je veux c’est te protéger. Quelqu’un te veut du mal, je ne sais pas trop pourquoi mais je pense que ça a à voir avec Daphnée.
- Ah ouais ? Je ne la connaissais pas jusqu’à tout à l’heure, alors pourquoi on me mêle à cette histoire ? –Dis-je au bord des larmes-
- Crois-moi que si j’étais au courant je t’aurais déjà dit la vérité –Il me regarde de biais- tu peux me faire confiance, mon rôle auprès des Erudits ne va pas aussi loin.
- Et a qui d’autre puis-je faire confiance ?
- Personne, je t’assure que ce que tu viens de voir doit rester entre toi et moi.
- Pas même Luke ?
- Non pas même Luke.
- Pourquoi ? –Dis-je étonnée-
- Car il est espionné par les Erudits et que si quelqu’un vous entend à ce sujet et le rapporte au groupe, ça va mal se finir. –Sa voix se brise- Je ne veux plus que quiconque lui fasse du mal. Elle a tellement souffert, on l’a trop accablée et regarde ce qu’elle est devenue cette fille au destin prometteur, cette écrivaine. Maintenant elle ne sait même plus prononcer une phrase normalement tellement son cerveau n’a pas supporté les flots constant d’humiliation et de pression. –Je déglutis- Et je refuse que tu vives la même chose, j’ai peur pour toi, quand je vois tes crises qui s’augmentent chaque jours, tu n’es plus cette fille nonchalante que j’ai rencontré. Ils ont commencé à te toucher, à te changer et je veux que tu évites de l’être toute entière. »
Je le regarde un instant. Une larme perle le long de sa joue brune, me prouvant sa sincérité. Depuis le début j’ai douté de lui mais visiblement Calum joue un double-jeu, le rendant plus complèxe qu’il n’y parait.
Dans quel monde de fous vivons-nous ?
*
De retour chez moi je m’affaire à tout ranger, repensant à ma crise de la matinée et la comparant avec la crise de Daphnée. Calum a raison, je suis en train de devenir comme elle. Sauf que moi ça partait de Michael puis les Erudits sont venu s’y coller. Je manque de m’étouffer.
Michael,
Que va-t-il dire quand il va apprendre que ses lettres ont disparu dans la nature ?
Je finis de ranger et me pose finalement devant ma fenêtre, regardant les lumières projetées par les réverbères vaciller. En m’avançant un peu plus je remarque que quelque chose passe devant les lumières, quelque chose de petit, quelque chose qui tombe.
Il neige.
Mon cœur bat la chamade et rapidement je m’enroule dans mon manteau et sors sur mon balcon. Je ne pensais pas que le jour où la neige tomberait serait un jour aussi glauque. Je laisse échapper un profond soupire, faisant s’échapper une épaisse fumée de ma bouche qui fait dévier les flocons dans leur chute. C’est si beau.
« - Heidi ? –Encore une fois je manque de tomber sous la surprise-
-Michael ? Qu’est-ce que tu fais dehors ?
-Je te renvois la question –Dit-il d’une petite voix-
-Je regarde la neige –Dis-je en souriant doucement, première fois de la journée-
-Moi aussi.
-Tu aimes la neige Michael ?
-Oui, moins que la pizza mais j’aime la neige en effet –Je pouffe de rire et m’approche un peu du paravent-
-J’aime t’entendre rire –Me dit-il timidement- ça change de tes cris ou de tes pleurs.
-Oh tu m’as entendu ? –Dis-je gênée-
-Oui, est-ce que tout va bien ?
-Pas vraiment –Dis-je en entortillant mes doigts, repensant à ce que j’avais vu aujourd’hui, devrais-je lui dire pour Daphnée ? Non Calum m’a fait promettre de me taire-
-Est-ce que tu veux en parler ? –Je balbutie légèrement en réponse à sa question- Enfin je ne veux pas te forcer hein, c’est juste que… Je m’inquiète un peu pour toi. –Je vire au rouge-
-Oh euh… C’est gentil mais je t’assure que ça va … -Dis-je d’une voix maladroite-
-D’accord –Il marque une pause- Est-ce que tu as reçu ma lettre ce matin ? –Je sens mon cœur se figer-
-Euh oui je…
-Oh je comprends, tu n’es pas obligée de me répondre… Tu sais si je t’ai envoyé cette lettre c’est p…
-Non Michael c’est pas ce que tu crois, je voulais te répondre mais… Mais je –Je commence à trembler-
-Quoi ?
-Michael j’ai un gros problème …
-Qu’est-ce qu’il se passe ? –Dit-il d’une voix alarmée-
-Tes lettres…
-Tu les as jetées ? –Dit-il en couinant-
-Non ! Mais… Mais elles ont disparu.
-Pardon ?
-Elles ne sont plus dans la petite boite –Dis-je en laissant échapper un sanglot- Je crois qu’on me les a volées.
-Heidi euh… Personne ne volerait des lettres –Dit-il gêné-
-Je sais que tu me prends pour une folle toi aussi, mais c’est la vérité ! Je n’y ai pas touché ! Jamais je ne les aurais enlevées de la boite !
-Non Heidi tu n’es pas folle, calme-toi –Dit-il doucement alors que je me met à pleurer, me tapant mentalement pour être autant similaire à Daphnée avec son mental fragile-
-J…Je ne sais pas où elles sont !
-Ce n’est pas grave je t’en écrirai d’autres tu sais.
-Mais… Mais c’était nos premiers échanges !
-Moi j’ai toujours les tiennes –Glousse-t-il- on a encore une trace comme ça.
-M…Mais Michael je..
-Chut Heidi, calme-toi s’il-te-plait.
-Je n’y arrive pas –Je hoquette-
-Ok, avance toi près du bord.
-Quoi ? –Dis-je décontenancée-
-Avance toi, fais-moi confiance. »
Confiance. J’ai envie que ce mot disparaisse de la surface de la Terre mais finalement je m’éxecute et arrive au bord de mon balcon. Rien. Je m’apprête à lui demander quoi faire lorsque quelque chose bouge à ma droite.
Une main.
Une main dépasse légèrement du balcon voisin.
« - Donne-moi ta main Heidi.
-Euh d…D’accord. »
Je préférerais qu’il s’avance mais visiblement la timidité de Michael est sans précédent et bientôt je glisse ma main dans la sienne, frissonnant à ce contact qui électrise tout mon corps. Sa main est chaude et ses petits doigts ronds commencent à caresser doucement mes doigts osseux, me faisant rougir.
Peut-être devrions-nous dire quelque chose mais comme depuis le début, Michael et moi nous plaisons dans les attentions autres qu’à l’oral. Si bien que nous restons silencieux, profitant de nos timides caresses qui me procurent un sentiment de bien-être.
J’ai une crampe au bras à force de tirer ma main vers lui, mais pour rien au monde je veux me retirer, caressant sa paume de mon pouce avant de finalement enlacer nos doigts pour refermer nos mains l’une sur l’autre. Mes larmes ont cessé de couler et seuls mes hoquets sont perceptibles. Il a calmé cette vague de folie en moi, rien qu’en me donnant la main.
« - Je t’ai dit que j’étais avec toi –Dit-il tout bas-
-Oui, merci Bulbizarre.
-Merci à toi Tornade. »
Son pouce caresse doucement ma main lorsque des flocons se posent dessus, nous faisant sursauter sans pour autant détacher notre lien. Ca picote mais la chaleur de la main de Michael me réchauffe petit à petit.
Finalement la neige est tombée le bon jour et au bon moment.
~ Tadaaaam :) j'espère que ce chapitre vous plait ^^ j'ai enfin fini de ficeler l'intrigue complète sur feuille Hallelujah. Je m'excuse de ne pas avoir répondu aux commentaires du chapitre 30, je vais m'en occuper :)
En tout cas j'espère que vous avez apprécié le 31 ^^
Merci à tous et merci à ceux qui ont posé des questions sur le compte Ask de BTWS et AYWK ^^
Kactus.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top