27 ~ The Daily Truth
Tout est calme, silencieux. De mon corps émane une douce chaleur et j’en ressens une autre dans mon dos. Alors c’est ça de dormir ? J’en avais presque perdu l’habitude. Je me retourne dans le lit avant de sentir mon corps être trainé doucement contre une source chaude. Je commence à ouvrir un œil mais des lèvres se posent sur mon front.
« - Mic…
- Rendors-toi Heidi –Je sursaute à l’entente de la voix de Calum mais ferme tout de même les yeux- Tu peux dormir encore un peu, on est seulement dimanche. »
Dimanche déjà ? J’ai totalement perdu la notion du temps, seul mon corps amaigrit était témoin des jours qui passaient sans que je puisse faire quoi que ce soit. J’enroule doucement un bras autour de la taille de Calum, enfouissant mon visage dans son cou bouillant. C’est autre chose que de se réveiller sur son balcon, le corps frigorifié et le nez qui coule. Au moins, je me sens vivre.
*
Quel bonheur d’ouvrir les yeux après avoir passé une longue et agréable nuit. Un léger sourire éclot naturellement sur mes lèvres puis je m’étire, remarquant que Calum n’est plus dans le lit. D’après les bruits je dirais qu’il est sous sa douche et j’en profite pour m’allonger en étoile sur toute la surface du matelas, m’enroulant dans sa couette encore chaude. C’est cette chaleur qui a éloigné mes cauchemars, c’est cette chaleur qui m’a enveloppée et m’a protégée.
Après quelque minutes à savourer mon réveil je me lève enfin et prends mes affaires en boule à mes pieds, sursautant lorsqu’un objet en tombe. Un objet bleu.
Le journal des Erudits.
Il faut que je trouve un moyen de l’embarquer sans que Calum ne s’en aperçoive. Je me dirige doucement vers la porte de la salle de bain, glissant le journal dans mon tas de vêtements et toque à la porte.
« - Tu veux venir te doucher avec moi Heidi ? –Dit-il en ricanant depuis la douche-
-Non merci, je voulais juste te prévenir que j’allais chercher quelques affaires dans mon appartement.
-Tant que tu reviens, c'est d’accord. »
Je me dépêche de retourner chez moi, glissant le journal dans un de mes tiroirs avant de prendre quelques affaires histoire de jouer la comédie jusqu’au bout, ne pensant pas à fermer à clé mon appartement. Après tout j’y retourne d’ici quelques heures, ce n’est pas si grave.
*
« - Vas-tu revenir en cours demain ? –Me demande Calum alors que nous déjeunons un plat de spaghettis devant le dessin animé ‘La Reine des Neiges’-
-Je ne sais pas, je suis encore fatiguée.
-Tu veux rester ici la semaine ? Histoire de te reposer et de ne pas passer tes nuits seules ?
-Oh non je ne vais pas abuser de ton hospitalité, c’est déjà gentil à toi de m’avoir invité à dormir hier soir.
-Je savais que ça allait te faire du bien –Dit-il en souriant- tu es toujours la bienvenue en tout cas. »
Je le remercie et embrasse sa joue avec douceur. C’est ce Calum Hood que j’apprécie, c’est en ce garçon que je veux croire et j’espère que le journal ne remettra pas en doute ma pensée. Nous finissons le repas et je m’accorde une petite sieste sur les genoux du basané qui enroule ses doigts bruns dans mes cheveux blancs. A quoi pense-t-il ?
« - Calum ?
-Oui ?
-Est-ce que Daphnée te manque parfois ? –Il se crispe et je mordille ma lèvre- Oh je ne voulais pas te gêner je…
-Oui. –J’hausse un sourcil- Oui elle me manque, je pense souvent à elle. Avant c’était elle que j’invitais à l’appartement et comme avec toi nous passions de bons moments. Mais tout ceci est révolu, voilà pourquoi je veux profiter de passer du temps avec toi, on ne sait jamais ce qui peut se passer. »
Mon cœur se serre doucement, me provoquant des douleurs que je pensais endormies. En effet, on ne sait jamais ce que la vie nous réserve, si c’était le cas on pourrait éviter pas mal de mauvaises choses. J'au’ais d’ailleurs pu éviter de perdre bêtement mon lien avec Michael.
Je crois bien que j’ai rêvé de lui d’ailleurs. Ce matin lorsque Calum a embrassé mon front, je ne m’imaginais pas dans ses bras à lui, mais dans les bras de Michael. Ce qui était étrange c’est que je ne voyais pas son visage, je l’appelais pas son nom, il me répondait, mais ses traits étaient brouillés. Même dans mes rêves je n’arrivais pas à remettre la main sur mes souvenirs de première année. Et c’était le plus frustrant dans tout ça, chercher un visage parmi tous les visages que l’on peut croiser chaque jour et ne pas le trouver.
*
En fin d’après-midi Amarande est de retour alors je décide de prendre congé de Calum, le remerciant pour m’avoir permis de penser à autre chose et je retourne chez moi, n’ayant pas besoin de mes clés. En regardant à droite à gauche je remarque que tout est en ordre, rien n’a bougé et pas même le journal qui se trouve toujours dans mon tiroir. Je le sors de là et le maintien un instant dans mes mains immobiles, scrutant l’objet comme s’il pouvait m’exploser à la figure.
Il est bleu, la couleur de la sagesse et du savoir. Ca ne m’étonne absolument pas que ces idiots se soient attribué cette couleur. Je vais m’asseoir sur mon canapé, les jambes tremblantes à mesure que j’ouvre la première page. Il y a beaucoup de photos, prisent à a volée, ça ressemble aux clichés de paparazzis, comme quoi nous étions bel et bien épiés sur ce campus pourtant gigantesque.
Rapidement je comprends que les pages sont classées par ordre alphabétique, mon premier réflexe est d’ouvrir à la page des M, retenant mon souffle, mais à mon grand soulagement le nom de Michael ne figure pas dans les pages frappées d’un M doré. Je tourne les pages dans le sens contraire.
L, Luke.
Il n’y a rien.
R, Rudy.
Il n’y a rien.
H, Heidi.
Il n’y a rien. Je laisse mon pouls se détendre avant de reprendre mes recherches.
E, Elonwy.
Il n’y a rien
A, Ashton.
Il y a une photo.
J’ouvre grand mes yeux lorsque ceux-ci se posent sur le titre en noir ‘La vie sexuelle d’Ashton Irwin’. En effet, la photo un peu plus bas illustre parfaitement le titre, si bien que ma bouche se crispe en un ‘O’ de surprise et de dégout car quelqu’un avait délibérément osé s’approprier leur intimité pour le publier au grand public. Sur ce cliché on peut voir Ashton, que je reconnais à ses bouclettes cuivrées, contre un mur que je devine être l’enceinte des Musiciens, sa tête est penchée en arrière et il ne me faut pas longtemps pour comprendre l’objet d’un tel sentiment d’extase. Plus bas sous son corps, reliée à ses mains désireuses, il y a une jeune fille à genoux. Mais ce n’est pas ce qui me choque le plus. Non ce qui me choque c’est que le visage de la fille a été rayé nerveusement, cachant par la même occasion le sexe d’Ashton. Dieu Merci.
Etait-ce Calum qui avait rayé le visage de la fille ? Auquel cas il s’agissait donc de Daphnée. Mais pourquoi avoir détruit son visage ? Parce qu’il l’aimait et qu’il était obligé de subir la vision de son ex entre les cuisses de son ex meilleur ami ? De quand datait ce journal déjà… Je le tourne et aperçois un timide Mai/Juin 2014. Ce devait être le dernier exemplaire parut avant les vacances d’été, le dernier exemplaire avant que Daphnée ne s’en aille et avant que Michael ne vienne habiter chez Ashton.
Etait-ce lié ?
Je reprends ma lecture, cherchant des personnes que je connais dans les A, mais en dehors d’un article pitoyable sur Amarande et sa consommation de drogue, je ne connaissais aucune des personnes sur les clichés.
Ce qui m’amène à ma recherche finale.
D, Daphnée.
Je suis prise d’un hoquet de stupeur en voyant la double page remplie de photos superposées, ne laissant aucune place au blanc du papier. L’acharnement avec lequel les photos ont été posées montre bien la rage des Erudits à son égard. Pauvre fille, elle a seulement voulu protéger son meilleur ami, je trouve que c’est cher payé. Ici aussi les images ont été rayées, je discerne seulement que toutes les photos ont l’air d’avoir été prises le même jour, au même endroit avec le même groupe de personnes.
Ils ont l’air d’être sur une espèce de plage parsemée de rochers sur lesquels un garçon, qui me semble être Ashton, aux vues de ses bouclettes, fait l’imbécile. Je reconnais aisément Luke, c’est le seul géant du groupe, des épaules larges et des cheveux redressés par une houppette, parfois j’ai même l’impression que ce dernier sort du cadre. Je regarde les autres clichés, grognant à cause des multiples coups de stylo qui ont été porté dessus et semble distinguer autre chose. Il reste un autre garçon je crois. Il est à peine plus grand qu’Ashton mais je ne le vois pas bien, il devait être souvent à côté de Daphnée car il est malheureusement sous les traits qui avaient pour but de rayer à jamais le visage de la jeune fille.
Mon cœur rate un battement.
Qui en dehors d’Ashton pouvait se trouver aussi proche de Daphnée ?
Il y a le copain, le cousin.
Puis le meilleur ami.
L’autre garçon c’est Michael, j’en suis certaine. Maudit stylo qui m’empêche une fois de plus de visualiser le visage de mon mystérieux voisin. Je tourne la page pour d’autre cliché mais à la différence de la première double page, celle-ci est totalement vide, avec pour seul texte au centre.
« Avant le drame. »
Quel drame ?! Je tourne rapidement chaque page du journal mais ne trouve plus aucun article au sujet de Daphnée. Seules ces photos placardées violemment sur les pages parlaient d’elle. Enfin moi elles ne me parlaient pas tant que ça. Je retourne sur la double page et détaille chaque photo, je ne sai spas ce qu’il se passe, ils doivent être sûrement bourrés. C’était de ça dont Calum m’avait parlé un jour. Que Daphnée était devenue très portée sur la boisson alcoolisée et la drogue en entrant chez les musiciens.
Décidemment cette fille n’a pas eût une vie facile ici. Lorsqu’elle avait sa place chez les Erudits ont lui a reproché de devenir un monstre orgueilleux et lorsqu’elle a pu enfin quitter ce monde pourrit de l’intérieur, elle s’est retrouvé dans le même schéma, mais chez les musiciens. Toujours traitée comme un monstre.
Je regarde une dernière fois la page et m’arrête sur une photo où l’on voit un peu plus Michael. Son visage est tourné de sorte que je ne discerne aucun de ses traits, mais je peux le voir. Je peux visualiser le reste de son corps, comme dans mon rêve sauf que c’est la réalité. Je fais glisser mon doigt sur son image avant de fermer le journal. Je dois me procurer les exemplaires suivants, d’après Luke ils ne se sont pas arrêtés au départ de Daphnée et c’était au tour de son cousin de payer pour elle. Mais de payer pour quoi ? Quel était ce drame et pourquoi personne ne me disait rien ? Alors que j’étais prête à parier que tout le monde autour de moi était au courant.
*
Mon plan était de retourner chez Calum un soir, prétextant avoir envie de manger des cupcakes devant un bon film ce qui me donnerait le loisir de lui ramener discrètement son journal. Mais pas ce soir, non ce soir je veux rester seule, retourner à mes pensées sauf que cette fois-ci je ne les laisserais pas reprendre le dessus sur moi. Je sors une feuille blanche et commence à écrire des mots clés, puis des prénoms. Je mets sur papier tout ce que j’ai appris jusque-là sur Daphnée et son entourage, à savoir, Ashton, Calum, Luke, les Erudits et Michael.
Daphnée et Michael sont les points les plus mystérieux du schéma et il faut que ça change.
*
Une semaine après je suis de retour à la fac, sur mes gardes quant aux Erudits et à leur fichu journal. J’avais vu les photos, elles étaient prises aux pires moments dans le seul but de piéger la cible et de l’humilier par la suite. Je ne veux en aucun cas vivre cela alors je limite mes sorties hors de l’amphi. A quoi ça les avançait ? Et comment un tel journal pouvait-il circuler sur le campus. Je suis révoltée.
« - Tu m’as manqué –Couine doucement Rudy en me serrant de façon si chétive contre son corps-
-Toi aussi Rudy –Dis-je en prenant soin de le serrer avec précaution- Tu es toujours malade ?
-Ca a du mal à passer mais le médecin me dit que je suis sur la bonne voie.
-Espérons qu’il ai raison –Dis-je d’une voix inquiète alors que mon meilleur ami me sourit de toutes ses dents-
-Je suis solide ! »
Non personne n’est solide. J’ai vu Luke regarder autour de lui comme un parano, j’ai vu Ashton et Calum pleurer et saigner, j’ai fait une crise d’hystérie suivie d’une dépression, j’ai entendu Michael s’effondrer contre mon paravent tout en se lamentant. Mais au fond j’ose espérer que mon meilleur ami a raison. Je lui souhaite d'petre solide et je serai là pour l'aider maintenant que je suis revenue.
« - Au fait, j’ai mené ma petite enquête pendant que tu n’étais pas là –Me chuchote-t-il à l’oreille-
-Comment ça ?
-A propos du journal, j’ai réussi à faire croire à un gars de ma classe d’option que j’étais intéressé pour m’abonner.
-Il t’a cru ?
-Oui, il a même laissé échapper quelques infos en attendant que je passe leur fameux test.
-Du genre ? –Dis-je en sentant ma voix trembler d’appréhension-
-Du genre je sais qu’il y a au moins une taupe ou deux en musique, on ne m’a pas donné de nom mais cette personne se charge d’espionner Ashton Irwin. Ce serait d’ailleurs la même qui a pris des clichés de la jeune sœur de Calum et ceux d’une certaine Daphnée.
-Ils t’ont parlé de Daphnée ?
-J’ai l’impression qu’il n’y a qu’elle qui motive les Erudits –Me confie Rudy-
-C’est bien ce que je pensais. »
A l’évidence le journal a vu le jour peu de temps après le départ de Daphnée de chez les Littéraires il me semble. Tout est liée à cette fille. Mais qui était cette taupe en musique ?
*
Les jours passent et se ressemblent, étant de plus en plus froids, j’ai même perdu l’habitude d’aller sur mon balcon tant l’air commence à être peu supportable. Tout ce que j’attends c’est qu’il neige. Ce sera un tel moment de calme, je pourrais me focaliser sur le bruit léger des flocons portés par le vent qui viennent faire des petits tas blancs au sol. Mais aujourd’hui, il pleut des trombes d’eau, un peu comme le jour de ma visite de l’appartement, sauf que là ça ne s’arrête pas mais étrangement ça ne me dérange pas, j’aime entendre le bruit de l’eau. Avant dans mon ancien studio j’écoutais les gouttes s’écraser sur le velux. Ça m’endormait.
J’ouvre ma baie vitrée et vais m’asseoir sur mon canapé, enroulée dans deux épaisses couvertures tout en regardant les épais filets d’eau ruisseler depuis le balcon au-dessus du mien. C’est beau. La nature est ce qu’il y a de plus beau à regarder et à écouter. Bientôt je ferme mes yeux et me laisse bercer par le clapotis des multiples gouttes alentour avant d’avoir une idée.
J’ai envie de chanter. Ca peut paraître bizarre mais l’eau me donne cette envie de chanter. Je me redresse un peu, les yeux toujours clos avant d’ouvrir mes lèvres bleuies par le froid.
« Summer has come and passed
The innocent can never last
wake me up when September ends »
J’avais promis de la lui chanter, c’était lui qui me l’avait demandé. Je sais que c’est trop tard, mais c’est celle qui m’est venu en tête la première. Si seulement il pouvait m’entendre. Je soupire tristement avant de reprendre ma chanson, essayant de garder ma voix constante malgré le froid qui me tenaille. Je la chante pour lui, mpeme si il n’est plus là pour l’entendre, je veux qu’où il soit il sache que je pense à lui. Que je n’arrive pas à l’oublier et que je resterai volontairement couchée jusqu’à ce que Septembre ne se termine, bien qu’on en était bientôt au mois de Décembre.
"As my memory rests
but never forgets what I lost
wake me up when December ends"
Le contexte était plus correct. Je me lève de mon canapé une fois la chanson fini et entreprend de rentrer chez moi, étant trop gelée pour continuer, lorsqu’un bruit foudroie mon corps, le rendant plus dur que du bois.
Une guitare.
Une guitare qui reprend la chanson de Green Day que je viens de chanter. Je suis paralysée, j’aimerais me remettre à chanter mais ce n’est plus dans mes cordes. Mon cœur est à la limite de l’explosion tandis que mes larmes s’échouent dans mes cheveux tressés. C’est impossible. Est-ce que c’est Ashton ? Je sais que Luke et Calum m’ont confirmé qu’il jouait de la guitare. Mais au fond de moi je veux croire en une autre hypothèse. Si bien que je réussi à puiser assez de force pour accompagner timidement la guitare jusqu’au moment où le silence s'installe de nouveau, laissant place au bruit incessant de la pluie.
Je tremble, mais c’est autre chose que le froid. Je dois savoir. Je titube jusqu'au paravent malgré ma paralysie et hoquette.
« - M…Michael ? »
La seule réponse que j’obtiens est le bruit de la baie vitrée voisine qui coulisse avant de se fermer. Si ça avait été Ashton, il m’aurait répondu, je le sais. Je porte mes mains à mon visage, laissant tomber les couvertures à mes pieds et ignorant la chair de poule qui se répercute sur tout mon corps frêle.
Il est revenu.
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