1 ~ Rainy Day

Une goutte, suivis d'une deuxième, une troisième.

Puis il se met à pleuvoir abondamment et je ne peux m'empêcher de lâcher un juron.

Le moment où je me maudis le plus c'est lorsqu'il se met à pleuvoir à l'improviste et que je n'ai pas de parapluie sur moi, comme maintenant. J'attache mes cheveux en une queue de cheval et me réfugie sous la tonnelle d'un fleuriste afin de regarder mon plan sans risquer de le mouiller. La rue Stockholm n'est plus très loin, cependant avec un temps pareil je risque d'arriver trempée quoi qu'il arrive, alors j'attends un peu que la pluie cesse, regardant les nombreuses gouttes choir bruyamment.

17 heures. La puissance de l'averse n'a pas diminuée et je ne peux rester ici à attendre plus longtemps, mon rendez-vous est dans cinq minutes. Je range le plan dans mon sac à main, resserre le col de ma chemise et sors de sous mon abri à toute jambes, poussant un petit cri lorsque les épaisses goutes froides viennent s'écraser sur mon visage à découvert. En l'espace d'une dizaine de minutes le temps avait totalement changé, il y avait eût un beau soleil et soudain la pluie avait pris tout le monde au dépourvu, notamment les cafés dont les terrasses avaient été rangées dans la précipitation. Quelle météo instable.

Quelques instants plus tard j'arrive enfin au niveau de la résidence étudiante et m'arrête à bout de souffle devant les portes d'un des appartements où attend une femme entre deux-âge vêtue d'un tailleur aussi gris que le ciel au-dessus de nos têtes.

« - Mademoiselle Fauste ? -Me dit la femme en me détaillant de haut en bas alors que j'essuie mon visage ruisselant de pluie d'un revers de manche-

- Oui c'est moi -Dis-je en reprenant mon souffle- Pardonnez mon état.

- Sale temps n'est-ce pas ? -J'hoche la tête avant de serrer la main de l'agente immobilière- Vous arrivez pile à temps pour la visite, vous me suivez ? »

Elle entre dans l'immeuble et je m'empresse de la suivre, grelotant sous ma chemise trempée qui semble s'être collée à ma peau. Le rez de chaussé est propre et lorsque nous entrons dans l'ascenseur je suis agréablement surprise par l'odeur de neuf qui en provient.

« - La résidence et ses deux immeubles ont été rénovés cette année -Me dit la femme avec un sourire fier- ce qui est un énorme point positif. »

Je lui réponds d'un signe de tête et la suis à présent dans le large couloir du troisième étage dont le sol est recouvert d'une moquette bleue foncée. On se croirait dans un hôtel et je me surprends même à marcher sur la pointe des pieds pour ne pas la tacher avec mes Creepers inondées. Vraiment quelque chose d'aussi propre et soigné est rare pour une résidence d'étudiants.

L'appartement que je visite aujourd'hui est au bout du couloir, ce qui signifie en fin de bâtiment, donc seulement un voisin. J'adore.

Une fois à l'intérieur je tourne la tête en tout sens, me projetant déjà dans les pièces si bien que je ne remarque pas tout de suite l'extérieur. Je m'arrête net et me rapproche de la baie vitrée. Face à moi se trouve un balcon de grande taille, sur lequel tiendraient aisément une table et des chaises, avec un garde-fou en métal noir et une sorte de paravent en bois vernis sur ma droite. J'hausse un sourcil. Ce paravent est là non pas pour me protéger du vent, mais pour marquer la délimitation avec ce qui semble être un autre balcon, un peu plus avancé que le mien. Comment est-ce possible ? Je suis pourtant en bout d'immeuble, mon balcon est censé être le dernier.

« - Excusez-moi -Dis-je à l'attention de l'agente- comment se fait-il qu'il y ait un balcon collé au mien ? Je suis à l'extrémité même du bâtiment 1.

- Oh c'est le bâtiment 2, les deux extrémités sont en fait collées l'une à l'autre.

-Donc ce balcon...

- Fait partie du B2. »

Je laisse échapper un soupir. Moi qui me réjouissais à l'idée de n'avoir qu'un voisin latéral, finalement j'en avais deux dont l'un n'était même pas dans mon bâtiment. Ce qui veut dire que si jamais je devais aller frapper à sa porte je serais obligée de sortir.

« - Vous savez qui habite là ?

- Oh oui, c'est Ashton Irwin, le fils du propriétaire de la résidence et un camarade à lui dont je ne connais pas le nom.

- J'ose imaginer qu'étant le fils du propriétaire il doit être sérieux ?

- Tout dépend ce que vous entendez par là. »

Il me semble qu'elle grimace à l'idée que je puisse refuser l'offre à cause de simples voisins, mais elle n'imagine pas à quel point le silence est important pour moi. Je fais des études en lettres modernes et il est primordial que je puisse me concentrer sur ce que je lis et écris. Mais je dois avouer que les temps sont durs de nos jours pour les étudiants et que cet appartement est une perle, c'est d'ailleurs ce qui me décide à le bloquer avec mon dossier.

« - C'est parfait -Me dit la femme en rangeant mon dossier dans son porte-documents- je vous contacterai dans la semaine.

- Merci. Au fait, pourquoi la fille avant moi est-elle partie ? C'est quand même un super appartement.

- Oh ça je n'en sais trop rien. »

Elle me fait un sourire un peu trop large si bien que je comprends tout de suite que cette dernière me ment, mais après tout qu'est-ce que ça changerait que je sache la raison du départ de l'ex locataire. Une fois redescendues je remarque avec soulagement que la pluie a cessé et je détache enfin mes cheveux humides pour les laisser sécher au soleil.

« - Plutôt inhabituelle comme couleur de cheveux pour votre âge -Me dit-elle en me regardant en coin-

- Je trouvais ça joli. »

Je serre la main de la femme avant de longer les bâtiments pour m'en aller. Je me moque de ce que l'on pense de mes cheveux. Je glisse mes longs doigts dedans et ébouriffe doucement ma tignasse blanche avant de lever la tête. C'est l'extrémité du B2, logiquement au 3e étage se trouvent mes voisins. Je tends un peu plus le cou avant d'apercevoir la baie-vitrée légèrement entrouverte, mais en dehors de ça, aucun signe de vie. J'ose espérer qu'ils seront aussi discrets une fois que j'aurais emménagé.

*

320 - Heidi Fauste

Je griffonne mon nom sur un bout de papier et le pose sur ma boite aux lettres avant de reprendre l'ascenseur pour rejoindre mon appartement dans lequel se trouvent mes meilleurs amis, les jumeaux Rudy et Elonwy. Tous les deux sont venu m'aider à emménager et je leur ai proposé de rester chez moi la journée, histoire de ne pas passer mon premier jour toute seule. Nous sommes tous les trois dans la même université, Rudy est dans ma classe tandis qu'Elonwy, elle, est en section audiovisuelle, si bien que lorsque nous parlons d'un livre pour les cours avec son frère, cette dernière se met à ronchonner.

« - Vous ne pourriez pas parler d'autre chose tous les deux ? -Ses yeux bleus aux longs cils noirs passent de mon visage à celui de son frère-

- Arrête de râler Elo, on a beaucoup plus de travail que toi alors laisse nous nous avancer -Lui balance son frère d'un air moqueur-

- Vous pourriez au moins vous mettre dehors et me laisser faire une sieste tranquillement à l'intérieur. »

Rudy lève les yeux au ciel et pars sur le balcon où sont installés un chaise longue et un petit canapé qui lui est contre le paravent. Je me lève à mon tour et le rejoins qui est déjà plongé dans son livre. Depuis ce matin que j'ai commencé à emménager, je n'ai rien entendu dans l'appartement voisin, à croire qu'ils sont en vacances.

« - Je sens que ce livre va être ennuyeux au possible -Soupire Rudy en triturant ses courtes bouclettes noires- Tu l'as lu ?

- Oui, veux-tu que je te passe mon résumé ? -Dis-je en jouant avec les lattes de bois du paravent derrière moi-

- Oh non ça va aller, je dois me débrouiller seul -Il soupire- A quoi il sert ce truc en bois ?

- A me cacher de mes voisins.

- Ca ne cache pas grand-chose, il suffit seulement que ton voisin se penche et avec son avancée de balcon par rapport au tiens, il aura une vue d'enfer sur toi en sous-vêtements le soir .

- Ne me dis pas ça où bien je vais mettre du barbelais autour du garde-fou... »

Il se met à glousser et j'esquisse moi-même un léger sourire. En effet, mes voisins n'ont qu'à se pencher en avant et ils me verront, tandis que moi, jamais je ne verrais leurs visages. C'est assez frustrant mais rapidement mon esprit est de nouveau focalisé sur les devoirs de littérature et j'oublie rapidement cette histoire de balcon. En fin de journée les jumeaux repartent chez eux et je vais et viens dans les pièces de mon appartement, un bol de chocolat chaud en main.

J'ai vraiment eût de la chance de tomber sur cette annonce mais je reste étonnée de la précipitation dans laquelle est partie l'ex locataire il y a quelques mois. La résidence est propre, c'est calme, les voisins ont l'air respectueux, la Fac est à quelques minutes à pieds. Vraiment je ne comprends pas ce qui l'a motivée à s'en aller, c'était sûrement personnel.

*

Une semaine que je suis dans mon nouveau chez-moi et je n'ai toujours pas entendu de bruit provenant de chez mes voisins du B2. Peut-être est-ce bien insonorisé ? En tout cas ça me rassure, je pourrais travailler tranquillement cette année, ça me changera de mon ancien studio.

Dans quelques jours les cours vont reprendre alors je profite de mes derniers instants de répit sur mon balcon, lisant un livre et laissant le soleil chauffer doucement ma peau laiteuse. C'est un régal, dans mon ancien studio je n'avais qu'une sorte de grand velux au plafond qui était mon unique puits de jour, laissant à peine passer le soleil, il n'y avait pas d'autres fenêtres et j'avais fini par m'y sentir à l'étroit, oppressée. Parfois dans la nuit il m'était même arrivé de me réveiller avec l'impression de ne plus avoir d'air, comme dans un bocal, je suffoquais et j'avais été obligée de garder le velux ouvert, ce qui n'était pas agréable en plein hiver. Mais ici tout est différent, c'est une nouvelle vie qui s'offre à moi.

J'étire mes doigts qui commencent à s'engourdir sous le poids du livre et pose ce dernier sur la petite table en bois. Mes yeux sont fatiguée à force de zigzaguer entre les lignes minuscules, si bien qu'une fois le livre sur la table et mes mains posées tranquillement le long de mon corps, je ferme les yeux et cède enfin à la fatigue.

Je sens que mon esprit s'égare alors que je commence à somnoler, les sons me parviennent aux oreilles tels des bourdonnements et il me semble même discerner du bruit chez mes voisins, comme si on faisait coulisser une baie vitrée. Je sombre un peu plus dans le sommeil lorsqu'une voix me fait sursauter.

« - Monsieur il le faut bien ! -Dit une femme d'une voix plaintive-

- Non, j'en ai marre, ça ne rime à rien ! »

J'hausse un sourcil. Ayant entendu le mot monsieur je m'attendais à tout sauf à une voix aussi jeune. Qu'est-ce que c'est que ce type qui se fait appeler monsieur alors qu'il n'est sûrement rien de plus qu'un simple étudiant, comme moi ? Je glisse une main dans mes cheveux blancs qui reflètent le soleil et triture quelques mèches. Etait-ce lui le fameux fils du propriétaire ? Auquel cas il doit sûrement pouvoir se permettre d'avoir des domestiques et de se faire appeler Monsieur. En tout cas il vient de parler d'une voix si ferme que j'ai peine à me rendormir et me redresse avec paresse. Pour une fois que je pouvais faire une sieste au soleil, c'est le jour où mes voisins ont décidé de faire acte de présence. En me levant, mon fauteuil fait un petit couinement et je me raidis sur place tandis que mon voisin laisse échapper un hoquet de surprise.

« - Rentrons ! »

Sa voix a changé, il a dû être surpris par ce bruit qui provenait du balcon voisin, il devait sûrement penser qu'il était seul. Je mords ma lèvre et rentre rapidement à mon tour, le cœur pulsant dangereusement. Je n'aime pas écouter les conversations des gens sans y être invitée, j'ai l'impression d'être une sorte de voyeuse... Vraiment ces balcons juxtaposés sont une véritable erreur, mais c'est bien la seule que j'ai trouvé ici.

Jusqu'au soir je n'ai plus entendu un seul bruit en provenance de l'appartement du B2, je ne sais pas si la domestique est encore là et je me demande même si le deuxième garçon, l'ami de Ashton Irwin dont l'agente ne connaissait pas le nom, habite véritablement ici lui aussi. Je me glisse sous mes couvertures et me concentre sur le silence. De quoi ce garçon en avait-il marre ? Je me suis toujours dit que lorsqu'on avait des domestiques on pouvait qualifier sa vie d'agréable, alors qu'est-ce qui pouvait bien lui déplaire ? Je laisse échapper un bâillement et cesse mes réflexions avant de m'endormir. Ces histoires ne me regardent absolument pas.

~ Bonsoir :) voilà le premier chapitre, bon certe il n'est pas passionnant mais il faut bien commencer :') le deuxième chapitre sera déja un peu plus apprécié je pense ;) en tout cas je suis ravie de recommencer une nouvelle histoire qui j'espère vous plaira :)

Si vous avez des questions, n'hésitez pas !

Merci aux lecteurs :)

K.

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