Chapitre 2
Personne ne savait que Stiles n'aimait pas la foule. En fait, il détestait ça. Alors forcément, chaque fois qu'il passait les portes du lycée, une bouffée d'angoisse naissait en lui. Pourtant, il cachait bien son jeu : lorsqu'on l'abordait, il parlait et répondait d'un air détendu en souriant, faisait quelques blagues par-ci par-là, mettait les gens à l'aise. C'était pareil pour les entraînements de crosse. Il se changeait à part pour des raisons qui ne regardaient que lui et par la suite, faisait fi des gens autour de lui et limitait au strict minimum les contacts avec les autres joueurs. Il parlait à Liam, Isaac et Scott, Greenberg à la limite, mais c'était tout. De toute manière, ce n'était pas à lui qu'on viendrait demander des conseils. S'il passait moins de temps sur le banc de touche depuis quelques temps, il restait un joueur raté. Moyen. Pardon, moyen. Extrêmement moyen.
Le soulagement de Stiles fut alors total lorsque celui-ci put enfin quitter les vestiaires, puis l'enceinte du lycée.
- Hé, Stiles !
Le jeune homme retint un sursaut et prépara un sourire, avant de se retourner vers Liam qui avançait vers lui, en compagnie d'Isaac, Scott ayant rapidement quitté le groupe pour aller fureter quelque part, sans doute allait-il retrouver Kira. Si le louveteau qu'était Liam était diablement expressif, Isaac restait dans la retenue. En effet, il était moins démonstratif en public que lorsqu'il venait quémander son aide après un cauchemar ou une crise. Isaac n'avait pas honte du soutien que pouvait lui apporter l'hyperactif lorsqu'il en avait besoin : non, c'était sa faiblesse à lui qui lui faisait honte. Il avait beau être un loup-garou depuis un bon moment déjà, ses peurs enfantines ne disparaissaient pas. L'on n'effaçait pas des années de mauvais traitements par une transformation lupine. Certes, Isaac était désormais un loup, un prédateur et avait beaucoup moins de chances de se retrouver à nouveau en position de faiblesse contre un ennemi humain. Si son père revenait, nul doute qu'il le mettrait au tapis. Néanmoins, il était marqué à vie et mettrait du temps à s'en remettre. Et ça, Stiles le voyait sans arrêt dans son regard bleu comme l'océan.
Stiles s'arrêta et attendit que ses amis le rattrapent. Enfin, il se remit à marcher à leur hauteur et les laissa l'incruster dans leur discussion traitant du dernier bordel surnaturel qui avait secoué la ville sans que ses habitants n'en aient eu réellement conscience. Alors qu'ils marchaient tous trois en direction du parking, Stiles sentit à plusieurs reprises Liam, qui était à sa droite, lui effleurer le bras. Trouvant ce fait complètement anodin, l'hyperactif mit ce détail de côté. Il ne lui tardait qu'une chose : retrouver sa bonne vieille Roscoe et rentrer chez lui, seul. Il avait eu son quota de sociabilité du jour, si bien qu'à l'intérieur de son propre corps, il étouffait et avait besoin de s'oublier. Pour cela, rien de tel que la solitude et de quoi se changer les idées.
Lorsqu'il aperçut sa Jeep, Stiles salua ses amis et s'éloigna du lycée en retenant son empressement. Aucun n'avait besoin de connaître son mal-être, ni son soulagement à l'idée de se retrouver seul. Même si son père lui manquait de par ses absences récurrentes, Stiles était heureux qu'il ne soit pas là. Plus tard, il se lamenterait et réclamerait sa présence. En attendant, il allait profiter de sa solitude.
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Stiles baissa ses manches et regarda son reflet d'un air impassible. Avait-il déjà été aussi pâle ? Il ne le savait plus. Il avait l'habitude d'avoir la peau claire mais celle-ci l'était d'autant plus depuis quelques semaines. Depuis qu'il avait commencé à profiter de sa solitude. A sa manière. C'était mauvais, il le savait. Mais qui pourrait bien l'arrêter ? Personne ne pouvait être au courant de son mal-être, encore moins se douter de son étendue. Ça partait de... De quoi, au juste ? Il ne le savait même plus. Faisant disparaître toute trace de ses actes de la salle de bain, Stiles finit par éteindre la lumière et retourner dans sa chambre, dont il prit soin de bien fermer la porte. C'était un réflexe qu'il avait fini par développer. Il était loin le temps où sa porte restait entrouverte, même lorsqu'il allait se coucher.
Stiles s'allongea sur son lit en soupirant de lassitude et son regard ambré fixa le plafond. Il s'était laissé aller dans une spirale infernale, un cercle vicieux dont il était le seul au courant. Il pouvait en sortir, oui et même s'en sortir. Mais seul, il n'en avait pas la moindre volonté. Chaque jour qui passait était, selon lui, un pas de plus vers un précipice si profond qu'une fois tombé, il lui serait impossible de remonter.
La vibration soudaine de son téléphone brisa le silence et la presque transe de Stiles, si bien qu'il sursauta et se redressa sur ses coudes. Son cellulaire était là, sur sa table de nuit et bougeait au rythme de son vibreur assez fort tandis que l'écran en mode nuit affichait un nom : Derek Hale. Stiles l'avait récemment renommé, comme il l'avait fait avec la majorité de ses contacts, retirant surnoms et appellations personnalisées, dans un but obscur même pour lui. Soupirant à l'avance car il n'avait pas envie de parler à qui que ce soit, l'hyperactif décrocha tout de même, sachant que le cas contraire entraînerait sans aucun doute la venue intempestive du loup qui passerait inévitablement par sa fenêtre.
- Qu'est-ce que tu veux ? Demanda-t-il simplement, sans prendre la peine de le saluer.
Il était dans un jour où transpirer la politesse ne faisait pas partie de ses priorités. Il enclencha le haut-parleur et posa son téléphone à côté de lui tandis qu'il se laissait à nouveau tomber sur son lit si confortable.
- Bonsoir Stiles, répondit toutefois Derek à travers l'appel.
- Ouais aller bonsoir, comment ça va ? Oui et toi ? Bien aussi merci, lâcha ironiquement l'hyperactif. Sérieusement, depuis quand tu fais dans la politesse ? Aller droit au but, ça permet d'économiser du temps et il est tard. Par conséquent, je ne vais pas tarder à aller dormir. Donc, je me répète : qu'est-ce que tu veux ?
- Stiles, il est à peine vingt-heures.
- Oui ben écoute c'est pas toi qui as passé la nuit précédente à faire des recherches donc, excuse-moi, mais je suis fatigué.
Stiles mentait éhontément mais il n'en avait cure : le loup n'était pas là pour vérifier ses battements de cœur. De toute façon, qui y ferait attention ? L'adolescent savait faire oublier la vérité grâce à son flot de parole qu'il pouvait faire monter à un niveau légendaire. Les mots sortaient de sa bouche par millier, endormaient les sens des loups fatigués désirant le silence. Parfois, être insupportable avait du bon.
- Tu vas devoir en faire encore.
- Ah, et pourquoi donc ? S'enquit l'hyperactif qui avait tout, sauf envie de se plonger dans le monde surnaturel ce soir-là.
- Il y a une sorte de sorcier qui traîne dans le coin, j'en ai trouvé des traces dans la forêt.
- Ah, parce qu'un sorcier a des traces de pas spécifiques ? C'est nouveau ça, ironisa l'hyperactif.
- Stiles, soupira Derek, j'ai trouvé des traces de magie.
- Ah, parce que les loups ça sent la magie maintenant ? Encore mieux. Ça a quelle odeur ?
- Stiles, bordel, arrête de faire l'enfant !
- C'est mon comportement habituel.
- Eh bien ton comportement me les brise.
Si tu savais ce que j'en ai à foutre. Stiles n'avait qu'une hâte, que cette conversation téléphonique se termine.
- Cool, allez bonne nuit, lâcha-t-il simplement avant de raccrocher sans prévenir.
Derek Hale avait beau être un loup-garou qui en imposait et qui avait les plus beaux yeux du monde, il ne fallait pas abuser. Stiles, en cette soirée morne, était tout sauf patient et n'avait pas la moindre envie de s'occuper à faire quelque recherche que ce soit. Toutefois, pour éviter une venue intempestive de l'ancien alpha colérique, Stiles lui envoya un rapide message dans lequel il s'occuperait de commencer ces recherches le lendemain matin dès son réveil. Après tout, quoi de mieux qu'un samedi pour passer son temps à faire des recherches ? Puis, ce n'était pas avec aussi peu d'éléments que Stiles réussirait à trouver quoique ce soit et ça, il ne manqua pas de lui préciser. Ce à quoi Derek lui répondit :
« Tu m'as pas laissé parler. »
Un constat réel et Stiles songea qu'effectivement, il ne lui avait pas laissé en placer une, son désir de couper tout contact avec la vie humaine étant trop fort. Il s'excusa vaguement et éteignit son téléphone.
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Chaque petit-déjeuner était un combat, pour Stiles. Pas qu'il avait des problèmes pour manger, simplement... Il n'avait pas faim, le matin. Cependant, ne pas manger au réveil le fatiguait beaucoup trop vite et tenir jusqu'au midi devenait difficile. C'est pour cela qu'il se força à manger ses tartines de Nutella alors que son père rentrait tout juste du travail. Par chance, l'hyperactif avait pensé à enfiler une veste en se levant.
- Bien dormi fiston ? Demanda le shérif en baillant.
- Extrêmement bien. Et toi, si tu allais te coucher ? S'enquit Stiles avec un sourire.
Noah hocha la tête, lui ébouriffa les cheveux avec affection et partit tout de suite à l'étage se mettre au lit. Travailler de nuit était éreintant mais c'était son emploi du temps qui voulait ça.
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Stiles voulait bien faire ce qui était prévu dans sa petite liste mentale. Néanmoins, un imprévu dans son programme risquait de retarder les recherches pour ce cher Sourwolf. Lorsqu'il vit son téléphone vibrer pour la troisième fois de la matinée, Stiles soupira. Scott avait beau être son meilleur ami, l'hyperactif commençait à en avoir assez d'être l'éponge qui devait écouter chaque variation dans sa vie sentimentale. C'était peut-être moins mouvementé que lorsqu'il était avec Allison – où mises en couple succédaient aux séparations et ainsi de suite – mais cela restait apparemment très intense pour le petit Scott, vrai alpha à la tête de sa meute grandissante. Stiles décrocha, encore.
- Stiles, j'en peux plus...
C'est moi qui n'en peux plus. Laisse-moi tranquille et débrouille-toi avec ta vie de couple aléatoire. Et pourtant, Stiles prit une voix tout ce qu'il y avait de plus normale et demanda :
- Tu as du nouveau ? Raconte-moi.
- Elle... Elle est compliquée, Stiles. Les filles, c'est compliqué. Je comprends pas ce qu'elle veut. Tu vois après t'avoir appelé, je l'ai rappelée et elle ne veut rien entendre. Elle m'a dit qu'elle avait besoin de temps pour digérer ça, mais j'ai rien fait de mal !
Monsieur McCall avait, en début de matinée, proposé des sorties un peu spéciales à sa dulcinée actuelle, Kira Yukimura après que celle-ci lui ai fait part d'un constat simple : à part coucher ensemble, ils ne faisaient pas grand-chose. Scott n'avait rien trouvé de mieux que de lui dire « si tu veux, je t'emmène là où tu pourras te faire les ongles, ça fait longtemps que tu les as pas faits. Oh et après, je t'accompagnerai chez l'esthéticienne ! Tu ne m'as pas dit que tu voulais te refaire le maillot ? ». Scott était complètement à côté de la plaque, comme toujours. Sa proposition avait tout simplement vexé la jeune asiatique, qui l'avais pris personnellement, pensant que Scott trouvait qu'elle se laissait aller. Ce qui était, en soi, déplacé de sa part étant donné que Kira se pliait toujours en quatre pour lui plaire. Stiles comprenait alors très bien la colère de la kitsune. Espérant terminer cet appel au plus vite et faire en sorte que ce serait le dernier de la matinée, l'hyperactif lui dit alors franchement :
- Scotty, tu es putain de maladroit. Kira fait ce qu'elle peut pour te plaire alors, naturellement, ta proposition sonne mal et donne l'impression que ce qu'elle fait, c'est pas assez. Tu sais combien de temps elle passe devant son dressing et son miroir ? Non ? Eh bien moi non plus mais je peux facilement te dire que c'est beaucoup. Je suis sûr que c'est pas intentionnel mais comprends que c'est un peu normal qu'elle l'ait mal pris. Ce qu'elle veut, c'est que vous fassiez quelque chose à deux, comme un couple normal. Partager quelque chose avec toi et pas que vos fluides, c'est ça qu'elle demande. Donc mon coco, tu vas me faire le plaisir d'aller la voir parce que, faut pas déconner, une dispute, ça se règle pas par téléphone. Puis toi tu lui as dit ça le matin au réveil, tu m'étonnes qu'elle ait mal réagi, tu lui as pas laissé le temps de se réveiller ! Alors maintenant, va chez elle et propose-lui, je sais pas moi, une virée shopping en amoureux, une sortie au parc, un resto...
Et fous-moi la paix.
Au bout du fil, Scott bredouilla quelque chose qui devait ressembler à des remerciements et Stiles finit par raccrocher. Bordel, enfin il gouttait à cette paix tant désirée et maintenant... Il fallait qu'il fasse quelques recherches. Son envie était dirigée ailleurs, à l'étage, dans une pièce bien précise mais il se fit violence et resta ici, dans le salon, les fesses vissées sur son canapé et l'ordinateur sur ses genoux. Il se devait de profiter de son temps libre et de son moral pas trop bas pour être efficace. Lorsqu'il descendrait à nouveau à un point critique, nul doute qu'il serait impossible pour lui d'avancer. Alors, Stiles se concentra et tapa sur son clavier, récolta quelques informations à l'aide de quelques notes dont Derek lui avait fait part par message, sans se douter une seule seconde du tournant que sa journée allait prendre.
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