Chapitre 17
Le tissu du drap épouse parfaitement son corps, le recouvrant jusqu'au milieu du dos.
Il n'a pas besoin de plus pour être à l'aise, puisque le lit est déjà bien assez chaud de la sorte. Encore profondément endormi, il frotte instinctivement sa tête sur son oreiller, appréciant la douceur du tissu. Tout est appréciable autour de lui. Il y a cette atmosphère délicate qui plane dans la pièce, le glissant toujours dans ce cocon douillet et réconfortant.
Izuku ne se rappelle plus de la dernière fois qu'il a passé une aussi bonne nuit. Certes, la fatigue pèse encore sur tout son corps, qui est bien endolori par son rythme affreux tenu pendant ces trois dernières semaines. Mais ici, le jeune homme pourrait presque dire qu'il se sent bien.
Totalement en paix, et à sa place.
« - Arrête, tu vas le réveiller... »
Tout est pratiquement parfait, à part ces quelques chuchotements qui parviennent jusqu'à lui. À peine audibles, mais suffisants pour troubler son repos bien fragile, et le mener de force vers l'éveil. Il sent d'ores et déjà ses paupières qui tressaillent légèrement, et la lumière jaunâtre parvenir à ses pupilles. Une vague sensation de chair de poule se diffuse sur son épiderme, tandis que le contact de deux corps se fait sentir contre lui.
Le musicien ne se sent pas du tout oppressé, ni même dérangé par ces présences. Au contraire même, il se laisse glisser davantage dans le confort, surtout lorsqu'un visage se place au creux de son cou.
« - Il a besoin de dormir, il est épuisé.
- Kumo va se ramener aussi, t'as cru qu'elle allait le laisser pioncer ?
- Elle est plus prévenante que toi.
- Crétin.
- Blaireau. »
Les murmures, qui n'en sont plus réellement, parviennent maintenant clairement à ses oreilles. Malgré tout, il tente vainement de les ignorer, afin de grappiller quelques minutes de sommeil supplémentaires. Le repos ici paraît salvateur, et il veut en profiter jusqu'au dernier instant.
« - Mais tu sais...
- Non arrête, faut qu'il dorme ! »
Dépité de voir le sommeil fuir désormais bien loin de lui, Izuku souffle bruyamment. Il n'arrivera plus à retomber dans les limbes du monde de l'endormissement.
« - Si vous voulez que je dorme, faudrait peut-être juste se taire. »
Il grommelle d'une voix rauque, tout en gardant les yeux fermés. Il ne peut cependant pas vraiment s'empêcher de sourire, de savoir qu'il se réveille entre Katsuki et Eijiro, bien que cela se passe dans des conditions particulières.
D'ailleurs, après quelques instants, le garçon finit par ouvrir laborieusement les yeux. Devant lui est allongé Eijiro, qui lui sourit gentiment tout en étant pourvu d'un air sincèrement désolé sur le visage. Celui-ci lui caresse la joue avec son pouce, et Izuku ne peut réagir autrement qu'en rougissant, quand il constate leur proximité. Derrière lui, lové tout contre son corps avec ses bras passés autour de son torse, il y a Katsuki, qui parsème la peau de son dos de quelques baisers légers, à peine perceptibles.
« - Salut, Izu.
- Coucou, Eiji. »
Eijiro se rapproche de lui, et dépose ses lèvres sur les siennes doucement. Une sensation de chaleur se diffuse dans le thorax d'Izuku, tandis que ses joues virent couleur coquelicot. Et cette impression prend encore en intensité, lorsque Katsuki se redresse et l'incite à tourner la tête dans sa direction en un geste, pour lui aussi l'embrasser.
Il est moins doux que Kirishima, et se permet même de lui coincer la lèvre inférieure entre ses dents, tout en ricanant quelque peu, très fier de sa manœuvre.
« - Bonjour, Deku.
- Salut, Katchan. »
Cela ressemble pratiquement à un rêve. Le musicien a beaucoup de mal à se dire qu'il vient de passer la nuit entre ces deux apollons, après qu'ils se soient chacun déclarés.
La journée de la veille lui revient peu à peu en mémoire. Forte en émotions et en changements. Il est passé de faire la larve sur son canapé, à une conversation avec Shoto, qui l'a traîné de force jusqu'ici. Et puis, il y a eu les retrouvailles avec eux et Kumo, qui lui a sauté dessus comme si sa vie en dépendait, trop heureuse de le revoir.
Ensuite, tout s'est enchaîné un peu trop vite pour son esprit épuisé, qui s'est laissé difficilement porter par les évènements.
Les paroles prononcées par les garçons sont encore là, ancrées dans sa mémoire. La totalité de leurs mots tourne en boucle, essayant tant bien que mal de prendre le pas sur tout le reste. Chasser la peur et l'angoisse n'est pas chose aisée, et la démarche peut s'avérer bien complexe.
Pourtant, au-delà de ça, les souvenirs de cette nuit auprès d'eux semblent bien plus forts en puissance que tout le reste.
Son palpitant s'emballe, quand il y repense. Cette demande, formulée au creux de son tympan, ponctué du regard suppliant d'Eijiro.
« - Deku, passe la nuit ici s'il te plaît... »
Izuku n'a pas mis longtemps avant d'accepter, encore grisé par les sensations provoquées par leurs baisers, mais aussi sa volonté qui paraissait s'étioler petit à petit. Il avait désespérément besoin de se ressourcer auprès d'eux, pour avoir encore l'impression d'être vivant et capable de ressentir certaines choses.
De toute manière, il n'aurait probablement pas pu refuser. Tout se passait relativement bien, et il n'avait pas de raison valable de fuir. Shoto l'aurait certainement laissé là-bas, en prétendant agir pour la bonne cause. Et Kumo aurait campé devant la porte d'entrée, en grognant s'il avait seulement tenté de s'en approcher.
Tous les signes étaient donc réunis pour l'inciter à accepter cette requête, qu'il n'avait pas sincèrement envie de refuser de toute manière.
« - T'as bien dormi Deku ?
- Beaucoup trop bien. À part ce matin, j'avais deux parasites qui me blablataient dans les oreilles, plaisante le garçon. Et vous ?
- Oh toi, tu perds rien pour attendre ! »
Comme d'habitude, Katsuki ne se fait pas prier pour le faire ployer sous une attaque de chatouilles, tout ceci sous le regard franchement amusé de Kirishima, qui rejoindrait presque Izuku dans son rire, à juste observer la scène.
Il finit par se lever, sans doute d'abord par protection, pour ne pas se prendre un coup de la part de l'un ou l'autre des deux garçons. Puis, il décide de s'habiller et part en direction de la cuisine, afin de leur préparer le petit déjeuner.
Le musicien ne le voit pas sortir de la pièce, trop occupé à hurler de rire. Son souffle commence même à lui manquer, l'empêchant de sincèrement se concentrer, ou énoncer quoi que ce d'autre que quelques supplications envers son bourreau.
« - Katchan ! Katchan ! Arrête ! Parvient-il à articuler laborieusement, entre deux gloussements intenses.
- Mmh, et si je veux pas ?
- S'teuplais ! Katchaaan ! »
Le blond cesse partiellement sa torture, et l'observe de haut, tout en haussant un sourcil. Il fait un large sourire, presque carnassier, qui dévoile ses canines.
« - Si j'arrête, tu me fais un bisou ?
- Je rêve...tu m'extorques de l'affection ?
- J'peux recommencer le nerd...
- Naaaan c'est bon, viens là. »
Izuku n'attend pas plus pour l'attraper par les épaules, afin de l'abaisser à sa hauteur. Il lui plaque un énorme bisou sur la joue, le tout ponctué de quelques rires de la part du libraire, qui s'amuse beaucoup de la situation.
Celui-ci finit par se calmer, et se poser à sa gauche, de manière à pouvoir l'attirer tout contre lui. Il enferme le jeune homme au creux de ses bras, et Izuku se laisse faire sans trop broncher. Il ne sourcille même pas, lorsque le husky s'incruste dans le lit, et leur grimpe dessus sans faire preuve de délicatesse.
Il se sent bien là, dans cette chambre, à se laisser aller dans une étreinte emplie d'amour, tandis qu'Eijiro n'est pas loin d'eux. Son muscle cardiaque vibre à cette pensée, pendant que son sternum crépite chaleureusement.
Le contact des mains de Katsuki sur lui l'apaise progressivement, maintenant loin de lui ses pensées négatives, qui menacent tout de même de le rattraper au vol. Après tout, malgré ces rapprochements probants, ainsi que cette nuit partagés tous les trois, ils n'ont pas vraiment officialisé quoi que ce soit. Ils se sont contentés de commander quelques pizzas, de laisser les sujets qui fâchent bien loin, et de profiter de cette accalmie.
Ils se sont embrassés autant que possible, mais surtout autant qu'ils en ressentaient l'envie. Le jeune homme s'est focalisé uniquement sur tout ceci. Parce que pour une fois, il a voulu essayer de privilégier son propre bonheur, même s'il ne s'agissait que de quelques heures.
Il progresse petit à petit, voyant où tout ceci va le mener, pendant que son esprit livre une bataille acharnée pour le délivrer de ses démons acerbes et sanglants.
« - Plus sérieusement Deku, comment tu te sens ? Et n'essaye pas de mentir. »
Il soupire légèrement, conscient que le mensonge ne lui apportera rien. S'il veut se battre, il doit être totalement honnête et ne rien cacher de ses ressentis. Parce qu'il veut avoir le droit de les aimer. Il le désire plus que tout.
« - J'ai vraiment bien dormi. Et je me sens bien là, avec toi et Eiji.
- Mais ?
- Je suis encore un peu perdu sur tout ça. Encore un peu en vrac. Même si j'ai la ferme intention de me battre pour vous deux. »
Katsuki hoche la tête devant sa confidence, et se lève presque aussitôt, en essayant de se couvrir d'une expression chaleureuse et encourageante. Il lui tend une main, pour l'inciter à suivre le même chemin.
« - Viens Deku, on va aller parler avec Eiji. »
Le musicien n'oppose strictement aucune résistance, et suit volontiers le mouvement. Il a bien compris son erreur de la toute première fois. Avoir voulu gérer tout ceci seul, et sans leur aide, ce n'était pas la bonne démarche à suivre.
Il doit se fier à la confiance qu'il leur porte, comme ils l'ont mentionné hier soir. C'est elle la clé de tout, qui le conduira à trouver la paix dans cette vie délicate et complexe. Elle qui lui permettra de se poser dans ses choix.
C'est ainsi qu'ils se retrouvent tous les trois dans cette cuisine. Celle-là même où ils ont déjà tant conversé par le passé, et qui a accueilli bon nombre de leurs confidences. Passant outre ses réticences, malgré un petit temps d'arrêt au premier abord, Izuku se place dans le dos d'Eijiro et passe ses bras autour de lui.
Le tatoueur, concentré sur sa tâche, écarquille les yeux avant de rougir fortement. Il mordille doucement sa lèvre, dans un geste à peine perceptible, tout en posant sa propre main sur celles de Deku, qui sont sur son torse. Ce contact le chamboule profondément, et il se sent complètement renversé de le savoir juste là.
Il finit d'ailleurs par se retourner, pour pouvoir le serrer à son tour dans ses bras. Kirishima a besoin d'un petit peu d'Izuku, pour se sentir bien. Après avoir rêvé si longtemps de cette proximité, il en savoure chaque grain, auquel il peut avoir accès.
Aussi, il apprécie de voir le garçon resserrer son câlin, et glisser sa tête sur son épaule, comme s'il cherchait à se cacher quelques instants.
« - Hey ? Ça va, Izu ? » Chuchote-t-il auprès de son oreille.
Le garçon hoche la tête, sans pour autant daigner se redresser. Il reste là, éperdument accroché à lui, comme si la perspective de le lâcher revenait à se manger la réalité de plein fouet et à grande vitesse.
Alors, Eijiro ne rajoute rien de plus, et se contente de le garder contre lui. Ses bras croisés dans son dos, il frotte affectueusement sa peau à l'aide de ses paumes, et finit par le bercer sans trop préméditer son geste.
« - Je vais finir de préparer le petit-déj, ajoute Katsuki discrètement.
- Merci Kat's. »
Le blond lui sourit et l'embrasse furtivement en passant. C'est surprenant et plaisant, la facilité avec laquelle cette routine en trio s'immisce dans leur esprit. Katsuki et Eijiro apprécient grandement cette présence, sans même réfléchir à ce que cela peut entraîner.
Peut-être parce qu'ils y ont suffisamment songé, durant l'absence d'Izuku, et qu'ils ne veulent plus que profiter de ce qui leur est accordé, sans se préoccuper du reste.
Même le libraire, qui était pourtant le plus réfractaire entre eux deux, semble être celui qui s'adapte le plus aisément à tout ceci. À croire qu'ils avaient seulement besoin de le retrouver, et de se laisser porter, pour se sentir bien mieux.
Izuku ignore combien de temps il reste là, à se morfondre dans les bras d'Eijiro. Mais il ne veut pas partir de là. C'est trop confortable et accueillant, trop précieux pour qu'il ne daigne s'en éloigner volontairement. Il apprécie fortement ce contact, qui relève presque de la normalité, et qui lui met du baume au cœur. Comme si chaque seconde passée contre l'un ou l'autre des garçons venait panser ses blessures une à une.
Il est cependant certain qu'il y reste un bon moment. Surtout quand la voix de Katsuki s'élève dans son dos, pour les prévenir que le petit déjeuner est prêt. Est-ce pour ça qu'il a voulu s'éloigner des garçons ? Parce que plus il se sent proche d'eux, plus sa capacité de réflexion est amoindrie ? Auprès du duo, tout lui paraît possible. Il pourrait gravir des montagnes sous couvert de les savoir derrière lui. Alors, pourquoi ne pas imaginer qu'il peut être heureux et amoureux ?
« - Tu viens Izu ?
- Ouais, je viens. Juste une petite seconde. »
Peu fier de s'éclipser de la sorte, Izuku s'évade tout de même quelques instants, en prétextant un passage à la salle de bain rapide et s'enferme dans la pièce. Il se mord la lèvre, sans chercher à faire preuve de délicatesse. Preuve en est, qu'il s'en tire avec la trace de sa morsure, et quelques gouttes de sang qui s'échappent de la plaie. Tout ça parce qu'il a bien trop maltraité cette zone durant ses longues journées à tergiverser, là-bas sur son vieux canapé, à pleurer sous ses plaids.
Son cœur tambourine dans sa poitrine, et sa respiration peine à suivre le mouvement. Malgré ses heures de sommeil, qui l'aident à gérer les choses plus aisément qu'au bord de l'épuisement. Il ne parvient pourtant pas à tout trier.
Il a envie d'y croire, profondément et éperdument. Mais il a besoin d'un coup de pouce. Ou même mieux, d'un coup de pied au cul. Juste de la motivation nécessaire pour le détacher de cette sensation affreuse. Celle-là qui l'a éloignée de ses amants. Il lui faut l'entendre de quelqu'un, pour couper ce fichu morceau qui le raccroche à ses peurs.
Ainsi, elles ne s'en iront peut-être pas définitivement. Cependant, il aura suffisamment d'amplitude et d'élan pour agir comme bon lui semble. Pour s'avancer vers ce que lui hurle son âme de toutes ses forces depuis déjà bien trop longtemps.
Tremblant, il attrape son mobile dans la poche de son short, et compose fébrilement le numéro. Mentalement, le musicien s'excuse de probablement le déranger dans son quotidien, encore. Il se promet également de lui offrir un panier garni, et de les emmener, lui et son compagnon, au restaurant, pour se faire pardonner de la gêne occasionnée.
« - Allô ?
- Sho' ??
- Izu ? Qu'est-ce qui t'arrive ? Ça va pas ? »
Le jeune homme inspire bruyamment, tandis que l'une de ses mains s'accroche à la vasque devant lui. Il rassemble de manière hasardeuse toutes ses idées, tout en mettant un immense stop à son angoisse grandissante. Il doit cesser de reculer.
« - Je...J'ai besoin de toi...
- Faut que je vienne te chercher ?
- Non, c'est pas ça.
- Va me falloir plus d'infos Izuku là, tu me paumes légèrement.
- J'ai juste besoin d'entendre certaines choses. Et j'sais que t'es le mieux placé pour m'aider.
- Qu'est-ce que tu as besoin que je dise ? »
Quelques larmes perlent au bord de ses yeux, pendant que cette lutte persiste. Il commence à gagner du terrain, petit à petit, après en avoir tellement cédé dernièrement. C'est la bataille finale qui se dessine ici. Celui qui gagnera ce combat acharné remportera également la guerre. Alors il ne peut rien laisser au hasard, et son plus précieux allié n'est autre que son meilleur ami.
« - J'ai pas envie de rentrer chez moi, lâche-t-il, presque larmoyant.
- Peut-être parce que tu es déjà chez toi ?
- Tu crois ?
- Bien sûr que oui Izu. Je sais pas comment s'est terminée cette soirée. Mais si tu es encore là-bas, je devine que c'est parce qu'il y a eu du mieux. Écoute... t'as suffisamment pleuré comme ça et été éprouvé. Ton bonheur, c'est maintenant qu'il se dessine. Il est juste à portée de main. Il est juste devant toi. Est-ce que t'as envie de passer à côté de ça ? Est-ce que t'as envie de te réveiller dans six mois, et de te dire que tu regrettes d'avoir laissé passer tout ça ? »
Ses paroles l'atteignent de plein fouet, l'incitant à voir un peu plus loin. S'il cède à ses frayeurs aujourd'hui, que ressentira-t-il dans quelques mois ? En tout juste trois semaines, Izuku a pratiquement eu l'impression de mourir. Tout déclinait à grande vitesse, et la machine se grippait dangereusement, menaçant de cesser de fonctionner à chaque instant.
« - Je sais pas si c'est que tu attends une validation, ou je sais pas quoi. Mais si tu veux juste que quelqu'un te conforte dans ce choix, alors crois-moi, on sera plusieurs à le faire. Moi, Sero, Denki... Et les garçons qui doivent être en train de t'attendre. D'ailleurs, t'es planqué où là pour me parler ?
- Dans la salle de bain... J'étais en train de paniquer.
- Je vois, lâche Shoto en ricanant doucement. Retourne les voir Izu, et soyez heureux. Si tu laisses tes peurs contrôler toute ta vie, alors tu n'existeras plus jamais. T'es amoureux de ces deux loustics, alors maintenant va leur prouver. »
Izuku sourit faiblement, toujours soulagé de constater que son meilleur ami le poussera dans la bonne direction, sans rien trouver à redire sur ses excès d'angoisse.
« - Merci Sho'... T'es le meilleur.
- T'en fais autant pour moi. Allez file maintenant.
- Ouais j'y vais... Salut, et passe le bonjour à Sero de ma part. »
Le garçon approuve, avant de couper l'appel, laissant le musicien définitivement seul dans cette salle de bain. Pratiquement regonflé à bloc, et empreint d'une détermination nouvelle. Pourquoi continuerait-il à craindre quelque chose qui ne s'est pas produit ? Et qui n'interviendra peut-être jamais ?
Tout ça, c'était juste...avant eux non ?
Izuku s'observe quelques instants dans le miroir. Il a presque envie de sourire, et même de rire. Il est totalement amoureux. Raide dingue de ces deux personnes absolument géniales, qui sont prêtes à beaucoup pour lui, pour lui permettre de trouver la paix. C'est tout ce qui importe, tout ce qui suffit.
« - Izuku ? Ça va ? »
Les trois coups sur la porte le sortent de ses pensées, tandis que la voix de Katsuki se fait entendre derrière le bois. Le musicien n'attend pas plus, et ouvre. Il se heurte à un libraire perplexe, qui fronce les sourcils. Le jeune homme lui attrape la main, et l'entraîne vers la table de la salle à manger, à laquelle Eijiro est déjà assis.
« - Mais Deku qu'est-ce que t'as ?
- Faut que je vous parle !
- D'accord, d'accord. »
Il l'oblige à s'asseoir à son tour, tandis qu'il se poste juste devant eux, sans pour autant prendre place sur l'une des chaises. Il les surplombe de toute sa hauteur, et se retrouve confronté à deux regards emplis de curiosité.
« - Mais qu'est-ce qui vous arrive à tous les deux ?
- Hé ! Je voulais juste savoir comment il allait moi à la base.
- J'dois vous parler les garçons. »
Une petite once de panique se fait sentir chez le duo. Eijiro cherche instinctivement la main de Katsuki, sans doute effrayé de savoir ce qui va être énoncé.
Izuku reste en face d'eux, les deux mains posées à plat sur le plateau en bois, les prunelles légèrement baissées. Il contrôle sa respiration quelques secondes, et se relève soudainement, pris d'une énergie incroyable, ainsi que d'une pulsion qu'il se doit de saisir et de ne surtout pas laisser filer.
« - Je n'ai pas répondu à tout ce que je vous ai dit hier soir. Et c'est pas juste parce que... Vous vous êtes mis à nu, vous vous êtes confiés. Moi je me suis contenté de dire que j'avais peur, sans vraiment apporter une réponse à votre déclaration.
- Izu, on comprend que tu puisses avoir peur. C'est pas rien comme changement et...
- Je sais. Désolé Eiji je te coupe la parole. Mais là, je sais ce que je veux d'accord. Et j'ai le courage de le dire, et je sais pas combien de temps ça va durer. Je sais pas si je vais réussir à maintenir le cap quinze plombes. Vous allez sans doute en avoir marre de me ramasser les premiers temps... »
Le garçon s'arrête quelques secondes, et réprime ce surplus d'émotion qui le fait succomber. Ce n'est pas le moment de craquer. Il lui faut juste encore un peu de temps.
« - Si vous avez pas peur d'avoir un mec brisé auprès de vous... Si vous êtes pas effrayés à l'idée de devoir le réconforter, et lui expliquer que ses craintes sont juste des illusions qui l'aveugle, alors... Je veux pas repartir. Je veux pas retourner dans ce putain d'appart sans vous. Je veux plus jamais être loin de vous deux.
- T'es...T'es sérieux Deku ? Ça veut dire que tu acceptes de revenir vivre avec nous ? »
Katsuki s'est relevé pratiquement aussitôt sa phrase terminée, tandis qu'Eijiro garde le silence. Mais ses yeux sont gorgés de larmes, à l'entente de cette confession.
« - Ouais. J'suis même prêt à aller faire mes cartons maintenant Katchan... Tout ça, toutes ces craintes et ces emmerdes. C'était avant vous. C'est pas la même chose. Et même si je sais que ça me fait peur, j'ai encore plus peur de vous voir vous éloigner de moi. »
Katsuki sent son souffle se couper, et peine à en reprendre le contrôle. Il a tout juste conscience de son corps qui bouge, pour faire le tour de cette maudite table qui le sépare de son second conjoint, afin de l'attraper. Il le fait tournoyer quelques instants, provoquant son rire. L'euphorie est présente dans cette maison, atteignant même Kumo, qui se met à japper autour d'eux.
Eijiro, quant à lui, semble avoir plus de peine à réaliser. Il est encore assis, le regard perdu dans le vide, les joues baignées de larmes. Izuku le remarque, et se détache du blond, pour venir à sa hauteur. Il s'assied sur ses genoux, le faisant sortir de sa léthargie, et l'obligeant à concentrer son attention sur sa présence.
« - Tu restes, Izu ?
- Je reste, Eiji...
- Putain dis-moi que c'est pas un rêve ? Parce que si c'est le cas, j'veux jamais me réveiller.
- C'est pas un rêve, Eiji.
- C'en est pas du tout un, lui murmure le libraire au creux de l'oreille.
- On est ensemble ? Tous les trois ?
- Si vous voulez de moi... Ouais... »
Le tatoueur pose une main sur sa joue, et l'embrasse avec empressement. Il peine à lâcher Izuku, qui suit la cadence en souriant, acceptant le moindre contact qui s'initie entre eux. Puis, quand ils finissent par se séparer, Katsuki dépose ses lèvres sur celles d'Eijiro, les dévorant de manière gourmande, avant de faire de même avec le musicien.
« - Bien sûr qu'on veut de toi, Deku... »
C'est une explosion de joie qui s'empare du domicile. Chassant à grand coup de balai les quelques mauvais camarades qui s'étaient invités jusqu'à maintenant.
Au revoir l'amertume, adieu le désespoir et leurs amis qui se sont incrustés sans même demander l'avis de qui que ce soit. Par les fenêtres ouvertes, et grâce à leurs étreintes, il n'y a que ce concentré pur et ultime de bonheur qui rentre désormais.
Et tout le monde dans le quartier doit en avoir conscience. La maison doit irradier d'une énergie nouvelle, qui se propage à travers toute la rue. Leurs rires, accompagnés de la musique qu'ils viennent de lancer sur l'une de leurs enceintes, ainsi que les aboiements de Kumo qui se joint à la partie. Il n'y a plus que ça qui compte.
Ça et l'avenir qui se profile à l'horizon. La vie se construit bien différemment désormais, et plus rien n'a la même saveur. Tout est plus fort, plus intense, plus...tout. C'est indéfinissable, indescriptible, mais surtout indéniable.
Qui aurait pu le préméditer, la toute première fois qu'ils se sont rencontrés dans ce fameux café.
Qu'ils venaient de trouver la plus belle histoire de leur vie.
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