23-2. Coeurs en étau

En média "You lost me" cover de Xtian Aguilera

Je fais le pied de grue depuis plusieurs minutes déjà face à la porte du pavillon des Beauchamp, quand je me décide enfin à sonner. N’entendant aucun bruit ni mouvement à l'intérieur, je tente une seconde fois. Mon doigt est encore sur la sonnette quand la porte s’ouvre sur un Manoé en tee-shirt moulant blanc et jogging, casque audio vissé autour du coup d’où s’échappent des notes bruyantes de hard rock. Je bloque un instant sur ce torse contre lequel j’aimerais encore une fois me blottir. Je lève mes yeux vers sa mâchoire crispée jusqu’à atteindre ses yeux qui m’ont tant manqué. Je vacille face à l’éclat meurtrier avec lequel ils me transpercent.

_ Tu veux quoi ? m’apostrophe-t-il rageusement.

_ Je…

_ Qu’est-ce que tu n’as pas compris dans mon message ? Je t’ai demandé de m’oublier Mélissa ! continue-t-il les dents serrées.

_ Je voudrais te parler, pour comprendre, bafouillé-je, déstabilisée par sa colère que je ne comprends pas.

_ Tu veux comprendre ? Ça tombe bien puisque moi aussi, il y a certaines choses que je n’ai pas comprises. Du genre, à quel moment tu t’es dis que tu pourrais te servir de moi ? 

_ Quoi ? Mais c’est du délire ! C’est moi qui devrais te poser la question ! rétorqué-je, la colère reprenant ses droits en moi. Pouvons-nous entrer s’il te plaît ? Je ne tiens pas à nous afficher devant tes voisins !

_ Ah bon ? Pourtant c’est bien toi qui me tannais pour afficher au grand jour notre couple ! Donc voilà ! Madame est servie ! Par contre, tu m’excuseras mais la déblayeuse de terrain que j’ai été préfère sortir de la partie. Allez c’est bon, fous le camp, tu peux aller le retrouver.

_ Mais qu’est-ce que tu racontes ? C’est toi qui a parié ma tête avec tes potes ! C’est toi qui te fous de moi depuis le début ! Tu n’as pas le droit d’être fâché, lui énoncé-je à bout de souffle en appuyant mon doigt contre son torse à chaque accusation. Et c’est quoi cette histoire de déblayeuse ? Qui est-ce que je suis censée retrouver ? 

_ ARRÊTE Mélissa ! Arrête de faire l’innocente ! Je vous ai vus ! Je t’ai vue dans ses bras ! Alors arrête et assume, merde !

_ Tu m’as vue dans les bras de qui ? lui demandé-je abasourdie.

_ Tu n’étais pas que dans ses bras, il était aussi dans ton lit, Mélissa ! Ce même lit dans lequel tu m’as donné ton corps encore et encore. Ce lit où je t’ai bâillonnée de ma bouche ou de ma main pour que tu ne hurles pas tout le plaisir que je te donnais tandis que ta grand-mère pionçait à côté ! Je t’y ai vue avec Mr Sarault ! prononce-t-il tout bas, pour inconsciemment me protéger d’oreilles indiscrètes.

_ Tu m’as vue avec Paul ? Quand ? 

_ Paul ? On en est carrément aux affinités ? Et puis tu ne nies plus finalement ! J’étais quoi, moi ? Ton galon d'essai avant de t’attaquer à notre prof ? Tu voulais être plus expérimentée pour lui, c’est ça ? me crache-t-il au visage, méprisant. Carla t’a juste donné l’excuse parfaite pour te le faire dans mon dos !

_ Tu n’y es pas du tout ! Paul est mon ami. Je sais que je ne t’en ai jamais parlé parce qu’il voulait garder la discrétion face aux autres lycéens...

_ Tu m’étonnes ! C’était bien pratique pour vous deux, m’interrompt-il mauvais.

_ Je ne sais pas ce que tu crois avoir vu mais Paul Sarault est mon ami et l’épaule sur laquelle j’ai déversé ma peine après la mort de Loly.

_ Qu’est-ce que notre prof de français a à voir avec la mort de ta meilleure amie ?

_ Paul est le frère de Loly ! Héloïse Sarault que nous appelions tous Loly ! Voilà ce qui les lie, ce qui nous lie, lui et moi. Leurs parents sont aussi mes voisins et c’est avec eux que je suis partie la semaine dernière. Tu fais fausse route, Manoé, il n’y a jamais rien eu entre Paul et moi et il n’y aura jamais rien car il est comme un grand frère pour moi, ma voix se brise sur cette dernière affirmation qui n’est qu’une demie vérité concernant Paul mais le châtain face à moi n’a pas besoin que j’ajoute de l’eau à son moulin.

_ Ok ! Donc, en plus de pouvoir vous voir en dehors de l’école, qu’il ait accès à ton lit pour te consoler, dit-il ses doigts formant des guillemets, tu m’annonces, là, que tu viens de passer une semaine avec lui et sa famille ! Bravo Mélissa ! Tu arriverais à vendre des lunettes de vue à un aveugle ! Tu sais quoi ? J’en ai assez entendu pour aujourd’hui. Tu devrais t’en aller.

_ Non ! Tu me congédies rapidement mais même si tu ne veux pas croire mes explications, j’ai le droit d’entendre les tiennes concernant les propos de Carla.

_ Tu veux entendre quoi ? Que j’ai parié que j’arriverai à te faire céder ? Que j’accéderai par la même occasion à ta petite culotte ? C’est ce que tu veux entendre ? Tout ce qu’il faut retenir, c’est que même si elle a agi comme une peste, Carla n’a menti à aucun de nous. C’est bon maintenant, rentre chez toi Mélissa ! m’ordonne-t-il avant de me claquer la porte au nez.

Alors je rentre chez moi machinalement, sans prendre conscience du chemin parcouru. Je suis vide, blessée, dépossédée. Ce n’est pas tant la confirmation du pari qui me tourmente mais le fait que Manoé ne voit en moi qu’une manipulatrice, capable de s’offrir à un garçon pour pouvoir combler un autre homme. Il a si peu d’estime de moi que ça me tue. Il y a encore quelques semaines, nous parlions de nos projets communs futurs, après l’obtention du bac. Lui étudiant à Versailles et moi, soit à Cergy soit à Créteil pour rester en région parisienne et nous voir autant que nos emplois du temps nous le permettraient. Aujourd’hui, il me méprise. 

Je regrette de ne pas lui avoir dit pour Paul. Si je l’avais emmené au cimetière avec moi, comme il me l’avait proposé un jour, il l’aurait compris de lui même et je n’aurai pas eu l’impression de trahir mon ami. 
Je regrette d'être partie cette nuit-là sans avoir tenté de confronter Carla et sa bande de potes.
Je regrette ma faiblesse qui a ouvert mes draps à mon ami et déclenché ce chaos sentimental.

A ces regrets, se mêle aussi de la colère. J’en veux à Manoé de m’avoir considérée comme une simple mise de pari. Je lui en veux de ne pas nous faire confiance. Et surtout, je lui en  veux de ne pas m’aimer comme moi je l’aime.

Peu motivée pour entreprendre une discussion vidéo avec mes amis, je leur envoi simplement un message groupé.

Moi : J’ai vu Manoé. La rupture est confirmée. Pas le moral ce soir. Bonne journée. 

Mamie vient me dorloter dans l’après-midi mais elle est impuissante face à mon chagrin et je ne cherche plus le réconfort. Je veux juste m’oublier, tout oublier…

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Coucou mes BeeLoved !

Alors cette confrontation ? Elle fait grincer des dents n'est-ce pas ?
C'est fou comme le Faux bourdon reste sourd aux explications de Mel !

La version masculine de la chanson en média n 'est pas anodine. Elle révèle l' état d'esprit dans lequel se trouve Manoé !

Je reconnais que pour le coup, il nous inspire des sentiments contradictoires : on a autant envie de le secouer que de le réconforter, de le baffer que de le rassurer.

Pauvre petite abeille ! Saura-t-elle passer par-delà le mur d'indifférence qu'il dresse entre eux ?

Préparez bien vos cœurs ! Nous ne sommes qu'au début de leurs montagnes russes ! 😈😈😈

Bisous sadiques
Namsra

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