Feu, chapitre 4
A jamais le premier
De tous les clubs français
Ô H. A. C.
Fier de tes origines
Fils d'Oxford et Cambridge
Deux couleurs font notre prestige
Ciel et marine
L'hymne du Havre résonne dans le petit salon et Élise ne peut retenir un sourire amusé. Elle ne le chante pourtant pas alors qu'il est repris en cœur par la quasi totalité de la tablée. Le match est projeté sur la télévision trônant dans le salon alors que l'ensemble des convives partagent une tartiflette. Par ce froid d'hiver, c'est le plat parfait.
Elle partage un regard amusé avec le cousin qui semble être septique quant au fait qu'il faille vraiment se lever pour chanter l'hymne du club numéro un en Normandie au milieu du repas alors que les joueurs font leur entrée sur le terrain. La voix de la rousse se mêle aux autres alors qu'elle énonce les phrases qu'elle connait à force de faire des soirées avec les habitants du secteur. Elle reste silencieuse alors qu'elle a sur le bout de la langue que trois phrases ne sont pas une hymne.
La discussion s'enclenche. Elle découvre chacun de ses interlocuteurs du soir. Les anecdotes de travail d'un mécanicien de la troupe sont racontées. Elles tournent toutes autour de son patron qui a l'air d'être un sacré phénomène. Dans les moments comme ça, la médecin est heureuse d'être à son propre compte malgré le fait qu'elle peut avoir des collègues pour l'épauler si nécessaire. Elle rit de sa situation alors que Domi la vanne légèrement.
Quand tous se lèvent de leur siège quelques minutes plus tard quand l'attaquant havrais marque, elle en oublie le repas et qu'elle trouvait quelques minutes plus tôt la situation amusante. Oui, Élise a fait la paix avec le fait qu'un autre club que le Racing Club de Lens peut occuper une petite place dans son cœur depuis quelques temps.
— Eh ben Élise, quand est-ce qu'on te voit avec un maillot ciel et marine ?
Son rire éclate en réponse.
— Y a des limites à mon acceptation et mon intégration ici !
Quelques éclats de rire et sourires lui répondent tandis que la malice brille dans son regard foncé. Se faire embêter sur le sujet par sa coéquipière est récurrent.
— Elle est très fière du club de sa région.
La phrase arrive comme une explication et la médecin sent le regard intrigué que Pierre pose sur elle à ce moment-là. Elle croise son regard quelques secondes et se perd dans le regard froid qui semble lire en elle.
— A raison, vous aussi vous supportez votre club local. Et c'est bien, je comprendrai jamais les gens qui supportent pas le club de chez eux.
Des éclats de rire se mettent à résonner alors que le blond se fait chahuter pendant quelques secondes. Elle observe la scène sans tellement la comprendre. Sa fourchette plonge dans son assiette et elle porte une part de l'agréable plat à sa bouche, ne s'en souciant que peu.
Ils ont à présent tous migré en direction des canapés confortables présents dans le salon pour la seconde mi-temps du match très disputé. Des jurons résonnent régulièrement, amusant la rousse qui reste malgré tout extérieure à la situation. Mais elle profite de l'ambiance conviviale et de l'agréable possibilité de passer la soirée en compagnie de personnes de son âge.
Ses prunelles dérivent régulièrement par le poêle où des morceaux de bois sont en train de brûler. Elle est hypnotisée par les flammes s'élevant. Elle ne peut s'empêcher de les trouver magnifiques, alors même qu'elle sait les dégâts qu'elles peuvent provoquer une fois incontrôlées.
— Faudrait quand même qu'on prenne le dessert.
Elle se lève pour alors, elle peut bien participer un peu. Elle l'a fait en préparant les pommes de terre, mais cela restait faible en comparaison au coup de main qu'on lui fournit en cet instant.
— Je vais le chercher.
Les visages se tournent dans sa direction tout en souriant. Elle est de toute façon bien moins intéressée par le match qu'eux. Elle disparait en direction de la cuisine, sachant parfaitement on trône le gâteau qui a été confectionné plus tôt dans la journée.
— Alors tu supportes qui comme club si tu supportes pas le HAC ?
Une voix résonne derrière elle dans la pièce et elle sursaute immédiatement. Un rire s'élève alors qu'elle a fait un bond et elle reconnait Pierre qui se tient dans l'embrasure de la porte, l'observant avec un regard amusé par la situation. La lumière tombe sur ses mèches blondes qui semblent briller sous celle-ci, bien loin de son visage souriant légèrement, mais dont une lueur brillant dans ses yeux océan lui reste impénétrable. Et Élise déteste ça, parce qu'elle a toujours aimé lire ce que les gens pensent à leurs yeux et elle n'y parvient pas.
Pierre observe la rousse qui se tient un peu plus loin à table depuis le début de la soirée. Elle ne se départit jamais de son sourire qui illumine son visage. Avec ses cheveux flamboyants, elle capte toute son attention depuis qu'il a posé ses prunelles bleutées sur elle quelques heures plus tôt. Il note qu'elle ne semble pas chanter l'hymne aussi vigoureusement que les autres membres de la tablée, un peu comme lui peu le faire.
— Tu parles d'une arnaque à l'assurance, j'avais cinq fenêtres à changer parce qu'elles étaient mortes et toutes les autres étaient parfaitement neuves. Y en a que cinq qui ont survécu, c'est celles-là !
Les rires éclatent devant la tête que fait celle qui est une médecin de ce qu'il a compris du début de conversation quand d'autres invités lui ont demandé ce qu'elle faisait dans la vie.
— Sacrée pyromane, elle a foutu le feu à l'agrandissement quasi neuf et pas au reste qui devait être refait !
Le rire cristallin d'Élise se mêle aux autres et chacune de ses réactions l'intriguent. Il ne comprend pas comment elle peut rire à ce point de sa mésaventure qui a vu ce qui semblait être un achat récent partir en fumée en quelques heures. Les photos l'ont profondément choqué. S'il a déjà été témoin de voitures flambant, il n'a jamais réellement vu de maison brulée et les dégâts étaient impressionnants.
— J'espère juste que l'assurance va se bouger, parce que ça a pas l'air d'être plus des skieurs de fond qu'alpin pour tout ! Ou des biathlètes aux viseurs mal-ajustés qui prennent dix tours de pénalité. Ça fait le spectacle, mais c'est plus lent !
— Toujours le ski hein ?
— Un sport, un vrai !
— Dit-elle en regardant un match de football. D'ailleurs anecdote, elle a prescrit un grand prix de formule un à papa comme somnifère quand il lui a dit avoir des problèmes de sommeil.
Une explosion de rire résonne.
— Comment ça ?
Sa voix résonne un peu trop fortement et de façon un peu trop énervée. Un regard peu impressionné se tourne alors dans sa direction se braquant directement dans le sien.
— T'as déjà essayé de regarder un grand prix ? Parce que le ronron des moteurs, c'est parfait pour une sieste dominicale, c'est d'ailleurs un grand point positif. J'ai eu un retour de patient qui a essayé et ça a fonctionné en plus !
Il s'étrangle avec sa boisson, toussant et la recrachant en partie. Il la détaille alors ensuite, cherchant à voir sa réaction, s'attendant à la voir éclater de rire. Mais la malice ne nait pas dans les prunelles le défiant de la contredire. Il comprend alors qu'elle est sérieuse et qu'elle doit ignorer qui il est. Il reste bouche bée devant la phrase ne sachant même pas quoi répliquer.
— Ça va aller Pierre, va pas nous faire un infarctus.
Il prend conscience que tous les visages sont dirigés vers lui, mais il pour une fois, il a perdu toute sa répartie. La conversation est brutalement stoppée alors qu'il cherchait une réponse quand tout le monde se lève et se met à hurler sur un but du club local. La conversation reprend par des vannes sur le club ciel et marine et une nouvelle phrase vient le piquer quand il se fait nettement charrier pour sa préférence pour le club de la capitale en comparaison à l'équipe du secteur.
— Pierre t'irait pas l'aider ? Elle aura pas assez d'une paire de bras s'il faut les assiettes !
Pierre la suit jusqu'à la cuisine, prenant une pile d'assiettes au passage pour la mettre dans le lave-vaisselle. L'idée de pouvoir discuter avec elle n'est pas sans lui déplaire, surtout que de nombreuses questions traversent son esprit. Il l'a détaillée alors que ses yeux se perdaient dans les flammes, ses cheveux paraissant se mettre à flamber à leur tour.
— Alors tu supportes qui comme club si tu supportes pas le HAC ?
Un rire lui échappe quand un sursaut la fait décoller lorsque sa voix résonne.
— Le meilleur club de France.
Il s'amuse de la réponse, si typique d'une personne supporter.
— Heureux de savoir que tu supportes également le PSG.
L'éclat cristallin s'élève en réponse.
— Non, je supporte vraiment le meilleur de France, celui qui vous en a collé quatre ce week-end.
Il peste une seconde en se remémorant l'humiliation vécue ce soir-là. Evidemment qu'il fallait qu'elle supporte le club nordiste, cela aurait été trop simple autrement. Il dépose les assiettes en plein milieu de la table alors qu'il la voit ouvrir un placard où on peut apercevoir les bols à travers la vitre.
— Toujours mieux que Marseille. Et c'est juste pour vous laisser un peu d'espoir, on prendra notre revanche au retour.
— Ouais, ouais, c'est ça.
Elle ne se retourne pas, absorbée par sa tâche. Il la laisse tenter plusieurs secondes alors qu'elle est sur la pointe des pieds mais ne parvient pas à atteindre les récipients. Il finit par la prendre en pitié et s'approche déposant doucement sa main sur son épaule.
— Je vais le faire, je crois qu'il te manque quelques centimètres pour éviter le drame.
— Les quelques centimètres parfaits pour ne pas se cogner dans les trucs pendant un peu trop bas.
Il pouffe face à la réponse, avant de prendre conscience qu'elle vient une nouvelle fois quasiment naturellement de transformer le négatif en positif. Il attrape trois bols et se tourne elle pour les poser dans ses mains avant d'aller chercher les suivants.
— Tu le penses vraiment ?
— Pense quoi ?
— Ce que tu disais sur la formule un.
Un léger reniflement où perce l'amusement résonne. Il a l'impression de pouvoir imaginer la tête qu'elle doit être en train de faire après l'avoir faite à plusieurs moments quand des remarques l'amusant ou ridicules avaient été faites depuis le début de la soirée.
— Pourquoi ? L'honnêteté dérange le fan de formule un que tu es ?
Un léger silence s'installe alors qu'il ne sait pas s'il veut lui dire qu'il n'est pas un fan. Il se résout à l'inverse. L'optimisme dont elle semble faire preuve est une véritable bouffée d'oxygène et il a envie de le conserver. Il ne peut s'empêcher de penser que ça ne sera pas le cas si elle découvre qui il est. Son regard sur lui changera nécessairement, et plus que tout, il a peur que disparaisse le côté rayonnant, celui où le positif brille particulièrement, où elle ne voit que lui partout.
— Non non.
— C'est ça, j'y crois ! Si tu veux tout savoir, mon avis sur ce « sport » – elle mime les guillemets de la main le visage paraissant dégoûté de devoir l'appeler d'une telle façon – est bien pire. Mais t'as été suffisamment choqué pour la soirée, on en parlera à une autre occasion.
Une forte lueur de défi brille dans ses yeux sombres. Il a instantanément envie de le connaitre, savoir ce qu'elle peut penser de si mauvais sur sa passion. Mais d'un autre côté, c'est peut-être mieux de ne pas être au courant
Il se tourne alors pour lui donner la fin des bols. Elle se tient juste devant lui. Il détaille son visage qui lui sourit tandis que les objets claquent contre le plan de travail. Son bras gauche se tend en direction des couverts où elle se saisit de plusieurs cuillères. Ses iris trainent sur son coude abimé.
— Qu'est-ce que t'as fait ?
— Quoi ?
Il se saisit de son bras délicatement et elle semble comprendre.
— Ah ça. Chute de vélo, je suis plus Roglic que Pogacar quand il est question d'équilibre.
Un de ses sourcils s'arque en interrogation. Elle a un léger soupir et roule des yeux.
— Inculte ! T'auras qu'à les googler en inscrivant chute derrière, tu comprendras. Et sinon vu que je suis une médecin très compétente, j'ai jugé qu'il ne fallait pas de point de suture par flemme d'engorger les urgences ou de déranger un collègue et il en aurait certainement fallu un ou deux. Mais vu que j'avais pas prévu de faire mannequin, c'est pas un drame.
Il l'écoute tout en pensant qu'il ne se souviendra jamais de ces deux noms. Le cyclisme n'est pas du tout un sport qu'il regarde, déjà parce qu'il n'a pas beaucoup de temps pour lui pour regarder d'autres sports et il sélectionne donc le football dont il est fan et pas le cyclisme souvent en pleine après-midi et qu'il ne peut de toute façon pas voir car il travaille à ce moment précis de la journée. Il se demande d'ailleurs comment elle fait pour en regarder alors qu'elle doit certainement travailler à ce moment-là.
Il allait poser la question quand une voix résonne depuis le salon, leur demandant s'ils fabriquent le dessert.
— Bien sûr ! J'ai même été traire tes vaches pour faire des yaourts.
— J'espère pas, j'ai rarement vu plus nul à la traite que toi !
La réplique fuse de la bouche de sa cousine et la rousse pouffe à côté de lui, la moquerie présente sur son visage. Une moue prend possession de son visage alors qu'il détache ses doigts du haut du bras de la jeune femme et s'en éloigne. Il récupère le gâteau sur la table et la boite de glace dans le congélateur.
Il détaille ses cheveux attachés en une queue de cheval qui descendant légèrement dans son dos, se balançant à chacun de ses mouvements tandis qu'ils rejoignent la seconde pièce où ils entendent pester. La médecin est belle sans avoir l'air de s'en soucier, sur son visage il n'a pas l'impression de voir le moindre maquillage présent. Mais elle est surtout fort vivante. Et contrairement à bien d'autres avant elle, il se dit que, pour une fois, c'est peut-être son comportement et sa joie de vivre qui lui plaisent. Et il espère pouvoir repasser un peu de temps en sa compagnie, pour profiter de la vie qui parait soudainement beaucoup plus jolie.
j'espère que ce chap vous aura plu. j'aime l'idée de montrer qu'ils ne retiennent pas du tout la même chose de leur discussion initiale.
pour les incultes du cyclisme (comme pierre), roglic a tendance à foirer ses grands tours après des chutes assez importantes (même si ça ne l'empêche nullement d'avoir un palmarès très fourni) quand pogacar est double vainqueur du tour de france.
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