Étincelle, chapitre 4
Beaucoup de mes amis sont venus des nuages
Avec soleil et pluie comme simples bagages
Ils ont fait la saison des amitiés sincères
La plus belle saison des quatre de la terre
14h, normandie
Ma maison a cramé. Cette pensée remonte une nouvelle fois dans l'esprit de la jeune femme. Cela revient en boucle dès lors que son cerveau n'est pas occupé à quelque chose. Et alors qu'elle attend des coups de fil, cette phrase monte à son cerveau bien trop régulièrement.
Le téléphone portable personnel d'Élise est pour une fois en sonnerie. Si d'ordinaire elle le laisse perpétuellement en silencieux, elle n'a pas fait ce choix ce jour-là pour des raisons évidentes. Elle attend un retour de l'assurance, d'une compagnie de nettoyage et d'un électricien. Une fois que les deux entreprises seront venues, elle pourra reprendre le cours de sa vie et réintégrer cette maison qu'elle aime tant.
Elle avait pu compter sur ses collègues qui géraient tout ce qu'elle ne pouvait pas faire ce jour-là. Son rendez-vous avec l'assurance l'avait rassurée. Elle ne risquait pas de tout perdre.
The Rains of Castamere qu'elle avait mis comme sonnerie tel un mauvais présage après avoir terminé la lecture du chapitre de son livre se met alors à résonner. Elle reconnait immédiatement le nom de sa coéquipière et amie.
— Salut. Comment tu vas ?
La médecin comprend à son ton que la question est sincère, qu'elle est au courant et appelle uniquement pour prendre de ses nouvelles.
— Je suis en vie.
Parce qu'au final c'est peut-être le plus important. Et peut-être que les pompiers ont un peu raison. Voir son toit depuis sa chambre est une image violente, mais il n'y a qu'un souci de placo. Et de plancher, ils avaient oublié le souci de plancher quand ils avaient tenté de la prévenir. C'est pas grand chose par rapport à sa frayeur qui subsiste mais a tendance à diminuer au fil et à mesure des heures. Elle s'est forcée à manger un peu plus, si elle avait faim, elle n'avait pas le même appétit que c'est parfois le cas.
— Tu sais ?
— Ouais, ça se sait vite des choses comme ça.
Elle soupire. Elle n'est pas étonnée. Elle avait des connaissances dans le conseil municipal qui l'avaient certainement informée.
— Mais ils avaient pas les détails, qu'est-ce qu'il s'est passé ?
La jeune femme aux cheveux de feu reprend une nouvelle fois son histoire, comme elle l'a déjà fait une dizaine de fois depuis le matin entre pompiers, collègues et assurance. Elle n'a pas encore prévenu sa famille. Sa mère travaille et elle n'avait pas eu envie de l'inquiéter ce matin-là alors qu'elle devait prendre la voiture pour se rendre sur son lieu d'activité.
— Si t'as besoin de quoi que ce soit tu me dis, on peut t'héberger.
Elle la remercie chaleureusement. Toutes ces petites attentions lui font le plus grand bien et réchauffent son cœur abimé.
Elle finit par raccrocher avant d'enfin appeler ses parents. La voix de son père résonne proche de son oreille et celle-ci la rassure immédiatement. Elle sait qu'il n'aime pas parler au téléphone après tant d'années de conversations avortées après uniquement quelques minutes de discussions. Mais elle était toujours cette voix grave qui l'accueillait lorsqu'elle avait un souci.
C'était lui de l'autre côté de la ligne lorsqu'elle s'était faite une entorse au pied et qu'il avait dû aller la chercher à l'hôpital à plus d'une heure de route pendant ses études. C'était lui lorsqu'elle était malade et qu'elle ne savait pas quoi faire alors qu'elle était à l'autre bout du monde. C'était lui qui venait la récupérer lorsqu'il se mettait à tomber un orage et qu'elle s'était rendue à vélo au lycée. C'était toujours lui quand il y avait une urgence en journée parce que sa mère travaillait et qu'il était celui qui restait à la maison depuis que son commerce avait fait faillite des années plus tôt.
— Bonjour ma grande. Qu'est-ce qui me vaut de tes nouvelles ?
Pour la première fois depuis plusieurs heures, sa voix craque de nouveau. Elle essuie ses joues tandis que les explications pleuvent et qu'elle fait face au silence en réponse.
— Eh ben. Sacrée histoire.
La médecin ne se formalise pas du manque de réactions. Ce n'est pas pour ça qu'elle l'appelle. Elle veut juste qu'il soit au courant, le prévenir qu'elle rentrera peut-être ou non en fonction de ce qu'il va se passer. Elle ne s'attend pas à des mots de réconforts, parce que ce n'est pas lui. Elle est pareille et c'est de lui qu'elle tient cette caractéristique. Alors elle ne peut pas lui en vouloir pour quelque chose qu'elle dont elle a connaissance depuis des années.
Après avoir continué l'échange, elle finit par raccrocher tout en le prévenant qu'elle rappellerait. Elle appelle ensuite une collègue en intervention sur un autre endroit de la zone.
— Salut Élise.
— Salut Manon. J'aurai un petit service à te demander.
— Vas-y.
Elle ne l'appelle pas au hasard. Ils sont déjà plusieurs à lui avoir proposé de dormir chez eux, proposant la chambre d'un fils désormais indépendant, des chambres d'amis ou un canapé lit. Mais elle n'en a pas envie. Pas plus qu'elle ne veut de la chambre d'hôtel que peut lui fournir l'assurance. La rousse veut dormir dans un lieu qu'elle connait, un où chaque son ne sera pas inconnu. Et elle connait par cœur la maison de Manon pour y avoir dormi de longs mois. Alors si elle ne peut pas dormir dans son lit d'enfant et d'adolescente, parce qu'elle doit rester ce week-end là, c'est là-bas qu'elle veut passer ses nuits.
— J'ai ma maison qui a brulé cette nuit et je voulais savoir si je pouvais dormir chez toi si je dois rester ce week-end.
— Qu'est-ce que t'as dit ?
Elle peut palper le choc dans la voix qu'elle connait à la perfection.
— Je sais que le réseau est pas ouf, mais t'as très bien entendu.
— Quoi ? Mais qu'est-ce qu'il s'est passé ?
Les mêmes mots ressortent une énième fois. Ceux qu'elle récite en mode automatique, qu'elle connait par cœur. Et puis la réponse finit par venir.
— Bien sûr que tu peux dormir à la maison, je ferai dormir les enfants dans la même chambre.
La médecin ferme les yeux, rassurée par la tournure des plus récents événements. Elle n'a plus qu'à attendre pour savoir si elle va rentrer dans le Nord ou dormir entourée de champs. Elle n'a peut-être plus de logement, mais elle est entourée de gens aimants.
5h, los angeles
Les pas du normand sont peu assurés alors qu'il rentre à son logement. Ses éclats de rire se mêlent régulièrement à ceux du monégasque alors que leurs corps tanguent au gré de leur avancée.
— Oups.
Le bruit strident d'une alarme de voiture résonne alors qu'il s'est agrippé à une poignée pour s'empêcher de basculer. Les ricanements et cris résonnent de plus belle dans la large avenue bordée d'arbres qu'ils remontent.
La vision de Pierre est floutée et il n'a pas le temps de penser que celle de son ami doit l'être également. Autour de lui, il a l'impression que le monde est en train de vriller. Sa tête tourne et son estomac est en vrac. Il en vide le contenu en bas d'un arbre.
— Ça va ?
Il hoche la tête lentement alors que les larmes lui piquent légèrement les yeux. S'il adorait la sensation de lâcher prise que lui prodiguait l'alcool, il ne supportait pas celle d'être dans un bateau secoué par un océan remuant. Les doigts glissent délicatement dans son dos dans un geste de réconfort. Bientôt, il se retrouve plaqué contre un mur alors que le plus jeune a basculé sur lui. Sa tête claque et il pousse un juron.
Il n'a aucune idée des boissons qu'il a avalées. Il sait juste qu'il n'aurait pas dû faire ce concours de shooter avec Daniel. L'australien avait commandé toutes les boissons les plus fortes du bar et Pierre n'a jamais toléré les mélanges. La brise nocturne le frappe et il frissonne dans sa chemise trempée par les verres renversés sur lui alors qu'il dansait. Charles semble s'en apercevoir car bientôt deux bras viennent l'envelopper et frotter énergiquement ses bras pour tenter de le réchauffer. Charles pour qui ils étaient tous sortis et qui était là, avec lui.
— T'aurais pu rentrer avec elle tu sais. T'étais pas obligé de m'occuper de moi.
Il ne voit pas les yeux qui se lèvent au ciel. Il oublie que son bien-être passerait toujours avant tout le reste aux yeux du brun.
— Elle était passable. J'aime pas les coups d'un soir. Et il fallait bien que quelqu'un s'occupe de toi et ce n'est pas Daniel qui l'aurait fait, il était déjà bien trop occupé avec Max.
Un flash le ramène à la remarque que le néerlandais avait fait des heures plus tôt, quand il était encore à peu près sobre, ou pas encore dans l'état qu'ils partageaient tous en cette fin de soirée. A la tristesse qui pulsait alors dans son regard.
— Tu savais qu'il était en couple ? Il m'a dit qu'il s'était déjà fait briser le cœur. Et pas par une défaite !
Il ajoute la dernière phrase comme s'il s'agissait d'un élément des plus importants dans sa remarque. Un immense sourire s'installe sur son visage et ses prunelles se font malignes alors qu'il est fier de sa blague. Seul un rire résonne suite à son questionnement matinal. Bientôt suivi d'une courte réponse.
— T'es si peu observateur.
Il hausse les épaules en retour. Il n'est pas d'accord.
— C'est faux. Là je vois une petite araignée, et l'arbre ici va bientôt mourir ça se voit, regarde ses feuilles. Tout au loin y a un panneau rouge et blanc. Peut-être un kebab. On pourrait faire un kebab de soirée ? J'ai envie d'un kebab de soirée.
Et le sujet disparait de la conversation. Le fait qu'il est incapable la plupart du temps de lire dans les expressions, actions et remarques des gens les choses qui s'y cachent également.
Il croque dans une frite et son estomac se remplissant lui fait le plus grand bien. Il a l'impression que les vagues diminuent et que la brume s'enlève bouchée après bouchée. Il ne fait même pas attention à la sauce qui tombe et s'ajoute à la vodka sur sa chemise. Il veut juste manger, remplir son estomac que seul du liquide a rempli depuis huit heures avec du solide, éponger pour espérer passer une nuit qui ne sera pas trop agitée.
Il se laisse tomber dans son lit dès qu'ils entrent dans la maison qu'ils louent. Ses chaussures sont envoyées valser à l'autre bout de la pièce et il se bat avec les boutons de sa chemise qu'il finit par réussir à enlever.
Il ne prend même pas la peine de retirer son pantalon et ses chaussettes, l'épuisement le rattrapant. Le bruit d'une chasse d'eau résonne dans une pièce à côté et bientôt sa porte s'entrouvre. Le jet de lumière qui perce à travers l'entrebâillement lui arrache les yeux. Il lâche un son guttural qui provoque un éclat de rire en réponse.
— T'as mis un réveil pour nos avions ?
Il hoche négativement la tête dans son oreiller. Il grogne alors que son meilleur ami souffle. Il tourne dans ses draps pour s'approcher des bords du lit. Il tâtonne à la recherche de son téléphone qu'il se souvient avoir posé sur sa table de nuit. Celui-ci tombe par terre après qu'il l'ait poussé.
— Attends, je vais le faire.
Il voit une silhouette s'approcher et bientôt une lumière s'allume juste à côté de lui.
— Eh voilà. Je l'ai pas mis trop tôt quand même, histoire qu'on est le temps de décuver le plus possible. J'en ai mis un aussi, vaut mieux qu'on en ait deux.
Il attrape le poignet et le serre doucement. Il relève les yeux vers ce qu'il pense être le visage de son ami.
— Merci Charles, je t'aime.
Ses paupières se ferment alors que le sommeil l'enveloppe doucement. Il a l'impression de sentir des lèvres se poser sur son front suivi d'un léger murmure avant de sombrer.
— Moi aussi je t'aime Pierrot.
x x x
bon j'ai l'impression que j'ai un bug sur mes temps de conjugaison entre mes différents chapitres, j'irai corriger tout ça pour harmoniser l'histoire... mais je la fais quand même avancer parce qu'il est écrit et j'ai pas envie de faire trop attendre (pour une fois que je suis productive & surtout je crois qu'il est pas le seul à être concerné par le souci).
hésitez pas à faire des retours, c'est quand même vachement plus agréable que d'écrire dans le vide :)
sinon pour ceux que ça intéresse j'ai sorti une autre histoire avec la mignonnitude comme arc narratif avec ricciardo comme perso principal (et max tout aussi principal) : rends l'amour.
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