Partie 1 : 5 - Le désespoir.

Point de vue : Darren.

James était remonté au bout d'un quart d'heure. Je l'avais trouvé un peu rapide, tout de même. Un quart d'heure pour interroger une personne, c'était minime. Surtout pour mon frère qui a l'habitude de prendre son temps. Si cette Chasseuse lui a fait le moindre mal, je ne me gênerais pas pour l'éliminer, quitte à trouver un autre moyen concernant les Blacks – différents de celui que j'ai actuellement.

Je regarde fixement James, qui sort un verre de sang, avant de le porter à ses lèvres et de le boire d'un traite. Mais que diable lui a-t-elle fait ?

Il n'a toujours pas tourné son regard vers moi. Je vois bien qu'il a l'air perturbé, qu'il a besoin de se retrouver seul. Mais le moment est mal choisi, vraiment. Dans d'autre circonstance, il aurait eu tout le le loisir d'avoir du temps pour réfléchir.

Mais pas maintenant. Ma vengeance, notre vengeance, passe avant tout. Et elle sera bientôt à son apogée. Et ce satané Black n'aura même pas le temps de faire quoi que ce soit.

—  Alors ? lui demandais-je, le sortant de ses pensées.

Il daigna lever son regard vers moi, mais je pus y lire de l'indifférence. Or, mon frère n'était jamais indifférent. Quelque chose clochait, mais j'ignorais quoi.

— James, quelque chose ne va pas ?

Il se ressert, bois à nouveau son verre de sang d'un coup. Comme s'il en ressentait le besoin. Heureusement pour moi, il se décide enfin à parler.

— Elle a tout oublié, Darren. J'ai dû lui boire plus de sang que voulu. Et depuis, je n'ai qu'une envie: la goûter une nouvelle fois.

— Pourquoi ne le fais-tu pas, alors ? Rien ne t'en empêche.

— Si, quelque chose m'en dissuade.

En prononçant ces paroles, son verre se remplit à nouveau d'un liquide rougeâtre. Mon frère n'a jamais abusé sur sa consommation, jusqu'à aujourd'hui du moins. Mais ses dires me perturbent, comme si j'avais déjà vécu ce qu'il vit en ce moment. Or, je n'arrive pas à me souvenir à quand remonte cette impression.

— Là n'est pas le problème, James. Es-tu certain qu'elle ne se souvient de rien ?

Il marqua un temps d'arrêt, réfléchissant longuement à la réponse qu'il allait me donner. Il avait intérêt à se montrer convainquant dans ses propos.

— Elle se souvient seulement de son prénom et du monde surnaturel. C'est tout, maintenant laisse-moi tranquille avec tes questions. J'ai d'autre chose à faire, dit-il en sortant de notre demeure.



Point de vue :Mélissa.

J'ai les yeux fermés, je respire lentement. J'essaye autant que je peux d'oublier la douleur que je ressens à mes avant-bras et mes chevilles. Ils ont vraiment serré fort, eux. Heureusement, j'arrive encore à bouger mes extrémités. C'est déjà ça.

Mes pensées divaguent encore une fois vers Daniel: il me manque. C'est indéniable. J'ai agi de façon immature, ce n'est pas dans mes habitudes pourtant. Serait-ce dû à mes hormones de femme enceinte ? Je n'en sais trop rien. J'ai voulu retrouver un Allister afin que Daniel s'occupe de moi. Pas pour me retrouver à cet endroit, attachée comme une esclave. Cela, je ne pouvais l'accepter. Je ne suis pas une de ses filles que l'on attache pour faire je ne sais quoi avec elle. Surtout si je suis enceinte, je leur montrerais les conséquences lorsque l'on s'en prend à une Black.

J'ai plus d'un tour dans mon sac.

— Eh oh, il y a quelqu'un ? criais-je espérant attirer l'attention d'un des deux Allister de la demeure.

Je ne serais dire si j'étais surprise ou contente de voir débarquer Darren Allister en même pas trois secondes devant moi, les bras croisés et le visage dur.

— Que se passe-t-il ? me demanda-t-il froidement.

Je me raclai la gorge devant tant de froideur et lui répondis que j'avais faim. Sa réponse ne se fit pas attendre :il me rit au nez. Littéralement. Comment peut-on être aussi lunatique ? Je ne comprends pas, pourtant je le suis dans son fou rire. C'était comme si nous étions reliés par un lien qui m'était inconnu, c'était même étrange. Non je vous rassure, je ne fantasme pas sur lui. Loin de là. C'est juste que j'ai l'impression de le connaître, sans le connaître. C'est perturbant.

— Tu as cru que c'était un restaurant ou ça se passe comment ? Tu es notre prisonnière si tu ne l'avais pas remarqué.

Voilà, lunatique que je disais. Complètement.

J'aurais tellement voulu lui dire tout ce que je pensais sur lui et sa race, qu'ils me répugnaient et qu'ils ne méritaient pas de vivre. Or, je devais jouer le jeu de la femme amnésique et je n'avais pas le droit à l'erreur. C'était déjà un miracle que je sois encore en vie.

— Désolée, je ne sais même pas pourquoi je suis ici. Je ne me souviens que de brèves fragments de ma vie alors sois indulgent avec moi s'il te plait.

Mensonges. Il faut avouer que je mens bien. Trop bien, même.

Il s'agenouille devant moi afin de m'étudier plus en détails. Je le vois froncer des sourcils avant qu'il ne s'exprime.

— Pourquoi entende-je deux cœurs ? Serais-tu enceinte, Mélissa ?

Je reste interdite. J'aurais dû m'en douter, j'aurais dû savoir qu'ils allaient s'en rendre compte. Surtout Darren, surtout lui. Il avait beau être impulsif, tout le monde savait qu'il était extrêmement observateur. C'était une de ses plus grandes qualités, en somme.

Si je lui mentais, il le saurait. Si je lui disais, qui sait ce qu'il serait capable de faire. Alors, quoi de mieux que de garder le silence, lui laissant tout le loisir de s'imaginer ce qu'il souhaite?

Mais au lieu de continuer la discussion, il s'approcha de moi. Si près que cela me donna la chair de poule. J'avais peur, car au jour d'aujourd'hui je ne pouvais rien contre lui. J'étais à sa merci la plus totale. Il avait réduit toutes mes chances de retourner la situation de par son comportement inhabituel. Et tout cela, il le savait pertinemment. J'étais en position de faiblesse, tandis que lui était en position de force.

Il approcha son visage vers le mien avant de dévier vers mon oreille gauche et me prononcer dans un murmure à peine audible :

« Dommage, imagine ce que l'on aurait pu faire ensemble. Toi, qui ressemble tant à ma chère Astrid. Je suis sûre que tu aurais pu la remplacer le temps qu'elle ne revienne, tu ne crois pas ?  »

Sa voix était rauque et je compris bien vite qu'il faisait allusion à des pensées polissonnes à mon égard. En temps normal, je l'aurais insulté de tous les noms et envoyé balader. Or, comme je l'ai dit précédemment, je suis faible face à lui. Je n'ai aucun échappatoire.

Désormais, mon seul espoir, c'est que Daniel me retrouve. Et vite.


Point de vue :Daniel.

Je fais les cents pas depuis tout à l'heure. Mon oncle m'a plus ou moins ordonné de rester chez moi afin de me reposer. Pourquoi ? Tout simplement parce que j'ai failli mourir face à un vampire, novice qui plus est. Gaspard à tout de suite remarqué que je n'avais pas dormi depuis plusieurs jours et m'a renvoyé chez moi illico presto.

Mais comment dormir sans penser à ce que ma femme subit en ce moment-même ?

Peut-être que certain y arrive, mais moi je ne peux pas. C'est en dessus de mes forces, l'ignorance. C'est même une obsession qui sans cesse est présente dans mon esprit, dans mon quotidien. Je déteste être mis à part, être le dernier au courant de ce qu'il se passe. Je veux tout savoir, de la Grèce antique aux futurs générations. Absolument tout.

Et cela, Mélissa était la seule à déceler cette facette de moi, la seule à avoir vu plus loin que mon physique et de l'image que je pouvais renvoyer. Elle, et ma mère. Ma mère était sûrement la seule personne à me connaître sur le bout des doigts, la seule qui me comprenait et qui me soutenait dans toutes les situations. Elle était mon pilier. Grâce à Mélissa, j'avais retrouvé cette plénitude. C'est une des raisons de la présence de mes sentiments pour elle, enfin je crois.

Ne pouvant plus attendre sans rien faire, et ne pouvant rejoindre les autres Chasseurs à la recherche de ma femme, j'allumai mon ordinateur afin de trouver le repère des Allister. Je veux me sentir utile à la tâche, je veux aider les autres.

Au bout de deux heures, je me réveillai en sursaut: m'étais-je endormi ? C'était sûr que oui. Mais comment ? Je n'en avais aucun souvenir. Sûrement la fatigue de ces derniers jours. Or, j'avais rêvé. Oui, rêver. J'ai fait un cauchemar pour être exact. Je voyais Darren tuer Mélissa, devant moi, en me demandant ce que j'allais faire. Mais je ne parvenais pas à bouger, retenu par James. J'avais vu son sang se vider, goutte par goutte, le plus doucement possible. Je me débattais et criais, mais rien n'y faisait.

Je me levai et me dirigeai dans la salle de bain afin de me passer de l'eau froide sur le visage. Lorsque je relevai la tête vers le miroir, je me surpris à observer mon reflet. Des cernes se dessinaient sous mes ternes yeux verts, si profonds normalement. En me voyant, je cru apercevoir la mort traverser furtivement mon regard. Sans Mélissa, je n'étais plus moi-même. Je n'étais plus l'homme que je suis, mais plutôt un corps sans vie. Une âme égarée.

Ne supportant plus ce que je voyais, je sortis de la salle d'eau et pris ma veste: je devais sortir, m'aérer l'esprit. Mais où aller ? Si je partais rejoindre les troupes, mon oncle allait me suspendre le temps qu'on la retrouve. Et cela, je ne le souhaitais pas.

Alors, je pris la direction du bar le plus proche. Vous savez, l'endroit où les Chasseurs ne se rendent pratiquement jamais, trop occuper à travailler. Mais là, en plus d'avoir pour ordre de rester tranquille, j'ai envie d'une bonne bière. Depuis combien n'en ai pas bu ? Je dirais depuis ma dernière année de Chasseur, pour fêter mes diplômes. Oui, parce que contrairement à Mélissa, j'étais scolarisé dans une grande École des forces de l'ordre actuelles. Et cela, depuis ma tendre enfance. Ma femme a juste eu besoin que quelques techniques de bases pour accéder à notre rang, déjà bien instruite de par ses recherches pour entrer dans notre filière.

Je pousse la porte d'entrée et me dirige vers la serveuse derrière le comptoir. Elle me fait un grand sourire et me demande ce qu'elle me sert. Je lui répond nonchalamment que je souhaiterais avoir une bière brune. Elle doit avoir l'habitude car elle me la passe poliment et m'adresse un dernier sourire avant de parler au client suivant. Puis au suivant. Et ainsi de suite.

Je bois ma petite bouteille, petit à petit, n'étant plus habitué à cette brûlure à l'œsophage pourtant si bénéfique. Si douce, si mélodieuse. Mais j'ai vite fini ma consommation, alors j'en recommande une. Puis une autre. Et ainsi de suite.

Je fixe la serveuse qui s'active à la tâche, elle a l'air si patiente avec son entourage –surtout avec ses clients. Toutes ces critiques qu'elle subit lorsqu'elle se retourne, elle n'en relève pas une. Comme si elle ne les entendait pas. Son teint basané et ses belles courbes font l'objet de beaucoup de discussion dans ce bar, chaque homme aimerait bien l'avoir dans son lit, si j'ai bien compris. Mais la respectent-ils au moins ? Ils sont tous irrespectueux avec elle. Mais pourquoi je m'en fait ? Je m'en fou, je la connais pas. Elle me sert juste mes bières.

Je me sens bien, tout d'un coup. Tout est beau, tout est formidable. Serait-ce ce liquide qui me fait cet effet ? Sûrement, ou peut-être pas.  

Pour être bien sûr, j'appelle la femme. Elle ne me répond pas. Je crie pour qu'elle me regarde, toujours rien. Alors, d'un coup, je me lève sur le comptoir et la fixe de haut. Mon geste m'aura permis d'obtenir toute l'attention de la pièce. Même de ma serveuse.

— Dis, c'est ce liquide que tu m'as donné qui me rend si bien ?

Elle papillonne des yeux, tandis que toute la salle rigole devant ma question et mon air ahuri.

— Savez-vous au moins de qui vous vous moquez ? continuais-je.

Tous ces vieux boucs me rient encore plus au nez.

— Oui, t'es un p'tit gars qui ne s'est jamais pris de cuite de sa vie ! dit l'un.

— Mais non, c'est juste un de ces jeunes qui veut se prendre une cuite ! dit un autre.

Ainsi que tant d'autre réplique du même genre. Mais où est ce que je suis tombé ? Pour qui se prennent-ils à me parler de la sorte ? Bordel, c'est trop pour moi.

— Et si je vous arrête pour outrage à agent, là maintenant, vous allez encore rire ? demandais-je.

Ils continuèrent dans leur fou rire jusqu'au moment où je sortis mon arme et mon insigne que je ne quittais jamais. Vous auriez dû voir leur tête à ce moment, tout simplement hilarant !

— Alors, on fait moins les malins ?  

Ce fut mon tour de rire aux éclats, même que certains me suivirent. Je descendis du comptoir avant de payer ma consommation. J'envoie un bisou de la main à ces vieux boucs –oui je sais, cela est d'une virilité à rude épreuve– et fait un clin d'œil à ma serveuse avant de sortir.

~~

¡Hola!

Voila le chapitre 5 ! Petit à petit, on commence à cerner Daniel, Darren et James et ce chapitre marque sûrement le début de l'intrigue.
De plus, il est plus long que d'habitude alors j'espère qu'il vous plaît !

Bises à vous ! (Le chapitre 6 sera posté soit mercredi soit vendredi prochain)

N'hésitez pas à commenter afin de donner vos avis, ça fait toujours plaisir de savoir ce que vous en pensez !

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