❝ On vouvoie le paradis mais on tutoie l'enfer
On adore la pluie mais on lui préfère le tonnerre
Tout tout tout ce qui vous fait oublier la terre ❞

ville bien rapidement traversée. il a les pas qui le guident un peu trop facilement et chacun d'entre eux semble un peu plus difficile à faire. poing qui se referme sur les fleurs, papier qui se plisse dans la paume la marquant un peu. et ces larmes, ces maudites larmes qui coulent. il rabat une capuche sur sa tête, espérant ne pas être reconnu, ne pas être dérangé. il n'était déjà pas particulièrement fan des dérangements en ville d'ordinaire, mais aujourd'hui il n'en voulait pas. 

regard qui croise le sien. il est sombre, noir et rougi en même temps et l'eau glisse sur les joues. l'autre finit par le détourner, gêné quand il s'en aperçoit. il voit ses yeux qui se portent aux fleurs qu'il tient à la main et il lui adresse un sourire désolé, comme s'il comprenait. alors il continue sa route. 

éclat roux qui attire son regard à l'autre bout de la rue. il accélère le pas. il n'était pas prêt. pas encore. pas aujourd'hui. il sait ce qu'il va se passer si elle le voit, si elle voit son visage ravagé par les larmes. elle va venir et aujourd'hui il n'a pas envie d'en parler. pourtant il aimerait qu'elle soit là à marcher à ses côtés, qu'elle lui dise qu'elle l'aime et qu'elle le prenne quelques secondes dans ses bras. mais pour ça, il aurait fallu qu'elle sache, or ce n'est pas le cas. 

il se dépêche de tourner au coin de la rue, espérant qu'elle ne l'aura pas aperçu. un jour, il lui dirait, il le faudrait. c'était trop important pour qu'eux ne sachent pas cette part de sa vie qui l'avait rendu si heureux à l'époque. il lui devait bien ça, à elle. parce qu'elle était sa famille avant celle-là et ce ne serait que lui rendre hommage que de leur en parler. 

mais à vrai dire, il n'en parlait jamais. même avec marco elle n'était jamais abordée. c'était l'objet de leur silence. il savait quand il pensait à elle et il comprenait. il le laissait dans ces moments-là parce qu'il ne pouvait pas les comprendre. c'était un non-dit entre eux. ils s'étaient pardonné tout en sachant qu'ils ne pourraient jamais vraiment oublier.

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il savait très bien à quel point l'autre respectait son passé, ce passé qu'il chérissait autant que lui. il lui avait fait des promesses qu'il avait tenues. c'était lui qui lui avait demandé de l'épouser. parce qu'il avait vu ses regards emplis de tristesse aux mariages de leurs amis. parce qu'il l'avait vu se fermer quand une fois lukasz avait abordé le sujet sous forme de blague. il savait que ça lui brisait le cœur d'en être réduit à attendre. et pourtant c'est ce qu'il a fait pendant des années. alors qu'il pouvait voir son regard qui traînait sur l'alliance ornant la main de leur meilleur ami bien trop souvent. 

il avait fini par surprendre une conversation, imaginer les larmes de son blond à sa voix brisée. comprendre à quel point il ne voulait pas voir que derrière ses remarques humoristiques sur l'inimportance du mariage à ses yeux il cherchait à le protéger. parce qu'il était comme ça, il avait toujours été comme ça. il cachait la vérité sur ses sentiments pour ne pas le mettre en porte-à-faux, pour qu'il n'ait pas à se poser les questions, pour qu'il ne se sente pas obligé de faire quelque chose qu'il ne voudrait pas parce que lui le voudrait. 

il l'avait déjà fait des années plus tôt, quand il lui avait caché une partie de ses envies pour ne pas le brusquer juste parce qu'il savait qu'il était le premier homme avec qui il était. c'était déjà le polonais qui avait mis les pieds dans le plat et qu'il avait fait parler à l'époque. 

je ne le ferai pas lewy. je lui ai fait une promesse et je compte bien la tenir. il est déjà marié. et il se souvenait de la suite. mais marco toi qu'est-ce que tu veux ? il avait soufflé avant de lui répondre. et les mots s'étaient enfoncés en lui. tu sais très bien ce que je veux, mais ce qui est important c'est ce que lui veut. j'ai pas envie de le mettre en face d'un dilemme entre elle et moi, l'avoir à mes côtés est bien plus important que de porter son nom. 

c'était ce jour-là qu'il avait pris sa décision. parce que lui n'avait rien promis. il avait promis à sa femme de l'aimer jusqu'à la fin mais elle était arrivée plus tôt que prévue. et ce n'était pas parce qu'il se remariait qu'il briserait sa promesse. il pouvait l'aimer et laisser un autre prendre son nom ou prendre le nom d'un autre. un autre qui n'attendait que ça depuis plusieurs années, qui l'aimait plus que tout, qui le faisait toujours passer avant lui-même. alors oui, il le méritait et peut-être que dans le fond lui aussi le voulait. il le ferait, parce que c'était évident qu'il attendait qu'il lui mette la bague au doigt, de lui appartenir vraiment, que leurs enfants puissent porter officiellement leurs deux noms.

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doigts qui viennent glisser sur l'alliance qui traîne autour de son cou, attachée à une chaînette. elle était là, tout le temps sur lui. il la gardait à la plage, il la gardait quand il jouait encore au foot, il l'avait le jour de son mariage, il la gardait quand il était glissé dans les bras de son blond et qu'ils partageaient leurs moments à deux. et il aurait pu l'enlever que ça n'aurait rien changé. parce que quand il faisait tout ça, elle était toujours là, quelque part au fond de son cœur et elle ne disparaissait pas. et l'autre le savait. 

lèvres qui s'y portent quelques secondes alors qu'il franchit les portes du cimetière gris et sombre. il peut entendre le tonnerre qui gronde de plus en plus fort. il n'y prend pas gare. une fois de plus, le ciel allait pleurer la mort de sa bien-aimée.

il glisse dans les allées avant de s'arrêter devant la pierre tombale. il y avait les fleurs qui continuaient d'orner les lieux. bougie qu'il rallume pour quelques instants, elle s'éteindrait aux premières gouttes d'eau. bouquet qu'il dépose doucement avant de s'asseoir dans l'herbe sèche. doigts qui glissent sur la pierre et il ferme les yeux un instant. il les rouvre. 

au loin, un éclair luit.  

bye. suite samedi :)