Chapitre 7

Moi dans un ensemble noir streetwear et lui dans son survêtement gris, nous franchissons le seuil de l'entrée pour aller à l'épicerie.

Il me jette des coups d'œil réguliers, attentif - comme toujours - au moindre de mes faits et gestes. Je souhaite profiter de cette journée à fond et déguster la romance que j'ai toujours rêvé de vivre, en secret. J'attrape sa main et lui offre un radieux sourire. Surpris mais heureux, il me le rend et m'attire contre lui, un bras autour de mes épaules.

Sur le chemin du retour, un SMS lui ôte toute joie. Un SMS en lien avec son travail, à en juger le sérieux avec lequel ses doigts filent sur le clavier ; je le vois ouvrir de nombreux mails tout en restant vigilant au trajet. Je pousse la porte du hall et nous montons les escaliers en silence. Arrivé sur le seuil de mon appartement, je songe à le libérer ; il a d'autres priorités que de me baby-sitter...

— Lan Zhan, je pense que tu devrais y aller...

— Non, ils n'ont pas besoin de moi. De toute manière, cet enquêteur ne m'a toujours pas...

Il s'interrompt comme s'il venait de commettre une erreur. Je le regarde, éberlué.

— Enquêteur ? Tu es dans la police ?

— Non...

— Une agence de détectives ? ricané-je en ouvrant ma porte.

— Non.

— Lan Zhan, qu'est-ce que tu tiens tant à me cacher ?

Il dépose le sac de courses dans l'entrée et ferme les yeux. J'ai soudain un très mauvais pressentiment...

— Je suis dans la sécurité.

— Oh, et c'est ça que tu...

— Nous avons plusieurs secteurs. Informaticiens, agents, location de véhicules, traçage...

Je plisse les yeux. Où veut-il en venir ? Je sens que l'aveu ne va pas être agréable.

— Wei Ying... j'ai posé une caméra sur ton palier.

— Tu... tu as fait quoi ?

— Quand j'ai vu que tu risquais de te faire agresser, j'ai décidé de te mettre sous surveillance. Hier, je n'étais pas là par hasard... avoue-t-il. J'ai également envisagé de... mettre une puce dans ton sac à dos pour te localiser, mais... en voyant que tu commençais à me faire confiance, que tu m'as permis de dormir avec toi... j'ai changé d'avis.

Mes yeux s'exorbitent. La seconde poche de courses m'échappe des mains.

— Je sais que ce que j'ai fait est...

— Digne d'un fan obsessionnel... articulé-je, aussi choqué qu'effrayé.

Il garde le silence. À cet instant, nous savons tous deux que quelque chose vient de se briser.

— Il... il n'y a pas que ça...

— Vraiment ? Tu as autre chose à me dire qui soit pire que ça ?

Les mots semblent lui écorcher les lèvres.

— Le responsable de ce qui t'arrive, c'est moi. Il y a quelque temps, j'ai dû changer mon pseudo, alors tu n'as pas fait attention...

— Quoi ?

— C'est moi qui t'ai proposé tant d'argent pour que tu dévoiles ton visage.

Ma mâchoire se décroche. Je reste bouche bée, littéralement ébranlé. À ce moment-là, il savait que je devais payer mes derniers loyers et l'école de danse sous peine d'être expulsé et renvoyé. Car il m'avait poussé à parler. Il avait cherché à en savoir plus sur moi et avait utilisé mes confessions personnelles pour pouvoir marchander, et voir mon visage. Quel bel abruti j'ai été...

— Wei Ying...

— Sors de chez moi.

— Je suis sincèrement désolé.

— Dehors !

Il recule lentement, plus navré qu'aucun homme ne pourrait l'être en ce monde, et redescend les marches. Dans l'angle de l'escalier, il m'adresse un regard lourd de remords, le dernier. Une tristesse qui nous déchire tous deux le cœur.


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