Chapitre XV : Le jeune amoureux et perdu (Partie 1)


Je me permets cette petite note puisque j'ai pris pas mal de libertés, pour ce chapitre. Peut-être le plus risqué dans le choix de la narration, mais aussi dans le retour à une intrigue "simpliste" pour mieux servir l'introspection. À vous de me dire si le risque est payant ou si je ferais mieux de recoller aux basiques. Ah, et si au passage je pouvais aussi avoir un avis sur le résumé... ^^'

Éternels ennemis, insatiables amants,
Compagnons évidents qui dansent la folie.
La raison, si polie, protège aveuglément.
Le cœur, si clairvoyant, nourrit la tragédie.

Je m'interroge. Pourquoi telle action ? Un homme seul, porté par sa monture qui veut prendre un château ? La folie fait des ravages, par là-bas aussi. Je ne saisis pas ce qui l'a poussé à une telle extrémité. Mais qu'importe, en tout autre moment, peut-être me serais-je plu à imaginer son histoire, mais je n'ai pas le cœur à cela. Je me sens si seul. Et je ne la comprends pas. Je ne l'ai jamais comprise. Rien de nouveau dans tout ça. Mais fol espoir qui m'a leurré...

Oh oui, tu y croyais, et malgré tout tu y crois toujours. Quel idiot tu fais. Tu as échoué, tu n'es parvenu à garder ton cœur dans sa chape de granit. Tu as été faible, tu en paies le prix.

Elle m'a donc libéré, de cette enveloppe ! Et cette petite lueur, ce bonheur entrevue, ne valait-il pas le coup ? Ne le vaut-il pas encore ? Vous vous accordez si bien.

Tu t'accordes si bien à elle, c'est vrai, mais tu ne sais rien de ses pensées. Rien. Et regarde où cela te conduit. Tu nous fais tous souffrir. Et regarde-le, celui-là, qui se réjouit de sa liberté nouvelle, a-t-il oublié qu'à voler trop haut, trop près du soleil, on se brûle les ailes et l'on s'écrase. Haïs-la, c'est ce que tu peux faire de mieux.

Je ne peux pas. Je le sais. Tu le sais. J'ai déjà essayé. En vain. C'est au-dessus de mes forces.

Alors cesse d'aller après elle, laisse-la venir ou partir, laisse parler l'avenir.

Mais si elle ne vient jamais ?

Il faut savoir passer à autre chose. Nous passons à côté de ta vie. Tu le sais. Tu en souffres chaque jour. Tu lui as déjà tant sacrifié... Et même si elle n'en sait rien, si elle ne peut le réaliser car c'est à l'intérieur que tu donnes tant, tu ne peux continuer comme ça. Tu te détruis.

Mais si c'était ta chance, ton unique chance ? La vie est cruelle, si tu ne saisis pas les quelques mains qu'elle te tend, tu n'avanceras pas !

Mais quelles mains ? Celles que tu fabules ? Tu n'es qu'un parmi tant d'autres à ces yeux, quoiqu'elle ait pu dire sous un coup de folie. D'ailleurs, tu ne sais pas comment elle parle aux autres. Peut-être est-ce similaire. Ce n'est pas elle qui te détruit à petit feu, tu n'as pas besoin d'elle pour cela. Ces mirages, laissent les s'évaporer. Tu ne comptes pas tant que ça pour elle. Il y a depuis le début un déséquilibre dans votre relation. Tu sais, l'indifférence que tu crains tant... Eh bien, qui te dis qu'elle ne t'auréole pas ? Plus tu attends avant de lâcher prise, plus dure sera la chute. Cette île qui s'envole, toi accroché à elle, tu seras bien obligé d'en lâcher le rebord à un moment. Fais-le tant que tu as un sol sur lequel te réceptionner.

Et si cette île était le paradis terrestre ? Et si l'amour n'était pas que l'œuvre des troubadours ? Et si tu me laissais agir, pour une fois ?

C'est ce que tu as fait, depuis le début. Et toutes les perches que tu lui as tendues, combien en a-t-elle saisies ? Combien de fois a-t-elle fermé des voies et opportunités par une parole par toi sanctifiée ? N'écoute plus ton cœur, vois où il te conduit. Reforge tes barrières, et vogue vers d'autres horizons. Elle ne peut que te faire traverser le Styx.

Sauf s'il s'agit de ton épreuve. Tu le sais, on n'a rien sans rien. Un périple au sein du malheur, peut-être te conduira enfin à l'Eden que tu n'osais pas même imaginer. Descendre, toujours plus profondément, pour mieux s'élever. Tu te rappelles de ces mots, je le sais : « Écoute ton cœur ».

Il voulait faire son intéressant, voilà tout. Peut-être n'es-tu pas fait pour tout cela. Ta gorge se serre. Tu sais que j'ai raison. Garde ton impassibilité. Reste calme. Oublie cette voix dissonante. Tu sais où elle te conduit.

Non. Les larmes sont saines. Laisse-les aller. C'est quand tu étais sincère qu'elle semblait la plus proche. Sois honnête avec toi-même, peut-être est-ce une leçon que tu devais apprendre de tout cela. Et peut-être aussi que c'est la clé.

La clé... Oublie ces conseils dignes d'un ménestrel. Dois-je te rappeler que tu n'es pas un beau et preux chevalier ? Tu n'es personne, à ce jour. Et si tu la laisses te détruire, tu ne seras jamais quelqu'un.

Ou alors le monde s'ouvre à toi. N'as-tu jamais pensé à l'inanité de l'existence ? Doit-elle avoir un but ? On meurt tous un jour. Quitte à souffrir, autant que ce soit pour un si grand dessein. Tu n'es pas personne. Tu ne l'as jamais été et ne le seras jamais. Pour être, tu n'as besoin que de vivre. Vivre. Pas survivre. Vivre sans penser aux conséquences. Prendre l'initiative, persévérer, te donner à elle. T'offrir à moi. Oublier ta raison si lâche.

Si lâche ? Ou si réaliste ? Tu ne sais rien d'elle, peut-être joue-t-elle comme vous le faisiez tous deux au commencement. Peut-être es-tu le seul qui a renoncé à ce si beau jeu...

Elle n'est pas cruelle.

Elle ne s'en rend pas compte, malgré tous tes efforts, tu restes tout ce qu'il y a de plus opaque !

À qui la faute, je ne demande qu'à m'ouvrir !

Tu le sais, mon compère ne plaît pas aux femmes. Elles veulent un homme, un vrai, pas un pleurnichard. Un être qui jamais ne les mettra sur le piédestal que tu es en train d'ériger, mon pauvre. Ressaisis-toi.

Non, persiste !

Non. Et puis tu le sais, en t'éloignant, peut-être reviendra-t-elle d'elle-même. C'est ce qu'elle ferait si elle tenait à toi. « L'espoir, c'est pour les sots ». Tu t'en rappelles, de cette phrase, aussi, n'est-ce pas ? Elle te faisait bien rire. Et si elle n'était que sagesse ? Je sens que tu commences à balancer en ma faveur, après tout j'ai raison par essence, je suis rationnelle.

Mais le monde ne l'est pas ! L'humain ne l'est pas.

Qui l'a décrété ? Allez, cesse de lui prêter attention, et renferme-le dans sa carapace protectrice. Tu sais que ma solution est la meilleure. Tu le sais. Mais en place du granit, choisis l'acier, pour sa prison. Je serai son geôlier. Je saurai l'entraver.

Je secoue la tête pour reprendre mes esprits. Ma décision est prise. J'ai trop donné pour rien. Je dois m'éloigner et attendre qu'elle revienne. Mais cela fait trop longtemps que perdu dans ce débat résolu, je suis resté inattentif à mon poste. Je n'ai pas même reposé mon arc. J'espère que je n'ai rien raté. Et qu'aucun de mes camarades ne m'a vu errer ainsi. Fierté, te voilà retrouvée. Et bien qu'au milieu de la nuit, avec si peu de chance qu'un homme me voit, je ravale mes larmes à défaut de pouvoir dénouer ma gorge. L'acier, il n'y a que ça de vrai. Solidité, rigidité, et pas de risque qu'il ne s'oxyde. Je refoule les affects et me concentre sur ma tâche, malgré la difficulté.

La relève ne tarde pas à me rejoindre. J'erre quelques instants dans la nuit fraîche avant de rejoindre le dortoir. Que cela me fait du bien, de marcher sans but, de contempler les étoiles, de faire le vide. Un instant perdu pour un homme éperdu. Malheureusement, tout à une fin, et je me dois de revenir à la réalité. Mais, bonheur ! Je suis fatigué, et à peine ma couche rejointe, je m'égare dans un sommeil sans rêve.

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