O8. SILHOUETTE
𝐁𝐀𝐒 𝐋𝐄𝐒 𝐌𝐀𝐒𝐐𝐔𝐄𝐒
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chapitre huit — Silhouette
« Quand les masques tombent, la vérité éclate. »
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— 𝐄𝐔𝐇... 𝐏𝐀𝐑𝐃𝐎𝐍 ? Je crois que j'ai mal entendu, déclara Emilia avec incompréhension. Vous allez faire quoi ?
— Te transférer dans la classe des épaves, je pensais que tu étais assez intelligente pour comprendre cette simple phrase, soupira le proviseur avec un certain sarcasme.
Emilia sentit son corps se pétrir sur place. Elle resta là, bouche bée, incapable de répliquer quoique ce soit. Son cœur manqua un battement, le sol semblait se dérober sous ses pieds, alors que dans sa tête, les sentiments et les questions s'emmêlaient.
— Tu le sais, il me faut quatre-vingt-quinze pour-cent d'élèves travailleurs, et cinq pour cent de fainéants que tout le monde charrie, expliqua le proviseur avec un grand sourire. Si je t'expulsais de l'établissement, il y aurait beaucoup d'élèves qui se mettraient à arrêter de travailler, même pire, qui te suivraient jusqu'à ton nouvel établissement. Avec ça, mes pourcentages ne pourront plus être tenus. Mais si tu vas en classe E, personne n'osera te suivre, même si tu es l'idole de cette école.
— Si vous m'envoyez là-bas, ça ne changera pas au fait que les élèves arrêteront de travailler, puisque je ne serais plus là ! Vos pourcentages seront aussi faux ! s'énerva Emilia, sentant la rage s'emparer d'elle.
— Je te l'accorde, au départ, tous les élèves seront déprimés et arrêteront d'étudier, soupira le proviseur, d'un air faussement accablé. Mais sache que tout le monde peut être remplacé. Une de tes amies deviendra la nouvelle idole du collège, c'est quoi son nom déjà... Eriko ?
— TAISEZ-VOUS !
Le hurlement d'Emilia fit taire le proviseur, qui ne semblait pas vraiment surpris de cette réaction.
— Les gens se lasseront de vous, vous ne vaudrez plus rien dans quelque temps, poursuivit-il avec calme. Lorsque tout le monde te verra partir en classe E, plus personne ne voudra être comme toi, voudra te prendre comme exemple ou même te suivre.
— Je ne peux pas aller en classe E... murmura-t-elle, le regard perdu dans le vide. Je ne peux pas, je suis supérieure, je suis la meilleure...
— Vous ne brillerez plus jamais, Emilia.
La jeune fille avait dû mal à respirer, incapable de se contrôler. Sa vision devenait floue, semblait se rétrécir en un sombre tunnel noir. Son corps était lourd, elle vacillait, titubait, alors que ses pensées s'entremêlaient. Elle n'arrivait plus à penser, à se contrôler.
Le proviseur donna une faible tape sur l'épaule de son élève, avant de lui souffler :
— Ton règne est terminé.
Non, ce n'était pas possible, Emilia rêvait. Elle allait se réveiller dans quelques secondes, et sa vie reprendrait comme avant. Elle allait revoir sa sœur Adella, passer du temps avec elle. Puis, Emilia irait en cours, garderait son masque d'hypocrisie et son faux sourire angélique.
Emilia repoussa brutalement le proviseur, envahie par une rage soudaine. Elle hurla, hurla à pleins poumons, incapable de faire autre chose qui lui demanderait un effort. Son cri résonna à travers les murs, résonna dans son propre corps, son propre cœur qui s'emballait dans sa poitrine.
— Je suis la seule personne à pouvoir être l'idole du collège, et certainement pas cette imbécile d'Eriko ! cria-t-elle en direction du proviseur. Je suis parfaite, je suis la meilleure ! Personne ne peut m'égaler !
— Emilia, vous ne brillerez plus jamais, c'est terminé, dit simplement le proviseur.
La jeune fille baissa lentement la tête, les yeux perdus dans le vide. Tout allait redevenir comme avant, elle allait briller à nouveau, elle reprendrait sa vie en main !
— Les choses sont éphémères, elles ont toutes une fin. Vous irez en classe E dès demain.
Et à ces mots, le proviseur dirigea son élève vers la sortie. Il avait gagné.
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Emilia n'était plus au collège. Elle venait de sortir, décidant de sécher les cours pour aujourd'hui, peut-être même pour toujours. D'un pas las, elle marchait, déambulait autour de l'établissement sans but précis.
La tête baissée, les yeux emplis de larmes, Emilia n'arrivait pas à se calmer. Elle voulait détruire tout sur son passage, insulter et frapper chaque personne que son regard croisait. Elle voulait hurler, hurler toute sa peine et sa frustration, sa rage et son impuissance qu'elle gardait en elle.
Mais Emilia ne fit rien de tout cela.
Elle n'arrivait plus à rien. Sa tête était vide, vide de pensées. Son corps bougeait seul, comme s'il n'y avait plus d'âme à l'intérieur, qu'elle était partie en même temps que le cri qu'elle avait poussé chez le directeur. Emilia ne ressentait plus aucune émotion.
Ses yeux étaient fixés dans le vide, ses pieds avançaient seuls, dans une direction inconnue. Jamais encore, Emilia n'avait été dans un tel état. Cela faisait combien de temps qu'elle était comme ça ? Une heure ? Deux heures ? Elle n'en savait rien, elle avait perdu la notion du temps.
Elle ? L'élite de Kunugigaoka, allée dans la classe des épaves ? Même la concernée n'y croyait pas. Si un jour, on lui aurait sorti une telle blague, elle aurait bien ri. Mais là, ce n'était pas une blague et elle ne riait pas, c'était la dure réalité qui lui tombait dessus.
— À quoi ça sert que je continue de vivre ? se demanda l'adolescente à voix haute. Adella est morte, je finis en classe E, je n'ai plus aucun avenir. Autant rester chez moi à ne rien faire.
Mais alors qu'elle allait retourner sur ses pas pour rentrer chez elle, Emilia releva enfin la tête, et découvrit avec stupéfaction où elle se trouvait. Elle était précisément à l'arrêt de bus que prenait Adella, lorsqu'elle rentrait à la maison.
C'était le chemin qu'elle aurait dû prendre pour revenir à la maison.
— Qu'est-ce que je fais ici... murmura Emilia en regardant autour d'elle, déboussolée.
En même temps, elle n'avait plus toute sa tête depuis son transfert en classe E. Alors qu'elle se retrouve là, perdue au milieu de toutes ces routes, ne la surprenait pas plus que ça.
Autour d'elle, les passants se pressaient pour arriver à temps jusqu'à leur bus habituel. Les voitures roulaient à toute allure, doublant les autres et bafouant le code de la route. Emilia observa l'horizon, le ciel bleu sans nuage, et le soleil briller de toute sa splendeur. Un temps assez contradictoire par rapport à la situation d'Emilia.
— Je devrais rentrer, finit-elle par dire à voix haute, la voix dénuée de sentiment.
Elle en avait clairement marre d'entendre les klaxons des voitures lui casser les oreilles. À peine avait-elle fait le premier pas qu'une fine et grande silhouette apparue un peu plus loin.
Cette silhouette semblait attendre le prochain bus. Debout, contre l'arrêt, elle fixait intensément Emilia. Et ce que la collégienne n'arrivait pas à croire, c'était que cette silhouette ressemblait trait pour trait à Adella.
Emilia se stoppa net, incapable de faire le moindre mouvement. Comme ancrée au sol, la jeune fille plissa des yeux pour mieux apercevoir la silhouette. Mais en un battement de cil, elle disparut, comme si elle n'avait jamais existé.
— J'ai des hallucinations... Adella est morte, je n'ai plus aucun espoir de la revoir.
Sa voix crachait chaque mot tant ils lui étaient douloureux. Le simple fait de prononcer ces paroles, mettait Emilia dans une colère noire, mais aussi dans une grande peine. Elle ne la reverrait plus jamais.
Mais soudain, Emilia fut comme frappée par l'évidence même.
Et si Adella n'était pas morte ?
Et si ce corps brûlé était simplement un leurre ?
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CHAPITRE 8 TERMINÉ
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