6. Catriona

La jeune femme regarda autour d'elle toutes ces personnes, ces couleurs, la musique et les lumières, qui tourbillonnaient, alors que la fête battait son plein. Tous étaient réunis pour cette soirée que Catherine avait concoctée rien que pour eux. Ils riaient, discutaient, mangeaient des victuailles pendant que d'autres dansaient sur la piste. Ses yeux scintillaient devant cette scène, alors qu'elle cachait sa nervosité à l'idée de revoir Amaury. Catriona prit une coupe de vin et se délecta de son goût sucré.

— Catriona Loveday, quel plaisir de te revoir à la Cour, lança une vieille dame.

Elle faillit avaler de travers. En observant son interlocutrice, elle ne parvint pas à se souvenir de son nom malgré ses efforts de concentration.

— Je suis Margaret de Castille, mon ange. C'est normal que tu ne te souviennes pas de moi, tu étais haute comme trois pommes la dernière fois que nous nous sommes vues ! poursuivit la femme, un sourire éclatant aux lèvres. Comment vas-tu ?

— Je vais bien, merci, répondit-elle sans pour autant esquisser le reflet d'un sourire.

En l'espace de quelques secondes, le silence se fit dans la grande salle. Ou plutôt, le bruit incessant avait diminué. Catriona se retourna et, comme tous les invités présents, son regard se posa sur une jolie rousse, aux longs cheveux coiffés qui lui retombaient joliment sur le dos et aux pas légers. À côté d'elle se trouvait François, un doux sourire collé au visage.

Ensemble, main dans la main, ils se rendirent au centre de la piste. Une gêne semblait régner entre eux au départ, mais la musique se chargea de la dissiper. Catriona ne reconnut qu'à cet instant Marie Stuart, la reine d'Écosse et la future femme de François. Fascinée, elle les contempla se mouvoir avec grâce. Lorsque la musique se termina, d'autres danseurs rejoignirent le couple de souverains pour participer à leur tour.

Catriona chercha Amaury du regard, qui se trouvait à quelques mètres d'elle. Une fois repéré, elle esquissa un sourire épris. Ses vêtements étaient bien formels, d'un vert aussi profond que sa simarre, les crevés qui ornaient les manches et le col étaient brodés d'or. Curieusement, il s'accordait à la perfection à sa toilette. Le regard du blond s'accrocha au sien, mais il ne vint pas. Pourtant, Catriona était divine ce soir, son corsage laissait apparaître la neige de sa poitrine. La jeune femme ne se découragea pas et remit lentement une de ses mèches de cheveux derrière son oreille, sourit une dernière fois dans sa direction, et regarda finalement ailleurs.

Elle obtint facilement ce qu'elle souhaitait, car elle sentit le blond s'approcher et se racler doucement la gorge pour obtenir son attention.

— Tu es magnifique, la complimenta-t-il.

— Merci.

La jeune femme sentit la chaleur lui monter aux joues.

— Accepterais-tu de danser ?

— Oui, bien sûr !

Un sourire aux lèvres, Amaury lui tendit la main dans laquelle elle glissa la sienne, puis ils s'avancèrent sur la piste. Alors que la musique débutait sur les notes basses du violoncelle et le rythme délicat du violon, les deux amoureux s'inclinèrent mutuellement pour se saluer et il la prit dans ses bras pour mener la danse.

Catriona, anxieuse, suivait ses pas d'une rigidité protocolaire.

— Gardes tes yeux sur moi, ressens la musique, tenta-t-il de la rassurer.

Les prunelles de la brune se plongèrent dans ses yeux clairs, qui brillaient encore de cette lueur infantile qu'elle avait connue autrefois. Ses souvenirs lui revinrent en mémoire ; les batailles de polochon dans lesquels des nuées de plumes s'envolaient, les nombreux saute-moutons dans le jardin d'herbes aromatiques ou encore cache-cache. Peu à peu, la raideur laissa place à sa vraie nature. Un sourire doux s'aventura sur son visage qui se décrispait, ce qui plaisait au blond, ravi que ses paroles l'aient aidé.

— À présent, ton expression est bien singulière, murmura-t-il en la faisant tourner sur elle-même. À quoi penses-tu ?

Leurs regards ne se lâchèrent pas tandis qu'ils tournoyaient lentement sur les accords des instruments, d'abord dans un sens, puis dans l'autre.

— À toi, répondit-elle, en toute franchise.

Catriona leva son bras au-dessus de sa tête et ses doigts retrouvèrent à nouveau ceux de son compagnon. Sereine, elle évoluait dans ses bras comme s'ils étaient seuls au monde.

— Je ne mérite pas d'être à côté d'une beauté telle que toi, répondit-il, ravi de la voir s'esclaffer à son compliment.

Amaury la saisit doucement par la taille et la souleva haut dans les airs. Ses chaussons de satin frôlèrent le sol, elle se sentait légère.

— Bien au contraire.

L'orchestre continua de jouer. La musique et le rire des hôtes bourdonnaient agréablement aux oreilles de la jeune femme. Amaury la renversa gracieusement en arrière, tout en la maintenant d'une main dans le dos. Ils ne faisaient qu'un. Par petits pas, ils s'éloignaient et se rejoignaient harmonieusement. Amaury la fit tourner sur elle-même plusieurs fois avant de poser une main sur sa joue et de recommencer l'enchaînement. Catriona l'imita et suivit ses pas.

Elle tenta de retenir cet instant, de le graver dans sa mémoire. Le jeune homme mit un genou à terre pour la saluer respectueusement et elle s'inclina en retour. Les dernières notes de musique retentirent et ils quittèrent la piste de danse. Catriona décrocha un sourire lumineux à son partenaire.

Ce qui était certain, c'était qu'ils s'étaient quittés alors qu'ils n'étaient que des enfants, mais lorsqu'ils s'étaient retrouvés, cela avait immédiatement allumé une petite flamme qui grandissait autant vite qu'un feu de forêt. Catriona ne voulait pas que cet instant se termine, cette soirée était parfaite et elle profitait pleinement de son bonheur.

Amaury déposa un baiser sur son nez et recula d'un pas léger. Troublée, Catriona ouvrit de grands yeux, se mordit les lèvres comme pour contenir un petit cri de joie, puis l'embrassa sur la joue. Soudain, l'impression que le monde avait cessé de tourner s'estompa et ils se retrouvèrent avec la Reine Catherine qui les observait. Catriona lança un regard interloqué à Amaury avant de hausser les épaules ... et éclata de rire.

— Excusez-moi, Reine Catherine, se reprit-elle en s'inclinant profondément devant la souveraine.

La matriarche ne voyait vraiment pas ce qu'il y avait de si amusant, mais s'exclama :

— Je me demandais si vous étiez de la partie demain pour rendre visite aux orphelinats de la ville et faire quelques dons à ces pauvres gens.

— Tout naturellement, Reine Catherine. Rien ne me ferait plus plaisir.

— Bien, nous partirons à midi.

— Entendu, je serai prête.

La reine s'éclipsa vers un Duc. Amaury éclata de rire.

— En tout cas, elle est infaillible.

Catriona se contenait, mais rapidement, elle éclata de rire à son tour. Le calme revenu, Amaury étudia ses grands yeux bruns profonds dans lesquels il se perdit un instant, ce qui plut à la jeune femme.

Elisabeth apparut enfin dans l'immense salle, dans une robe des plus sobre, de couleur noire aux reflets dorés. Elle appela immédiatement son amie, qui, après un dernier sourire, délaissa son futur mari pour la rejoindre. Suivie d'une rapide accolade, Elisabeth entreprit de la présenter aux nobles de la Cour qui n'avaient pas encore eu le plaisir de la rencontrer. Tandis que la princesse parlait avec un des nombreux Comtes, Ducs et Barrons présents, Catriona en profita pour aller chercher un verre d'une boisson opaque et en but rapidement une gorgée. Ce n'était pas mauvais, vraiment. Elle se mit à observer les danseurs au centre de la salle de bal, détaillant les couples. Elle remarqua de nouveau le dauphin danser avec sa future femme. Ils vont très bien ensemble, pensa-t-elle.

Accaparée à nouveau par Elisabeth, le reste de la soirée fut une réelle corvée. Le temps passait trop lentement à son goût depuis qu'Amaury avait disparu.

Fatiguée, la jeune femme s'excusa auprès de la princesse et rejoignit ses appartements éreintée, mais satisfaite de cette fête. Elle s'assit sur le petit canapé en velours rouge, proche du grand feu de cheminée et retira ses boucles d'oreilles en attendant ses servantes. Elles arrivèrent peu après pour l'aider à enlever son corset, sa robe et ses parures. Avec soin, elles l'aidèrent à revêtir sa nuisette en satin de couleur blanche. Catriona les remercia de l'aide apportée et s'avança en direction du grand lit. La traîne, presque aussi longue que celle de sa robe, glissait sur les pierres froides de cette pièce éclairée par de multiples chandelles. Elle s'échappa de cette fraicheur en sautant dans ses draps qui avaient été préalablement chauffés par une bassinoire.

Nikkihlous & Kratzouille29

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