ENTENTES
— tu veux du vin?
julia le regarda se verser un verre avant de répondre.
non, mais c'est une blague, j'espère!
— non merci. je ne prends pas d'alcool à cause de, tu sais... c'est très mauvais pour la santé à long terme et puis, j'essaie de ne pas ruiner ma vie pour réussir mon rêve. c'est gentil de ta part, mais peut-être une autre fois.
« peut-être une autre fois », la réponse universelle pour « jamais de la vie ».
il la regarda pendant un instant, comme pour vérifier si elle était réellement en colère. et enfin, un sourire éblouissant se forma sur ses lèvres.
— bonne réponse. tu as passé le test.
elle détestait lorsqu'il agissait de la sorte. non, en fait, elle adorait.
— je prendrais bien un verre d'eau, par contre. et puis, la dernière fois que j'ai osé prendre un verre, c'était à une fête ridicule qu'un gars pour qui je flashais à l'école avait organisé. je crois que j'ai voulu l'impressionné, alors j'ai simplement fait la fête, comme tout le monde. j'ai simplement oublié qu'il y a une limite à toutes choses..
charles a regarda avec les étoiles dans les yeux, le sourire aux lèvres.
— et ce garçon pour qui tu en pinçais? t'a-t-il vu à ta juste valeur ce soir là?
elle rit légèrement, un gesture qui vint chatouiller le coeur de charles.
— aucunement! il ne s'était pas occupé de moi. je crois que ça m'avait brisé le cœur, à l'époque.
elle souriait encore lorsque charles lui donna son verre d'eau.
julia n'arrivait pas à croire qu'elle se retrouvait dans la maison de charles, un endroit qui lui semblait si loin, mais si près. c'était un endroit bien spacieux et charmant, un endroit où l'on pouvait rapidement se sentir chez-soi. tout ceci était bien nouveau pour elle: l'énorme salle d'entraînement vitrée, la salle à manger qui pouvait bien accueillir au minimum vingt-cinq personnes et la salle de trophées qu'il avait reçus lors des nombreux tournois auxquels le jeune homme avait participé. depuis toujours, elle avait vécu dans ce petit bungalow sur le bord de la mer avec son père, cet endroit piteux avec une seule salle de bain et des ampoules traditionnelles pour éclairer chaque pièces. s'en était peut-être trop pour elle, de voir un endroit aussi luxueux. ici, elle avait l'impression qu'à chaque tournants, elle allait croiser une nouvelle chambre, une nouvelle salle d'eaux.
elle se l'imaginait fredonner doucement un air d'aerosmith en préparant un petit déjeuner dans son immense cuisine remplie de robots technologiques. elle le voyait bien faire des redressements assis dans sa salle de sport, tout en sueur, son chandail moulant son torse musclé. tout semblait logique avec la place. et même pour un minuscule instant, elle s'était imaginée habiter dans cette maison à ses côtés. peut-être que, dans sa tête, c'était pour elle qu'il préparait ce petit déjeuner, après tout?
arrête, julia. tu fais pitié. tu ne connais pas cet homme.
ils étaient assis dans le salon et regardaient la reprise du match de halep contre williams qui jouait à la télé. julia regarda autour d'elle en se disant qu'un jour, elle habiterait dans une maison aussi digne d'une joueuse professionnelle, une maison exactement comme celle-ci.
— charles, je ne veux pas être indiscrète ou quoi que ce soit, j'ai beaucoup de respect pour toi, mais comment fais-tu pour t'offrir une aussi belle maison?
il se retourna vers elle, un air malicieux brillant dans ses yeux.
— avec tout ces tournois gagnés, mes trois ans de coaching avec mon ancien client et l'argent que mon cousin m'à légué après sa mort. Il était horriblement riche.
elle se sentit soudainement gênée au son du mot « mort ». sa respiration se bloqua immédiatement dans sa gorge. ce terme semblait ne pas la quitter partout où elle allait, décidément. elle prit une gorgée de son eau pour cacher sa réticence.
— je suis désolée pour... tu sais...
— tu n'es pas obligée de le dire, julia. je te comprends. vivre un deuil peut être une chose très difficile.
il prit une pause pour lui faire comprendre qu'il savait ce que le chagrin était une étape interminable d'un deuil.
— ne te force pas à en parler si tu ne veux pas.
avec toute la force qui lui restait, julia s'efforça de retenir ses larmes. pourtant, elle avait envie d'en parler avec lui et même de pleurer en sa compagnie. elle voulait qu'il l'entoure de ses bras forts, qu'il la rassure et lui dise que tout allait bien aller. il était le seul au monde qui semblait pouvoir la comprendre. il la regardait avec un regard si doux qu'elle ne se souvenait pas d'avoir rencontré un homme aussi attachant.
c'est dans ta tête, tout ça.
— étais-tu proche de ton cousin?
— très. nous avions une certaine différence d'âge, mais c'était lui qui me faisait le plus rire dans la famille. je crois que j'étais son favori. enfin, c'est ce que ma tante me rappelle si souvent. c'est pour cela que j'ai tant hérité. et toi?
julia prit un certain temps avant de répondre. elle se disait que ça ne valait pas la peine de plonger dans le vif du sujet. toutefois, c'était plus fort qu'elle; c'était un besoin. elle avait besoin d'en parler.
— oui. il a été la clé pour tout ces moments où j'hésitais, où je voulais déclarer forfait. j'ai longtemps hésité avant de vouloir officiellement devenir une joueuse professionnelle et c'est lui qui m'a encouragé à rêver, à ne jamais abandonner. je le considérais comme un ami, même.
charles s'approcha d'elle sur le canapé, ce qui la prit un peu par surprise. il savait que c'était le bon moment pour le dire. il le devait. c'était bien pour cela qu'il l'avait invité chez lui. non, pas pour parler stratégies, mais bien pour mettre les choses au clair. ne plus penser à elle une seconde de plus.
— julia... c'est aussi ce que je veux que tu penses de moi. je ne suis pas un entraîneur, un professeur ou un maître du tennis qui doit seulement te donner des ordres. je suis aussi ton ami. je ne te veux que du bien pour ton future et tes ambitions.
et beaucoup plus.
mais ça, charles n'osa pas le dire à voix haute.
— entendu?
celui-ci observa son étoile, elle qui le regardait sans vraiment bouger, la bouche entre-ouverte tel un poisson cherchant son chemin dans l'océan. elle réagit finalement avant de lui offrir un sourire chaleureux.
— entendu... merci beaucoup, charles. ça fait du bien de l'entendre. et tu le mérites tout autant.
elle posa avec délicatesse sa main sur celle du garçon, un peu effrayée de sa réaction. mais celui-ci aborda un petit sourire. Elle avait réussit à illuminer son humeur.
— par contre, ça ne veut pas dire que tu es meilleure que moi au tennis.
elle éclata de rire, un peu trop à son goût. par réflexe, elle masqua le bruit en plaçant promptement sa main sur sa bouche. il rit à son tour, heureux de la voir retrouver son humeur habituelle et d'entendre le seul rire au monde qui valait beaucoup à ses yeux. ju' se retourna vers la télé, le sourire toujours scotché à ses lèvres.
mais qu'est-ce qu'elle est belle.
il l'observa encore un moment avant de le lui demander.
— tu veux manger des pâtes?
et c'est ce qu'ils ont fait. de toute la soirée, ils ont regardé le match (halep gagna 6-2, 6-4), mangé les fameuses pâtes à la crème de charles (un délice pour les papilles), discutés avenir et rigolé sur les gens qui étaient drôlement habillés dans la foule du match (particulièrement à propos de cette anglaise abordant un énorme chapeau rose, presque aussi grand qu'un parasol).
de toute la soirée, ils n'ont même pas pensé une seconde à parler stratégies.
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