Chapitre XXX
Des gémissements de douleur tirèrent Aaron de son lourd sommeil et il grogna un peu en se redressant dans son lit. En y prêtant attention, et aussi en émergeant, il se rendit compte que les bruits provenaient du salon où dormait Hugo. Cette constatation termina de le réveiller et il se leva rapidement pour accourir dans la grande pièce. Le brun était en plein cauchemar, il bougeait dans tous les sens sur le canapé, tentant de se débattre contre un fantôme invisible. Il attrapa ses épaules et le secoua en appelant son prénom jusqu'à ce qu'il ouvre les yeux. Les pupilles marrons regardèrent autour d'elles, le transformant en un véritable chiot perdu, et Aaron caressa doucement ses cheveux en chuchotant de sa voix grave, tout près de son oreille :
— C'était un mauvais rêve, petit agneau, calme-toi...
— Putain... je... j'ai cru qu'il était là et qu'il...
L'étudiant étouffa un sanglot en se mordant la lèvre et ferma les yeux pour cacher ses larmes. Cela suffit à faire ressurgir dans son esprit l'image de son père sur lui en train de le frapper. La panique aurait pu de nouveau le gagner s'il n'avait pas sentit les bras protecteurs de son aîné s'enrouler autour de ses épaules et sa voix rassurante lui chuchoter :
— C'est fini, Hugo, c'est fini... il n'est plus là... il ne te fera plus de mal...
— Co-comment tu peux en être sûr, hein ? Toutes les nuits, je... il est là...
— Tu fais ce rêve tous les soirs ?!
La moue désolée du plus jeune fit aisément comprendre au roux que, si ce n'était pas tout le temps, la fréquence de ces cauchemars était beaucoup trop élevée.
— Et c'est trop compliqué de me le dire, tête de mule ?
— Tu dors toujours profondément... je ne voulais pas te réveiller...
— Idiot, soupira le plus vieux, bon... viens avec moi. Ce sera plus simple de te calmer dans mon lit pour les prochaines fois.
Le visage de l'étudiant sembla s'éclairer un instant avant de reprendre cette mine fatiguée et quelque peu effarée, si bien que l'avocat pensa avoir rêvé. Il prit sa main et l'emmena dans sa chambre. Hugo monta sur son grand lit et se roula en boule sous la fine couverture en couinant :
— Comment tu peux dormir avec seulement ça ?
— Je ne suis pas frileux...
L'avocat s'allongea dans son dos et l'enlaça en soupirant :
— Viens par là, je vais te réchauffer...
Bien malgré lui, le plus jeune émit un petit couinement de bien être en se laissant aller contre son torse ferme, ce qui le fit sourire tendrement. Il déposa un baiser dans sa nuque et caressa son ventre, passant la main sous son t-shirt, pour le bercer. Il attendit qu'il fût rendormi pour pouvoir lui aussi fermer les yeux et somnoler jusqu'à ce que son réveil sonne.
~~~
— Tu es sûr que je peux venir ?
— Je sais pas si je vais pouvoir me retenir, mes pères ne savent pas forcément gérer mes crises.
— Mais moi oui, questionna Hugo en fronçant les sourcils, fixant la route menant à la clinique où exerçait Eric en tant que chirurgien.
— Toi, tu... Tu as déjà réussi à le faire hier, alors pourquoi pas aujourd'hui aussi, hein ?
— Je l'ai fait en te suçant, tu veux vraiment que je te fasse une pipe devant tes vieux ?
— Tais-toi à la fin...
Aaron se gara sur le parking de l'établissement médical et se tourna vers le brun pour expliquer :
— Hier, le malade qui s'en est pris à Éric a hurlé qu'il ne voulait pas se faire soigner par une tapette avant de prendre un de ses outils et lui planter dans la cuisse. Il est blessé mais… ses jours ne sont pas en danger...
— Oh… Je suis désolé...
— Et hum… aussi… je lui ai promis que je viendrai avec mon petit-ami, c'était pour lui faire plaisir... Du coup...
— ... Je dois me faire passer pour ton petit ami.
Il ne put voir la lueur blessée qui passa dans les yeux de l'étudiant à cause de ses lunettes de soleil et il n'eut pas plus de temps pour deviner ce qu'il pensait que déjà il sortait de la voiture en claquant la porte.
— Tu comptes vraiment leur mentir comme ça ?!
— Est-ce que c'est seulement un mensonge, Hugo ? On est déjà quasiment en couple.
— Et qu'est qui nous empêche de l'être complètement, alors, espèce de connard ?
— Le fait que je ne puisse pas encore te punir pour cette insulte, grogna le roux en attrapant fermement son poignet et en le plaquant contre lui pour ajouter contre son oreille, je rêve de te faire mien depuis que je t'ai récupéré. Je veux que tu sois mon soumis, que tu sois à mon service jour et nuit... t'es le seul à me faire ça, mais je ne peux pas encore dire... les trois petits mots que tu attends. Pas après avoir aussi longtemps lutter contre...
— Aaron... je...
— On en reparlera en rentrant.
L'avocat le relâcha et traça son chemin, le laissant pantelant et les joues cramoisies sur le parking. Il tenta de reconnecter ses deux neurones en se repassant le dialogue qu'il venait d'avoir. Aaron avait confié... il avait confié... ses pommettes ne pouvaient pas se colorer plus mais elles l'auraient fait avec joie. Il l'aimait ! C'était dit à mi-mots mais c'était dit.
— Pardonnez-moi, mon Dieu, je crois que je vais signer avec le démon de la luxure même, chuchota-t-il avant de courir à l'intérieur.
Il attrapa la main de son aîné qui attendait près de l'accueil. Il sentit ce dernier nouer ses doigts avec les siens et les serrer avec force. Il avait dû mal à faire disparaître les rougeurs sur ses joues et l'énorme sourire qui lui mangeait le visage. Il voulut lever la tête mais quasi-aussitôt la main libre du roux la lui maintint baissée vers ses pieds en chuchotant :
— Je serais toi je garderai la tête basse et je prendrai bien soin de m'appeler Prince et me vouvoyer, quand on est tous les deux ou avec des personnes du même monde. Enfin, même s'ils sont au courant, évite de le faire devant mes vieux.
— Ou-oui, Prince, souffla Hugo en tentant de retenir le frisson d'excitation qui traversa sa colonne, mais on est pas censé faire un contrat ?
— On le fera en rentrant.
— Bonjour, messieurs, puis-je vous aider, demanda la secrétaire alors qu'ils arrivaient à sa hauteur.
— Bonjour, mademoiselle, je viens pour voir mon père, le docteur Éric Chô.
— Oh, oui. Pauvre docteur... Mm... C'est la chambre 147.
— Merci.
L'avocat partit à travers les couloirs vers un escalier et monta au premier étage. Le brun resta accroché à sa main pour pouvoir le suivre à travers le labyrinthe que formait la clinique et il ne respira librement que quand ils furent arrivés devant la chambre. Aaron ouvrit la porte en souriant et aussitôt une voix chaleureuse les accueillit :
— Aaron, qu'as-tu dit à ce pauvre garçon ? Il paraît effrayé...
— C'est rien, Appa, souffla le jeune homme en pinçant la hanche de l'étudiant qui releva la tête en couinant de douleur, je te présente Hugo. Hugo, voilà Éric et... où est papa ?
— Parti me chercher des biscuits, rigola l'homme dans le lit, faisant plisser ses jolis yeux noirs un peu bridés, ravi de vous rencontrer, Hugo.
— Moi de même, monsieur...
Hugo se sentait étrangement à l'aise avec lui. Le cinquantenaire avait l'air d'une personne très empathique et d'une grande gentillesse. Il constata sans mal qu'il avait des origines asiatiques, sans doute coréenne vu le surnom que Aaron avait utilisé pour lui parler. Il détailla ses cheveux noirs et son visage fin qui ne se semblait jamais perdre son sourire. Il était bel homme.
— Comment tu vas ?
— Ne t'inquiète pas pour ça, va. Se faire blesser dans un hôpital n'est pas la pire chose qui ai pu m'arriver dans la vie.
— Peut-être, mais ce malade t'as tout de même bien amoché, mon amour.
Le brun se tourna en sursaut vers la porte quand il entendit une nouvelle voix derrière lui. Elle était un peu plus froide, pas dénuée de sentiment mais moins rassurante que celle du docteur, et appartenait à un homme lui aussi âgé d'une cinquantaine d'années de la même carrure que Aaron. Il avait d'ailleurs les mêmes cheveux cuivrés, bien que quelques mèches blanches commencent à apparaître par-ci par-là. Seul différence avec son fils, ses yeux, qui avaient une teinte gris sombre rappelant un ciel d'orage.
— Qui est ce jeune garçon, Aaron ?
— Je te présente Hugo, mon petit-ami...
— Enchanté. Je suis Louis, le père de Aaron.
— Ravi de vous rencontrer.
Il serra la main que l'homme lui tendait avec un léger sourire. S'il l'avait impressionné au premier abord, le regard protecteur qu'il avait lancé à son fils quand ce dernier l'avait présenté l'avait attendri. Aaron avait vraiment des parents extraordinaires.
~~~
— Tes parents sont vraiment sympas...
Aaron poussa la porte de son appartement en claquant la langue sur son palais. Quand Hugo passa devant lui, il lui administra une belle fessée qui le fit couiner de douleur avant d'expliquer en souriant :
— Tu as oublié le vous et le Prince, à la fin de ta phrase.
L'étudiant rougit légèrement en baissant la tête. L'avocat rigola un peu et avança vers l'îlot de la cuisine en tendant un paquet de quelques feuilles vers lui.
— Lis-ça, petit agneau. Et dis-moi ce que tu en penses...
Le cadet s'assit sur un tabouret en face de ce qu'il devina facilement être un contrat et commença sa lecture :
CONTRAT D'INITIATION AUX PRATIQUES BDSM
Déclaration préliminaire:
Les parties s'accordent pour que ce contrat BDSM soit une valeur morale reliant les deux contractants d'un accord mutuel. Il n'a pas de valeur légale au sens strict de la loi.
Clauses communes :
1.1 Cet accord prend effet à la date de la signature par les deux parties.
1.2 Il lie le soumis à son Maître pour une période de sept jours sous réserves des conditions d'annulation ennoncées à la partie Dissolution du présent contrat.
1.3 Le contrat BDSM ne peut être modifié qu'en accord des deux parties.
Droits et obligations du Maître :
2.1 Il s'engage à tenir compte des exigences familiales, professionnelles et financières de son soumis.
2.2 Il dispose de tous les pouvoirs sur son soumis tant sur son physique, son sexe et son intellect. Il peut se jouer de toutes pratiques sexuelles, punitions ou humiliations.
2.3 Il respecte les limites physiques de son soumis.
2.4 Il doit se tenir informer de l'état physique et psychologique de son soumis et en tenir compte lors des jeux BDSM.
2.5 Il peut filmer ou photographier son soumis en accord avec ce dernier.
2.6 Il peut rompre le contrat sans préavis.
Droits et obligations du soumis dans le contrat BDSM :
3.1 Le soumis comprend et accepte la Domination de son Maître et devient sa propriété exclusive.
3.2 Le soumis sait que le corps du Maître est sacré et qu'il ne peut le toucher sans son autorisation. Toute infraction serait punie et le soumis pourrait même être répudié assortie d'une rupture du protocole de soumission.
3.3 Le soumis comprend et accepte les désirs et plaisirs du Maître. Lui seul à le droit au plaisir, au confort, au bien-être, au repos, à l'amusement, à la distraction, au luxe, aux vacances et à la paresse. le soumis se mettra à son service pour qu'il puisse jouir des plaisirs de la vie.
3.4 Le soumis accepte que son dévouement ne réponde pas à ses fantasmes ou attentes sexuelles mais a celles seules du Maître.
3.5 Le soumis s'exprimera avec respect sous peine de punition. Le Maître peut éventuellement lui demander d'émettre un avis, qui doit être le plus sincère possible.
3.6 En qualité de soumis, le soumis renonce à sa liberté et à ses droits en remettant son corps et son âme entre les mains de son protecteur.
Le contrat BDSM impose :
4.1 le soumis s'engage à accepter toutes les pratiques sexuelles ou non et humiliations que ce soit en public ou en privé.
4.2 le soumis s'engage à porter tout accessoire sexuel ou tenue imposée en tout lieu et à tout moment.
4.3 le soumis laisse l'accès et le contrôle total de sa sexualité et de son intimité à son Maitre.
4.4 Le soumis n'a aucun secret pour son Maître et a obligation de vérité dans ses réponses.
4.5 Le soumis a droit à un Safe Code.
Tout manquement implique une punition ou la résiliation du present contrat.
Safe Code :
5.1 Un Safe Code est prévu pour être utilisé lors des séances. Si le soumis ne peut parler, un Safe Code alternatif est choisi.
5.2 S'il est employé, le Maître interrompt la séance et écoute le soumis.
5.3 Si le soumis l'utilise, il doit être en mesure d'expliquer pourquoi.
5.4 Il ne sera utilisé que dans les cas extrêmes. Utilisé sans motif valable, il oblige une punition exemplaire.
Dissolution :
6.1 Le Maître peut dissoudre le contrat de soumission en libérant le soumis sans aucune justification.
6.2 Le soumis peut en demander l'annulation en cas de non respect de la présente convention ou s'il n'y a plus d'entente entre les participants.
6.3 Ce contrat peut aussi être rompu s'il devient impossible de continuer les séances et pratiquer la relation BDSM.
J'ai pris connaissances du présent contrat BDSM et c'est librement que je m'engage à le respecter dans son intégralité.
Document établi en double exemplaires
Le ........................................... à...........................................
Signature du Maître, précédé de la mention "lu et approuvé, bon pour engagement":
Signature du soumis, précédé de la mention "lu et approuvé, bon pour engagement":
— Mm... Donc... si je signe ça, on sera... un couple ?
— Oui, on sera un couple, mais je te préviens dès maintenant... même si on va faire des trucs de couple normaux je veux que tu aies toujours le comportement d'un soumis. Sauf quand je te demande le contraire.
— Hé bien… Je crois que c'est correct. Si quelque chose ne va pas, on pourra toujours le modifier ?
— Bien sûr. Le but, c'est que ça nous profite à tous les deux.
Un sourire victorieux naquit sur les lèvres du plus vieux alors qu'il apposait sa signature en bas de la dernière page.
— Voilà, Prince.
— Parfait... Alors file prendre ta douche, nous allons nous coucher.
— Oui, Prince.
Hugo se retint de justesse de se mordre la lèvre en descendant du tabouret puis il se dépêcha d'aller dans la salle de bain pour se doucher. En l'attendant, l'avocat signa lui aussi le contrat et le photocopia afin que son désormais soumis puisse en conserver un exemplaire. Son cœur battait vite. Il avait eu peur qu'il refuse, mais apparemment le brun était tout aussi attaché à lui, ce qui le rassurait un peu. Tout irait bien maintenant.
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