CHAPITRE 1 - Enfer Terrestre
Je m'étire lascivement dans mon lit en prenant tout mon temps. Je suis dix minutes en retard pour mes cours. Normal. Mon quotidien. Et je n'essaie même pas de faire une différence dans cette mauvaise habitude. Mais je suis mauvaise en soi. Alors pourquoi changer ? C'est si bon d'être mauvaise... ( OK, non, j'exagère...un peu ) Puis, je ne suis pas pressée. Pas le moins du monde.
Je m'extirpe à regret de mon grand lit et enfile mes pantoufles que j'ai placé minutieusement hier soir pour que quand je me réveille, ils soient parallèles à mes pieds quand je me lève. C'est peut-être con, mais ça m'épargne des minutes précieuses à placer les pantoufles, galérer à me pencher pour les ramener vers moi et tout le tralala. Alors je me mets debout et me rends dans ma salle de bain privée pour me doucher. Je détache mes longs cheveux bruns, me déshabille et me glisse sous le jet d'eau chaude avec bonheur.
Je suis aussi le genre de personne qui aime secrètement jouir des petits plaisirs de la vie. La douche, le petit déjeuner, les oiseaux au matin... mais je ne le montre surtout pas. Si je veux conserver ma réputation, je ne dois pas laisser cela paraitre. Au lycée, je suis factuelle, « polie », froide et distante. Personne ne réussit à percer ma carapace protectrice. Personne. Pas même mes parents. Eux, bah, ils s'en foutent carrément. Le fait que je n'arrête pas de sécher des cours et d'arriver en retard leur est égal aussi. J'ai des retenues ? Tranquilles. Convocations ? Tranquilles. Mais marcher pieds nus dans la cuisine ? Troisième guerre mondiale. C'est ce qui explique les pantoufles. J'veux pas un mal de tête gratuit à huit heures et demi du matin, moi.
Au bout d'une dizaine de minutes, je coupe l'eau et m'entoure d'une serviette. J'essore mes cheveux, les sèche rapidement avec le séchoir puis me plante devant mon dressing. J'ai rien à me mettre... Oui, OK, vingt paires de chaussures, des tonnes de chandails et de pantalons, mais j'ai envie de mettre une robe, moi là. Ma mère en a plein..
Un sourire malicieux vient étirer mes lèvres pendant que je me dirige vers la porte de ma chambre pour « voler » une robe à maman. Mais je n'ai pas le temps de tourner la poignée que je reçois un texto de Maélie, une de mes amies les plus proches.
MAÉ: Yo, la prof de litté a emmené son fils. Pis y'a un nouveau
MOI: OK, et alors ?
MAÉ: Koi « et alors », les deux sont fckn beaux !
MOI: OK, bien pour toi.
MAÉ: De koi, bien pour moi ?! C'est qd que tu vas te décoincer et avoir ton premier mec, explik ?
OK, elle a touché un point sensible. Oui, je n'ai jamais eu de mec. Oui, je n'ai jamais eu mon premier baiser. Mais je ne suis pas pour autant coincée, là !... Bon, d'accord... un tout petit peu.. Mais c'est les limites que je me suis imposées il y a quelques années. Depuis la fin de Seconde. Je ne m'attache pas, mais j'attache. Tout simplement.
MAÉ: Bref, moi j'retourne dans ma contemplation des divines beautés assises devant. Grouille ton cul.
Je soupire devant la « beauté » de son dernier message. Maélie est connue pour sa franchise sans limites et ses manière sauvages. Tout ce que j'aime. Je lance mon Iphone sur mes draps et enfile mes pantoufles pour ne pas faire trop de bruit. Et je marche sur la pointe des pieds dans le couloir pour me rendre au dressing de ma mère. J'en ouvre la porte en essayant d'atténuer les sons en y allant lentement. Parce qu'elle dort encore et que si elle se réveille et me voit en train de lui piquer des vêtements, c'est la mort assurée.
Je prends une robe-pull au hasard et cours dans ma chambre l'enfiler. Finalement, je suis plutôt pressée de me rendre en cours. Il faut dire que Maé a piqué ma curiosité. J'enfile le vêtement blanc rayé de noir moulant qui épouse chacune de mes formes et met ma poitrine en valeur. J'enfile des baskets noires, détache mes cheveux qui retombent en cascades dans mon dos, attrape mon sac à dos et prends mon lunch sur le comptoir de cuisine. Je ne mange pas les trucs bizarres de la cafétéria.
Je lance mon sac sur le siège du côté passager de ma voiture et la fais démarrer. Une dizaine de minutes plus tard, je suis au lycée. L'endroit que je déteste le plus au monde, mais dans lequel j'ai une certaine autorité. Je roule lentement jusqu'à MA place de parking... qui est occupée. Mon sang commence à bouillir dans mes veines. J'ai presque envie de hurler: « Qui ose prendre la place de la reine !? ». Mais je n'en fais rien. Je ne fais que régurgiter une flopée de jolis mots en me trouvant une autre place bien plus éloignée pour me garer.
Je sors de ma voiture, en claque rageusement la porte et me rend d'un pas lourd jusqu'à la grille qui est déjà fermée à cette heure. Mais j'en connais bien le gardien.
- Jonathan ?
Il lève la tête du journal qu'il était en train de lire et m'offre un petit sourire.
- Bien le bonjour Alex. Toujours autant en retard à ce que je vois.
- Moui... Avoue que tu m'ouvres la porte ?
- Vérité ou conséquence ?
Et merde. C'est son jeu à lui, ça. Si je choisis vérité que je réponds bien, il me laisse entrer. Même chose pour les conséquences.
- Pff... T'es vraiment un gamin...
Il me sourit de toutes ses dents et dépose le journal à ses pieds en croisant les bras.
- Alors ?
- Vérité.
Il réfléchit un instant en scrutant mon visage.
- Donc... Alexia... As-tu une prochaine cible masculine ?
Je fronce les sourcils et choisis consciencieusement mes mots.
- Non.. Je n'ai pas de cible masculine, présentement.
Il commence à jouer des sourcils.
- Sûre ?
- Oui.
- Sûre comme un citron ?
Je me cache le visage entre les mains pendant qu'il rit à gorge déployée de sa blague qui n'en est pas une. Il est déjà chanceux que je l'apprécie assez pour tolérer une telle merde. Puis, il se calme et m'ouvre la grille.
- Bonne journée, mademoiselle Makaryan.
- Merci, Jo.
Je franchit la porte de l'enfer terrestre. Direction: cours de littérature.
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