❀ Chapitre 29 - L'échange ❀

Je n'ose plus remettre sur le tapis la conversation que nous avons eue quelques heures plus tôt. Nous avons mangé et dévalisé littéralement les magasins. Malia n'a cessé de me conseiller en sous-vêtements, habits, chaussures, accessoires et produits de beauté pour plaire davantage à Jordan. Les pauvres conseillères et vendeuses ont dû me conseiller sur des produits supposés attirer toute l'attention d'un petit ami imaginaire... Où va le monde... Même Allison n'a rien dit.

J'avais oublié également à quel point Malia pouvait être sauvage. Elle a pratiquement arraché les yeux d'une cliente qui voulait me piquer discrètement un article entreposé dans ma cabine d'essayage. La pauvre n'y reviendra certainement pas. Cette frayeur lui aura servi de leçon, c'est certain.

Nous sommes désormais attablées à une terrasse de café, les doigts de pieds en éventail si je puis dire. Je sirote tranquillement le Frappuccino à la vanille que j'ai commandé. Je pense d'ailleurs commander à emporter tout à l'heure et apporter à Jordan un peu de réconfort. Je tiens à le remercier pour tout ce qu'il fait depuis le début. Et quoi de mieux qu'un geste simple et attentionné ?

Le temps file à une vitesse inimaginable.

— Ethan vient d'arriver, je vais devoir y aller les filles, nous informe Allison après avoir jeté un coup d'oeil furtif à son portable.

— Lâcheuse ! s'égosille Malia.

Tous les clients se retournent vers nous. Être en compagnie de Malia, c'est la discrétion assurée !

Allison la dévisage, le rouge aux joues.

— On a réservé cette soirée depuis des siècles, c'est pour fêter nos plusieurs mois de relation, se justifie-t-elle.

— T'en fais pas, on sait. Malia fait des blagues pas drôles, faut pas lui en vouloir. Amusez-vous bien et pas de bêtises, la mets-je en garde.

— Sinon tu sais que je suis là et que je t'entends Madi ? peste la coyote.

— C'est pas vrai, tu as des oreilles ? la taquiné-je gentiment.

— Moque-toi, moque-toi...

— Allez j'y vais moi, bon week-end et à lundi, nous salue Allison avant de s'éclipser rapidement.

Malia m'observe en silence. Face à son regard scrutateur, je décide de reprendre la parole.

— Tu as une heure pour rentrer ? m'enquiers-je.

— Je pense ne pas trop tarder, il y a Arrow à la télé ce soir. Donc, si je veux que mon plateau repas soit prêt, je devrai partir d'ici un quart d'heure je dirai, et toi ?

— Je partirai à peu près en même temps que toi je pense, réponds-je.

— Ouh la copieuse, je suis ton modèle c'est ça ? glousse-t-elle.

Cette fille est désespérante mais qu'est-ce-que je ferais sans elle ?

— Malia, tu n'as pas bientôt fini de dire des âneries ? pouffé-je.

— Laisse-moi rêver un peu Madi', t'es pas gentille, se plaint-elle.

— Ok, ok, je te laisse dans tes songes quelques instants, lui accordé-je, souriante.

Elle prend un air qui se veut important et se met à fixer un point derrière moi.

— Dis-moi, tes agresseurs ont été retrouvés ? me demande-t-elle, un rictus mauvais sur le visage.

— Jordan ne m'en a pas parlé donc j'imagine qu'ils courent toujours, la renseigné-je.

— Plus pour longtemps à mon avis, ricane-t-elle avant de se lever de son siège.

— On ne peut pas savoir...

— Oh crois-moi, s'ils croisent le chemin des mauvaises personnes, ils ne risquent pas de faire long feu. Tout sera bientôt derrière toi, me promet-elle.

Je lui souris touchée.

— Je me doute. L'équipe du shérif finira par remonter à eux, j'ai bon espoir. lui certifié-je.

— S'ils ne sont pas retrouvés avant... répond-elle d'une voix mystérieuse.

— Comment ça ? l'interrogé-je, souhaitant comprendre pourquoi elle dit ça.

— Bon allez, c'est pas le tout mais moi faut pas que je traîne ! On se voit plus tard, allez salut ! conclut-elle avant de me laisser en plan, elle aussi, en s'éloignant à toute vitesse.

Wow ! Je ne m'attendais pas à ce qu'elle parte si vite... Elle n'avait tout de même pas un train à prendre !?

Je me relève à mon tour, les yeux toujours arrondis de surprise. Je saisis tous mes sacs et me dirige vers le comptoir.

Le serveur me prépare ma commande à emporter après que je l'ai réglé. J'espère que le Latte Machiato à la vanille que je lui ai acheté lui conviendra. Pour ma part, je me suis laissée tentée par un chocolat viennois, une valeur sûre de nos jours.

Après plusieurs minutes de marche, je demande à la personne de l'accueil si Jordan est disponible.

Le jeune homme m'emmène jusqu'à son bureau et frappe trois fois à la porte.

J'entends Jordan se lever de son fauteuil et se rapprocher de l'endroit où je me trouve. Mon coeur bat à tout rompre.

J'ai peur de le déranger. Me faire envoyer baladée n'est pas ce que je recherche à tout prix en ce moment.

Qu'est-ce-qui m'a pris ?

Je recule discrètement, prête à prendre mes jambes à mon cou.

— Oui ?

— La jeune fille a demandé à te voir, lui explique son collègue.

Je perds la vue quelques secondes, prise d'une angoisse profonde.

— Entre donc je t'en prie, m'accueille l'adjoint, à mon plus grand soulagement.

Il se décale de la porte, fait un rapide signe de tête à son confrère et referme derrière nous.

— Qu'est-ce-qui t'amène ? s'enquiert-il.

Je me racle la gorge, voulant m'assurer que ma voix franchira la barrière de mes lèvres.

— Je sais que tu travailles beaucoup. Je me suis dit que ça pouvait être sympa de t'apporter un petit remontant, me justifié-je en lui tendant les boissons.

— Oh c'est adorable de ta part Madison, je n'ai jamais connu ce genre de petites attentions, me répond-il touché.

— Tu les mérites pourtant, prononcé-je sans réfléchir.

Pourquoi fallait-il que je pense à voix haute ?

Je fais mine de vérifier que tous mes sacs sont là, mal à l'aise.

— Il y a même mon prénom ! s'émerveille-t-il.

Je redresse la tête et esquisse un tendre sourire.

Il ressemble à un enfant découvrant ses cadeaux sous le sapin à Noël.

— Je leur ai demandé de le noter pour que l'on puisse différencier nos gobelets, lui expliqué-je doucement.

— C'est encore plus mignon, je ne sais même pas comment te remercier, murmure-t-il ému.

— Tu n'as aucun besoin de me remercier, mon but était de te changer les idées un petit peu pour que tu ne satures pas trop, l'informé-je, attendrie.

— Que dirais-tu si l'on se posait des questions autour de ces douceurs pour apprendre à se connaître ? me soumet soudain Jordan.

— Avec plaisir, mais seulement si tu le souhaites aussi, accepté-je.

— Si je te le propose c'est que j'aimerais beaucoup, me rassure-t-il.

— Super, tu commences ou je m'en charge ? le questionné-je.

— Honneur aux femmes, je te laisse débuter ! s'exclame-t-il tout excité du jeu qui s'instaure entre nous.

Je prends quelques instants pour me décider sur le premier sujet à aborder.

— Quel était ton rêve lorsque tu étais petit ?

Je saisis mon gobelet et avale quelques gorgées, attendant patiemment qu'il prenne la parole.

— Je voulais sauver des vies et protéger les gens que j'aime. C'était pour moi ma destinée et je me suis donné les moyens pour y arriver. Aujourd'hui, je ne regrette rien, se confie-t-il.

— Tu ne pensais pas à avoir une vie de famille grâce à laquelle tu pourrai t'épanouir alors ?

— Très peu. Disons que ça n'était pas au centre de mes priorités mais maintenant ça l'est davantage, m'explique-t-il.

Je souris, satisfaite de la réponse apportée.

— Et toi ? reprend-il.

— Avant que ma vie soit chamboulée, je rêvais de pouvoir fonder une famille plus ou moins nombreuse, qui m'aimerait pour ce que je suis. Aujourd'hui, mon rêve est d'être heureuse et de pouvoir vivre de ma passion.

— Je peux savoir quelle est-elle ? me quémande-t-il, piqué par la curiosité.

— Oui bien sûr ! Je souhaite devenir psychologue. Aider les gens à aller mieux, les écouter et les aider à trouver des solutions à leur mal-être est une priorité dans ma vie.

— C'est un très beau projet. Je te souhaite de réussir dans ce domaine.

— Je te remercie. Je me permets de rebondir là-dessus, quels sont tes passe-temps favoris ?

— Aller au cinéma, faire du sport et m'instruire en lisant, me dit-il, sans hésiter.

— Quel homme ! m'exclamé-je, épatée.

Il rigole doucement.

— Maintenant, quelle est ta citation préférée ? me sonde-t-il.

— Sept fois à terre, huit fois debout. Je trouve que c'est un beau message d'espoir, montrant que l'on peut toujours se relever malgré toutes ces épreuves qui nous sont envoyées. Et toi ?

— J'ai appris que le courage n'est pas l'absence de peur, mais la capacité de la vaincre.

— Je l'aime beaucoup aussi. Il y a des proverbes inspirants qui nous empêchent de baisser les bras.

— Figure-toi que je suis entièrement d'accord avec toi ! me certifie-t-il.

— Nous sommes faits pour nous entendre, pouffé-je.

— C'est certain !

Je le dévisage, troublée par ses dires.

— Et qu'est-ce-qui t'effraie le plus ? changé-je de sujet.

— Te moque pas mais j'ai une trouille bleue des clowns. Et toi ?

— Beaucoup de choses m'effraient. Je dirais la peur d'être oubliée, la peur de la maladie, de la mort et de perdre tous les gens que j'aime.

— Ça ne m'étonne pas vraiment. Ces craintes sont similaires pour certains profils de personnes et au vu de ta sensibilité, je ne peux que comprendre que tu fasses partie de cette communauté.

— Je suis une personne prévisible alors ? murmuré-je, déçue.

— Non, du tout. Ça n'était pas dans le sens péjoratif du terme. C'était plutôt pour t'expliquer que tu correspondais aux différents critères de ce profil type qui craint toutes ces choses, du fait de ta sensibilité. reformule-t-il pour que je ne le méprenne pas.

— Oh d'accord, merci d'avoir pris le temps de me le répéter avec d'autres mots. Je comprends mieux ce que tu veux dire, lui assuré-je.

Les minutes défilent à la vitesse de l'éclair. Jordan et moi avons échangé longuement.

Nos boissons ont également été honorées comme il se doit.

Je n'arrive pas à le croire, jamais je n'ai eu autant cette impression de manquer de temps.

— Il est déjà dix-neuf heures, soufflé-je, résignée.

— Je n'ai pas vu le temps passer... me rétorque Jordan, dépité lui aussi.

— Je ferais mieux d'y aller... murmuré-je, sans aucune envie de le quitter.

— Je te ramène ? me propose-t-il.

— Oui je veux bien.

— Très bien, j'ai fini mon service de toute façon. Je vais récupérer toutes mes affaires et j'arrive. Tu peux m'attendre au niveau de l'accueil si tu veux, me prévient-il.

Il quitte son bureau en même temps que moi. Je me dirige vers l'entrée et patiente sagement.

— Vous êtes la copine de Jordan ? me demande son collègue.

La mâchoire et les bras m'en tombent.

Ai-je bien entendu ou mes oreilles me joueraient-elles de mauvais tours ?

— Vous savez, je trouve que vous formez un très beau couple, continue-t-il sur sa lancée.

Mes yeux doivent sortir pratiquement de leurs orbites.

— Qu'est-ce-que tu disais à Madison ? s'incruste l'adjoint.

— Je lui confiais mon admiration pour votre couple, lui explique Daryl.

Jordan a la même réaction que moi. Cependant, à la différence, il secoue sa tête de gauche à droite et se reprend rapidement.

— Nous ne sommes pas ensemble, l'informe-t-il, les joues cramoisies.

— C'est pour bientôt alors ! s'exclame-t-il en nous adressant un clin d'oeil lourd de sens.

Fuir ce moment gênant est devenu une priorité pour nous deux.

— Allez à bientôt Daryl, bonne soirée. conclut Jordan avant de m'entraîner dehors.

Nous explosons de rire une fois dans son véhicule.

— Tu te rends compte, tout le monde veut nous voir ensemble. Il faudrait peut-être qu'on l'envisage, blague-t-il.

— Nous ne serons jamais tranquilles ! Autant finir par nous réunir pour faire des heureux, dis-je, les yeux plissés d'amusement.

— Madison, veux-tu être ma petite amie ? plaisante-t-il.

— Avec grand plaisir mon cher Jordan. Ce serait un honneur d'être vue à votre bras, pouffé-je. 

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