❀ Chapitre 19 - La déposition ❀

Un chapitre un peu plus long que d'habitude, j'espère que vous ne m'en voudrez pas (j'ai énormément de mal à rester constante dans la longueur). Il y a pas mal de dialogues aussi, bonne lecture ✨❤️


J'ai accepté la requête de l'adjoint du shérif.

Nous avons parcouru les quelques mètres nous séparant de son bureau l'un à côté de l'autre.

Je me retrouve assise sur une chaise en bois clair et balaie la pièce du regard. Une grande armoire faisant la largeur de la pièce se dresse devant moi. Ses vitres en verre me permettent d'y apercevoir quelques trophées et médailles datant certainement d'il y a quelques années, lorsqu'il évoluait encore dans l'armée.

Jordan laisse claquer la porte à quelques mètres de moi. Je sursaute et me retourne vers lui, apeurée.

— Excuse-moi, elle m'a échappé des mains, m'explique-t-il, penaud.

— Ça n'est rien, ça arrive, lui réponds-je simplement.

Il m'adresse un sourire désolé.

— Tu souhaites quelque chose à boire ? me propose-t-il.

— Je veux bien si tu as, lui demandé-je timidement.

— Qu'est-ce-qui te ferait plaisir ? me questionne-t-il, prêt à se mettre en quatre.

— Un Frappuccino au chocolat sans café avec une paille lavande s'il-te-plaît, lui dis-je très sérieuse.

Sa mâchoire est prête à se décrocher. Je décèle de la panique dans ses yeux. Il cherche à savoir si je le fais marcher.

Je le toise durant quelques secondes avant d'exploser de rire.

— Oh mon dieu ta tête ! me moqué-je de lui gentiment.

— Madison !!! C'était pas drôle, se plaint-il en croisant les bras, boudeur.

Je suis attendrie face à son comportement. Qui aurait cru qu'il était toujours un grand enfant ?

— Tu devrais profiter, je suis la seule à avoir de l'humour dans la famille, l'informé-je.

— À ta place je ne m'en vanterais pas trop... me taquine-t-il.

Les yeux malicieux, je le détaille du regard.

Il rougit jusqu'aux oreilles.

Ne souhaitant pas le rendre trop mal à l'aise, je reprends mon sérieux.

— Un chocolat chaud ça ira, le renseigné-je.

— Je te l'apporte de suite, m'avertit-il.

Il me laisse seule et part chercher comme promis ce que je lui ai demandé.

Je perçois le fameux bruit de la machine qui remplit le gobelet en plastique.

Je tends l'oreille davantage. Les collègues de Jordan ont dû reprendre place car j'entends le cliquetis plus ou moins régulier des claviers d'ordinateur.

La porte finit par se refermer à nouveau. L'adjoint s'approche de moi et me tend la douce boisson où de jolies volutes de fumée s'en élèvent.

Alors que je le remercie, il regagne sa place et s'installe face à moi. Son regard scrutateur me déstabilise. Je sens mes joues s'empourprer aussitôt et me contente de souffler sur mon chocolat comme si de rien n'était.

Je laisse quelques gorgées couler dans ma gorge. Le liquide est encore trop chaud et me brûle presque les doigts à travers le plastique. Je repose le gobelet encore plein aux trois quart sur le bureau de Jordan, prête à parler.

Il semble comprendre ce que je m'apprête à faire.

— Madison, si tu le veux bien, je vais t'expliquer maintenant la procédure. Je tiens à préciser que je ne me permettrai de t'interrompre qu'en cas de question. Sache également que je ne te jugerai pas. Je me contenterai de t'écouter et de prendre des notes. Je vais te poser quelques questions ouvertes auxquelles tu pourras choisir de répondre, ou non. Surtout essaie d'être la plus précise possible. Et enfin, je te demanderai, suite à une description de ces individus, de me confirmer leurs portraits robots que j'aurai établi, et de vérifier que ma prise de notes correspond à ta version, d'accord ? me fait-il savoir.

— Tout me paraît clair, je te remercie d'avoir pris le temps de me faire part de toutes ces informations.

— Je t'en prie. Nous pouvons commencer dès à présent dans ce cas.

Il ouvre au même moment un document sur le logiciel utilisé par la police pour dépôt de plainte.

Attention, âmes sensibles, s'abstenir

— Pourrais-tu m'expliquer ce qui s'est passé en me précisant la date, l'heure, le contexte et tout ce dont tu te rappelles ? reprend-il.

— J'étais revenue de vacances aux Hamptons il y a tout juste quelques jours. Nous étions le mardi 7 janvier 2020 et, après ma journée de cours, j'étais allée chercher les enfants que je garde à l'école. Une annonce de tempête avait été communiquée quelques heures avant. Cela signifiait, qu'encore une fois, personne ne serait dehors lorsqu'elle pointerait le bout de son nez, sous peine de se retrouver accidenté. Nous sommes rentrés chez eux, et, étant donné que leurs parents travaillaient jusqu'à tard le soir, je les ai aidés à faire leurs devoirs, je leur ai fait à manger, jusqu'aux environs de 20h30. Ensuite, Andrew, le papa des enfants, est arrivé et a pris le relais. Il m'a remercié pour tout et m'a laissé rentrer chez moi. C'est sur le chemin du retour que tout s'est déroulé très vite... m'interromps-je.

J'avale ma salive difficilement et prends quelques gorgées de mon chocolat chaud avant qu'il ne soit froid.

— Prends ton temps, c'est déjà très courageux de ta part d'être venue faire la démarche jusqu'ici, m'encourage-t-il.

Je lui adresse un faible sourire et passe une main dans mes cheveux nerveusement.

— J'ai regardé l'heure sur l'écran de mon portable. Il était 20h45. C'est à ce moment que j'ai aperçu cinq garçons me suivre. J'ai tenté d'appeler Brady, mon meilleur ami, mais il n'a pas répondu. Un des garçons m'a saisi par le bras et m'a saluée en me donnant un surnom malsain compte tenu du contexte. reprends-je.

— Quel surnom ? m'interrompt-il.

— Heu, poupée je crois, je ne me souviens plus très bien, marmonné-je, timidement.

— Très bien c'est noté. Je te laisse continuer.

— Comme je m'en doutais, pas une voiture ne circulait. Les rues étaient désertes en raison de la tempête de neige annoncée. J'ai tenté de bluffer en leur indiquant que j'étais attendue, ce qui en soit, n'était pas totalement faux. J'ai essayé de retirer mon bras de l'emprise d'un des garçons mais il n'y avait rien à faire, il était trop fort. Un autre s'est approché, et, voyant que je refusais d'obtempérer, m'a plaqué violemment contre l'un des pans d'une cabane en bois, celle qui est la plus proche de la forêt. À cet endroit-là, encore moins de monde pouvait voir ce qui se passait, un temps soit peu qu'ils soient de sortie. Mes mains ont été saisies et ramenées au-dessus de la tête, pour m'empêcher de bouger. L'un des garçons a déboutonné mon jean et l'a fait glisser le long de mes jambes et il en a été de même pour mon dernier dessous qui me couvrait quelque peu...

J'étouffe un sanglot. Raconter tout, dans les moindres détails, est si compliqué. C'est une épreuve de plus à endurer. Je prie pour que ces salauds soient retrouvés et punis. Ma souffrance n'aura pas été vaine, et si je peux empêcher d'autres filles de se faire violer, alors soit.

Jordan me dévisage, hésitant quant à la posture à adopter je suppose.

Il se lève finalement et vient s'accroupir face à moi. Ses yeux profonds me déstabilisent encore plus que je ne le suis.

— Ton témoignage ne va pas en rester là Madison. Même si je ne l'ai pas vécu, je sais d'une certaine façon à quel point c'est dur de faire resurgir ce cauchemar qui te hante depuis plusieurs jours. Me parler de tout ça jusqu'à ce moment est déjà remarquable. Je te promets que ces connards ne vont pas s'en tirer aussi facilement.

J'arrondis les yeux de surprise. Je n'ai jamais vu Jordan perdre sa politesse, mais contre toute attente, sa langue semble s'être déliée.

— Merci pour tout ce soutien qui me fait chaud au coeur.

Il me sourit tendrement et entreprend des caresses sur l'une de mes cuisses.

— Je te laisse reprendre quand tu te sens prête, me dit-il avant de se redresser.

Je reprends mon gobelet et avale encore quelques gorgées. La partie à venir risque d'être des plus complexes. Je le repose sur le bureau et souffle un bon coup pour me redonner du courage.

— C'est alors que j'ai compris réellement tout ce qui allait se passer. Le garçon m'ayant déshabillée laisse place à l'un de ses copains en l'informant qu'il peut me prendre. Son sourire ne me disait rien qui vaille et j'avais raison. Toujours maintenue contre le mur, il a plaqué ses lèvres violemment contre les miennes. Je n'ai pas pu m'empêcher de hurler de douleur lorsque je l'ai senti entrer en moi. Ses yeux étaient comme animés par une lueur qui m'était inconnue. J'ai tenté de me dégager de son emprise, en vain. Je l'ai entendu appeler l'un de ses amis...

— Et quel était son prénom ? susurre Jordan entre ses dents.

— Julian. Ma tête s'est retrouvée bloquée pour que l'autre reprenne des baisers, plus sauvagement cette fois-ci. Plus les minutes passaient et plus je souffrais. C'est à ce moment que j'ai décidé de ne plus user de mon énergie inutilement. Les garçons se sont mis à alterner, me faisant un peu plus mal à chaque fois. J'ai cru mon cauchemar terminé lorsque le dernier a éjaculé en moi et m'a laissé retomber violemment au sol. Mais le choc dû à ma chute n'était rien comparé à ce que je venais de subir... Deux de ces garçons se sont encore approchés et m'ont rouée de coups au visage et sur le corps. conclus-je, secouée par les larmes.

Fin des âmes sensibles

Jordan, la mâchoire contractée, finit de taper rageusement sur le clavier. La boîte distributrice de mouchoirs qu'il a laissé devant moi fait bon usage. J'utilise mon troisième déjà.

Il patiente quelques minutes que je reprenne mes esprits.

— Je suis vraiment désolé de te demander ça, surtout après tout ce que tu viens de me dire, mais j'aurai besoin que tu me les décrives pour que je me charge de leurs portraits robots.

— Bien sûr, je comprends. Le premier garçon est un châtain aux yeux verts, trapu. Lorsque je l'ai vu, il avait une barbe naissante. Il devait faire environ ta taille. Le second était légèrement plus petit mais tout aussi trapu, je dirais qu'il devait faire aux alentours du mètre soixante-quinze. Il était blond décoloré mais je n'ai pas vu la couleur de ses yeux. Le troisième, Julian, était roux aux yeux verts. Il avait une boucle d'oreille à l'oreille droite. Sa taille devait être similaire à celle du premier. Les deux autres devaient être des jumeaux. L'un avait des mèches bleues dans ses cheveux bruns et l'autre des mèches vertes. Ils avaient tous les deux les yeux marrons et devaient faire un mètre quatre-vingt dix.

Pendant que je les détaille, l'adjoint s'occupe de les faire apparaître à l'écran. Les différents portraits sont vraiment ressemblants.

— Nous allons interroger notre base de données et revenir vers toi d'ici quelques jours. Si tu te sens capable, j'aimerais que tu viennes les reconnaître lorsque nous les aurons retrouvés.

— Je ne louperai cette occasion pour rien au monde. Ils sont dangereux Jordan. Ils ont voulu en plus me renverser tout à l'heure.

— Je ferai tout ce qui est en mon possible pour te protéger. Tu peux me faire confiance, m'assure-t-il.

— Merci Jordan, vraiment. C'est plutôt étonnant mais je me sens soulagée de t'en avoir parlé. Peut-être que les choses vont enfin bouger.

— Je t'en prie, c'était le moins que je puisse faire. Je te ramène ? me propose-t-il.

— Avec plaisir.

Il saisit ma main dans la sienne et m'entraîne jusque dans sa voiture, sous le regard ahuri de tous ses collègues. 

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