Putain, j'aime vraiment ce chapitre. Je suis contente... Mais du coup encore plus stressée en même temps

- Je t'appelle bientôt alors repose toi bien cette nuit.

Sans prononcer un seul mot, Taehyung sortit de la voiture. Machinalement. Tel un robot, il s'extirpa de l'habitacle trop chaud pour se confronter au froid glacial de l'extérieur. La portière se referma derrière lui et la voiture n'attendit pas une seconde de plus avant de reprendre la route.

Seul en plein milieu de l'étendue de béton, il observait fixement l'horizon. Son esprit était un véritable bordel. Il ne savait plus ce qu'il vient de faire, ce qu'il s'était passé. C'était comme s'il avait tout oublié, sans oublier en même temps.

Il ne savait même pas si toute cette situation était réelle. Si elle l'avait été à un moment donné. Pourtant, il se trouvait là. Dehors, planté devant chez lui, en plein milieu de la nuit, le froid ravageant déjà son corps amoché.

Les lèvres tremblantes, il soupira, et l'air chaud sortant de sa bouche se transforma immédiatement en buée avant de disparaître. Plusieurs fois, il recommença l'opération, observant cette sorte de fumée émaner de lui avant de disparaître dans la pénombre qui engloutissait tout. Cette pénombre qui l'engloutissait lui aussi.

Qui le faisait sombrer dans le néant.

Amorçant un premier pas pour rejoindre le trottoir, il grimaça en bougeant, sentant ses muscles se raidir de douleur. Évidemment, il avait encore mal. Il avait mal partout. Physiquement, mais dans sa tête aussi.

Namjoon était en train de le détruire. De le rendre faible comme il n'avait jamais été. La simple pensée du jeune homme dans sa tête le faisait frissonner d'effroi et, en même temps, créait une chaleur dans le creux de son ventre.

Mais ce dont Taehyung se rendit compte, c'est que cette chaleur n'était pas agréable. Ou du moins, si elle l'était au premier abord, elle ne l'était pas dans le fond. Ce n'était pas la même chaleur qu'il ressentait quand il était avec Jimin avant par exemple. C'était différent. Plus malsain. Plus viscéral.

Une sorte de chaleur paralysante mais pourtant tellement addictive. Et c'était  cette addiction qu'il ne pouvait pas s'expliquer. Cette addiction à laquelle il arrivait à peine à penser même. Il ne se comprenait plus. Comment est ce qu'il était possible de autant haïr une personne et d'être dingue d'elle en même temps ? Parce que c'était ce que vivait le brun en ce moment.

Violemment, ses dents agrippèrent ses lèvres et il se mordit, jusqu'à ce qu'une légère traînée de sang glisse le long de son menton. Cette douleur, courte, vive, lui faisait du bien, et permettait à son esprit de se concentrer sur autre chose que sur ce qu'il vivait en ce moment.

Ses jambes entamèrent quelques pas pour rejoindre le trottoir puisque les phares d'une voiture apparaissaient à l'horizon. C'est alors que, sans plus de cérémonie, il se décida à rejoindre son appartement. Ouvrant la porte, à demi convaincu, il s'échappa une ultime fois du vent de la nuit pour rejoindre son cocon.

La lumière du salon était allumée, mais Taehyung ne voyait rien. Des bruits de voix s'échappaient de la télévision, mais Taehyung n'entendait rien. Douloureusement, sa jambe buta contre la table de la cuisine, mais Taehyung ne sentait rien.

Il ne sentait plus rien.

Parce qu'en cet instant, il ne se ressentait plus rien.

C'est alors que, sans même faire attention à la tignasse rousse, affalée seule sur le canapé qu'il rejoignit sa chambre en traînant des pieds lourdement. Pourtant, cette tignasse rousse, l'avait vu elle.

Jimin avait observé avec attention et inquiétude la démarche hésitante et légèrement boiteuse de son ex petit copain. Il l'avait observé disparaître dans le couloir pour rejoindre sa chambre sans faire attention à son environnement. Sans même remarquer que sa sœur n'était pas là, et que le rouquin était seul chez lui.

Oui, parce que Sunmi n'était pas là cette nuit, et elle avait demandé à son petit ami de dormir à l'appartement pour veiller sur son frère au cas où. C'est alors que, tandis que les heures défilaient encore et encore que Jimin avait veillé. Attendant que le brun daigne rentrer.

Et plus la nuit s'était écoulé, plus une peur insidieuse s'était emparé de lui. Ses idées noires étaient revenues et il était de plus en plus effrayé. Effrayé comme il l'était avant. Avant, quand on l'avait forcé à devenir un autre et à faire des choses qu'il regrettait amèrement aujourd'hui.

Ce qu'il ressentait pour Taehyung le rendait faible, et il le savait mais c'était plus fort que lui. Parce que Taehyung avait été le premier et que dans son cœur, et malgré tout, Taehyung sera, à jamais le seul.

C'est alors qu'il le laissa disparaître. Sans rien dire.

Le brun referma la porte de sa chambre derrière lui, avant de se laisser tomber contre cette dernière, le regard complètement vide. Son cerveau ressassait en boucle sa journée, ses moments avec Namjoon, la manière dont il l'avait traité, dont il lui avait parlé, dont il s'était fondu en lui, violemment, sans aucune douceur. Comme s'il n'était rien de plus qu'un jouet. Un simple animal.

Son chien.

À ce mot, la mâchoire de Taehyung se crispa alors qu'une première larme glissa le long de sa joue. Puis deux, et trois, et ainsi de suite. Il pleura, encore et encore. Laissant ses sanglots évacuer sa colère, sa frustration, sa douleur, sa solitude.

Laissant s'échapper tout le mal qui se trouvait en lui en ce moment.

Il ne comptait plus les minutes qui défilaient. Il ne savait pas depuis combien de temps il pleurait. Depuis combien de temps il était affalé sur le sol, son visage enfoui dans ses genoux. Seulement, tout ce qu'il avait en tête se vidait peu à peu.

Ses problèmes, ses amis, sa sœur, Jimin.

Tout, sauf Namjoon. Sauf lui. Son esprit restait fixé sur cette seule et même personne. Ce seul être qui le tuait et semblait le rendre vivant en même temps. Ce seul être qui le contrôlait comme une marionnette. Ce seul être dont il dépendait.

Il le détestait mais le vénérait presque en même temps. Tout simplement parce que, de quelque manière que ce soit, il réussissait à lui donner ce dont il avait le plus besoin au monde. De l'importance. Assez d'importance pour veiller sur lui.

Il redéfinissait alors, dans un creux de son crâne, son visage, sa voix, ses gestes, ses mots, son odeur, son toucher. Chaque petits détails insignifiants mais ayant pourtant leur importance. Et plus les secondes s'écoulaient, plus ces détails nourrissaient cette rancœur enfoui au creux de son cœur. Cette rancœur qu'il l'énervait. Qui le rendait dingue. Qui le perdait.

Perdu, il l'avait déjà été. Il l'avait toujours été. Mais jamais à ce point.

D'un seul coup, il se releva soudainement, le souffle court, les yeux gonflés, les mains tremblantes et la mâchoire contractée. Ses poings serrés pendaient le long de son corps frêle alors que ses jointures devenaient blanches à force d'être compressées.

Une rage, comme il en avait rarement connu s'emparait de lui. Sa bouche s'ouvrit finalement pour qu'il puisse hurler. Hurler à en perdre haleine. Hurler tout son mal être et sa colère. Son corps se mit à bouger lui aussi, pour envoyer valser les premiers objets qui lui passaient sous la main. Chacun d'entre eux finissaient, écrasés contre le mur, puis, au sol, complètement détruits.

Détruit comme lui.

S'il était brisé, alors le reste devait l'être aussi. Et sa chambre allait en être le commencement.

Encore et encore, il fit voler en éclat chacune des choses qui lui étaient un tant soit peu précieuse ici. Les larmes dévalaient le long de ses joues alors que sa haine s'évanouissait peu à peu. Ou du moins, elle s'atténuait, mais elle ne disparaissait pas pour autant.

Seulement, au moment où il voulu glisser ses mains dans ses poches pour trouver autre chose à exploser, ses doigts buttèrent sur quelque chose qu'il ne connaissait pas. Un sachet en plastique, qu'il n'avait quelques heures auparavant.

Le souffle toujours saccadé, il l'extirpa avant de le regarder, sans comprendre. Un mot était accroché à ce sachet. Un mot rédigé par la seule personne qui avait pu lui mettre quelque chose dans la poche.

Un mot qui changea, malheureusement, la donne immédiatement dans l'esprit de Taehyung.

« Je suis sûr que tu vas t'énerver en rentrant. Prends ça, c'est des calmants, ça te fera te sentir bien. Fais attention à toi. Je m'inquiète pour toi. Vraiment. Nam. »

C'était fou. Fou comme des mots pouvaient faire du bien. Comme des mots pouvaient détruire et reconstruire une personne en un rien de temps. Comme des mots pouvaient être convaincants et persuasifs s'ils étaient prononcés par la bonne personne.

En l'espace d'un simple claquement de doigt, c'était comme si l'esprit de Taehyung venait de se vider, une nouvelle fois. Alors qu'il y a quelques secondes, son visage affichait une véritable expression d'énervement maintenant, tout était vide et plat chez lui. Son regard avait retrouvé son espèce de faiblesse qu'il avait en présence du coloré, et un léger sourire timide étira la commissure de ses lèvres.

Il ne comprenait pas sa réaction, mais c'était plus fort que lui. C'était comme si son aîné pouvait lire en lui. Comme si son aîné savait parfaitement quoi faire pour contrôler chacune de ses réactions, même à distance.

En regardant de plus prêt le sachet, et les cachets qui s'y trouvaient à l'intérieur, Taehyung su exactement de quoi il en ressortait exactement. Ce n'était pas des calmants. Clairement pas. C'était de la drogue.

Les calmants n'existent pas. Les anti dépresseurs n'existent pas. Tous ces médicaments ne sont qu'en vérité une drogue de plus que la société nous fait ingurgiter en faisant passer le tout comme un remède médical miraculeux. Foutaise.

Namjoon réussissait peut être à le rendre aveugle, mais il ne l'était pas à ce point. Seulement, et en pleine connaissance de cause, il ouvrit, sans aucune once d'hésitation le paquet avant d'avaler rapidement un des cachets.

Oui, Taehyung venait de prendre de la drogue. Et cette fois, il en était conscient, et il était également parfaitement consentant. Parce qu'il savait que les effets de cette pilule allait l'aider à partir loin de ce monde, le temps de quelques heures.

Et pour être honnête, c'est ce dont il avait le plus besoin en ce moment.

Disparaître.

Alors lentement, il laissa ses genoux épouser le sol avant que son corps ne suive entièrement. Puis les yeux rivés sur le plafond, il laissa ses paupières se fermer lentement, attendant patiemment de sombrer dans le néant et l'inconscience.

Seulement, il y a une chose que Taehyung n'avait pas prévue. Une chose à laquelle il n'avait même pas songé. Une chose à laquelle il n'avait pas fait attention. Plutôt une chose à laquelle il n'avait pas voulu faire attention.

C'est qu'il n'était pas seul dans l'appartement cette nuit. Et que quelqu'un avait plus ou moins assisté à son carnage, l'oreille presque plaquée contre sa porte de chambre.

Ce quelqu'un avait été témoin de son coup de folie et de ses pleurs.

Ce quelqu'un avait été témoin de sa détresse grandissante.

Et ce quelqu'un avait finalement décidé d'agir, comme il aurait du le faire depuis longtemps déjà.

Ne pouvant pas attendre une minute de plus, Jimin enfila alors un manteau avant de quitter l'appartement les larmes au bord des yeux. Puis il prit la route.

Une route qu'il ne connaissait que trop bien.

Une route qu'il détestait.

Une route qui conduisait n'importe qui à sa perte.

Arrivé à destination, c'est avec une détermination sans faille qu'il se rendit à cet endroit précis. Cet endroit exact qu'il connaissait depuis des années. Il poussa la porte violemment avant de tomber sur l'individu qu'il cherchait. Puis, distinctement, et avec tout le cran qu'il avait, il lui cracha au visage.

- Il faut que ça s'arrête. Que ça s'arrête maintenant Namjoon.