Chapitre 25 : Ce qui ne nous tue pas nous rends plus forts.

Jeff s'avança vers moi. Je pouvais sentir, malgré son sourire figé, que cela l'accablait, et qu'il était triste pour moi à cause de toutes les révélations sur mon passé et principalement sur ma mère. En fin de compte, il montrait de la compassion pour moi, et cela me surpris encore plus. J'étais habituée maintenant aux émotions des creepypastas, surtout de Jeff et de Ticci Toby. Mais je ne sais pas pourquoi, là, maintenant, en ce moment, bien que je ne su dire pourquoi, voire Jeff ainsi me déconcertait.

Jeff s'agenouilla près de moi et d'un geste qui se voulait rassurant, il me pris les mains doucement.
- C'est drôle de te voir ainsi, Jeff... d'habitude, tu es un peu déjanté et tu es toujours en train de rigoler ou de faire des blagues. Et quand tu abandonne ton côté loufoque, tu deviens un tueur sans pitié et dangereux... et là, tu es sérieux... sérieux comme un mec qui porte sur son dos, tout le poid du monde.
C'est rare de te voir ainsi.
Jeff acquiesa vaguement avant de plonger ses yeux bleus et dépourvus de paupières dans les miens. Son regard n'était pas celui d'un fou mais celui d'un garçon, désireux d'essayer d'aider les autres.

- Ouais... parfois faut se détacher de notre rôle de psychopathe et revenir à l'essentiel. Et puis, je serais jamais sérieux empli de compassion pour n'importe qui, et tu es tout sauf n'importe qui, Mathilde, déclara-t-il dans le plus grand des calmes.
Je lui souris tout en continuant de fouiller dans les photos, les actes de naissance et dans cet incroyable vric-à-vrac.
- Qu'est-ce que tu cherches ? me demanda-t-il, soucieux de m'aider.
- Des éléments de mon passé et de mon histoire. L'histoire de ma famille, celle qui m'a forgée et celle qui fait la personne que je suis aujourd'hui. Mes origines en bref.
Je continua de chercher et dans le quatrième carton, je trouva des photos, ainsi que des carnets qui devaient être des espèces de journaux intimes et des certificats de naissance. Le mien, celui de ma mère et celui de mon père. Je ne pris même pas la peine de consulter le tout et je rejoignit Jeff avec mon fardeau.

- Whouah ! T'en as trouvé des trucs dis donc ! Qu'est ce que c'est que ça ?
Jeff saisit un des carnets et le feuilleta rapidement. Quand il me le rendit, il le fixa, comme fasciné par le contenu de ce cahier.
- C'est l'histoire de tes ancêtres.
Je pris le carnet puis le feuilleta, à mon tour. C'était effectivement, l'histoire de mes grands-parents, écrite par la main de mon grand-père maternel qui était décédé avant ma naissance. Soudain, je vis une feuille, pliée en quatre que je m'empressa d'ouvrir pour la lire :

"Ma très chère Mathilde,

Mathilde, ma chérie, si tu trouves tous ces carnets dans lesquels, j'ai consigné toute l'histoire de notre famille, la mienne et celle de ta mère, c'est que tu es toujours en quête de ton identité et que tu la cherches à travers tes origines. Je sais que tu as toujours voulu connaître l'histoire de la famille dont tu es issue. Déjà, toute petite, tu me posais mille et une questions sur tes grands-parents et sur ce qu'ils avaient été, dans le passé. Te souviens-tu, Mathilde, de ces heures passées ensemble où je répondais vaguement à tes questions ? Je m'en suis toujours voulu d'avoir fait cela mais je voulais te préserver. Le passé n'est jamais dangereux mais il peut influencer, causer des dégâts et être l'origine de nombreux ravages. C'est de cela dont je voulais te préserver, Mathilde. Je ne voulais pas te voir affaiblie par le poid d'un passé qui ne passe pas. C'était ma plus grande angoisse. Mais maintenant que le temps m'est compté, j'ai décidé de laisser à ta disposition, ces carnets relatant toute l'histoire des membres de ta famille. C'est ta mère qui en avait l'idée. Bien avant que tu naisses, elle a rédigé toute l'histoire de sa propre famille et j'ai ainsi fait de même. Nous voulions que quand tu seras grande, tu ne reste pas dans l'ignorance. Nous pensions déjà à ton avenir, car nous t'aimions, Mathilde et nous t'aimerons toujours...

C'était les mots et les phrases de mon père. Il m'avait écrit une seconde lettre et encore une fois, c'était pour me prouver son amour et pour m'aider. J'étais heureuse de trouver un nouvel élément venant de lui et qui m'était destinée. Mais en même temps, j'étais triste et un peu maussade car je ne savais toujours pas si il était vivant ou pas. J'étais toujours dans cet état d'incertitude. Je pris le carnet de mon grand-père maternel, Frantz Strossman, et commença à le lire tandis que Jeff lisait celui de ma grand-mère paternelle.
Dans ce carnet, l'histoire parlait aussi de mes arrières grands-parents, Kerntner et Gretchen Strossman. Ce couple était issue d'un milieu bourgeois autrichien. Ils vivaient dans les beaux quartiers de Vienne et ils étaient de confession juive. Malheureusement, à cette époque, il y avait la montée du nazisme en Allemagne et celle du régime hitlérien. Le 14 mars 1938, à la suite de l'Anchluss, le 12 mars ( l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne ) Gretchen et Kerntner ont fuis l'Autriche vers les États-Unis. Là-bas, Gretchen a donné naissance à Frantz Strossman et le couple a dû tout reconstruire. Mes arrières grands-parents ont fait leur vie et se sont installés à Cheyenne, capitale du Wyoming et quand mon grand-père a été majeur, il a décidé de s'installer dans l'État d'Alberta, au Canada. C'était son plus grand-rêve. Les paysages canadiens le fascinait, eux et leur beauté. Frantz est donc parti, a trouvé du travail et a rencontré une jeune femme indienne, Alisha Banerjee, jeune femme sikh qui avait fui, l'Inde, son pays natal, pour fuire un système de castes et d'oppresion ainsi qu'un mariage arrangé que lui avait imposé sa famille. Ensemble, ils ont eu trois enfants, trois filles qui se prénommaient Anja, Ashis et Hannah, ma mère et mes tantes que je n'avais pas vu depuis la mort de ma mère. Ils ont continué à vivre heureux, tous ensembles jusqu'à ce que Alisha décède d'une pneumonie en 1988 et que mon grand-père, Frantz meurt, un an après.
Ainsi était l'histoire de ma famille maternelle et même si ils n'étaient pas ce que j'espèrais, j'étais très fière d'avoir le même sang qu'eux. Je referma le cahier et me tournai vers Jeff qui avait terminé le sien.

- Alors ?
- Alors j'aime beaucoup l'histoire de ta grand-mère, Alma Alvarès Fernandès. Sa famille a fui le régime franquiste en Espagne et se sont installés en Irlande. Alma a rencontré Martin Rykers et ils se sont mariés avant d'aller s'installer au Canada, à Edmonton, me dit-il en prenant un grand air d'historien.
- Tu sais Jeff ? Ce n'est pas pour critiquer mes ancêtres mais j'ai toujours l'impression qu'ils fuient le problème au lieu de l'affronter.
- C'est-à-dire ?
- Kerntner et Gretchen ont fui l'Allemagne nazie, ma grand-mère Alisha a fui l'Inde et la famille de ma grand-mère Alma a fui le régime de Franco. Je sais qu'ils n'ont pas trop eu le choix à cause de la peur que leur inspiraient leurs sociétés respectives. Mais moi, tu vois je vais rompre avec cette tradition familiale qui est de toujours fuir la cruauté de la société. Je vais affronter le problème, la cruauté de cette putain de société et la société elle-même. Je me fiche de savoir si je vais sortir vivante de ce combat. L'importance c'est que au moins, je les aurais ébranlées, elle et ses bases. J'aurais... marquée l'Histoire en détruisant les pilliers sociétaux...

Jeff m'observa à la dérobée avant de me sourire et de prendre mes mains dans les siennes, comme tout à l'heure. J'ai cru qu'il allait démentir ses propos, pour une raison ou pour une autre mais au lieu de cela, il ma regardée tendrement et m'a caressée la joue avant de déclarer dans le plus grand des calmes :
-Je crois, en toi, Mathilde Rykers...

À suivre...

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