S2 : E7 "Rien de plus"
Deux ans avant la naissance d'Adrien.
Paris, septembre, 2001.
— Maintenant, il est temps pour toi d'accepter qu'elle est partie et qu'elle ne reviendra jamais. Dit-il sèchement.
Son teint de voix écorcha son interlocutrice en plein coeur.
— Mais où est-elle ? Demanda-t-elle sans s'en empêcher.
La réponse aurait du sens pour elle. Peu importe ce qu'elle était. Entière ou en miette.
La blondinette avait les cheveux attaché et tressé en deux nattes parfaitement séparées de chaque côté de sa tête. Ses grands yeux verts translucides hypnotisaient chacun qui les rencontrait. Mais son regard, transpirait le chagrin. Une âme d'enfant naïve et juvénile brisée à tout jamais.
Tout ce qu'elle avait jamais désirée était de retrouver sa mère disparue du jour au lendemain sans explication. Cette mère à qui elle ne manquait pas l'avait abandonné aux mains d'un homme froid et antipathique. Elle aurait dû la détester et non la rechercher.
"Maman est partie prendre l'air, mais elle reviendra quand elle remarquera que je lui manque et qu'elle m'a oublié." s'était répétée durant des jours.
Refoulée une désillusion était une très mauvaise idée. Et désormais, elle avait compris la leçon. Au fond d'elle sa mère lui avait brisé le coeur il y très longtemps.
Je t'aime, ma petite maman chérie.
La fermeté de son père s'enterra dans ses chairs et dévora les tissus après en avoir bu le sang et fait disparaitre la vie. La petite Émilie aimait sa mère et ne lui en voulait pas. Tout ce qu'elle voulait était simplement qu'elle revienne.
— Abandonne, Emilie. Et commence à t'habituer à la situation. Ta mère ne servait à rien de toute façon c'est bien mieux qu'elle ne soit pas là. Ajouta-t-il posément.
Une distance glaciale s'interposa entre eux. Leur lien n'existait plus. Émilie ne se sentait même pas être sa fille mais bien une étrangère mégère qu'il détestait.
La jeune fille avait pensé que l'absence de sa mère rapprocherait son père et elle. Peut-être même qu'il la soutiendrait. Mensonges et pacotilles. Il l'évitait comme si elle était un parasite atteint d'une maladie contagieuse.
— Qu'ai-je fait pour que tu me détestes à ce point ? Demanda-t-elle d'une petite voix tremblante la tête baissée.
Son paternel arbora une mine dégoutée, la cruauté de ses paroles alourdit la boule dans son estomac. Émilie sentit ses paroles la poignarder en plein coeur. La faisant souffrir atrocement. Son père venait de lui brûler le coeur, elle n'aurait jamais cru cela possible.
Elle était une enfant de seize ans abandonnée à la solitude et sa mère, puis rejetée par son père. Pourquoi son père n'avait-il pas pitié d'elle ? Cette colère qu'elle ressentait pour lui elle voulait à présent s'en débarrasser à tout jamais. Elle était trop lourde, trop douloureuse.
Cette personne qu'elle avait auparavant tant aimé...
C'en était trop.
Un éclair avait traversé son regard. Une pichenette déclencha ses larmes dans ses yeux. La rancoeur devint plus forte qu'elle ne l'avait jamais été tandis qu'autour d'elle tout espoir s'effondrait en milles morceaux. L'espoir qu'il l'aimerait enfin. L'espoir qu'elle serait enfin considérée comme sa fille. Émilie serra ses poings de toutes ses forces et le siège de son père se tourna face à la fenêtre. Trop confuse par la colère, ses idées noires ordonnaient d'être assouvies. Quelqu'un devait payer. Et quelqu'un allait payer.
Si le seul moyen de sortir de cette spirale infernale devait être le prix du sang, alors Emilie payerait.
Œil pour œil, et dent pour dent.
— La discussion est clause. Je ne veux plus jamais que tu m'en reparles. Trancha-t-il froidement.
Emilie jura de se venger. Après tout ce que son père lui avait fait, il serait enfermé. Il n'aurait aucune chance d'en sortir indemne. Car, chez l'adolescente, il avait brisé cet équilibre qui la retenait du bon côté et qui désormais la livrait au monde et aux ténèbres. Sans limite. Sans frontière. Pendant des mois Emilie s'était accrochée corps et âmes à ses illusions qui la berçaient. Aujourd'hui elle se rebellait en ayant assez de tout le temps souffrir en faisant le bien.
Je vais te massacrer, vieux con. Murmura-t-elle intérieurement l'air sombre en le braquant d'un regard meurtrier.
Si elle pouvait lui souhaiter la mort est-ce que cela voulait-il dire qu'elle ne l'aimait plus ?
Calmement ou pas, elle commença à réfléchir à la vengeance la plus violente et sournoise possible bien que ce n'était pas une bonne idée, bien qu'elle le savait et tout autant qu'elle s'en moquait royalement. Après tout, son père était un tyran et un monstre, à quoi elle s'attendait ? A être une petite princesse et à faire le bien ? Quelle blague, sérieux ! Plus elle réfléchissait plus elle se rendait compte des choses, à commencer par l'argent qu'ils possédaient et qui étaient tous sans exception tâchés de sang d'innocents et de bandits. Rien dans cette famille n'était pur ou bon, rien n'inspirait à la bonté ou la lumière mais bien seulement et rien qu'aux ténèbres et à la mort.
Emilie envia son père une seconde mais pour une seule raison : son absence de conscience. Elle aurait bien voulue elle aussi, ne pas penser aux autres et perdre cette capacité à tuer sans remords, sans regrets, sans problème. Et si elle l'avait eu, elle l'aurait tué lui, à sa différence. Heureusement, elle était sa fille donc également et officiellement la personne la plus proche de lui.
Des pots éclatés contre les murs tapissés de blanc immaculé après de terre et d'eau. Les cris mélodieux, les seuls en rythmes, emplissant la pièce avant de tomber dans un silence de velours assourdissant.
Ses parents aimaient se disputer. Était-ce leur manière à eux de s'aimer ? Les adultes et l'amour étaient deux choses tellement compliqués pour l'esprit d'un enfant. Mais au départ de sa mère Emilie avait compris que non. La blondinette avait assisté à ces spectacles déchirant pour un enfant, traumatisant pour son adulte intérieur. La violence de son père dans ses mots et ses gestes envers sa mère, l'adolescente les excusait mais l'enfant s'en rappelait chaque détails.
Auparavant c'était sa mère qui prenait les coups mais désormais qu'elle n'était plus là, Emilie serait la prochaine à les récupérer. Voilà la seule chose que sa mère disparue lui avait laissé. La violence d'un homme. Elle se demanda : quand ? quand portera-t-il le premier coup ?
Quelques fois, il n'y a pas si longtemps alors qu'elle essayait de se rassurer elle s'était demandée pourquoi les larmes ne pouvaient plus la soulager, pourquoi elle devait aimer son père alors qu'il était un monstre. Mais la lumière qui brillait dans les yeux de sa mère avait disparu et la chaleur au fond d'elle était partie avec.
Les problèmes de sa famille l'avait détruite à force qu'elle s'en occupait. À présent, elle avait conscience de ces choses-là. Celles qui blessent. Celles qu'on évite même dans sa tête. Donc, elle finissait ainsi par haïr le premier homme de sa vie. Le père est le premier amour d'une jeune fille. Il ne serait visiblement pas le sien pour elle. Était-elle alors destinée à un autre premier amour.
Je souhaite que le ciel lui tombe sur la tête et qu'il connaisse la douleur d'un crâne explosé contre la roche. S'il vous plaît. Seigneur, vengez-moi de tout. Je vous en supplie achevez-le.
Relâchant un soupir, le souffle court, elle baissa les yeux sur ses pieds la poitrine serrée comme un roc. Ce fut la première fois qu'elle se sentit assez forte pour défier l'autorité de son paternel.
Un homme. Il était juste ça.
C'est tout.
Il n'avait rien été d'autre qu'un humain fait de chair et de sang. Et autrefois, il avait été son père ou un géniteur qu'elle avait sur considéré.
Quand soudain, des coups troublèrent son élan et qu'un homme entra. Encore plus troublant que tout le reste. Sa chevelure châtain flottait dans la pièce et fit entré le soleil violement dans le bureau triste. Sa seule présence suffisait à amener de la lumière et à exterminer les ténèbres et ses démons. Emilie sentit une joie immense l'envahir alors qu'elle ne lâchait plus l'homme des yeux, hypnotisée.
Boum.
Boum.
Son cœur se recolla, chaque morceau ne refit plus qu'un ainsi la douleur passa et disparut.
— Monsieur, votre rendez-vous est arrivé. Annonça le garçon.
Le son de sa voix attira un long frisson de plaisir à la jeune femme. Heureusement pour elle que son père soit de dos car elle dévisageait vraiment intensément le garde du corps qui lui, lui avait déjà lancé un court regard en entrant à son insu.
C'était compliqué.
Ou surtout... interdit.
Le jeune homme faisait toujours profile bas à vrai dire il n'avait pas le choix, faire autrement rimait au suicide. Par les règles, s'il s'approchait trop près de ce joyeux si défendue et précieux.
La fille du mafieux le plus cinglé de Paris.
Il mourrait dans d'atroce souffrance.
Mais il mourrait tout court, rien de plus.
Mais tout de moins.
— Très bien. Répondit le père d'Emilie, il appuya ses mains sur les accoudoirs de son fauteuil et projeta son corps en avant.
Rien de plus.
Mais tout de moins.
Tout.
Une fois debout, il se détourna et en passant à côté de sa fille qu'il ne dévisagea même pas d'un regard, il ordonna à son homme de main :
— Ramène-la dans sa chambre et empêche-la de sortir. On ne peut pas savoir quelle idée fabulatrice a-t-elle encore imaginée pour retrouver sa mère.
La porte ne claqua pas mais Émilie su qu'il n'était plus présent. Elle soupira en tapant brusquement du pas sur le sol sous les yeux du garde du corps qui se retourna et l'observa embêté d'être impuissant, furieux d'assister à son désarroi sans réagir.
Comme elle le faisait systématiquement après chaque entretient avec lui, la torture mentale s'empressa de lui sauter dessus et de l'étouffer, quitte à lui faire perdre la tête.
— Émilie. Dit-il d'une voix suave.
Elle ne l'écoutait déjà plus, trop occupée à ruminer, saisit fermement par ses pensées, combattant le démon son père.
— Comment peut-il oser me faire une chose pareille... Qui suis-je à la fin ?!
— Eh... Murmura-t-il faiblement et il posa une main sur son épaule.
Elle se figea et leva aussitôt les yeux vers lui.
— Calme-toi.
— Je ne peux pas, Gab. Je ne peux pas. Il me sort par les yeux, et toi, tu choisis toujours le mauvais moment pour te pointer !
Elle se mit sur la pointe des pieds et frotta son nez en trompette contre celui du garçon, il écarquilla les yeux, elle se recula un peu et enroula ses bras autour du cou du jeune homme complètement troublé.
Doucement, après l'avoir regardée et déchiffrée avec un plaisir qui lui est privé, elle pencha son doux visage à son oreille et lui souffla :
— Dis-moi que je t'ai manqué avant que je parte, j'ai besoin de l'entendre, j'ai besoin de savoir que quelqu'un tient au moins dans ce monde de merde.
Le dénommé Gab jeta un regard à la caméra postée dans un coin du bureau et vit qu'elle était allumée. Il repoussa le plus doucement possible la seule femme qu'il n'avait jamais autant désiré de sa chienne de vie.
— Je te l'ai dit, calme-toi, Émilie. Abdiqua-t-il les yeux intensément enfoncés dans ceux de la blonde qui comprit après une légère grimace son comportement.
Toutefois, elle n'eut aucun plaisir à être rejetée.
Encore.
Aucun.
Alors, elle soupira l'ennuie qui lui envahit les poumons douloureusement, sourit faiblement puis se retourna en murmura de façon à ce qu'il soit le seul à l'entendre :
— J'ai compris... sache au moins qu'à moi, tu m'as manqué chaque jour de la semaine.
Le garçon sentit sa gorge se nouer et son ventre se retourner violemment et faire à l'intérieur de son corps des milliers de galipettes sans raison valable.
Pour certaines personnes, le monde n'existe qu'à travers la personne qu'il aime et rien d'autre ne comptera jamais plus.
Temps qu'il était là, Émilie supporterait le coup et n'abandonnerait jamais rien. Gab était l'univers de son monde, l'heure de son horloge et l'aiguille de sa boussole, d'ailleurs la jeune femme n'avait jamais voulus le cacher. Par exemple, elle faisait partis de ces gens trop sentimentalement impliqués dans leur émotion.
Souvent, les conséquences... Ô mon Dieu... !
La terre n'était jamais parvenus à atteindre l'incapacité de s'effondrer comme son équilibre. Tellement le pari était risqué et plus elle l'aimait.
Le danger se résume à l'action.
L'amour à l'impact des sentiments.
Et les sentiments sont les conséquences de nos choix.
— Attends-moi, ce soir. Murmura à mi-voix Gab en la regardant s'éloigner.
Il espéra qu'elle se retourne. Au moins, qu'elle le regarde une dernière fois.
Mais elle ne fit rien et ne répondit rien non plus.
Son cœur manqua de se déchirer à son tour et de s'effondrer en milles morceaux.
Ça faisait mal d'être à son tour rejeté, n'est-ce pas ? La douleur n'était pas pareille quand elle ne s'adressait plus à quelqu'un d'autre.
Pour eux deux, l'impression incessante que l'avenir ne leur ouvrirait jamais ses portes commença à triturer le fond de ses songes la nuit. Gabriel se demandait s'il délirait ou s'il s'égarait encore davantage dans son déni.
Quoiqu'ils fassent, ils ne pourraient jamais être ensemble ni vivre comme un couple normal, et encore moins avoir une vie heureuse.
Les secrets.
Les mensonges.
C'était leur futur ensemble, rien de plus.
Mais tout de moins.
Néanmoins, en fin de compte...
Qu'est-ce que ça faisait ?
Le plus important, ce n'était pas l'instant présent ?
🩻🪁🌌
A bientôt pour la suite !
Pour ceux qui seraient perdus, c'est un extrait entre Émilie et Gabriel, les parents d'Adrien. J'ai décidé de reprendre avec eux pour raconter leur histoire afin d'être plus clair dans la tournure des événements. Évidemment dans le prochain chapitre nous retrouvons Adrien et Marinette.
Merci pour votre attente et votre soutien. 😆
J'ai modifié le chapitre en réécrivant le début mais je reviendrais pour le terminer, j'ai juste pas assez de temps. Néanmoins, je trouve la lecture du début bien plus agréable. Du coup... YOUPIII
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