BABYISH- 28


Debout devant l'imposante psyché dans l'entrée de leur appartement, Namjoon lissait minutieusement sa chemise du plat de la main. Seokjin avait passé un temps monstre à lui choisir une tenue "parfaite", le blondinet trouvant toujours un petit quelque chose qui le gênait dans les toilettes, toutes plus raffinées que les autres, qui lui avaient été présentées.

«-Je n'ai pas l'air trop... trop?

Le chanteur soupira, dardant son regard agacé vers l'autre garçon.

- Non, Namjoon. Pour la énième fois, tu es très bien comme ça. Très raffiné.

Un léger silence plana un instant dans l'air, Seokjin fixant son petit-ami dans les yeux à travers le reflet du miroir.

- Honnêtement, je doute que ta tenue ne les dérange. En fait, ce sera peut-être même la dernière de leur préoccupation, mon cœur. Tu vas me présenter officiellement à ta famille, on va déjeuner tranquillement tous ensembles, et tout vas bien se passer, d'accord? Je sais très bien que t'as la trouille mais ça va aller, il passa sa main dans le dos de Namjoon; Ça va aller.

En grimaçant, le jeune garçon aux cheveux roses épousseta délicatement son col. Il était resplendissant, dans sa chemise en soie sombre, qui tombait élégamment sur ses larges épaules, épousant parfaitement son buste. Seokjin semblait être né pour faire partie du beau-monde. Sa taille fine était joliment soulignée par le pantalon droit qu'il avait enfilé, moulant ses cuisses musclées, presque trop indécemment pour le plus grand des deux. Habillé de la sorte, on aurait pu le prendre pour un mannequin huppé.

- J'espère que ça va pas être trop chiant.

-Tu sais quoi? Je suis prêt à parier qu'avant la fin de la journée, tu seras réconcilié avec ta famille.

-Ah ouai? T'es sûr de vouloir jouer?

-Certain. Si ton père te demande des excuses, tu te teints les cheveux en vert. Non! En violet!

-Rêve. Ça n'arrivera pas.

-C'est ce qu'on verra!»

Sur ces belles paroles, pleines de bon sens, le couple claqua la porte. Un taxi les attendait devant chez eux, envoyé plus tôt par les parents de Namjoon, et qui devait les conduire au restaurant où ils allaient déjeuner. Ils n'eurent besoin d'indiquer l'adresse au chauffeur, qui démarra sur les chapeaux de roues, sûrement pour tenter de rattraper leur retard. Le grand dadais blond s'enfonça dans son siège. L'averse s'abattait sur le capot de la voiture, produisant une étrange litanie rythmée sur la tôle chaude. Le nez collé à la vitre froide, Namjoon soupira. La pluie s'écrasait sur le bitume, ruisselant dans le caniveau.

«-Arrête de stresser, souffla son petit-ami, posant sa main sur sa cuisse. Le rosé réfléchit un instant, le regard fixé sur le paysage défilant rapidement à travers la fenêtre. Tu sais ce qu'il se passe quand deux poissons se disputent? Le thon monte!

Il conclût sa blague sur un rire aigu, qui arracha une grimace ressemblant vaguement à un sourire à Namjoon.

- Je crois que... En fait, je crois que j'ai peur qu'ils ne t'aiment pas. Et tout me paraît tellement surréaliste que j'ai l'impression d'être dans un rêve éveillé. C'est vraiment, vraiment étrange.

- Alors là, tu me vexes. Qui pourrait ne pas m'aimer? »

Seokjin ravala son rire en voyant le visage blême et tiré de son petit-ami, qui fixait le rétroviseur, la nuque raide. Le chanteur déboucla sa ceinture pour poser sa tête sur son épaule, lui murmurant quelques paroles réconfortante, entrecoupées de baisers légers déposés sur la peau de l'autre. Finalement, bien plus tôt que Namjoon ne l'aurait souhaité, le chauffeur sorti du véhicule pour leur ouvrir la portière, s'inclinant largement. Il parût étonné lorsque Seokjin le remercia chaleureusement, un sourire un peu béat, peut-être même un peu benêt, sur les lèvres.

Dans un geste enfantin, Namjoon tâtonna un instant avant d'attraper sa main, collant sa paume glacée et moite à celle de Seokjin, bien plus chaude. Il se sentait nauséeux et avait les jambes lourdes, brusquement, et serrer la main de son compagnon semblait diminuer son anxiété grandissante.
Le blondinet fit craquer ses cervicales, détendit sa mâchoire et plaqua un baiser sonore sur les lèvres du musicien, pour se donner du courage.

«-Prêt?

-Non. Mais j'ai plus réellement le choix, là. »

D'une démarche presque assurée, Namjoon gravit les quelques marches d'escalier qui leurs faisaient face, s'engouffrant dans le restaurant en traînant l'autre par la main alors qu'on leur ouvrait les portes. Seokjin ne put refréner le sifflement admiratif qui s'échappa d'entre ses lèvres. Le musicien s'émerveillait à chaque petits détails; les nappes brodées, les lustres qui décoraient le plafond ouvragé, l'uniforme impeccable des serveurs qui tournait élégamment dans la salle, un plateau où tenaient en équilibre des flûtes de champagne sur le bras.
Il glapit, pointant discrètement du doigt une jeune femme en tailleur, assise à quelques pas, arrachant un sourire amusé à Namjoon.

«- Regarde! Elle porte du Gucci!

- Oui, mon coeur. C'est que que les friqués aiment. »

Ils se frayaient un chemin parmi les personnes fortunées de la capitale, percevant sans mal les regards étonnés qu'on posait sur eux. Namjoon avait ralentit, occupé à poser son regard sur la foule.
Tout ce beau monde était tellement... lisse, presque fade. Chaque personne présente avait revêtu un masque de pseudo sociabilité, gentillesse ou servitude afin de répondre à leur propre intérêt. C'était pathétique.

La voix de Seokjin le sortit brusquement de sa torpeur.
«- Ce sont tes parents?, il lui demanda, désignant vaguement de la main une table d'où leur souriait une jeune fille.
-Oui. Avec ma petite sœur. »

Alors, il prit une grande inspiration, plaqua un sourire aimable sur son visage et, la main sur la taille de Seokjin, s'avança vers ceux qu'il redoutait tant.

"-Namjoon, mon grand! Nous avons déjà commandé, je vous ai prit le menu du jours.

-Très bien. Excusez-nous pour le retard, il y avait beaucoup de circulation. "

Ils s'assirent côte à côte, juste en face du couple de parents. Namjoon, assis le dos droit sur sa chaise, sentait son cœur palpiter. Il se concentrait essentiellement sur la chaleur diffusée par la main que Seokjin avait posé sur sa cuisse, les yeux rivés sur la nappe, comme passionné par son motif. Le musicien discutait gaiement avec la jeune fille à sa droite, très enjouée et franchement heureuse de le rencontrer "pour de vrai". Et, étonnamment, il n'était plus tant nerveux que cela.
Sa mère prit la parole, un léger rictus amer sur les lèvres.

"-Alors... Comme ça, tu étudies les lettres, maintenant? Et vous, hum-

-Seokjin, madame.

- Ah! Donc, que faîtes vous dans la vie?

- Seokjin chante. Il est très doué. "

Un serveur vint remplir leurs coupes de champagne et apporter les plats. Durant une poignée de secondes, le blondinet regarda fixement les bulles remonter vers la surface, le silence seulement troublé par les commentaires de sa petite-sœur sur ce qu'elle avait commandé.

"-Namjoon, goûte donc mon-

-Donc, tu vis avec un homme?,coupa brusquement son père. Ça va aller, se répéta Namjoon, avant de lever la tête, affrontant pour la première fois depuis des mois le regard de son géniteur.

-Oui. On est heureux comme ça. Un lourd silence plana quelques instants dans l'air avant qu'il ne reprenne la parole, fixant toujours l'homme.
Je sais que tu désapprouves ma relation. Tu penses sûrement que cela va entacher la réputation de la famille, mais je n'en suis plus vraiment un membre, n'est-ce pas? Si vous voulez bien m'excuser, je vais fumer. Parce que oui, en plus d'être une tapette, je fume, maintenant. "

Il se leva brusquement, manquant de renverser sa chaise. Le jeune garçon attrapa sa veste au vol, et, faisant fi du regard des autres, qui avaient convergé vers eux à cause du raffut inhabituel que Namjoon produisait, déposa ses lèvres sur celles de Seokjin. Peut-être pour provoquer ses parents, aussi.
Il traversa à grandes enjambées la salle, son regard sombre dissuadant quiconque de venir lui parler, s'échappant rapidement de l'ambiance lourde et tendue du restaurant.

Une fois sorti, il s'autorisa à relâcher ses muscles crispés, expirant profondément. Le blondinet profita du vent frais qui caressait ses joues, contrastant avec la torpeur moite qui régnait dans l'établissement luxueux. Ce genre de restaurant était toujours trop chauffé!
La clope au bec, les mains dans les poches, l'étudiant en lettres marmonnait, agacé.

«-Namjoon!

- Quoi, encore! Tu veux pas me laisser tranquille une bonne fois pour toute? Je sais que tu as honte de moi, alors fait en sorte de ne pas être vu en ma compagnie, hum?

-Non, c'est faux! Je... je suis fier de ce que tu es devenu, et j'aimerai que tu me pardonne. J'ai agis comme un abruti fini. Je suis désolé, fils, et-»
L'homme au cheveux grisonnant le prit soudainement dans ses bras, étouffant le reste de sa phrase.

Et Namjoon, les yeux embués, lui rendit son étreinte. Au fond, peut-être n'attendait-il que ça depuis le début.
Finalement, il allait peut-être devoir acheter une coloration violette, et plus tôt que prévu.

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