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La planque d'Ibrahim a durée deux semaines. Durant deux semaines, il s'est caché chez une de ses anciennes fréquentations qui lui était redevable. La police n'a encore aucun élément le reliant au meurtre du procureur. Pour l'instant, ils enquêtent sur d'anciens détenus qui auraient pu en vouloir à l'homme. Ibrahim peut donc profiter de ce temps pour envoyer Rabah loin, très loin.
Le gitan avait un plan. D'abord, ils vont faire en sorte que Rabah soit soupçonné pour le meurtre du procureur. La chance était de leur côté. Lors de sa première interpellation
il y a maintenant dix ans, Rabah a pris huit mois ferme à cause de l'excellent réquisitoire de Mariotti.
Il figure donc dans la liste des suspects. Mais, son affaire date d'une dizaine d'années. Il faut donc semer des indices un peu partout. L'arme qui a servi à tuer le procureur, Rabah avait demandé à un de ses hommes, de la jeter dans la Seine. Mais celui-ci intéressé par l'appât du gain, a été séduit par la proposition d'Ibrahim. Cette arme n'a donc jamais disparu, et lorsque la police mettra la main dessus ils feront le rapprochement avec Rabah.
L'excès de confiance a toujours été son talon d'Achille.
Lorsque Rabah sera arrêté, Ibrahim remettra les plans au Gitan puisque que celui-ci a gardé parole. Ce n'est qu'une question de temps avant que son ennemi ne comprenne qu'il s'est fait piéger et il dénoncera Ibrahim. Ibrahim n'est pas un meurtrier mais il n'est pas stupide. Pour avoir la paix, Rabah doit mourir.
AZHAR
« Azhar, tu ne manges rien depuis des jours, la réprimande Youssra.
- Ça fait deux semaines qu'il est partit.
- Ibrahim reviendra lorsque tout sera terminé Azhar, pas avant. Il ne nous mettra jamais en danger.
- Si tu savais comme j'ai peur Youssra. Je le vois encore ce matin-là, quand il est arrivé chez-moi. Il avait tellement peur.
- Il va se battre pour nous, nous sommes sa famille il ne nous abandonnera pas. Il va revenir pour nous. Pour toi, il reviendra. »
J'espère tellement qu'il reviendra. J'aimerais être aussi optimiste que Youssra mais, je ne peux pas. J'ai cette boule au fond de mon ventre à chaque instant passé loin de lui. Lorsque le téléphone sonne, j'ai peur qu'on m'annonce qu'il a été arrêté ou même tué. Mon cœur, mon esprit, tout, absolument tout lui appartient.
Je suis rentrée chez moi, encore plus triste qu'avant. Je n'avais pas espoir qu'il s'en sorte. Les gens avec qui il fait ses affaires sont dangereux. Ibrahim n'est pas comme ça. Il a fait des erreurs, mais tuer ce n'est pas lui.
[...]
OMNISCIENT
La nouvelle est tombée, Rabah a été arrêté ce matin. Les policiers ont fait le boulot correctement. Son avocat est bon, mais il ne pourra pas échapper à une détention. C'est là, qu'il se fera tuer. Le Gitan à des hommes dans la prison. Des hommes prêts à lui trancher la gorge dans les douches.
Une fois Rabah en prison. Ibrahim a honoré sa part du contrat en fournissant les plans. La garde à vue de Rabah a durée quarante-huit heures. Il n'a pas donné de nom. Pensant sans doute, qu'il sortira vite. Ou alors, il prépare un autre sale coup. Et comme ils l'espéraient, il a été conduit à Fresnes en attendant l'avancée de l'enquête.
« Tes hommes sont en capacités de le faire ? demande-t-il à Carlos dit le Gitan.
- Fiston, j'étais dans les affaires tu n'étais même pas un amas de cellules dans le ventre de ta mère. Tu crois que c'est la première fois que je fais ça ? Rabah va être protégé pendant quelques temps par son équipe mais ça ne l'empêchera pas de se faire tuer.
- Préviens-moi quand ce sera fait.
- Sois prudent, me dit-il. C'est bizarre qu'il ne t'ai pas encore dénoncé. Reste sur tes gardes. »
La planque était terminée pour lui. Hassan est son ami en plus d'être son patron mais, il ne pouvait pas se permettre de perdre son boulot. Pas maintenant. Après avoir pris une douche, Ibrahim quitta la chambre d'hôtel en payant en liquide. Un sac sur l'épaule, il opta pour les transports en commun pour se rendre au travail. Son équipe a été très surprise de le voir dans cette dégaine. Loin des costumes et de l'image de l'homme parfait qu'il renvoie toujours.
Il a travaillé un peu. A discuté avec Hassan de ce problème de famille qui l'a retenu si longtemps. Celui-ci n'est pas stupide. Il sait bien qu'il y a eu autre chose mais il n'a rien dit. Il espère juste qu'Ibrahim n'est pas bête au point de tout perdre alors qu'il a des projets pour lui. Après cela, il est rentré chez lui. Sa mère avait cru à l'histoire du déplacement pour le travail, mais son père n'était pas dupe. Ils allaient avoir une conversation. Une conversation très sérieuse car, Ibrahim n'oublie pas la promesse qu'il s'est fait.
Le soir-même il a demandé à Mounir de venir, afin qu'ils puissent discuter tous les trois.
« Je t'écoute Ibrahim, dit son père. Tu étais vraiment en déplacement pour ton travail ?
- Non, avoue-t 'il. Mentir à son père ne sert a rien et il le sait. J'avais un problème à régler et c'est fait.
- Quel problème ?
- Une histoire, en rapport avec mon passé. Mais c'est réglé maintenant.
- Tu étais au courant toi ? Demande-t-il à Mounir.
- Oui, mais comme Ibrahim te l'a dit c'est réglé.
- Tu n'en a pas marre de vivre comme ça ? Quand est-ce que tu vas grandir ?
- Je sais que je ne t'ai pas rendu fier, mais...
- Tu te trompes, je suis fière de toi et ma mère aussi. Quand tu pars aussi longtemps je me pose des questions. J'ai eu peur, j'ai cru qu'il t'était arrivé quelque chose de grave ! Tu ne veux pas comprendre mais, tu dois changer. Tu as vingt huit ans, il faut que tu réfléchisses à ta vie.
- J'ai réfléchis. Je vais me marier baba. Mounir le regarde avec des grands yeux.
- Te marier ? Avec qui ? Répond son père d'un air blasé. Tu ne peux pas juste te marier comme ça, tu dois y réfléchir. Être prêt.
- J'ai réfléchis et pour la première fois de ma vie je suis sûr de ce que je veux. Baba laisse-moi épouser Azhar. »
Ibrahim regarde son père, puis Mounir. Il a peur. Il a peur que son père ait la même réaction que Mounir. Il a peur qu'il refuse, qu'il trouve leur relation malsaine. Ou pire, qu'il le pense indigne d'Azhar.
« Je sais ce que tu penses. Baba, il ne s'est jamais rien passé entre nous.
- C'est pour toi qu'elle a refusé d'épouser cet homme ?
- Je ne sais pas, enfin peut-être. Mais ça ne change rien.
- Si, parce que ça veut dire que vous viviez sous le même toi en sachant que...Mon Dieu qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça ? se lamente t'il.
- Baba, il ne s'est rien passé ! Je ne peux pas faire ça à Azhar.
- Baba, intervient Mounir,on a déjà eu cette discussion lui et moi. J'en ai aussi parlé avec Azhar. Je le crois quand il dit qu'il ne s'est rien passé.
- C'est à cause de toi qu'elle a déménagé ?
- Oui...C'est moi qui aurait du partir mais elle m'a devancé. Ne dit pas non, j'ai besoin de ton accord.
- Je veux parler avec Azhar ma décision dépend de ce qu'elle me dira, dit-il avant de quitter la pièce. »
[...]
Il va venir. Il a envoyé un message pour savoir si elle dormait. Ça veut dire qu'il arrive. Elle range un peu, mettant fin au bazar qui s'est accumulé. Elle se regarde une dernière fois dans le miroir. Elle a les yeux marqués par l'inquiétude et la fatigue mais, il est la cause de tout cela alors tant pis.
On sonne à la porte. Elle s'empresse d'aller ouvrir.
« Tu ne rentres pas ?
- Non, tu peux mettre une veste ? J'aimerais qu'on parle dehors. »
Son sourire disparaît. Il a un air grave sur le visage que va-t-il annoncer ? Azhar enfile un gilet en laine et ses chaussures avant de le suivre. Ils sortent de son immeuble et montent dans sa voiture. Ibrahim roule durant une vingtaine de minutes avant de s'arrêter.
« Azhar, on ne va sûrement pas se voir pendant un certain temps.
- Pourquoi ? Tu vas partir ?
- Non, dit-il avant de prendre sa main. J'ai fait beaucoup de mauvaises choses dans ma vie. Mais ce que je m'apprête à faire là maintenant, c'est surement la chose la plus folle. Pourtant, je n'ai pas peur parce que tu seras à mes côtés.
- Ibrahim, je suis prête à m'enfuir avec toi. »
Il rit, puis lui caresse la joue tendrement avec son pouce.
« On n'a pas besoin de s'enfuir. J'ai parlé à mon père Azhar. Je lui ai parlé de nous.
- [...]
- Je lui ai dit que je voulais t'épouser. »
Si elle était debout, elle serait tombée. C'est une blague, une caméra cachée.
« Je lui ai dit que je voulais être avec toi, il veut te parler et ensuite il nous donnera sa décision.
- Tu es sérieux Ibrahim ?
- Je n'ai jamais été aussi sérieux.
- Tu ne peux pas faire ça.
- Comment ça ?!
- Tu me demandes en mariage ?
- Non, j'annonce qu'on va se marier.
- Tu dois me demander en mariage !
- Pourquoi ? Tu as déjà dit oui.
- Par principe ! Je mérite au moins ça. »
Elle avait du caractère sous ses airs timide, il n'en doutait pas un instant. La situation l'amusait, elle était adorable. Elle exigeait de lui maintenant.
« Azhar, je ne vois pas l'intérêt de te demander en mariage.
- Je m'en vais. Tu ne veux même pas me demander ! Ramène-moi chez moi.
- Tu es sérieuse ?!
- [...]
- Azhar ? On a plus dix ans.
- [...]
- Nous ne sommes même pas encore mariés et tu me prends la tête !
- Alors ne m'épouse pas ! »
Elle ne compte pas céder et lui non plus. Elle est déterminée à obtenir ce qu'elle veut. Ibrahim a acheté la bague hier, elle est toujours dans son écrin. Il ne veut pas faire sa dans sa voiture. Alors il démarre et roule jusqu'au restaurant de son ami Allan. Celui-ci ne les attendaient pas, mais Ibrahim lui parle discrètement. Allan sourit avant de les entraîner tous les deux jusqu'à l'étage. Cette fois-ci, ils montent jusqu'à la terrasse.
Ils ont une tout autre vision de la capitale. Azhar en oublie presque le désaccord lorsque l'un des serveurs apporte une nappe et un panier de pique-nique totalement improvisé. Il part les laissant seuls.
« Je ne suis pas doué pour les déclarations. Mais tu as raison. Tu mérites que je te demande de m'épouser. »
Il ne met pas un genou à terre mais lui prend les deux mains avant de l'installer sur le banc. Il s'agenouille juste en face d'elle, ils ne se quittent plus des yeux. Cette fois-ci, Ibrahim a peur. Elle lui fait confiance, une confiance aveugle. Elle espère tant de lui. Il espère ne jamais la décevoir.
« Azhar, est-ce que tu veux bien devenir ma femme ? Dit-il en ouvrant l'écrin.
- Oui, je veux t'épouser, dit-elle émue. Donne-moi la bague, dit-elle d'un ton autoritaire qui le fait sourire. »
Elle rit, le plus beau rire qu'il n'est jamais entendu. Il met la bague à son doigt et elle l'embrasse sur le front. Ils sont heureux et confiants pour l'avenir. Ibrahim regarde sa future femme. Elle est parfaite, parfaite pour lui. Il repense à la discussion qu'ils ont eux ici. Un étage plus bas il y a quelques semaines. Il est conscient de l'avoir blessé ce jour-là.
Elle n'est pas grande et mince. C'est Azhar. Celle qui à bouleversé toutes ses certitudes en l'espace d'un an seulement. Et elle est la plus belle chose qui lui soit arrivée.
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