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Azhar se réveille ce matin, fatiguée d'avoir pleurée la nuit dernière. La migraine la cloue au lit. Incapable de faire le moindre mouvement, le regard vide, elle patiente attendant que son état s'améliore. Elle sait que la plus grande douleur, elle la ressent au fond de son cœur. Ce qu'elle a fait hier, elle n'aurait jamais cru devoir le faire un jour. Venir en aide a la femme de l'homme qu'elle aime.
Pauvre Yasmine, son état lui a réellement fait beaucoup de peine. Elle n'a pas le droit de lui en vouloir, alors elle prend son téléphone et lui envoie un message demandant de ses nouvelles. Elle espère qu'elle va bien. Ibrahim n'est pas rentré, il a du passer la nuit avec elle. Cette pensée intensifie sa migraine. Elle se tourne sous les draps durant de longues minutes avant de se lever.
Elle a pris une décision. Hier, elle a passé une très bonne soirée avec Malick. Mais elle doit être honnête envers lui et envers elle-même. Elle ne peut pas épouser un homme alors qu'elle en aime un autre. Elle parvient à se lever et se prépare pour le travail. Passer du temps avec Sania lui réchauffe le cœur.
Azhar déjeune. Sofia a fait à manger avant de partir à l'école. Elle est en école d'infirmière, une voie qui lui plaît. Azhar aime l'entendre lui raconter tout ce qu'elle voit en stage. D'ailleurs dans quelques jours, Sofia aura dix-neuf ans.
Azhar est née deux jours après elle. Elle aura vingt et ans et cela fait presque un an qu'elle est en France.
En ce mois de novembre elle ressort ses pulls et gilets car frileuse, le moindre coup de vent suffit à la faire tomber malade. Lorsqu'elle arrive a l'hôpital, elle constate que la petite fille va beaucoup mieux. Après deux semaines d'hospitalisation, elle rentre enfin à la maison.
« J'ai hâte de retrouver ma chambre.
- Moi j'ai hâte de ne plus avoir à revenir ici. Je n'aime pas beaucoup les hôpitaux.
- Il est trop bon ton gâteau, la nourriture ici elle est dégoûtante.
- Tu peux dire que tu n'aimes pas, mais ne dit pas que c'est dégoûtant.
- Mais c'est vraiment dégoûtant. »
Azhar ri avant de l'embrasser sur le front. Elle aimerait avoir la même insouciance que Sania. Elle voudrait presque retournée en enfance, lorsqu'elle passait des heures à observer sa mère les yeux remplis d'admiration pour cette femme qu'elle aime tant. Elle veut connaître cela, être maman.
Lorsqu'elle quitte la clinique, Azhar a envie de faire demi-tour. Malick l'attend, il attend une réponse de sa part et elle a peur de le blesser ou de lui faire du mal. Mais, elle se dit aussi qu'elle lui fera beaucoup plus de mal en lui mentant. Lorsqu'elle arrive dans le fameux café où il lui a donné rendez-vous, Azhar s'arrête un instant avant de rentrer. Est-elle entrain de faire une erreur ? Elle n'en sait rien, mais ce qui est sûr, c'est qu'elle n'éprouve rien pour cet homme mise à part de la sympathie.
« Installe-toi, tu veux commander quelque chose ?
- Non, merci. Malick je dois être honnête avec toi. Je ne peux pas t'épouser, je suis désolée.
- Ne t'excuse pas Azhar. Je suis déçu car je t'apprécie réellement. Je n'irais pas jusqu'à dire que je suis tombé amoureux de toi mais, je sais que j'éprouve quelque chose de fort et de sincère.
- Je t'ai fait perdre ton temps.
- Non, j'ai été heureux de faire ta connaissance. Tu refuses parce qu'il y a un autre homme ? »
Honteuse, Azhar baisse la tête. Elle n'ose pas lui répondre que oui. Elle veut croire que tout cela n'est pas uniquement à cause d'Ibrahim, mais elle sait que son amour pour lui à largement pesé dans la balance. L'ignorer serait totalement hypocrite de sa part.
« Il a beaucoup de chance, j'espère qu'il le sait.
- C'est plus compliqué que cela.
- C'est toujours compliqué quand il s'agit d'amour. Ne t'en fait pas pour mes parents, je les préviendrais. Prend soin de toi Azhar.
- Merci beaucoup Malick. »
[...]
Le ménage, il n'y a rien de mieux pour s'occuper. Azhar n'a pas envie de rester allongée à ruminer. Elle s'active, faisant les poussières, lavant les vitres allant même jusqu'à pénétrer dans l'antre secrète d'Ibrahim. Cette pièce a besoin d'un bon nettoyage mais son propriétaire étant maniaque, elle fait attention à tout remettre en place. En ouvrant un tiroir, elle tombe sur un album photo.
Mounir, Kaïna et Amine lorsqu'ils étaient enfants. Elle tourne les pages puis, une photo s'échappe de l'album et tombe au sol. Azhar la ramasse et l'observe. Une jeune femme pose fièrement un grand sourire aux lèvres à ses côtés un homme la regardant avec des yeux débordants d'amour. Une copie d'Ibrahim, les mêmes yeux, le même nez, le même regard. Elle pense comprendre, mais n'ose pas formuler cette hypothèse.
Elle a toujours eu un doute, mais n'a jamais osée poser de question. Tout est clair à présent. Ibrahim a sûrement été adopté et ce n'est pas un secret pour lui. Cela explique beaucoup de chose. Elle se demande dans quelles circonstances son oncle et sa tante ont accueilli ce petit garçon dans leur famille.
Elle repose la photo à sa place et range l'album. Au même moment, son téléphone vibre dans la poche de son pantalon. Un message de Yasmine. Elle va bien et la remercie de l'avoir aidée hier. Azhar sort, elle se sent mal. Elle a l'impression de s'être introduite dans sa vie, dans son intimité.
AZHAR
Mon oncle est particulièrement silencieux et cela n'augure rien de bon. Lorsqu'il ne dit rien, c'est que quelque chose le tracasse. Je pense d'abord au fait que j'ai refusé d'aller plus loin avec Malick. Mais, je sais qu'il ne m'en tiendra jamais rigueur alors c'est autre chose. Lorsque nous terminons le repas, il annonce qu'il sort faire un tour et demande à Ibrahim de le suivre.
Lorsqu'ils reviennent, nous sommes tous curieux de savoir ce qu'ils ont bien pu se dire. Mais ils gardent tout le deux le silence. Ce ne sera pas pour ce soir. Fatiguée, je rejoins ma chambre. Je reprends le travail demain et Sania mérite toute mon attention.
[...]
Lorsque je sors du bus mon parapluie en main, un homme m'arrête. Brusquement je retire mon bras de sa main. Il me regarde et la manière dont ses yeux descendent de mon visage jusqu'à mes pieds me déstabilise.
« Qu'est-ce que vous faites ? Pourquoi vous me touchez ?!
- Pardon, je vous ai confondu avec quelqu'un. Vous êtes la sœur d'Ibrahim ?
- [...]
- Je m'appelle Rabah, Ibrahim est un ami à moi. Je t'ai confondu avec Kaïna. »
Me confondre avec Kaïna, je n'ai jamais entendu une chose pareille. Kaïna est brune avec un teint hâlé et grande et mince. Avec ma peau blanche, ma petite taille et les kilos que j'ai pris depuis mon arrivée, il faut être myope pour nous confondre. L'homme ne m'inspire pas confiance. J'ai déjà rencontré certains amis d'Ibrahim et aucun d'entre eux, n'a osé nous toucher et nous regarder de la sorte.
« Ce n'est pas grave, j'aimerais partir maintenant.
- Tu vas où ? Je peux te déposer ?
- Je travaille ici, au revoir.
- Je vais t'accompagner.
- Ce n'est pas nécessaire.
- Marchons. »
Il me fait peur, très peur. Heureusement pour moi, Marc le chauffeur de Ryan passe au même moment avec la voiture. Il s'arrête à nos côtés et Ryan sort.
« Azhar ? Tout va bien ?
- Oui, j'allais partir. Il insiste pour m'accompagner.
- Elle n'a pas besoin d'être accompagnée.
- Je suis un ami de la famille, Azhar a été surprise. »
La manière de prononcer mon nom, d'insister dessus me fait froid dans le dos. Dans quoi est-ce que Ibrahim s'est embarqué ? L'homme finit par me relâcher et faire demi-tour.
« Azhar ? Vous allez bien ? Me demande Ryan.
- Oui. »
Je pensais pouvoir faire abstraction de ce qui s'est passé, mais la journée m'a paru très longue. Pauvre Sania, moi qui voulait qu'on s'amuse pour son retour de l'hôpital. Nous avons passé la journée devant les dessins animés. Le soir lorsque je rentre, j'attend Ibrahim. Je dois lui parler et comprendre ce qu'il se passe.
Encore une fois ce soir-là, mon oncle l'emmène en promenade. Il se passe quelque chose entre ces deux-là. Lorsqu'ils reviennent, je suis seule dans le salon. Mon oncle m'embrasse avant d'aller au lit et Ibrahim s'arrête devant la porte.
« Qu'est-ce que tu as ? Demande t-il.
- Un ami à toi m'a suivi jusqu'à mon travail aujourd'hui.
- Un ami ?! Quel ami ?
- Je ne sais pas, il m'a fait peur. »
Il s'approche de moi, comblant le vide entre nous. Il s'assoit à mes côtés.
« Tu as eu peur. Pourquoi ?
- Parce qu'il m'a attrapé par le bras, et ensuite il m'a regardé et...
- Il a dit son nom ?
- Rabah, je crois que c'est le nom qu'il m'a donné. Je n'en suis pas sûre. »
Ibrahim ne dit rien, mais ce que je vois dans ses yeux m'effraie. Bien plus que ce qui s'est passé se matin avec cet homme.
« Il t'a fait du mal ?
- Non, mon patron est arrivé et il est parti.
- Je vais régler ça.
- Qu'est-ce que ça veut dire ?
- Ne t'inquiète pas. Il ne t'approchera plus.
- Ibrahim qu'est-ce que tu vas faire ?
- Tu as eu peur, alors je vais faire en sorte que ça n'arrive plus.
- Tu vas avoir des problèmes ? Ne fait rien, ce n'est pas si grave que ça.
- Demain je t'accompagne à ton travail. »
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