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Il est là. Je le sens. Je ressens sa présence. Apaisante et rassurante. Il est tout près car, j'arrive à sentir son parfum. Puis, un contact. Sa main sur la mienne durant quelques secondes à peine. Comme un effleurement. Lorsque mes yeux s'ouvrent, il est debout devant moi. Il se penche légèrement, pour s'assurer que je suis bien réveillée. Puis, le médecin fait son apparition. Des questions, des d'examens et une toilette plus tard, je suis de retour dans ma chambre où Ibrahim m'attend.

« Je suis désolé pour ta mère.

- [...]

- Le médecin a dit que tu peux sortir aujourd'hui.

- Est-ce qu'ils l'ont enterré ?

- Oui.

- Je n'ai pas de corps à enterrer. Je n'ai pas celui de mon père, ni celui de ma mère. Si j'étais restée je l'aurai enterrée.

- Si tu étais restée, tu serais morte.

- Ça n'a aucune importance.

- Si, mais tu es trop triste pour t'en rendre compte. Je vais te laisser t'habiller. »

La minerve me gêne. J'ai envie de la retirer mais, le regard réprobateur d'Ibrahim me fait changer d'avis. Le trajet en voiture se fait dans le silence. À notre retour, seule ma tante et Sofia sont présentes. Je n'ai pas envie de parler, alors je pars directement dans la chambre.

Je ne me souviens pas exactement des trois jours passés à l'hôpital. J'ai beaucoup pleuré et dormi.  Une fois seule dans la chambre, le choc de l'accident refait surface. J'en tremble presque en me regardant dans le miroir. Mon visage est marqué. Une énorme cicatrice barre mon front, celle-ci ne partira pas c'est certain. Mon pied dans la l'attelle me fait souffrir lorsque je le pose trop longtemps par terre mais ma douleur au crâne reste supportable. Ibrahim a raison, j'étais trop préoccupée par mon chagrin. Maintenant, je me rends compte que j'ai été stupide et irresponsable.

À cause de mes blessures, je ne vais pas pouvoir travailler pendant trois semaines. Le temps que ma jambe guérisse et que mon traumatisme crânien ne s'aggrave pas. Épuisée, je m'allonge sur mon lit et m'endors.

[...]

À mon réveil, je ne reconnais pas le lieu où je me suis endormie plus tôt. Je me redresse beaucoup trop vite, ma tête tourne. Une sensation horrible, j'ai l'impression d'avoir un orchestre dans le crâne. Sofia entre dans la chambre et me tend un verre d'eau avec un efferalgan que j'avale rapidement.

« Je vais t'apporter à manger.

- Je n'ai pas faim, merci.

- Il faut que tu manges, tu as perdu du poids.

- Je n'ai pas faim Sofia.

- Mais...

- Quand tu voulais être seule après ce qui t'ai arrivé je n'ai pas insisté. Maintenant c'est moi qui ai envie d'être seule.

- Bien, comme tu voudras. »

Je ne voulais pas la blesser, mais toute cette compassion je n'en ai pas besoin. Rien de tout ça ne pourra me ramener ma mère. Ma tante est venue à son tour. Je n'ai pas osé lui demander de partir, elle est restée avec moi jusqu'à ce que je m'endorme à nouveau.

Las d'avoir dormi toute la journée, je me réveille en plein milieu de la nuit, tiraillée par la faim. J'avance à pas feutrés à cause de ma jambe. Une assiette m'attend dans le micro-onde. Je la réchauffe avant de m'installer sur la chaise. Une fois assise, je pousse un soupir de soulagement. Rester debout est trop douloureux.

Je décide de rallumer mon téléphone, surprise d'y découvrir un message. Un message de Yasmine l'amie d'Ibrahim qui me présente ses condoléances et propose qu'on puisse se voir un jour. Je n'ai aucune envie de sortir avec cette fille. D'ailleurs, je ne sais pas comment elle a trouvé mon numéro. Quelque chose me dérange chez elle. Au début, je pensais être jalouse mais ce n'est pas ça. Elle est beaucoup intrusive. Par politesse, je lui réponds et ignore sa proposition.

Le second est d'Amine qui n'a pas pu venir me voir. Je verse quelques larmes en lisant les messages qu'il m'a envoyé. Je vais attendre qu'il fasse jour pour lui parler de vive-voix. Il est la seule personne à qui j'ai envie de parler. Des pas se font entendre dans le couloir. Ils se rapprochent de la cuisine avant que la porte s'ouvre.

« Qu'est-ce que tu fais dans le noir ? Me demande Ibrahim.

- Je mange.

- Allume la lumière tu m'as fait peur !

- Il faut partir dans ce cas.

- Je vais ignorer ce que tu viens de dire pour notre bien à tous. Ne soit pas méchante Azhar, ce n'est pas toi. Tu n'es pas comme ça.

- Je ne suis pas méchante !

- Si tu le dis. Remet ton truc, tu veux te casser le cou où quoi ?!

- Ça gratte.

- Remet-le ! »

Je l'ignore et reprend mon repas. En quelques secondes, il se trouve derrière moi. La minerve entre les mains, il l'accroche avant de s'éloigner en vitesse. Comme si notre proximité était dangereuse. Et elle l'est, nous le savons tous les deux.

« Ton amie n'arrête pas de m'envoyer des messages.

- Mon amie ?

- Yasmine.

- Tu connais Yasmine ?

- Elle est venue me parler l'autre jour, elle m'a envoyé un message hier.

- Je ne veux pas que tu lui parles.

- Pourquoi ?

- Parce que, je ne veux pas.

- Elle est gentille. Je ne vois pas pourquoi je ne peux pas devenir amie avec elle.

- Elle est tout sauf gentille et Yasmine n'est pas mon amie. Je ne veux plus te voir avec cette fille, dit-il avant de partir brusquement. »

[...]

Je m'ennuie terriblement. J'ai reçu plusieurs appels de Sania qui m'ont réchauffé le cœur. Elle me manque beaucoup, mon travail me manque aussi. Sa relation avec son père s'améliore et j'en suis très heureuse. Tout le monde est au petit soin pour moi. Je ne savais pas que ça faisait autant de bien de ne rien faire.

J'ai prévu avec l'accord de ma tante que Sania me rende visite avec son père. Elle tenait absolument à me voir et bien entendu, je n'ai pas pu lui dire non. La maison était entièrement propre et j'avais préparé un goûter pour elle. Ryan n'a pas pu venir car il travail, c'est donc le chauffeur qui a emmené Sania.

« C'est joli ici. On dirait un palais des milles et une nuit.

- Ma tante aime beaucoup la décoration orientale.

- Moi aussi ! Papa a dit qu'il viendra me récupérer. Je crois qu'il se passe quelque chose avec Chirine, me dit-elle d'un air malicieux. »

Sania est un ange mais lorsqu'il s'agit de Chirine c'est une véritable terreur.

« Sania, je t'ai déjà dit de ne pas t'en mêler.

- Ils se sont disputés et elle ne vient plus. Papa a même changé les clés. Il dit que c'est parce que les nouvelles clés sont plus sûres, mais je ne suis pas débile. Dit-elle en levant les yeux au ciel.

- Peu importe, laisse ton père gérer tout ça.

- D'accord, j'écouterai moins aux portes ! »

Irrécupérable, mais ça me fait rire et ça me fait beaucoup de bien. Kaïna rentre des cours et tombe elle aussi,  sur le charme de ma petite terreur.

OMNISCIENT

Ibrahim s'est empressé de quitter le travail ce soir-là après avoir terminé la négociation avec un confrère. Il salut l'équipe et monte dans sa voiture en direction de la Porte de Pantin. Yasmine l'attend sûrement déjà. Cet appartement est une garçonnière, appartenant à un de ses amis figure du grand banditisme.

Ibrahim aime être discret avec les femmes, alors il vient ici. Yasmine est une habituée. Lorsqu'il la voit allongée dans le lit à son arrivée, il s'empresse de se déshabiller et de la rejoindre. Il ne parle pas, ne l'embrasse pas. Il n'y a pas de douceur dans ses gestes, ce n'est que physique.

« Je ne veux plus que tu ailles voir ma cousine, tu as compris ?

- Je voulais simplement faire sa connaissance.

- Tu ne t'approches pas de ma famille Yasmine. Tu te prends pour qui ? Demain tu vas aller te présenter à ma mère ?!

- Non, je te demande pardon.

- C'est la dernière fois. Je ne veux plus te voir ici.

- [...]

- Yasmine, ne pleure pas. Ce n'est pas contre toi. Tu dis que tu m'aimes, mais c'est faux. Tu ne sais pas ce que c'est d'aimer, et moi non plus.»

[...]

Ibrahim le sait, Yasmine n'abandonnera pas aussi vite. Mais il a l'habitude, elle finira par laisser tomber comme toutes les autres. Lorsqu'elle aura comprit que c'est une cause perdue. Depuis qu'il fréquente des femmes, Ibrahim a appris a mettre une barrière entre ses conquêtes et sa famille. Elle a franchit une limite et il doit s'en débarrasser maintenant.

En passant la porte il est directement interpelé par le calme, seule Sofia est présente. Il l'a cherche. Comme toujours. Mais elle est sûrement déjà endormie. En se dirigeant vers sa chambre, il ne peut s'empêcher de s'arrêter devant la sienne. Il ouvre doucement, heureusement pour lui Kaïna n'est pas là ce soir.

Il l'a regarde, c'est malsain et il le sait. Mais il n'arrive pas à détacher ses yeux de sa silhouette allongée sous les draps. Il s'imagine dormir à ses côtés. Une nuit, juste une seule. Il ne doit pas penser à ce genre de chose parce que Azhar est différente. Mais elle l'attire et il ne peut ignorer ce qu'il ressent.

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