Chapitre 24 | Cyrus
― Pourquoi tu pleures ?
Je ne m'approche pas des autres en temps normal à cause de mon stupide frère. Il a tendance à me voler mes propres amis uniquement par plaisir de me faire souffrir. Cette fois, Lewis ne se donnera même pas la peine d'engager la conversation avec le nouveau. Notre classe sociale est bien supérieure à la sienne, il étudie dans cette école uniquement grâce à une bourse.
Le blondinet lève les yeux dans ma direction en serrant davantage son crayon dans la main. Cela fait trois semaines qu'il est arrivé dans notre école, mais personne ne s'est approché de lui. Les apparences sont primordiales au sein du royaume et malheureusement ce gamin est bien trop différent pour avoir de l'importance aux yeux des autres.
― C'est à cause des autres ? Ils sont stupides, tu ne devrais pas les écouter.
― Je déteste cette école !
Il place sa main devant sa bouche, les yeux écarquillés. Il ne voulait certainement pas craquer devant moi par crainte des représailles. Je ne suis pas comme ces imbéciles, je me fiche de la famille de laquelle il vient et de sa richesse.
― Tu ne devrais pas me parler, ils vont te brutaliser aussi.
― Et alors ? Je ne veux pas laisser une personne seule.
Ma remarque semble le surprendre.
― J'ai envie de devenir ton ami et ce n'est pas les autres qui vont m'en empêcher.
― Tu as juste pitié de moi...
― Non, tu m'intrigues c'est tout.
Je tends la main en souriant.
― Je m'appelle Cyrus Cromwell, heureux de faire ta connaissance.
― Ethan. Ethan Hillmore.
Je contemple le liquide brillant dans la bouteille puis avale une gorgée. J'avais besoin d'un remontant après une telle journée. Les étoiles scintillent dans le ciel, c'est une nuit incroyable. J'ai encore beaucoup de mal à croire que mon meilleur ami d'enfance fait son apparition dans ma vie. Il ne se souvient probablement pas de moi, mais je ne suis jamais parvenu à l'oublier. Un soupir s'échappe de mes lèvres, c'était un gamin paumé et maltraité par les autres gamins. Nous nous sommes énormément rapprochés quand j'ai eu le courage de lui adresser la parole. Sa famille est devenue très populaire par la suite, c'est la raison pour laquelle il est parti du jour au lendemain.
― C'est un peu triste de boire seul.
Une voix agaçante attire mon attention et provoque une certaine nostalgie. Je me retourne pour faire face à ce vieil ami. Le gamin timide n'existe plus, il a laissé la place à un homme confiant avec des vêtements de marque. Ethan Hillmore est bien plus riche que moi désormais, les rôles se sont inversés.
― J'avais entendu dire que le fils aîné des Cromwell avait décidé de mettre les voiles, mais je ne m'attendais pas à te retrouver ici. Tu as toujours eu l'envie de prendre ton indépendance alors cette décision ne me surprend pas. Tu es toujours le même, Cyrus.
― J'aimerais te retourner le compliment, mais tu es différent de celui que j'ai toujours connu. Le Ethan que je connaissais n'aurait jamais accepté d'épouser une femme pour sa richesse et son statut.
Il lève les yeux au ciel.
― Aylana Eastwood est une jeune femme adorable, j'apprécie sa compagnie.
― Tu sais ce que je pense des mariages arrangés.
J'avale une nouvelle gorgée de mon alcool en contemplant les étoiles.
― C'est peut-être difficile à croire, mais j'aime sincèrement Aylana.
― Tu tombes amoureux au premier regard, c'est ça ?
Un rire moqueur s'échappe de ma bouche. Je n'appartiens plus à ce cercle grotesque, mais je ne pensais pas que mon plus proche ami tomberait aussi bas. Il devient une pâle copie des autres riches que j'ai connu toute ma vie. J'appréciais le Ethan simple et pauvre qui avait de réelles convictions. Ce connard arrogant est un parfait inconnu.
― Je laisse une place au véritable amour, Cyrus. Tu devrais songer à faire de même au lieu de picoler tout seul et faire un travail montrant tes véritables capacités. Tu vaux mieux que jouer les guides pour les riches alors que ta famille l'est également.
― Garde tes conseils pour toi.
Je vacille légèrement à cause des effets de l'alcool, mais je ne suis pas suffisamment ivre pour tomber dans les pommes. Je lance un regard mauvais à cet ancien ami que je ne supporte plus de voir. Il vit dans un monde d'illusions, les mariages arrangés finissent rarement bien et il verra la véritable facette des riches du royaume de Slonia.
Ethan n'ajoute rien et se contente de partir, les mains dans les poches de son pantalon. Il est en voyage avec sa fiancée, ne devrait-il pas prendre le temps de rester avec elle ? Je passe une main sur mon front recouvert de transpiration. Je croyais que Aflium m'apporterait toute la liberté dont j'avais besoin, mais il faut que je croise des personnes de mon passé. Qu'il aille se faire foutre, c'est ma vie dont il est question !
Je retourne dans ma maison en prenant soin de bien refermer derrière moi. Ethan ne vaut pas mieux que ma propre famille, c'est désespérant. Je dépose la bouteille à moitié vide sur la table basse du salon puis marche en direction de ma chambre pour aller dormir lorsque je remarque une faible lumière provenant d'un pot décoratif. Intrigué, je m'approche de celui-ci puis réalise que la lumière en question est causée par le vieux médaillon trouvé à la Cascade.
Je le prends entre mes mains, mais la chaleur émanant de lui, laisse une marque profonde sur ma peau. Le pendentif tombe lourdement sur le parquet en un gros bruit. Je souffle sur la brûlure tandis que la lumière s'accentue. Ever avait peut-être raison, ce truc est sûrement maudit ou un truc du genre.
― Quelle soirée ! marmonné-je.
Tant pis pour mes recherches, je vais le remettre à sa place. Il est inconcevable que je garde un objet maléfique dans ma maison ! Le silence est peu à peu remplacé par une mélodie semblable à une berceuse. Une femme fredonne le même air avec une extrême douceur. Cette situation devient de plus en plus étrange. Une journée ordinaire est-elle trop demandée ?
― Promets-moi de ne jamais m'abandonner, murmure une voix masculine.
― Mon cœur t'appartient pour toujours et à jamais.
La lumière disparaît finalement à mon grand soulagement ainsi que les voix. Ce couple est certainement connecté au mystère entourant ce pendentif. Une relation amoureuse, cela ne devrait pas me surprendre. La plupart des malédictions sont causées par des romances qui finissent mal. Une raison supplémentaire de ne pas tomber amoureux. Les visions affirment le contraire, mais je ne m'approcherais pas de cette femme capable de me détruire et me rendre dépendant d'elle.
Je ramasse le pendentif puis le balance dans le canapé. J'aurais dû écouter Ever et ne pas l'emmener avec moi, il ne m'arrive que des catastrophes depuis qu'il est en ma possession. Mon envie de dormir s'est envolée à la seconde où le pendentif s'est illuminé. Je pousse un grognement puis enfile mes chaussures pour me rendre au seul endroit susceptible de me faire oublier mes problèmes pendant quelques heures.
Je marche sans m'arrêter avant de m'immobiliser devant le logement temporaire de Dawn. Une maison plus grande que la mienne avec une grande piscine, c'est le grand luxe pour une émissaire royale ! La lumière du salon est encore allumée, ce qui prouve qu'elle ne dort pas comme je m'y attendais. Je toque à la porte en essayant de soigner mon allure. Les cheveux relevés en une queue de cheval, Dawn écarquille les yeux en me voyant.
― Cyrus ? Il est deux heures du matin, qu'est-ce que tu fais ici ?
― Accorde-moi une nuit, Dawn.
La rouquine attrape le col de ma chemise pour m'attirer et dépose un baiser sur mes lèvres. Je réponds à ce baiser avec fougue et la serre davantage contre moi. Dawn est bientôt plaquée contre le mur de sa propre demeure, la respiration haletante. Mes mains caressent chaque centimètre de son corps aussi chaud que le feu.
Nous ne nous attardons pas à l'extérieur puis pénétrons à l'intérieur. Dawn ne perd pas de temps et balance sa robe au loin. Ce n'est pas de l'amour, mais uniquement une relation basée sur un désir charnel commun. Je ne veux pas tomber amoureux, cela détruit absolument tout. La seule que j'ai aimée est morte alors quel est l'intérêt de sombrer dans ce qu'on appelle l'amour ?
― Cyrus...
― Chut, profite de l'instant présent.
Je plonge mon visage dans son cou afin de déposer un grand nombre de baisers. Elle frissonne à mon contact, mais gémit. Je connais chaque centimètre de son corps et je ne veux rien d'autre.
13.09.2023
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