Chapitre 32 : Concert


— MA VILLE MON CLAN MON STYLE MON FLOW
— ÇA C'EST MA DOPE
— TA PTITE AMIE M'APPELLE MON BEAU
— ÇA C'EST MA DOPE
— MAMENE MA BANDE PROTÈGE MON DOS
— ÇA C'EST MA DOPE

Autour de moi, le public était en feu, tout le monde chantait à tue tête, répondant à Ken et Doums qui sautaient partout sur scène. C'était incroyable, je n'avais jamais vécu une ambiance pareille. Violette semblait ravie et se donnait à fond dans le concert, il y avait déjà eu plusieurs cercles et pogos, les gens fumaient, buvaient des bières, s'embrassaient. Je n'avais d'yeux que pour Ken, l'énergie qu'il dégageait sur scène, la bienveillance qu'il avait à l'égard de son public. Jamais les paroles de « Mon âme » ne m'avaient parues aussi vraies. Il donnait tout, le rap était sa vie, il vivait du rap.

Cela m'émut profondément, j'avais l'impression de le voir réellement tel qu'il était. Les chansons se succédaient, entre celles du S-Crew, de Ken et de ses invités, j'étais transportée. Pendant deux heures, plus rien ne comptait, plus aucun souci n'avait d'importance, on était juste tous là, réunis par la musique.

— C'était parfait, me dit Violette quand je la raccompagnais à la sortie du festival, tu le remercieras encore pour moi.

— Bien sûr, n'hésite pas à me contacter quand tu veux, j'ai adoré faire ta connaissance.

Elle me serra dans ses bras et rejoignit la voiture de sa mère qui l'attendait. Pour ma part, je retournai au tour bus attendre les gars.

Pour patienter, je regardais sur Instagram les photos prises lors du concert, en faisant défiler, mon attention fut captée par plusieurs images suspectes. Je cliquai et avec surprise découvrai que ce que je craignais était bien réel. Il s'agissait de photos de Ken et moi, prises à la gare quand nous y étions dans l'après-midi. Nous étions enlacé, sur l'une il embrassait mon front, sur l'autre c'est moi qui déposait un baiser sur sa joue. Elles avaient été publiées par des comptes fan, les commentaires allaient bon train. Certains demandaient mon insta, d'autres m'insultaient, la plupart se posaient la question de qui j'étais.

Note pour moi même : Ne plus jamais s'afficher dans une gare en plein jour.

Quelques minutes plus tard les gars revinrent enfin au bus en riant. Ils avaient l'air crevé.

— Alooooooors comment va notre groupie number one ? s'exclama Framal, tu tires une de ces gueules ! T'as pas kiffé le flow du Fenek ?

— Vous étiez incroyable, j'ai passé une des meilleures soirées de ma vie, lui répondis-je en retrouvant mon sourire.

Tous les gars entraient au fur et à mesure dans le bus, pendant une heure tout le monde parla, rit, fuma et rappa. J'avais l'impression d'être une infiltrée aux milieu d'eux, l'ambiance était vraiment incroyable et je compris véritablement pourquoi Ken les aimait tellement.

J'évitais un peu Deen pour l'instant, ne voulant pas rallumer un feu à peine éteint. Mekra n'avait pas l'air tant fâché que ça contre moi et me parlait comme si de rien était. Au bout d'un moment je décidai d'aller dormir et leur souhaitai bonne nuit à tous avant de rejoindre la couchette de Ken. Il me fit signe qu'il se coucherait plus tard.

Je m'endormis rapidement.

— Clem, tu prends toute la place je peux pas me coucher.

Dans un demi sommeil, la voix de Ken me parvint et je me pressais contre la paroi du bus pour lui laisser une place. Je le sentis ensuite s'allonger à côté de moi.

— Soyez sage les deux, j'ai pas envie que votre couchette s'effondre sur moi.

La voix de Doums émanant de la couchette du dessous acheva de me réveiller. Framal rappait au dessus de moi en se couchant.

— Vous pouvez pas être moins bruyants ? râlai-je.

— Arrête de geindre, t'as déjà de la chance d'être là.

Cette fois-ci c'est Mekra qui avait parlé, je ne répondis pas.

— Ça va beauté ?  me chuchota Ken dans l'oreille.

— Oui, j'ai juste besoin de dormir.

Ses bras se positionnèrent alors autour de ma taille et il m'attira à lui.

— Je suis content que tu sois là, murmura-il.

— Moi aussi, cette soirée devait être épouvantable et grâce à toi et aux gars elle a été formidable.

— Pourquoi épouvantable ?

Je soupirai tandis qu'une larme s'échappa de mon œil.

— 13 juillet... Ce soir j'aurais dû être à mon enterrement de vie de jeune fille... avec Anna.

Ma voix s'étrangla dans ma gorge et j'étouffai un sanglot. Ken comprit que je n'étais pas encore guérie, qu'il allait me falloir du temps.

D'une main il caressait mes cheveux, de l'autre le rappeur maintenait fermement mon buste contre son torse. Son odeur emplissait mes narines, ma joue reposait sur son épaule et je pensais à l'absurdité de la situation. Quelques mois auparavant, j'étais une jeune femme fiancée qui n'avait jamais remis en question le moindre choix qu'on avait fait pour elle, un voyou avait croisé mon regard dans le métro et avait dévasté ma vie, et ce soir je me retrouvais dans ses bras, alors que j'aurais dû être dans ceux de mon futur mari. Je passais du planifié à l'improvisé, du certain à l'incertain, de la routine à l'aventure. C'était terrifiant.

— Ne m'abandonne pas Ken...

En lui chuchotant ces mots je savais que je me rendais vulnérable, mais c'était plus fort que moi, même si je faisais tout pour m'aguerrir, j'avais peur qu'il me fasse du mal.

Il ne répondît pas et me serra plus fort, j'avais besoin d'être rassurée mais en même temps, je le connaissais, il ne pouvait rien promettre. Pour la simple et bonne raison que lui même n'était pas certain qu'il ne finirait pas par me briser le cœur.

Soudain quelque chose me revint en mémoire et je levai brusquement la tête vers lui. Ken sursauta.

— Qu'est-ce qui te prend ?

— Au téléphone, tu m'as dit que tu voulais me parler d'un truc.

Je devinai son sourire dans le noir.

— Ça te dirait de venir quelques jours en Grèce avec ma sœur, le $-Crew et moi fin août ? Vous avez à peu près le même âge avec Irène, vous pourriez bien vous entendre.

La proposition était alléchante, passer du temps avec lui, à l'étranger, dans le pays d'origine de sa famille.

— C'est pour toi ou pour ta sœur que tu me fais venir ?

Il avait toujours cette façon de présenter les choses de façon à ne pas trop montrer son attachement.

— Les deux, Beauté, répondît-il en déposant un baiser sur mon front.

Mais il ne s'arrêta pas là et ses lèvres se posèrent ensuite sur chacune de mes joues, puis le long de ma mâchoire, puis au coin des miennes.

Il était vraiment très fort pour se rendre irrésistible.

C'était comme si une tension électrique mortellement dangereuse avait envahi notre petit espace. Chacun attendait que l'autre franchisse la dernière limite.

Au moment où je me décidais, la voix de Doums interrompit mon mouvement.

— Faites pas les cons je suis en dessous.

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