Chapitre 32 : Épouse moi.


Deux gardes escortaient Aveline et Garrett. Cela faisait trois jours qu'ils montaient, elle était traitée avec le plus grand des égards. On leur avait expliqué qu'avant de rejoindre la Capitale ils allaient s'arrêter dans la demeure du Seigneur en question, apparemment elle avait besoin de quelques leçons. En plus de cela, personne ne savait qui elle était, pour ces deux hommes elle était la jeune Duchesse fiancée à leur maitre et qu'il avait été contraint de cacher. Ce n'était pas tout à fait faux, si ce n'est qu'elle n'était pas fiancée. Aveline avait été forcée d'éviter tout rapprochement avec Garrett ces derniers jours, ils étaient étroitement surveillés bien que ce dernier soit son garde du corps attitré. Etonnamment il s'en sortait très bien, aucun débordement, aucune colère, juste quelques regards mauvais. Il profitait toujours d'un moment pour l'aider à descendre de cheval, ou quoi que ce soit d'autre qui leur permettait un peu d'intimité, ce qui n'était pas une chose simple.

Après avoir monté une matinée entière ils atteignirent enfin leur destination, une immense demeure au milieu des arbres. Tout semblait s'harmoniser en ces lieux, la nature poussant autour de cette bâtisse. Aveline descendit de selle, imitée par les autres. Elle et Garrett furent guidés à l'intérieur où une armée de serviteurs attendait, tous rangés en rang et s'inclinant dès qu'elle fut entrée. La jeune femme grimaça, elle avait oublié tous les simagrées de la cour et des convenances. Une femme d'âge mûr s'avança. Sa tenue était stricte, mais un petit éclat dans son regard la rendait tout de suite plus amicale.

« Ma Dame. Si vous voulez bien me suivre je vais vous montrer vos appartements pendant que l'on s'occupe de vos bagages et de votre garde du corps. »

Aveline jeta un œil à Garrett qui lui donna son approbation. Elle se laissa donc entrainer à la suite de la femme et fut bientôt imitée par plusieurs demoiselles. On la conduisit à l'étage dans une vaste pièce qui devait faire la taille de la maison qu'elle avait avec sa grand-mère et sa sœur à la Capitale. Un petit balcon donnait directement sur un jardin avec de magnifiques fleurs et buissons. Tout était splendide. Sur le lit aux draps couleur crème était disposé un amas de tissu qu'elle devinait être une robe. Passant une petite porte au fond de la pièce elle découvrit une salle de bain, juste assez grande pour mettre une baignoire. Un fond d'eau s'y trouvait déjà.

« L'eau chaude arrive. Vous allez pouvoir vous détendre, nous ferons ensuite les essayages de vos robes pour voir si votre trousseau vous convient. » Une chose était certaine, cet étrange protecteur avait pensé à tout. Deux serviteurs entrèrent avec des seaux, ils versèrent l'eau fumante dans la baignoire. Finalement la journée ne serait pas aussi terrible qu'elle l'avait pensé. Elle se tourna vers la femme, et deux servantes qui étaient restées près de la porte.

« Vous pouvez disposer. » Elles la regardèrent, la femme se racla la gorge.

« Nous avons pour instruction de vous aider Ma Dame. Vous êtes notre maitresse. » La jeune femme retint un soupir. Elle n'avait aucune envie d'être assistée. Cela faisait bien trop longtemps qu'elle se débrouillait seule. Néanmoins elle ne semblait pas avoir le choix, les demoiselles se pressants déjà autour d'elle pour l'aider à se dévêtir. Elle n'aimait pas cela.

« Donc, c'est vous qui m'accompagnerez au palais ? » Autant savoir tout de suite comment les choses allaient se passer. Cela était déjà assez frustrant de ne pas savoir qui prenait dans soin d'elle.

« Je serai la seule, d'autres femmes de chambre vous attendent à la Capitale. » Il faudrait donc qu'elle retienne des noms et des visages. Vaste programme. Avec bonheur elle s'immergea tout de même dans le bain chaud, se prélasser ainsi n'avait jamais fait de mal à personne.

« Bien. Votre maitre a-t-il donné d'autres instructions dont je devrais être au courant ? » Normalement elle était censée savoir qui était son fiancée, seulement elle n'en avait absolument aucune idée, sa seule chance était de faire comme si.

« Simplement que cette demeure était à présent votre et que nous étions tous sous vos ordres. A part cela, rien de spécifique. Nous avons pour ordre de veiller à votre bien être. » Son bien être... Il aurait été plus préservé encore si elle avait pu rester auprès des Capes Rouges.

« Merci.... Puis-je savoir votre nom ? » Pendant qu'elle parlait les deux demoiselles avait entrepris de lui laver les cheveux. Aveline grimaça, ce n'était pas des plus agréable.

« Eloane Ma Dame. » C'était le premier nom qu'elle devait retenir, cette femme pourrait lui être d'une aide précieuse. Elle la détailla un instant, grande et svelte, elle semblait avoir vécu tout en gardant une douceur et une beauté peinte sur le visage. Ses cheveux blonds étaient maintenus par un chignon serré et ses yeux verts étaient en forme d'amande. « Et voici Shana et Tris. » Elle regarda les deux demoiselles. Elles faisaient à peu près la même taille, leurs cheveux étaient tressés et ramenés en arrière. Tris était plus corpulente que Shana mais cela lui allait bien, sa chevelure rousse semblait difficile à dompter alors que les cheveux noir de sa compagne étaient plus fins et plus assagis.

« Enchantée. Vous pouvez tout à fait m'appeler Aveline si vous le souhaitez. » Elles hochèrent la tête, même si la jeune femme doutait fortement qu'elles feraient quelque chose de cet ordre. « Savez-vous quand mon fiancé nous rejoindra ? » Sans oublier qu'elle ne devait faire aucune allusion au fait qu'elle ne savait fichtre rien de lui.

« Il ne le fera pas. Il est prévu que vous le rejoigniez à la Capitale. » Evidemment. Elle soupira alors que l'on rinçait ses cheveux. « Souhaitez-vous rester un peu plus longtemps dans votre bain ? » Cette proposition était tentante, seulement si elle le faisait elle y passerait sa journée, et il ne fallait pas abuser des bonnes choses.

« Non, cela ira. »

Elle sortit de la baignoire s'enroulant dans un drap pour se sécher. Malgré tout ce qu'elle pouvait dire, il était agréable de se faire ainsi choyer. Elle n'en avait plus l'habitude. Une fois séchée elle enfila une chemise qu'on lui tendait. Douce et agréable. Il lui fallait maintenant passer à l'essayage. Dans la chambre on lui passa l'une des robes d'une couleur émeraude, elle était brodée de pierreries et de fils d'or. Tout en complexité, Aveline savait pourtant qu'il s'agissait d'une robe de tous les jours comme sa mère avait l'habitude d'en porter avant quand elle se « reposait ». Néanmoins, si elle était magnifique, elle était trop grande pour elle au niveau de la taille.

« Le maitre nous avait donné vos mesures, nous avons dû nous tromper quelque part. Pardonnez-nous.» L'entrainement chez les Capes Rouges avait été beaucoup plus intense qu'elle ne l'aurait imaginé.

« J'ai perdu du poids ces derniers mois. Ce n'est pas vous. Désolé. » Elle était bien consciente de ce qu'elles allaient devoir subir : le réajustement de chaque tenue. Même elle, cela ne la réjouissait pas. Elle en était venue à préférer tirer à l'arc.

« Je vais faire quelques rapides retouches. » Il lui fallut quelques minutes pour revenir avec son matériel de couture. Aveline se laissa faire alors qu'elle se tenait debout au milieu de la pièce, bras écartés. D'un coup elle se sentait parfaitement stupide, et inutile.

« Parfait. » Murmura-t-elle tout en observant les autres travailler. En réalité elle mourrait d'envie qu'on lui dise qu'il y avait quelque chose à faire, qu'elle pouvait aider. Au lieu de cela, on lui intima l'ordre de ne pas bouger, et cela allait durer de longues minutes.

*

* *

Serrant Garrett contre elle, Aveline se prit à s'imaginer rester ainsi pendant très longtemps. Pourtant le lendemain ils prendraient la route du palais et il n'y aurait pas de demi-tour possible. Sa journée avait été ennuyeuse au possible, entre les essayages et les retouches. Heureusement son garde du corps avait pu la rejoindre dans la nuit, lorsque tout le monde s'était endormi. Cela était très certainement leurs derniers instants en toute intimité avant un long moment. Garrett fit remonter ses doigts le long de son dos avant d'aller jouer avec l'une de ses mèches de cheveux.

« Si on fuyaient, tu crois qu'ils nous rattraperaient ? » Elle y avait aussi pensé. Malheureusement la conclusion était toujours la même.

« Je crois bien que oui. » Le jeune homme soupira. « Nous partons demain, nous reviendrons vite, et quand ce sera le cas... » Il la fit taire en l'embrassant. Il lui caressa la joue.

« Épouse-moi. » Elle leva les yeux vers lui. Ils se regardèrent un instant. « Je suis sérieux Aveline, nous pouvons nous marier dès qu'on sera de retour chez les Capes Rouges, ou même avant. Je veux être avec toi... » Le mariage. Elle n'avait pas envisagé cela depuis longtemps. Elle voulait rester avec Garrett, c'était une certitude, mais un tel engagement la terrifiait.

« Je... Je ne sais pas.... Je.... » Paralysée, elle crut qu'il allait la planter, prenant sa réponse pour un non. Au lieu de cela il lui embrassa le front.

« Ce n'est qu'une suggestion... Je sais que tu as peur. » Il lui remit une mèche de cheveux derrière l'oreille. « Je te reposerais la question à un autre moment, et j'ose espérer que tu diras oui. » Pas de mélodrame ou de crise de colère. De la compréhension. Cela lui arracha un sourire, exactement ce dont elle avait besoin.

« Merci. » Encore une nuit ensemble et ils devraient s'éloigner quelques temps. Etre proches et pourtant garder une distance. Aveline alla se blottir contre lui. Autant en profiter tant qu'elle le pouvait encore.


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