Chapitre 29




  -Vous allez faire quoi !?

  Si Gabriell avait cru que lorsque Justin Bieber s'était fiancé, Mailla avait poussé sa voix à des décibels insoupçonnés, il s'était lourdement trompé. Même Ivanh réagit en se bouchant les oreilles, alors qu'il était plongé dans ses révisions.

  Assise sur le fauteuil en train de siroter un thé vert, Gabriell s'estimait heureux que son amie n'est rien éclaboussé, et surtout pas la parquet d'Ivanh. Ce dernier ne semblait pourtant n'en avoir rien à faire, même s'il était à l'origine de ce cataclysme.

  A l'origine Gabriell avait invité Mailla après les cours pour qu'elle l'aide sur un devoir qu'il devait rendre à propos d'écrivains italiens. Il était tombé sur un texte non traduit. Sans elle, il aurait eu du mal à le comprendre, même avec une aide informatique. Seulement, le sujet avait légèrement dévié sur des motifs dont il se serait bien passé et Ivanh avait lâché l'information de trop. Tout ce dont il pouvait se réjouir maintenant était qu'Elian ne les avait pas accompagnés, et qu'en apprenant de quoi ils avaient parlé, s'en mordrait les doigts plus tard.

  -C'est rien Mailla, on va juste se faire dépister la semaine prochaine. Rien de quoi en faire tout un drame.

  -Non mais attends Gabriell, ça englobe beaucoup de choses ce que tu me dis là ! BEAUCOUP DE CHOSES !

  -Mailla...

  -Attends j'appelle les autres.

  Gabriell se frotta les yeux, exaspéré par l'attitude de son amie. D'autant plus que le fautif faisait comme si de rien n'était, à croire qu'il ne savait pas comment étaient leurs amis ! Après que Mailla est contactée tout le monde et mit le haut-parleur, immédiatement ce fut la cacophonie dans le salon et, enfin, Ivanh commença à réagir.

  Ni l'un ni l'autre n'était exaspéré par l'étalage de leur vie privée, après tout le sujet serait parvenu aux oreilles de leurs amis un jour ou l'autre. Non, le problème venait du fait que Gabriell savait que le sujet allait dévier tôt ou tard sur tout autre chose.

  -Franchement Gabriell, tu nous avais pas tout dit !

  -Moi je n'étale pas ma vie privée sur l'étalage, pas comme certaine !

  Comme d'habitude Gabriell rentrait dans leur jeu. A chaque fois que Mailla ou Elian mettaient leur grain de sel dans un sujet qui le concernait il se sentait obligé de répondre à leurs provocations. Au lycée il se souvenait que de nombreux élèves comment était-ce possible que ces trois amis le soient. Gabriell faisait tache, comparé aux deux autres. Il était d'apparence bien plus posé ses amis. Ceux qui le connaissaient ne disaient rien, mais leurs sourires complices en disaient long.

  Et alors quand les trois commençaient à se chamailler, étrangement Gabriell n'était pas en reste. Le plus calme sortait les griffes et se défendait bec et ongles face aux accusations de ses amis. C'est pour cette raison qu'Ivanh le laissa gérer la situation, jamais son compagnon ne l'avouerait, mais il adorait se crêper le chignon avec ses deux meilleurs amis.

  -Tu me fends le cœur !

  -Gab, rends papa fier. Dis-moi que t'es le plus au-dessus.

  -Elian, tu es répugnant.

  -Rien que ça !

Gabriell soupira.

  -Mais, Gabriell, Ivanh je « comprends » qu'il se fasse tester, mais toi ? demanda Simon, plus réfléchie que les autres.

  -Au cas où, je peux avoir des trucs. J'en sais rien mais on veut pas prendre de risques.

  -Tu m'étonnes ! C'est vrai qu'à part un bisou avec Alice en cinquième, t'as pris de nombreux risques dans ta vie.

  -C'était en quatrième et c'était ma plus belle histoire-FEMININE-rajouta-t-il après un regard appuyé de la part d'Ivanh. Un peu de respect s'il te plait.

  -C'est vrai, j'avais oublié que t'étais un vrai charo comme on dit maintenant. Un vrai tombeur de ces dames.

C'est ce moment-là que choisit Ivanh pour intervenir.

  -Je me disais bien que t'étais doué pour un novice. Alors comme ça t'as vécu une incroyable histoire torride ?

  -Ah non ! pas toi aussi !

  Ivanh ricana avant de passer un bras autour de sa taille et lui murmurer contre son oreille « Désolé, j'étais obligé ». Gabriell soupira. Entouré de personnes comme ça, ce n'était pas surprenant si, au final, il se retrouvait seul à mener sa bataille.

  -Est-ce qu'on pourrait, s'il vous plait, parler d'autre chose ?

  -Ah non ! Je viens d'apprendre que mon Gabi-chou n'était plus puceau ! C'est carrément un jour sacré, répliqua Mailla.

  -Ne m'appelle pas comme ça...

  Dans son dos il sentit le regard d'Ivanh, mi moqueur mi encourageant. Tous ses amis connaissaient sa haine pour les surnoms mais s'il y en avait bien deux qui ne s'en préoccupaient pas le moins du monde c'était bien Mailla et Elian. Ce dernier persistait à l'appeler « Gab » et toutes ses protestations ne suffiraient jamais à le faire changer d'avis. Pour autant, il tenait à continuer de protester, espérant, peut-être naïvement, à juste titre, que son ami finirait par comprendre. Il se raccrochait à ce ridicule espoir.

  -T'étais vraiment obligé de le leur dire ?

Ivanh leva les yeux vers lui, une expression innocente dans le regard.

  -Ils l'auraient su à un moment ou un autre.

  -Evidemment ! mais on aurait pu préparer le terrain, faire quelque chose pour désamorcer la bombe.

  -Les connaissant ça n'aurait rien changé. Et crois-moi, j'ai bien fait de lâcher ça alors qu'il n'y a que Mailla avec nous. Entre nous je préfère avoir Elian au téléphone.

  -Eh ! s'écria le concerné.

  -Moh, tu sais qu'on t'aime ! lui répondit Mailla, sans pour autant démentir les deux autres.

  La discussion continua pendant plusieurs minutes, se diversifiant au fur et à mesure. Au final ce fut Mailla qui raccrocha, sans même laisser Elian finir sa phrase. Apparemment elle venait de se souvenir de la raison de sa présence. Et comme si les vingt dernières minutes n'avaient jamais existé, repris là où ils s'étaient arrêtés.

  Elle remarqua un certain désarroi dans les yeux de Gabriell et eu le culot de le rappeler à l'ordre, pourtant bien consciente que c'était elle qui avait interrompu leurs devoirs. Néanmoins ils avaient perdu assez de temps pour ne pas en perdre davantage en réprimandes futiles. Ivanh retourna dans ses notes et Mailla et Gabriell reprirent là où ils s'étaient arrêtés.

  Le travail fut laborieux, Mailla apprenait vite et s'intéressait véritablement à l'italien mais elle était toujours novice en la matière. Plusieurs fois ils furent obligés de s'aider de l'informatique. Pour autant ils réussirent à achever leur travail au bout de quelques dizaines de minutes.

  Pas peu fiers de leurs aptitudes, ils se permirent une petite danse de la joie sous le regard amusé d'Ivanh, qui les regardait s'extasier pour une simple feuille de traduction. Ce dernier devait trouver ça amusant de voir deux jeunes adultes se donner autant de mal pour un simple texte.

  Après cette explosion de sentiments, la jeune femme fut forcée de partir, commandée par son père de rentrer pour l'aider à la préparation du diner.

  Son départ amena le silence dans l'appartement. Ivanh était encore et toujours plongé dans ses révisions de langues. Ces épreuves tombaient en premières cette année et il avait vraiment besoin de bonnes notes dans cette option. Même si grâce à ses études de médecines il avait déjà une longueur d'avance par rapports aux autres étudiants.

  Gabriell quant à lui avait terminé ses devoirs pour la soirée. Ils étaient vendredi et il aurait tout le week-end pour réviser. Pour l'instant il voulait juste profiter de la présence d'Ivanh à ses côtés. Cela voulait dire se contenter de s'allonger et poser sa tête sur les genoux de son compagnon et le regarder froncer les sourcils quand il rencontrait une difficulté dans une de ses leçons.

  Mais ça ne le dérangeait pas de ne rien faire à part ça. C'était reposant et agréable. Il pouvait s'endormir s'il le souhaitait, mais il savait qu'il passerait son temps à le regarder, au risque de le déranger.

  S'il y avait bien une chose dont Ivanh n'arrivait pas à se faire c'était le fait d'être dévisagé. Encore plus quand il était concentré. Néanmoins quand c'était Gabriell qui le fixait, la plupart du temps il se contentait de sourire sans le regarder. Il ne dirait pas que son regard l'indifférait, parfois Gabriell sentait même que c'était tout le contraire. Mais il ne le gênait pas. C'était un de ses privilèges auxquels il ne renoncerait pas.

  Ils restèrent là pendant de longues minutes, Ivanh avait allumé une lampe qui éclairait leur visage faiblement. Soudain, alors que Gabriell s'endormait presque, son compagnon baissa la tête pour le regarder.

  -Pourquoi tu ne le leur as pas dit ?

Gabriell inspira profondément, il savait que ce sujet tomberait sur la table à un moment donné ou un autre.

  -Car c'est trop tard. A l'époque j'étais trop honteux de ne pas m'être protégé en faisant un cunni à une meuf car on avait pas de capote. Ça leur apporterait quoi d'apprendre qu'après qu'elle se soit barrée je me suis branlé en pensant à mon collègue de job d'été ?

  -Pour l'instant je ne sais pas quoi en penser, mais si le teste revient négatif sache que je serais très heureux que vous n'ayez pas eu de capote ce jour-là.

  -Avoue t'es fier d'avoir été mon premier en tout point de vue.

Ivanh afficha une mine faussement outrée.

  -Je suis surtout très heureux que vous ne l'ayez pas fait SANS capote.

  -Quel égo...

Ivanh le fit se relever pour le placer sur ses genoux.

  -Et pour fêter la demi-intelligence de ton toi d'il y a deux ans que dirais-tu de coucher ensemble une dernière fois avec une capote.

  -Pfff... comme si on allait tenir jusqu'à la semaine prochaine.

  Ivanh sourit contre ses lèvres avant d'éteindre la lampe.

ᾡᾡᾡ

  Une fois de plus ils se retrouvèrent à la bibliothèque devant des livres et des cahiers de cours ainsi que de leurs ordinateurs. Les yeux de Gabriell brûlaient à force de faire face à des écrans et les frotter toutes les minutes n'arrangeait rien. Comme d'habitude Ivanh s'était assis en face de lui et au vu de ses yeux rouges, il n'en menait pas large non plus.

  Comparé aux fois précédentes, la bibliothèque était bien plus remplie. Sans doute dû aux températures plus clémentes et à l'approche des examens. Gabriell n'oubliait pas que c'était ici qu'Ivanh et lui s'était embrassés pour la première fois. Mais aujourd'hui ils avaient d'autres chats à fouetter.

  Bien trop concentré par ses cours de littérature, le plus jeune ne faisait plus attention aux personnes environnantes qui allaient et venaient autour de lui. Au contraire, pour une fois le bruit lui faisait du bien. Il ne l'embrouillait pas mais servait plutôt de substitue à la musique qu'il ne pouvait écouter ici. Lui qui n'arrivait pas à travailler dans le silence avait oublié son casque. Mais, même si la bibliothèque restait un endroit calme, elle laissait échapper des ricanements ici et là. Des livres qu'on rangeait et prenait à tour de rôle, le parquet en bois qui grinçait et les chaises qui raclaient le sol.

  Tous ces sons lui rappelaient des souvenirs de lycée. Même dans des salles de classes à l'apparence calme, il y avait toujours des bruits de fond qui faisaient que le silence n'était jamais de mise. Le pire, il s'en souvenait, venait des cours de sciences. Sur les grandes tables blanches, avec leurs longues chaises du siècle dernier rouillées et mal réglées. Les heures de cours lui paraissaient interminables quand dès qu'un élève bougeait et que les chaises grinçaient sans interruptions.

  -T'en es à où ?

  Gabriell leva les yeux pour croiser le regard interrogateur d'Ivanh. Ils révisaient tous les deux les mêmes cours et s'il lui demandait ça c'était qu'il se retrouvait bloqué quelque part.

  -La partie trois. Pourquoi ?

  -Je ne comprends pas la seconde notion. Les bases étymologiques ne sont pas les mêmes et ne veulent pas dire la même chose mais sont toutes les deux employés pour désigner le mot « liberté ».

  -Pour moi, « libertas » c'est une faculté de l'homme à se comporter comme un être libre. C'est l'état de nature on va dire. Alors que « liber » c'est « juste » un mot pour désigner un être ou une personne qui ne jouie d'aucune contrainte. Mon professeur de philosophie en terminale m'avait expliqué ça. Si je m'en souviens bien.

  -Hmm...

  -J'ai pas bien expliqué ?

  -Hein ? Si, si. J'ai compris. Juste je ne comprends pas pourquoi utiliser « liber » alors qu'on parle bien de la notion d'état de nature dans le cours. Autant aller droit au but non ?

  -Aaaah- Ivanh... Il faut que tu comprennes que dans la littérature, surtout dans les langues anciennes on tourne SYSTEMATIQUEMENT autour du pot. C'est le but.

  Ivanh ricana, c'était une bonne manière de présenter les choses. Ce dernier retourna à ses cours mais le plus jeune, maintenant déconcentré, n'y parvint pas. C'est ce moment que choisirent Alex et Clément pour arriver. Gabriell les vit monter les escaliers et croisa leurs regards. Alex lui fit un signe de la main et s'approcha de leur table.

  -Vous aussi vous commencez à réviser.

  -Quand il faut, il faut...

  -Allez Gabriell, courage !

Il soupira avant de répondre.

  -Je déteste réviser. C'est comme un répulsif.

  -Comme moi pour Alex avant. Il est pas beau le monde ? ajouta Clément.

  -Toi tu es un répulsif pour tout le monde, c'est différent, répondit Alex.

  -AhAhAh ! Tordant. Tu ne disais pas la même chose cette nuit.

  -La ferme...

  Gabriell pouffa face aux chamailleries du couple. Ils avaient une façon bien à eux de se montrer leur amour, façon qui lui échappait totalement. Dès le départ, quand il les avait rencontrés et qu'ils n'étaient alors encore que de simples amis, il avait senti une alchimie particulière entre eux. Ils avaient l'air de se détester mais en même temps ils semblaient être obligé de rester coller l'un à l'autre ? Même s'il fallait dire que Clément était le plus dépendant d'Alex.

  Il s'était raccroché à lui malgré ses multiples démonstrations de rejet. Et s'il ne l'avait pas forcé à sortir avec lui, il était resté à ses côtés jusqu'à ce qu'il l'aime. Même si présentement ça ne se voyait pas vraiment.

  Il détourna son regard et tomba sur le visage d'Ivanh qui arborait un rictus face à la scène de ménage que leurs deux amis donnaient en spectacle. C'était à chaque fois amusant de les voir interagir ensemble. Comme s'ils oubliaient qu'ils n'étaient pas seuls, à la manière de vieux couples qui se connaissaient depuis des décennies et qui n'en avaient plus rien à faire du regard des autres.

  Autour de leur petite table, des têtes se tournèrent dans leur direction, intriguées par les chuchotements, peu discrets, des deux autres. Gabriell reconnut des personnes qui connaissaient le couple et ceux pour qui il n'était que deux inconnus. Les premiers souriaient, d'une complice habitude, alors que les autres jetaient de simples regards dubitatifs.

  Il restait aussi une autre catégorie : celle des gens sérieux. Au vu de leurs regards il semblait évident qu'ils n'étaient pas là pour rire et qu'ils bien travailler pour leurs partiels. En paix. La plupart d'entre eux lançaient des coups d'œil agacés mais d'autres étaient bien décidés à aller en découdre avec les deux énergumènes.

  Gabriell tenta de secouer Alex pour attirer son attention, en vain. Faute de résultat il se tourna vers Ivanh pour essayer de lui faire comprendre la situation. Il jeta des regards autour d'eux quand un petit groupe de l'autre côté de l'escalier se leva pour commencer à avancer vers eux. Ils n'avaient pas l'air menaçant au premier abord, mais s'ils pouvaient éviter un esclandre au milieu d'une bibliothèque universitaire à cause d'un couple qui se sentait obligé de se taper dessus en permanence, ça arrangerait tout le monde.

  -Eh, vous eux ! fermez-là, chuchota Ivanh.

Alex et Clément se tournèrent vers lui, surpris.

  -Quoi ?

  -Vous demandez vraiment ? dit Gabriell.

  -Depuis tout à l'heure vous vous crêpez le chignon comme deux petits vieux. Vous dérangez tout le monde.

  Ils semblèrent enfin s'en rendre compte et Alex rougit, signe que lorsqu'ils se disputaient il oubliait le lieu où ils se trouvaient. Clément, lui, n'avait pas l'air de s'en soucier le moins du monde. Par simple fierté il jeta des regards menaçant à quiconque oserait venir les déranger. Expressément ceux qui viendraient voir d'un peu trop près d'Alex.

  Même en le connaissant et étant son ami, Gabriell n'aurait pas le courage de se frotter à lui. Le pire étant qu'Alexandre ne semblait même pas s'en rendre compte. Presque aveugle de l'attention que son petit-ami lui portait et il se demandait comment on pouvait l'être à ce point.

  Le calme revint dans la bibliothèque et tous ceux qu'ils avaient dérangé reprirent leurs activités. Avoir enfin leurs deux amis posés n'était pas une mince affaire et Ivanh et lui comptaient bien en profiter.

  Gabriell se déplaça pour s'asseoir à côté de lui et laisser les deux autres tranquille. C'était la raison qu'il voulait laisser croire mais en vérité les regards que les personnes autour d'eux avaient jeté sur eux l'avait mis à mal.

  Malgré le fait qu'il n'ait pas été à l'origine de ces regards appuyés, il n'avait pu s'empêcher d'éprouver de légers pincements à la poitrine. Pour éviter que ses symptômes ne se développent il s'était rapproché de son petit-ami. Être proche de lui le calmait et même s'il n'aimait pas se servir de lui comme « médicament » il voulait éviter d'être obligé de quitter la bibliothèque et d'aller se réfugier aux toilettes les plus proches jusqu'à ce qu'il se calme.

  Il s'assit du côté où Ivanh n'utilisait pas son bras pour pouvoir prendre sa main et entrelacé leurs doigts. Il les passa sous la table pour pouvoir les rapprocher de lui plus facilement.

  -Ça va ?

Malgré le nœud dans sa gorge il lui répondit sans faire trembler sa voix.

  -Pourquoi j'ai l'impression que tu ne fais que me poser la question ?

  -Peut-être parce que tu me fais souvent m'inquiéter.

  -Ça va. C'est qu'un peu là.

Ivanh embrassa sa tempe tendrement.

  -Tu me dis si ça ne va pas.

  -Oui. Si t'as du mal à écrire comme ça dis-le moi aussi, je te lâcherai.

  -Non, ça ira.

  -Okay. Tant mieux car je ne suis pas sûr que j'aurais pu le faire de toute façon, rit-il.

  Ivanh leva les yeux au ciel en soufflant avant de retourner à ses cours. Gabriell quant à lui laissa son regard vagabonder autour de lui. Il n'avait plus la tête à réviser et il était bien conscient que la semaine qui suivrait n'arrangerait rien. Depuis tout petit il avait une peur irrationnelle des aiguilles, surtout quand il s'agissait de prises de sang.

  Plus jeune il avait été obligé de suivre une batterie de test pour quelque chose dont il ne gardait aucun souvenir. Peut-être à cause de sa croissance rapide, il n'avait que sept ans à l'époque. Durant plusieurs jours il avait été hospitalisé avec des prises de sang régulières et un cathéter systématique au poignet.

  Depuis rien qu'imaginer qu'on lui fasse un vaccin ou des prélèvements de sang le renvoyait à cette époque où il se voyait vomir dans une barquette d'œufs. Puis il ne pouvait s'empêcher de penser aux résultats qu'ils auraient. Il s'inquiétait pour Ivanh.

  Bien qu'il soit en pleine forme, avec ce genre de maladie, tout était possible. Même s'il l'avait rassuré en lui disant que tout irait bien, qu'il s'était toujours protégé comme il le fallait, Gabriell ne cessait de penser à ce risque zéro qui n'existait pas. Inconsciemment il serra sa main un peu plus fort et s'en rendant compte il se tourna vers Ivanh.

  -Qu'est-ce qu'il y a ? commença à s'inquiéter Ivanh.

  -Je t'aime.

Toute trace d'inquiétude quitta les yeux d'Ivanh, qui sourit avec tendresse.

  -Moi aussi.

  -Tu vois ! On pourrait essayer d'être minon comme ça.

  Même si Clément semblait avoir chuchoté, de nouveau des têtes se tournèrent vers eux. Ivanh et Gabriell se tournèrent vers lui, surpris.

  -Clément, tais-toi... On en est incapable. Tu le sais.

  Alex avait à peine réagi, par habitude peut-être. Les deux furent surpris d'être interrompus de la sorte. Cela rappelait à Gabriell pour quelles raisons vulgariser ses sentiments en public restait compliqué pour lui. Les gestes physiques ne le dérangeaient pas, mais depuis adolescent il avait du mal à exprimer ses sentiments aux gens qu'il aimait.

  Au fond de lui il estimait que c'était quelque chose de personnel qui ne regardait que lui et la personne concernée. En plus il prenait un risque. Le risque de se faire voler ce moment où il se sentait capable de dire ce qu'il ressentait.

  Avec ses amis, cette peur diminuait mais il arrivait que parfois il se retrouve avec des personnes qui ne comprenaient pas ça, comme Clément. Ce n'était pas grave. C'était ça le risque après tout. Mais au fond de sa poitrine il ne pouvait s'empêcher de ressentir cette gêne que d'autres aient pu capturer ce moment entre lui et Ivanh.

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J'ai faillis oublier de poster aujourd'hui donc ce chapitre sort un peu (beaucoup ?) en retard.

On arrive doucement à la fin, encore 3/4 chapitres et ce sera la conclusion d'Avec deux L et un H. Mais pas de panique ! Plusieurs tomes (encore quatre) sont prévus avec les mêmes personnages de cet univers. Je vous en dis davantage bientôt !

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