Chapitre 11




Gabriell compta sur son téléphone les jours qu'il lui restait avant les vacances de Noël. A l'inverse de celles de la Toussaint lui et les autres étudiants auraient cette-fois le droit à deux semaines de vacances. Même si cela consistait plus en un cadeau empoisonné qu'à de véritables vacances. Les partiels auraient lieu quelques jours après les vacances scolaires. Il faudrait donc qu'il passe ses vacances à réviser au lieu de se reposer.

Néanmoins, 10 jours le séparaient désormais des grasses-matinées et des soirées apéros. Les Fêtes de fin d'année étaient ce qu'il préférait. D'autant plus que cela coïncidait étrangement avec l'anniversaire de Mailla. Il avait d'ailleurs toujours eu le présentiment qu'elle avait choisis cette période en particulier sans que jamais personne ne le croit.

Cette même fête d'anniversaire qu'elle ne cessait de leur rabâcher encore et encore à longueur de journée. Seul Simon ne pourrait pas être des leurs, mais pour calmer l'hystérie de la jeune femme, il avait promis de les appeler par Skype dès qu'il le pourrait, et se bourrer avec eux par distance.

Ce court délai rassurait Gabriell autant qu'il l'inquiétait. Il ne pouvait s'empêcher de penser au fait que plus les vacances approchaient plus les examens aussi. Les révisions qu'il avait commencé quelques jours plus tôt n'avaient pas duré et il avait de plus en plus de mal à être productif.

Certains cours étaient devenus flous et il ne parvenait même plus à en comprendre quelques-uns au point où il fut obligé de demander à Ivanh de lui envoyer les siens. Samedi il en avait parlé avec Caroline qui l'avait rassuré et conseillé.

Elle lui avait dit de se faire aider par un ami et de ne pas rester seul en révisant au risque de se déconcentrer. La seule ombre au tableau était qu'il n'avait personne qui pourrait convenir et remplir correctement cette tâche. Aucun de ses quatre amis ne suivaient son cursus et à part Simon et Manon, qui ne l'auraient pas déconcentré, ces derniers ne lui seraient d'aucune aide s'il venait à bloquer sur un cours.

Le seul qui pourrait remplir ce rôle était Ivanh, mais Gabriell n'avait pas le courage de le lui demander. Il ne connaissait pas son emploi du temps exact pour les jours à venir, ainsi que ce qu'il comptait faire de ses vacances.

Pourtant s'il ne lui demandait pas, il resterait coincé dans cette spirale de doute et de stress. Il avait bientôt cours de littérature avec Ivanh. Durant les trente minutes qui suivirent il tenta de trouver le courage de lui demander de l'aide.

Et s'il crut le trouver, toute sa confiance s'enfuit en constatant les cernes sous les yeux d'Ivanh. Il était visiblement exténué mais souriait tout de même, ce subterfuge aurait pu fonctionner s'il ne louchait pas sur l'épaule de Gabriell comme s'il était le meilleur oreiller du monde. Celui-ci s'approcha et prit appui sur le mur, juste à côté d'Ivanh.

-Révisions ?

-Révisions.

-Il reste encore du temps. Ralentis le rythme.

-Je ne peux pas m'empêcher de réviser plus que je ne le devrais, je sais pas pourquoi.

-Ralentis quand même.

-Merci de ton aide, ironisa l'ainé. Comment t'arrives à être aussi serein ?

-J'y pense pas tout simplement.

-T'as pas commencé à réviser ?

-Si, si, bien sûr, je m'en sors comme je peux.

Ivanh avait fermé les yeux et luttait contre le sommeil. La montre de Gabriell indiquait qu'il restait encore dix minutes avant l'arrivée de leur professeur, et il se retint de justesse de proposer à Ivanh qu'il prenne appui sur son épaule pour se reposer, s'il le souhaitait. « C'est bizarre comme proposition ». Il se contenta alors de veiller à ce que son ami ne s'écroule pas au sol dans son sommeil.

Comme ils étaient en TD à cette heure-ci, eux et les autres élèves se trouvaient dans un bâtiment annexe qui réunissait plusieurs salles plus petites que les amphithéâtres habituels pour que les étudiants puissent mieux se concentrer et que les voix résonnent moins que dans les grandes bâtisses.

Gabriell commença à s'inquiéter de la fatigue d'Ivanh, se demandant s'il serait capable de suivre la cadence rigoureuse qu'imposait les TD. De plus qu'aujourd'hui les groupes se modifiaient pour le nouveau devoir que leur professeure allait leurs distribuer. Et malgré le fait que les étudiants formaient eux-mêmes les groupes, il ne connaissait pas vraiment les personnes autres que ses, désormais, anciens camarades. De plus Ivanh était celui des deux qui était le plus à l'aise en société.

Comme prévu la professeure arriva dix minutes plus tard. Classeurs et pochettes sous le bras, elle s'empressa de les tendre à l'étudiant le plus proche d'elle, qui faillait renverser la totalité des paquets, pour sortir les clés de sa poche et ouvrir la porte de leur salle de classe.

Elle rentra en laissant toutes ses affaires au pauvre jeune homme qui ne savait qu'en faire et semblait avoir du mal à ne pas faire tomber la pile de cours par terre. Gabriell arriva à son secours et reçu un « merci » soulagé de la part du jeune homme qui n'oublia pas de fusiller du regard l'étudiant à côté de lui qui ricanait sans retenue depuis le début. Si les souvenirs de Gabriell étaient bons, ce dernier s'appelait Clément. Il n'essaya pas de penser à la raison pour laquelle il se souvenait de son prénom.

-Me regarde pas comme ça Alex ! C'est tordant.

-La ferme.

Les étudiants rentrèrent les uns derrière les autres alors que Gabriell tirait de sa main libre le bras de son ami qui sommeillait encore. Les dix premières minutes du cours consistèrent à la formation des nouveaux groupes et furent plus que bruyantes.

Il arrivait que dans ces moments-là il entende chaque bruit produit autour de lui. Au même moment. Au centuple. Et que cela crée dans ses oreilles une telle cacophonie que ses jambes tremblaient sans s'arrêter sous la table.

Devant lui étaient assis les deux étudiants qu'il avait rencontré précédemment. Le fameux Alex avait insisté pour qu'ils fassent équipe et ni Gabriell ni Ivanh n'avait la force, ni l'envie, de lui refuser sa requête. Le seul bémol à cet accord était également la présence de Clément qui semblait collé, tel un chewing-gum, à Alex.

Désormais Ivanh semblait pleinement réveillé et discutait vivement avec Clément à propos des documents qu'ils avaient sous les yeux, alors que les deux autres échangeaient plus calmement. Gabriell se sentait plus à l'aise durant les TD qu'en cours magistral. Il appréciait les deux mais son cerveau avait la fâcheuse manie de lui faire se déconcentrer.

Lorsque cela arrivait il ne pouvait s'empêcher de faire rouler un stylo entre ses doigts, sans plus écouter le cours, se faire des films dans sa tête à propos de tout et n'importe quoi et d'autres choses encore plus absurdes qui le déconnectaient à coût sûr de ce que le prof disait. A l'inverse, les TD lui permettaient de rester focaliser sur la tâche demandée.

Contre toute attente les quatre jeunes hommes furent appliqués dans leur travail et rendirent leur travail en avance. Si Gabriell n'appréciait pas Clément au premier abord, il devait avouer qu'il était plus sérieux qu'il ne l'avait pensé en le rencontrant.

Dehors le soleil battait son plein et même s'ils étaient encore en décembre, certaines personnes avaient fait le choix de retirer anoraks et pulls pour profiter pleinement de ces rayons lumineux apaisants.

Après un dernier signe de la main, le petit groupe se sépara. Alex et Clément d'un côté pendant que les deux autres les regardèrent s'en aller sans un mot. Ils semblèrent se taquiner et Clément tenta de passer son bras autour de la taille de l'autre qui le lui agrippa avant qu'il ne fasse quoi que ce soit, tout en le fusillant du regard.

-Je te paris ce que tu veux qu'ils sortent ensemble, lança Ivanh sans prévenir.

-Tu penses ?

-Bien sûr ! Regarde comme ils se chamaillent. Un vrai petit couple.

-Bof je ne pense pas. Pas pour l'instant du moins.

-Aveugle... Tu es aveugle.

Gabriell rit de bon cœur face à la remarque de son ami qui lui rappelait qu'il avait toujours été celui du groupe qui ne voyait aucuns signaux qu'on lui envoyait.

-En attendant je ne suis pas celui qui ne voit aucune des allusions de mon ami pour qu'on se mette ensemble.

-Pardon... déglutit Ivanh.

-Bah oui ! Je suis d'accord avec toi y'a de gros, gros signaux entre les deux, mais franchement Alex n'en voit aucuns. Tu ne trouves pas ?

-Ah si, si. Je me disais aussi...

-Quoi ?

Ivanh secoua la tête pour lui signifier d'oublier ce qu'il venait de dire puis l'incita à le suivre pour qu'ils aillent se poser sur une table en plein soleil. Histoire qu'ils puissent se réchauffer sous les rayons lumineux rassurants.

Affalé sur le banc de la table en pierre, Gabriell profitait, les yeux fermés, des rayons du soleil qui frappaient son visage. Ivanh était à côté de lui, allongé en train de lire quelque chose sur son téléphone, visiblement concentré. Il lisait sans doute une quelconque revue d'un journal pour, comme il l'avait déjà dit, s'imprégner de tout ce qui pourrait l'aider à mieux assimiler son futur métier.

Le silence qui s'était installé ne le gênait pas, il pouvait même aller jusqu'à dire qu'il se sentait plus à l'aise dans le silence qu'autre part. D'autant plus qu'à l'heure actuelle parler était la dernière chose qu'il souhaitait faire. « On est pas de grands parleurs nous deux j'ai l'impression » se dit-il.

Il était loin d'avoir fini sa journée de cours et rien qu'à cette pensée il soupira par dépit. Si son emploi du temps restait inchangé le second semestre, il se saurait dans l'incapacité de suivre ce rythme. C'était pour cette raison qu'il lança une prière au ciel pour essayer de remédier à cette éventualité.

Gabriell repartit vers sa salle de cours en laissant Ivanh derrière lui pour deux longues heures d'introduction à l'histoire ancienne en cours magistrale. Le professeur étant toujours en avance l'amphithéâtre était déjà ouvert aux élèves et il put s'installer aux premiers rangs.

Ce ne fut que quand il s'assit qu'il se rendit compte qu'il avait oublié de demander à son ami de l'aide.

ᾡᾡᾡ

De retour chez lui Gabriell ne prit même pas le temps de s'arrêter pour manger qu'il alla directement s'installer derrière son bureau pour ouvrir les pages de ses cours et recommencer à réviser. Sa mère vint toquer une fois à sa porte avant d'être forcée de rebrousser chemin sous les complaintes de son fils qui souhaitait travailler dans le plus grand calme sans être déconcentré à longueur de temps.

Gabriell travailla jusqu'à tard dans la nuit, malgré le fait que son réveil soit programmé à huit heure le lendemain et ce ne fut qu'à trois heure et demie qu'il reposa enfin sa tête contre l'oreiller.

Exténué.

Le réveil quatre heures plus tard fut compliqué à exécuter mais en se rappelant qu'il devait passer chez Mailla la récupérer Gabriell s'obligea à se lever du lit pour se préparer.

Gabriell ne s'embêta pas à se préparer un petit-déjeuner. Cela faisait des années qu'il en avait pris l'habitude, depuis que des nausées étaient apparues le matin à la simple imagination de nourriture. Pour autant il emballa un bout de brioche dans du papier aluminium avec précaution. Manon avait appris quelques mois auparavant cette fâcheuse habitude et depuis elle l'obligeait à, au moins, faire ça.

Désormais la première chose qu'elle lui demandait le matin était s'il avait bien ramené quelque chose à grignoter dans la matinée si son ami n'avait pas mangé en se levant. Systématiquement. Jour après jour.

Son sac était déjà fait et il n'eut plus qu'à s'habiller et se brosser les dents avant de se rendre en direction de l'appartement des parents de Mailla. Cette dernière habitait à quelques pâtés de maison, raison pour laquelle ils n'allaient ensemble en cours qu'à de rares occasions. Aujourd'hui était une de celles-là. Son amie l'attendait déjà devant chez elle, la jeune femme était accoudée au muret de pierre qui longeait la rue, absorbée par son téléphone.

-Hey !

Mailla leva les yeux en souriant.

-Lut'. Comment va ?

-Bien, toi ?

-Super méga bien !

Le métro était une fois de plus bondé. L'heure de pointe ne faisait que commencée, et ils furent collés à des inconnus. L'odeur d'eau de cologne atteignit ses narines avant que Gabriell ne s'en rende compte. Le parfum qu'apparemment tous les hommes de cette ligne de métro utilisaient emplissait le wagon, et il était à la limite de le faire suffoquer. Celui de son père était différent, moins fort, plus tolérable.

A côté de lui Mailla était serrée contre lui, son dos collé à son torse. Devant elle un homme se rapprochait imperceptiblement de la jeune femme, son visage était tourné vers elle et ses yeux la reluquaient sans aucune pudeur.

Son amie était en apparence trop absorbée par son téléphone pour pouvoir remarquer ce qu'il se passait, mais Gabriell la connaissait trop bien pour savoir qu'elle ne faisait que se protéger. En vain. L'homme vint véritablement la coller, et il sentit toutes les fibres du corps de Mailla se crisper contre son torse.

-Ca va je te dérange pas ?

L'homme leva les yeux vers Gabriell, visiblement surprit.

-Quoi ?

Gabriell agrippa la taille de son amie avec son seul bras de libre.

-Evite de te frotter aux filles dans le métro. Il n'est même pas 9h, laisse un peu de dignité au chien en rut qui te sert de queue.

-C'est bon, désolé, je savais pas qu'elle était à toi mec.

L'homme partit avant que Gabriell ne puisse répliquer quoi que ce soit. Mailla quant à elle se contenta de garder le silence alors qu'autour d'eux certains visages s'étaient retournés dans leur direction. Lui, il était trop énervé pour s'en rendre compte, bien que d'ordinaire la situation dans laquelle il se trouvait lui aurait fait perdre tous ses moyens.

Ils arrivèrent bientôt à leur station et descendirent sans se faire prier. L'ambiance qui se dégageait du métro devenait malsaine et aucun de deux ne pouvaient la supporter plus longtemps. Leur bus de correspondance était déjà garé lorsqu'il sortit à l'extérieur et ils y entrèrent avec un soupir de soulagement.

Mailla força le passage vers une place à la fenêtre sans demander l'avis de qui que ce soit. Forcé, Gabriell s'assit du côté de l'allée, le bus était quasiment vide et une petite musique se faisait entendre, émanant d'une enceinte portative à l'avant du bus.

Les nuages donnaient une teinture grise au ciel, sans vie il exprimait une routine monotone, plaisir de décembre. Selon la météo il ne devrait pas pleuvoir mais pour ces choses-là Gabriell préférait croire les signes qu'il voyait de ses propres yeux. Une odeur d'orage emplissait l'atmosphère, comme un avertissement funeste. Une prévention de la nature à leurs pauvres oreilles, trop immatures pour la saisir.

Cette année la neige n'avait pas encore pointé le bout de son nez, et seule la pluie et le tonnerre avaient fait leur apparition depuis le mois de novembre, sans presque aucune interruption. Le petit groupe devait ainsi constamment remettre à plus tard leur sortie sous la neige à cause de fausse alerte sur les possibles futures prévisions de chutes. « Une nouvelle journée sous les nuages donc... ». Le rayon de soleil de la veille était donc effectivement un fait rare ces temps-ci.

Arrivé à l'université les deux amis se séparèrent pour se rendre vers leur bâtiment respectif. Son option d'histoire voulait dire être obligé de suivre le cours du développement de l'Europe au cours des derniers siècles.

Gabriell aurait pu choisir l'anglais comme discipline mineure, comme Ivanh l'avait fait. Cette dernière était bien moins remplie que celle d'Histoire, mais n'ayant jamais brillé dans cette matière, son choix s'était tout de suite porté sur sa décision finale. C'est ainsi que son emploi du temps comportait beaucoup plus d'heure de cours que son ami.

La seule autre à avoir autant, si ce n'était plus, de cours que lui, était Mailla. En plus de son cursus principal et de sa mineure de Science du langage, elle avait demandé une dérogation pour pouvoir suivre des cours de Langues Vivantes d'Italien.

Il avait un peu de peine pour elle mais elle semblait s'en sortir. Il ne saurait dire comment, mais elle y arrivait. Et même si quelqu'un l'avait empêché de suivre tous ces cours, ou rien que de l'en dissuader, cette personne aurait été dans l'obligation d'abdiquer face à la ténacité de la jeune femme.

Depuis des années elle espérait enfin connaitre plus en profondeur la langue maternelle de sa grand-mère de cœur et rien ni personne ne pourrait plus l'en empêcher.

A cette heure-ci le campus était pratiquement vide, d'autant plus que le mauvais temps forçait les étudiants à se réfugier dans la bibliothèque au lieu de rester dehors. Le bâtiment où se déroulait son cours se situait à l'autre bout de l'université et Gabriell prit plus de dix minutes à s'y rendre, sous la pluie qui commençait à tomber, et sans parapluie ni capuche.

Ses cheveux s'égouttaient déjà lorsqu'il arriva à destination et l'eau glissait sous son pull ce qui lui provoqua des tremblements incontrôlés.

Il était encore seul devant la salle et il s'assit par terre pour prendre appui sur ses jambes afin de poursuivre l'écriture de son roman. C'était un devoir qui faisait suite à un atelier d'écriture auquel il avait participé la semaine précédente. Son professeur du mardi soir n'était pas encore au courant de son projet, Gabriell n'avait pas eu le courage de lui en parler mais il espérait le faire dans les prochaines semaines.

Sans s'en rendre compte le couloir se remplit petit à petit et bientôt la sonnerie retentie dans tout le bâtiment. Leur professeur d'histoire arriva au même instant et invita ses élèves à entrer dans la petite salle de TD. Les groupes se formèrent rapidement et Gabriell retrouva les personnes avec qui il partageait ses cours d'histoire le jeudi.

Les deux heures et demie passèrent sans embuches et Gabriell pu partir retrouver ses amis la tête vidée et sereine. La pluie avait cessé de tomber depuis une petite heure déjà mais par sûreté le groupe d'amis avait décidé de déjeuner à l'intérieur

Lorsque Gabriell rentra dans le bâtiment principal il se rendit compte qu'ils n'avaient pas été les seuls à avoir cette idée. Ses amis l'attendaient à une table improvisée par de précédents étudiants et discutaient joyeusement autour de paquets de chips et de plats préparés par la cafétéria de la faculté.

Arrivé à leur hauteur, Mailla lui laissa de l'espace à côté d'elle et tendit la main sans le regarder. Il glissa alors deux billets de dix dans sa paume pour rembourser son amie.

-Alors comment c'est passé votre matinée, dit-il en s'asseyant.

-Bof ? j'avais un CM donc légèrement barbant, répondit Mailla.

-On vient de commencer, indiqua Simon en se pointant du doigt avec Manon.

-Cours des arts et de la littérature de l'Europe, dit Ivanh à son tour.

C'est à ce moment-là qu'Elian arriva enfin et qu'il commença à monopoliser la conversation pour raconter toutes les péripéties qui lui étaient arrivé dans les transports pour atteindre l'université.

-Déjà, avant de sortir de chez moi il faisait beau, donc moi évidemment je me suis dis « Okay good, tout est okay ». Je prends pas de parapluie, arrivé au métro il commence à pleuvoir comme jamais mais encore une fois je me dis « aller trente minutes de trajet ça passera entre temps ». Ensuite le métro arrive en retard à cause des grèves à la con donc je poireaute bien dix minutes en grelottant comme un chien mouillé. Enfin il arrive et après trois stations, sur quinze. Quinze ! Il s'arrête car l'orage a perturbé les rails des quelques mètres où la ligne passe à l'extérieur donc vingt minutes de plus à attendre. On repart puis dix stations encore un problème à cause d'une des rames qui a pris beaucoup de retard donc plusieurs wagons à l'arrêt. J'étais si près pourtant, si près ! En tout au lieu de trente minutes de trajet en métro j'ai pris une heure. A quel moment ?! Evidemment je sors, il pleut toujours et deux fois plus fort et le bus arrive que dans quinze minutes donc bah j'attends dans le froid et la pluie et en plus de ça il prend du retard. Je vous jure c'est pas ma journée.

-Mhooo, mon p'tit trésor. Il t'en arrive de ces malheurs dis donc, rit Mailla.

Elian lui jeta un regard moqueur et ironique alors qu'elle lui offrit son manteau comme couverture. Il grelottait entre ses bras avec le mug de chocolat chaud qu'était allée chercher Manon entre temps. Un soupir de bien-être s'échappa de ses lèvres lorsqu'il but le breuvage marron puis il posa sa tête contre l'épaule de Mailla.

Celle-ci ne protesta pas en sentant des gouttes d'eau lui tomber dans le cou et se contenta de le presser un peu plus dans ses bras. Gabriell les regardait se comporter comme frère et sœur tous les deux avec un sourire amusé. « Ces deux-là se sont bien trouvés ».

Comme il avait légué sa place à Elian, le jeune homme se retrouva à côté d'Ivanh. Il hésitait encore à lui demander de l'aide et il ne savait pas si c'était le bon moment pour le faire. De toute façon il aurait encore jusqu'à la fin de la journée pour lui poser la question.

S'il ne se trompait pas leurs prochaines heures de cours étaient communes et il aurait peut-être alors l'occasion de lui poser la question. Bien que le courage lui manquât.

L'heure fatidique arriva et les deux amis quittèrent les autres à contre-cœur pour se rendre ensemble à leur cours de langue française. Cette fois-ci ils n'étaient pas loin et ils furent rapidement sur place, tout juste à l'heure pour le début du cours. La majorité des places étant déjà prises, les deux jeunes hommes se placèrent à regret au fond de l'amphithéâtre où le son résonnait mal et où ils avaient le plus de mal à suivre correctement le cours.

Certains retardataires arrivèrent avant que le professeur ne puisse fermer la porte et l'un d'entre eux percuta violemment cette dernière, ce qui provoqua le rire d'Ivanh.

-Quoi ?

-Oh, rien, juste que ça me rappelle toi quand tu t'es fracassé contre la porte au tout début d'année.

-Déjà je m'étais à peine cogné et de deux tu ne voudrais pas oublier ça ?

-Jamais.

C'était le moment où jamais. Ils avaient engagé une conversation. Il pouvait le faire.

-Sinon... J'aurais quelque chose à te demander...

-Ouais qu'est-ce qu'il y a ?

Gabriell s'apprêtait à lui répondre lorsque le professeur prit la parole pour introduire le sujet de son cours du jour. Il indiqua qu'il lui dirait à la fin des cours, dans quelques heures, lorsqu'ils rentreraient ensemble. Ivanh hocha la tête et sembla ne plus y penser, ce qui permit à Gabriell de décompresser. Ne serait-ce qu'un peu.

Gabriell attendit plusieurs minutes devant le portail avant d'apercevoir Ivanh marchant à vive-allure dans sa direction. Les quatre autres étaient déjà partis depuis quelques temps déjà ce qui fit que les deux amis se retrouvèrent seuls sur le chemin du retour.

Au début le plus jeune cru presque que son ainé avait oublié ce qu'il lui avait dit quatre heures auparavant. Ils parlaient de tout et de rien sans qu'aucun ne se décide vraiment à lancer le sujet, jusqu'au moment où Ivanh prit la parole, la curiosité prenant le dessus.

-Donc, tu voulais me parler de quoi tout à l'heure ?

-... En fait en ce moment j'ai un peu de mal à me concentrer et je ne savais pas pourquoi jusqu'à ce que je me rende compte que c'était à cause du fait que je révisais seul et que je ne comprenais pas vraiment les cours. Or, à part toi, personne ne convient vu qu'on suit le même cursus. Donc je demandais si tu voulais bien accepter de m'aider pour réviser les partiels. Si tu le veux bien.

-Oh ce nest que ça ? Bien sûr aucuns soucis, durant les vacances je ne fais rien donc je t'aiderais volontiers.

-Tu me sauves sérieux ! Ah ! Aussi Mailla fête son anniversaire durant les vac', elle t'a prévenu ?

-Ouais j'y serais normalement.

Les discussions reprirent et ils mirent en place les heures de libres qu'ils auraient jusqu'au vacances et durant celles-ci ainsi que les horaires de la bibliothèque de l'université, qui restait ouverte durant les vacances scolaires.

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