Chapitre XXII

Salut vous tous, si vous trouviez que tout allé trop bien, et bien ce temps-là est révolu.

Ne le haÏssez pas trop, je pense qu'il se déteste assez tout seul.

Ne me détestez pas trop non plus, je vous jure qu'après la pluie viendra certainement le beau temps.

Dites-vous que c'est pour leur bien.


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Marc

"Tout acte a des conséquences. Pas seulement les choses qu'on fait, mais aussi celles qu'on ne fait pas"

Élise BROACH


— Pas de problème, je serais là.

— Tu prends les petites avec toi, j'espère.

— Bien sûr, c'est le seul moment où elles voient leur grand-mère.

— Tu crois que tu arriveras à te tenir tranquille ou ça va encore être un carnage ?

— Cécile, tu m'emmerdes. Ok ! Si vous ne me faites pas chier, il n'y a pas de raison que ça parte en couilles.

— As-tu besoin d'être aussi grossier ? Je ne sais pas qui tu fréquentes en ce moment, mais elle n'exerce pas une bonne influence sur toi.

Oh putain, elle sait pour Bruna, je vais y avoir droit demain, sans aucun doute.

— Excusez-moi madame l'Avocate. Bon c'est tout ce que tu as à dire ? Je n'ai pas que ça à faire.

— Tiens-toi à carreaux demain surtout.

Elle me raccroche au nez, putain ma sœur est une véritable pétasse. Je n'ai franchement pas envie de me farcir toute la famille, c'est vraiment parce que c'est l'anniversaire de ma mère et qu'elle veut voir les petites. Mais je sais d'avance comment va se terminer cette journée, dans les cris et les pleurs, puis j'aurai la paix pendant un an. Je pense plutôt qu'il faut que j'arrête de m'imposer ça, je peux très bien être avec ma mère sans me taper le reste de la famille Son.

— Y a un problème ? Tu as l'air énervé.

— Ce n'est rien, juste l'anniversaire de ma mère demain et je n'ai pas des masses envie d'y aller, ni d'y emmener les petites et en même temps, je ne veux pas lui faire de peine.

— Tu veux que je t'accompagne ?

Mais jamais de la vie, je ne lui ferai vivre ça. Ils vont la traiter comme de la merde, la rabaisser parce qu'elle n'a pas de travail bien défini, comme elle a des tatouages, des enfants ou encore que l'on n'est pas mariés. Je le sais, Julie l'a vécu pendant onze longues années et en bon lâche que je suis, je ne me suis jamais dressé contre mon paternel. C'est ce qu'on appelle être conditionné. Et Bruna, avec son franc-parler, peut faire dégénérer la situation en dix secondes chronos.

— Même pas en rêve, je t'imposerai ça, je n'ai pas envie que tu te barres en courant.

— Ne dis pas n'importe quoi, je suis là aussi pour les mauvais moments pas seulement quand tout va bien. Si tu as besoin que je vienne et bien, c'est ce que je ferais.

— Non, c'est bon. Je mange là-bas avec les petites et je rentre le plus vite possible.

— C'est comme tu veux. C'est toujours pareil de toute façon, me répond-elle en jetant sa tasse dans l'évier.

Elle sort de la pièce énervée. Elle a l'air vexée. Qu'est-ce que j'ai dit encore ? C'est pour elle que je fais ça.

Je la suis pour lui expliquer, elle s'est habillée à une vitesse folle et est en train de finir de se préparer dans la salle de bain.

— Ils vont te mettre la misère. Mon père et ma sœur, ce sont deux saloperies. Elle est tellement tarée qu'elle a sûrement déjà fait trois cents recherches à ton sujet. Ils vont tout critiquer, ton boulot, tes cheveux, tes tatouages, ta vie, tout quoi. Il n'est pas question que tu vives ça.

— C'est bon, je t'ai dit, il n'y a aucun problème. À quelle heure tu récupères les petites ?

— À 17 h et Julie vient les chercher dimanche en début d'après-midi.

— Ok, donc si je comprends bien, on ne se voit pas demain soir, merci de me prévenir.

Elle me passe devant, récupère son sac à main sur le canapé et se dirige vers la porte d'entrée. Pourquoi est-ce qu'elle part aussi tôt ? Son groupe de parole n'est qu'à 15 h.

— Pas de bisous, rien.

Elle opère un demi-tour pour m'accorder ce que je demande.

— Désolée, je n'ai pas envie d'être à la bourre.

Et elle se casse.

Elle se fout de ma gueule ? À la bourre de quoi ?

Il est 8 h.

Elle fait la tête, mais ce n'est pas ça que je trouve bizarre. Ce qui m'interpelle, c'est le fait qu'elle ne me dise pas pourquoi. Ce n'est pas son genre, elle dit toujours ce qu'elle pense et quand ça ne lui convient pas, elle ne se gêne pas pour me le faire savoir, ou me tuer dans sa tête. Et puis avec tous les non-dits des premiers temps, on a pris l'habitude de parler, on ne se laisse plus déborder par les incertitudes. Je ne comprends vraiment pas où est le problème.

Dans l'après-midi, elle m'envoie un message pour me dire de ne pas l'attendre, elle mange au restaurant avec sa copine et ne sait pas à quelle heure elle va rentrer. Il est plus qu'évident qu'elle m'évite et je fais le choix de faire comme si je ne comprenais pas.

Demain ça lui sera passé. De toute manière, elle sera obligée de me parler, je dois l'accompagner chez Aaron, mon tatoueur. Comme il ne prend plus de nouveau client qu'il ne connaît pas, je dois servir d'intermédiaire.

Le samedi, le rendez-vous étant prévu pour 18 h 30, j'arrive au restaurant de mon père à 18 h 15 pour ne prendre aucune réflexion, mais c'était se bercer d'illusions que de croire ça. Tout le monde est déjà là. Mon père discute avec son assemblée et ne me gratifie même pas d'un regard. Ma mère, quant à elle, m'accueille avec un sourire chaleureux et embrasse mes filles avec amour. Je n'ai pas le temps de profiter calmement d'elle que "Son King" débarque.

— Tu es en retard, comme d'habitude.

— Takeshi, on ne va pas commencer.

— Écoute Francesca, il pourrait fournir un effort au moins pour ton anniversaire.

— Bonjour à toi aussi papa, les filles, embrassez votre grand-père.

Il n'y a qu'avec elles qu'il témoigne d'un minimum de tendresse. Il les serre dans ses bras en embrassant leur tête et s'éloigne avec elles. Ma sœur le regarde faire, la rage brûlant dans ses yeux.

C'est ce que l'on appelle le retour de bâton, il n'agit absolument pas comme cela avec son fils, pourtant elle, elle a tout bien fait. De brillantes études qui ont fait d'elle une excellente avocate d'affaires pour un énorme groupe qui rachète de petites entreprises pour mieux les couler afin de faire d'énormes bénéfices, elle a épousé un Français né de parents japonais, elle a mis au monde un digne héritier mâle qui porte le prénom de notre géniteur, mais rien ni fait, il traite son fils de la manière dont il me traite, moi et accorde à mes filles la tendresse qu'il n'a jamais accordée à personne.

— Ce n'est rien figlio mio, tu connais ton père.

— Justement, je ne sais même pas pourquoi je continue de m'infliger tout ça, mama, il n'est pas obligé d'être là quand je viens te voir. On peut se donner rendez-vous ailleurs, sans lui et surtout sans Cécile.

— Ne dis pas ça, regarde-le, avec tes filles, il n'est pas si mauvais.

— Pourquoi tu le défends tout le temps ?

— C'est mon mari.

— Ça n'excuse pas tout.

Je suis dépité, ça fait vingt ans que l'on a cette conversation régulièrement et je ne comprends toujours pas pourquoi elle reste avec lui. J'en ai ma claque d'avoir la sensation de n'être qu'une erreur, un raté, il n'y a que quand je suis dans ma famille que je ressens ça.

J'ai un boulot stable et qui me rapporte pas mal d'argent, j'ai deux filles adorables et bien élevées, j'ai toujours été sérieux dans tout ce que j'entreprenais et je me rends compte que ce que je vis au sein de ma propre famille n'est pas normal. Au lieu d'être fier de moi, il faut toujours que l'on me rabaisse, que l'on me critique.

Quoi que je fasse, rien n'est jamais assez, rien n'est jamais bien. Combien d'années encore va-t-il me faire payer ses propres erreurs ? Il faut que je me libère de l'emprise qu'il exerce encore sur moi. Pour mon bien-être et ma sérénité, il me faut couper les ponts avec ce clan.

— Et sinon comment ça va mon fils ? Tu as quelque chose de changé. Tu es heureux au moins ?

— Je le suis mama, comme je ne l'ai jamais été.

Bellissima, e come si chiama ?

— Bruna

— Bruna ? Comme la Bruna dont tu étais amoureux au lycée ?

— Elle-même.

Ma mère savait, c'est une mère, elle comprenait que je n'allais pas bien. Entre mon père qui voulait absolument diriger ma vie et Bruna qui avait rencontré quelqu'un, j'étais extrêmement malheureux. Et comme elle ne me lâchait pas, j'avais fini par lui confier que j'aimais une fille avec qui je n'étais jamais sorti parce que j'avais raté ma chance en étant avec Émilie, qui était le choix de mon père.

— Ça fait longtemps que vous êtes ensemble ?

— Sept ou huit mois, je n'ai pas compté.

— Pourquoi tu ne l'as pas emmenée ?

— Je n'allais pas la jeter dans la fosse aux lions et puis elle n'a jamais rencontré les filles.

— Comment ça se fait ?

— Je ne sais pas, elles sont petites, je prends mon temps.

— Ça fait tellement longtemps que tu l'attends. Pourquoi en perdre encore plus ? Tu vas juste lui faire croire qu'elle ne compte pas. Corrige cet oubli mon fils, le cœur d'une femme est fragile, tu sais. Si tu le brises, ce sera difficile de recoller les morceaux.

Elle a raison et je viens de comprendre en une seule et simple phrase mon erreur, celle que je persiste à faire depuis le début de ma relation avec elle.

C'est pour ça que Bruna s'est vexée hier, elle doit penser que je la mets de côté, qu'elle n'a pas d'importance ou pire, que je n'envisage rien avec elle, je suis débile, tous ses doutes viennent de là. Mais pourquoi ne m'a-t-elle rien dit ? Il serait peut-être intelligent de lui envoyer un message, qu'elle comprenne que j'ai merdé.

Marc : Tu avais raison, tu aurais dû m'accompagner

On passe à table et bizarrement tout se déroule comme sur des roulettes, au moment du dessert, le patriarche donne l'autorisation aux enfants de se lever de table pour aller jouer plus loin et c'est à cet instant précis que les problèmes arrivent et que tout me retombe dessus.

— Alors Marc, toujours pas décidé à te trouver un vrai travail, quelque chose de plus prestigieux ?

— J'aime le travail que j'ai actuellement et contrairement à ce que tu penses Cécile, non seulement je gagne extrêmement bien ma vie, mais j'arrive à profiter pleinement de mon temps libre, ne sois pas jalouse sœurette.

— Ta sœur a raison, il y a quand même plus gratifiant que planter des fleurs.

— C'est sûr que couler des affaires que d'autres ont mis toute une vie à monter c'est plus honorable que de vivre du travail de ses mains.

— Bien évidemment, je préfère dire que je suis avocate plutôt que jardinier.

— Alors pour ta gouverne, je préfère le terme créateur de jardins si tu veux bien et il vaut mieux pour moi que je sois heureux comme je suis, qu'être aigrie et blasée comme toi.

— Ça pour être heureux, monsieur est heureux. Papa, tu savais que ton fils, ici présent, avait, encore, une nouvelle compagne ?

C'était obligé, à sa réflexion au téléphone, je savais qu'elle se serait encore servie de ses putains de limiers en carton, cette connasse est tout le temps sur mon dos ou en train de faire surveiller ma vie.

— Cécile, ferme-là.

— Ne parle pas comme ça à ta sœur. Qui est cette femme encore ?

— Elle s'appelle Bruna...

— Je parle à Cécile, si tu penses que je te fais confiance pour me dire la vérité, tu te mets le doigt dans l'œil. Je veux de vraies informations pas toutes les conneries que tu pourrais me raconter et avec les moyens qu'elle a, je me doute qu'elle ait dû se renseigner.

— Bien sûr que oui papa.

Elle sort un petit calepin de son sac, l'ouvre et tourne les pages jusqu'à trouver ce qu'elle cherche. J'ai l'impression d'être un criminel dans "Faites entrer l'accusé" ou d'avoir atterri dans une dimension parallèle. On nage en plein délire, mais personne ne semble étonné de ce qu'il se passe, comme si faire de moi la cible de la méchanceté de ma soi-disant famille était quelque chose de tout à fait anodin, comme s'il était habituel de transformer un repas de famille en véritable procès.

— Elle s'appelle Bruna Marti, elle a le même âge que Marc. Elle a été mariée vingt ans avec un agent immobilier reconnu dans la région, ils ont eu deux enfants, des jumeaux qui ont dix-huit ans. Elle travaille encore deux jours par semaine avec son ex-mari et cerise sur le gâteau, elle écrit des livres pornographiques.

Plus personne ne prononce un mot.

Mais ma sœur est malade. Quel est son problème ? Le but de sa vie est de me faire chier ce n'est pas possible. Pourquoi elle a pris autant de renseignements sur Bruna ? C'est quoi qui ne tourne pas rond chez elle ? Sa jalousie envers moi est en train de la rendre folle.

C'est exactement pour ça que je ne voulais pas qu'elle m'accompagne. Il me monte les nerfs, si j'osais, j'enverrais valser la table. Je sers les poings pour canaliser les émotions qui m'envahissent, car je sais que ce n'est pas fini.

— De mieux en mieux fils. Et celle-là, tu t'en débarrasses quand ?

— Jamais.

— Ce n'est pas une réponse acceptable.

— Pourtant, c'est la seule que tu auras. Je l'ai attendue pratiquement vingt-cinq ans, je ne vais pas la quitter parce que tu l'exiges. Je ne te demande rien, je vis ma vie comme je l'entends. Tu n'as jamais respecté aucune de mes compagnes et je n'ai jamais bronché sous couvert de tradition. Cette fois-ci, je ne me laisserai pas faire, si ça ne te convient pas, ce n'est pas mon problème. J'ai plus de quarante ans et j'ai encaissé plus que ce qu'il est raisonnable de supporter venant de vous, il me semble donc légitime d'aspirer à un minimum de bonheur. Et comme ce n'est pas auprès de vous que je le trouve, mais auprès d'elle, si tu venais à me demander de choisir, je te garantis que la réponse serait facile.

Il me vient la paire de couilles dont j'ai toujours eu besoin. J'aime Bruna, elle est toute ma vie, je ne me séparerai pas d'elle. Je vais la présenter à mes filles, à Marie, à ma Mère. Pour Julie ça va être compliqué, elle a tellement souffert indirectement à cause d'elle que je suis terrifié de devoir franchir cette étape. Dans tous les cas, il n'est plus acceptable qu'elle ne fasse pas partie de ma vie.

— Papa laisse-le, tu sais qu'il adore faire des gosses à des traînées.

Je frappe la table du plat de ma main si fort que la vaisselle tinte, tout le monde me regarde. C'est décidé, je vais tuer ma sœur, elle dépasse les bornes.

— Je t'interdis de la traiter de pute, tu ne la connais pas. Je t'interdis d'insulter les mères de mes filles. Je suis désolé mama, mais tout ce cinéma, ces faux repas de famille, c'est terminé pour moi, j'ai donné. Toi, tu n'es plus ma sœur et toi, tu n'es plus mon père, je ne veux plus jamais vous voir. Mama, je t'emmènerai les petites quand tu veux, papa aussi, t'as de la chance qu'elles t'aiment, mais plus aucun contact avec moi.

Mon père me regarde en silence pour la première fois de sa vie, mais je ne me démonte pas.

— Je suis désolé qu'à cause de moi, tu te sois senti obligé d'épouser maman, je suis désolé de porter un prénom que tu as toi-même choisi et de ne pas être aussi métissé que tu l'aurais voulu, je suis désolé de faire un métier que j'aime et pas celui que tu avais programmé pour moi et je suis tellement désolé pour moi, parce que je t'ai obéi et j'ai passé vingt-cinq ans de ma vie à attendre une femme dont j'étais fou amoureux, à être malheureux. Mais jamais, je ne m'excuserai d'avoir eu mes filles même si je n'aimais pas comme il faut leurs mères et je te préviens, si jamais tu ne les traites pas comme elles le méritent, si tu n'es pas un bon grand-père, tu ne les verras plus jamais. C'est bien compris ?

Il me fait oui de la tête, mais ne dit toujours pas un mot.

— Cécile, tu n'existes plus pour moi, n'approche ni mes filles, ni leur mère, ni moi, ne t'avise plus de rechercher quoi que ce soit sur Bruna ou son entourage. Reste dans ta vie de merde.

— Tout ça pour une pute ?

— Ferme ta gueule bordel, hurlé-je, elle, au moins, elle ne se tape pas ses assistants pendant que son mari joue au parfait homme au foyer.

Ça a le mérite de lui faire fermer sa gueule, j'embrasse ma mère et prends mes filles par la main, on rentre chez nous. Dans la voiture, j'envoie un message à Bruna.

Marc : Descends chez moi demain vers les 12 h-13 h, je voudrais te présenter mes filles, il y a longtemps que ça aurait dû être fait

— T'as une amoureuse papa ?

— Oui mon cœur.

— On aimerait trop la voir.

Bruna : J'ai trop hâte.

Le problème était bien là. Demain, il sera réglé.


Le lendemain matin, j'ai encore la tête à mon brouillé familial quand Julie débarque à 11 h 40. Je lui ouvre la porte alors que les filles sont encore en pyjama devant la télévision.

— Mais, t'es déjà là ?

— Ouais, sois gentil, fais-moi un café.

— Pourquoi t'es venue si tôt ?

— Je savais que la soirée aurait été une catastrophe, je voulais savoir comment tu avais géré.

Je lui donne sa tasse et m'assois sur une chaise.

— Merci. Les filles, allez-vous habiller, Liiam vous attends à la maison. Alors, t'as géré ou pas ?

— Mieux qu'il y a quelques années. J'ai mis les choses au clair, je n'irai plus jamais. Ils auront le droit de voir les petites, mais moi, c'est terminé. Et Cécile est interdite de tous contacts avec qui que ce soit qui fait partie de ma vie.

— Eh bien bravo, il était temps. Et à quoi devons-nous ce changement radical ?

— On en parlera quand on sera que tous les deux si tu veux bien.

— Pas de soucis.

— On essaie de se capter dans la semaine, j'aimerais en parler rapidement.

— Ok passe demain, c'est Marie qui gère la sortie des classes et les devoirs.

— Parfait.

— Allez les filles, c'est déjà midi, on récupère votre frère et Émine vous emmène au McDo.

Une fois la marmaille prête, elles s'en vont. Sur le pas de la porte, j'embrasse mes filles et serre Julie dans mes bras au moment où les portes de l'ascenseur s'ouvrent sur Bruna.

Merde avec tout ça, j'avais zappé.

Elle est tout sourire, les yeux pétillants, je vois qu'elle reconnait Julie, en même temps, elle n'a pas changé, les filles la regardent, émerveillées, tant elle est rayonnante ce matin. Elle s'approche au plus près, se penche pour faire la bise à mon ex-femme.

— Salut, on s'est déjà vu il y a longtemps, je suis Bruna, je suis...

— C'est ma voisine.

Je sais à l'instant même où ces mots franchissent ma bouche que je viens de faire la plus grosse connerie de toute ma vie. Je n'ai pas su gérer, je n'avais pas encore eu le temps de lui parler d'elle et j'ai paniqué.

Elle se fige instantanément, le soleil dans ses yeux s'éteint, annihilé par la nuit et son sourire laisse place à la douleur. Je voudrais ravaler mes paroles, remonter le temps, c'est moi qui lui ai demandé de venir et je lui inflige cet affront.

Je peux voir les rouages dans son cerveau s'activer, le mécanisme de défense est enclenché, elle réfléchit au moyen de faire bonne figure. Elle fixe mon regard, le sien est vide d'émotions, ses yeux ont une couleur qui m'était, jusqu'à aujourd'hui, inconnue. Elle sort ses clefs et les manipule dans tous les sens.

— C'est ça je suis la voisine du cinquième, puisque tu es rentré, je venais te rendre ta clef.

La douleur change de camp, je viens de mourir de l'intérieur, fusillé par ses paroles, achevé par son regard. Elle prend ma main pour l'ouvrir et y dépose la pièce de métal froid.

— Tu avais juré putain. Tu as renoncé, mais ce n'est pas grave. Tu sais pourquoi ? Parce qu'en fin de compte, c'est toi le pire.

Elle tourne les talons et se dirige vers l'ascenseur, arrivée au niveau de mes filles, elle s'accroupit devant elles, passe ses mains sur leurs visages. Tout mon être ressent la souffrance dans ses gestes, j'aimerais être capable de faire le pas qui la ramènerait à moi, mais la honte me paralyse.

— Vous êtes tellement jolies, j'aurai trop voulu être votre copine.

Elle se relève et nous lance.

— Une bonne journée à vous.

— Bruna, attend.

Elle se retourne et à son regard, je comprends qu'il ne vaut mieux pas que je l'approche.

Et c'est comme ça que je regarde les portes se refermer sur l'amour de ma vie.

— Papa, c'est elle ton amoureuse ? Elle est trop, trop belle.

— Marc, c'était Bruna ? La Bruna ?

— Oui

— Mais pourquoi tu ne l'as pas dit ?

— Je ne voulais pas te blesser.

— Mais me blesser de quoi ? Je viens de me marier avec l'homme le plus merveilleux que la terre ait créée, tu n'apprends vraiment jamais rien de tes conneries, ce n'est pas possible.

— Je suis surtout extrêmement con.

— Pour le coup grave, bon courage pour rattraper tout ça.

— C'est mort, elle ne me pardonnera jamais.

— Quand on aime, on pardonne.

— Tu ne la connais pas, je viens de faire la seule chose qu'il ne fallait pas faire.

Je suis devenu Léo.

Et Si, je venais de perdre ma seule chance d'être heureux ?

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Et voilà, Bad B se délecte et Bruna se morfond.

Bon courage à lui, bon courage à elle.

Des fois une simple bêtise est à l'origine de tellement de drames.

Alors oui quelque part ce n'est rien de grave, mais quand on a une petite voix maléfique qui vous pourrie la vie, qui vous rabaisse. Ce genre de choses insignifiantes pour certains et plus qu'une montagne à franchir pour d'autres.

Seule des femmes, ou homme, mal dans leur peau au plus profond d'eux même peuvent comprendre et ressentir ce que Bruna vit.

Allez soyez compatissante, ne me maudissez pas jusqu'à demain, continuez de faire vivre leur histoire en lisant, votant, commentant, partageant et critiquant.

À demain, si le coeur vous en dit.

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