Prologue

Ben


"Si quelqu'un vous trahit une fois, c'est sa faute. S'il vous trahit deux fois, c'est la vôtre".

Eleanor Roosevelt


Il y en a qui dise simplement, je t'aime, alors qu'Alfred de Musset a écrit :

"Je suis perdu, vois-tu, je suis noyé, inondé d'amour, je ne sais plus si je vis, si je mange, si je marche, si je respire, si je parle, je sais que je t'aime".

Il y a des trahisons qui changent à tout jamais des personnes, les blessant si profondément que la souffrance semble insurmontable mettant des années à cicatriser, forçant le trahi à ériger des barrières toujours plus solides autour de son cœur.

Refusant de se dévoiler, se protégeant férocement pour que personne ne perce la carapace dont il se serait habillé.


Septembre 2000 – Clinique Santa Maria Nice

— Poussez Madame, poussez.

Putain, c'est le plus beau jour de ma vie.

Ma fiancée, Selma est en train de donner la vie à notre fille. Cela fait plus de huit heures que nous sommes dans cette salle d'accouchement, mais la petite se fait désirer. Et pour être désirée, elle l'est enfin surtout par moi.

J'ai passé ma vie à être baladé de famille d'accueil, en famille d'accueil. Ma mère est morte d'overdose quand j'avais trois ans, mon père, inconnu au bataillon, ou plutôt trop de possibilités pour qu'il y ait de certitude.

Personne n'a voulu de moi à la mort de ma génitrice, mon problème de sevrage néonatal a calmé tous les candidats potentiels, donc j'ai fini en foyer.

Il y a pire, me direz-vous, mais il y a mieux aussi.

On va dire que je n'ai pas démarré dans la vie en ayant toutes les cartes en main, je pense même que c'était un sérieux handicap.

Mais j'ai fini par rencontrer Selma, l'amour de ma vie, cela fait quelques années que l'on est ensemble.

Notre première rencontre a eu lieu dans le cinéma dans lequel je travaillais, elle est venue m'acheter des popcorns et de sourires en sourires, elle m'a attendu à la fin de son film et on ne s'est plus jamais quittés.

Enfin si, quelques semaines, avant sa grossesse. Je suis parti, après une énième dispute au sujet de Xavier, son meilleur ami, qui est aussi mon patron dans le restaurant dans lequel je travaille les week-ends pour arrondir nos fins de mois, mais cela n'a même pas duré un mois. On a mis les choses à plat et tout est rentré dans l'ordre. Trois semaines après, Selma m'annonçait qu'elle était enceinte.

Je voyais enfin la lumière au bout du tunnel, j'allais enfin avoir ma famille à moi. Cela faisait des mois que l'on essayait, je m'étais toujours dit que je serais un père sensationnel, j'amènerais mes enfants à l'école, au sport, je les aiderais à faire leurs devoirs même si je ne suis pas une lumière, je serais présent quoi qu'il arrive, je les aimerais plus que ma vie. Et quand on a su que ce serait une fille, j'étais comme un fou. Moi le mec bourru, j'allais tenir une petite poupée dans mes bras.

J'ai bossé dix fois plus pour que Selma ne travaille pas. Je voulais qu'elle se repose, qu'elle se concentre à façonner le petit être qui allait bouleverser mon existence. Et là, neuf mois après, je suis au climax du bonheur.

— Arghhhhhhhh.

— Vas-y mon amour, je suis là, t'es la plus forte, tu peux le faire.

— Ça fait mal Ben.

— Je sais, sers ma main, vas-y.

— Allez madame, poussez maintenant.

— Arghhhhhhhh.

— On voit la tête, allez encore un petit effort.

Quelques poussées et j'aperçois enfin le gynécologue se baisser pour sortir ma fille, il me demande si je veux couper le cordon ombilical, ce que je refuse, je ne veux pas lâcher la main de Selma et en toute honnêteté, je ne me sens vraiment pas. On me fait signe de suivre les sage-femmes pour le nettoyage, ce que je fais immédiatement.

Quand je rentre dans la petite pièce accolée à celle de l'accouchement, je n'ose pas m'approcher, elle paraît si petite, si fragile. La sage-femme s'applique délicatement à nettoyer ma fille, puis elle stoppe ses gestes, relève les yeux sur moi et me dit toute émue :

— C'est absolument magnifique ce que vous avez fait pour cette enfant.

J'avoue que je reste pantois face à cette remarque.

— Comment ça ? Je ne comprends pas.

— Et bien, prendre la responsabilité et assister à l'accouchement d'un enfant qui n'est pas le vôtre. À votre âge, il faut réellement être une belle personne.

— De quoi vous parlez ? Pas de moi ? Mais c'est ma fille.

— Écoutez, je suis désolée, je ne voulais pas supposer quoique ce soit. Pardon, je suis... Confuse, vraiment.

J'ai l'impression que la douleur vient de m'agripper avec des tentacules géants pour me faire glisser dans des profondeurs dont personne n'a eu connaissance. Je m'approche doucement de ma fille, je la regarde et je comprends la réflexion de la sage-femme.

Mon monde vient d'imploser.

Qu'y a-t-il de pire qu'être trahi par la personne que tu chéris le plus sur cette terre ?

Je ne lâche pas Lina des yeux, je la regarde se faire habiller du petit pyjama et du bonnet que j'ai moi-même choisi, je la regarde tenter d'ouvrir ses minuscules petits yeux et bouger ses toutes petites mains et je la regarde encore, lorsque la dame en rose me la place dans les bras.

Mes larmes ne veulent pas couler, coincées par la peine et la rage à la lisière de mes yeux. Mes rêves viennent de partir en fumée et le peu de sentiments d'amour qui vivaient encore en moi se sont barrés avec la joie d'être enfin père.

Je m'approche de Selma, elle me regarde en souriant, mais mes lèvres restent scellées et forment une ligne si fine et si crispée qu'elle arrête de sourire immédiatement. Arrivé à sa hauteur, je lui dépose Lina dans les bras.

Je la regarde, le cœur lourd, une dernière fois, je veux être certain de la trahison de celle que je considérais encore, il y a dix minutes, comme l'amour de ma vie.

Mais il y a des différences physiques, comme une couleur de peau par exemple, qui ne trompent pas.

— Toutes mes félicitations à toi et Xavier, elle est magnifique.

Elle ouvre de grands yeux et me regarde m'enfuir loin d'elle, loin de l'amour.

Ce soir-là, j'ai récupéré toutes mes affaires, je suis parti sans me retourner et j'ai changé de vie en me jurant qu'on ne m'y reprendrait plus.

Et Si, je n'étais pas fait pour l'amour ?

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Voilà, le passé de Ben est posé, pour celui de Kaya, celle qui ont commencé le premier tome sur Marc, le connaisse déjà

J'espère que cette histoire, beaucoup plus courte, vous plaira autant que la première

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